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Utilisateur:FlyAkwa/x^y=y^x

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La fonction est depuis plus de 75 ans un classique des problèmes posés aux étudiants, que ce soit en faculté ou en classe préparatoire, et celui qui ne connaît pas la manière de la mettre sous forme paramétrique risque d’y passer beaucoup de temps.

Historique[modifier | modifier le code]

En fait, cela fait près de 3 siècles que cette fonction a attiré l’attention des mathématiciens.

Vers 1730 [1] le physicien, et mathématicien, Bernoulli s’est posé le problème de trouver des couples de nombres (a, b) tels que .
Il connaît déjà le couple (2, 4) : et son symétrique (4, 2), de même que (-2, -4) et (-4, -2) : .

Ne parvenant pas à en trouver d’autres, il soumet le problème à son confrère Christian Goldbach qu’il considère comme plus pointu que lui en analyse et théorie des nombres – Goldbach est connu, entre autres, pour sa conjecture « tout nombre pair est somme de deux nombres premiers ».
En notant que la fonction peut s’écrire , Goldbach pose , ce qui lui permet de la mettre sous forme paramétrique et d’en faire l’étude complète; il répond alors à Bernoulli qu’il n’y a pas d’autres entiers que 2 et 4 qui satisfont à l’équation, mais qu’il y a une infinité de solutions rationnelles.

D’autres mathématiciens se sont ensuite intéressé à cette même fonction, en particulier Euler qui trouva une forme paramétrique un peu différente, plus pratique pour étudier les conditions aux limites, et qui se déduit immédiatement de celle de Goldbach.

Mise sous forme paramétrique[modifier | modifier le code]

Dans tout ce qui suit nous supposerons et strictement positifs, et nous laisserons de côté la solution triviale . On notera que changer en et en ne change pas la fonction : la courbe représentative est symétrique par rapport à la droite .

Si on pose l’équation devient

En prenant la racine des deux membres on a , d’où .

On en tire

et étant positifs, doit l’être aussi avec la restriction (en effet, pour on retombe sur la solution triviale ).

Comme , il vient .

La formule citée par Euler consiste à poser , donc .

On a alors et . Comme t est supposé strictement positif, cela impose : et et exclut l’intervalle (-1,0).

Le fait de poser est assez arbitraire et ne correspond pas à la démarche classique pour mettre une fonction implicite sous forme paramétrique; en général, on cherche à substituer à une fonction qui pourrait mener à . Sinon, une autre voie courante consiste à voir si l’équation ne pourrait pas être résolue en coordonnées polaires, ce qui justement est le cas ici et ramène à la forme paramétrique de Goldbach.

On appelle « r » le rayon vecteur, et « a » l’angle polaire, l’axe Ox étant l’axe polaire; et étant strictement positifs, l’est aussi et on a : .

On sait[2] que et .
Il vient alors :
, ou .

En prenant la racine des deux membres il reste .

En posant , on sait que et .

L’équation précédente devient ; en élevant les deux membres à la puissance il vient ,
d’où ,
d’où ,
d’où .

Si maintenant on revient aux coordonnées rectangulaires :

.

Comme , on a . On peut alors poser et on a :

et avec . On retrouve ici la forme paramétrique proposée par Goldbach.

Variation de et pour [modifier | modifier le code]

Pour , est négatif et peut s’écrire ou ; quand tend vers 0, tend vers 1 et  ; tend vers l’infini quand tend vers 0. On a y = t^(t/(t-1)) ; Ln(y) = t/(t-1)Ln(t) ; quand t tend vers 0, (t-1) tend vers -1, t/(t-1) tend vers –t et Ln(y) tend vers –t.Ln(t).

On sait (3) que x.Ln(x) tend vers 0 quand x tend vers 0, donc Ln(y) = –t.Ln(t) tend vers 0 quand t tend vers 0. Il en découle que y tend vers 1 quand t tend vers 0. En résumé, quand t tend vers 0, x tend vers +inf et y tend vers 1 ; la courbe représentative possède donc une asymptote y = 1. Pour voir la limite de x quand t tend vers 1, on prend la forme donnée par Euler avec x = ((1+k)/k)^k et y = ((1+k)/k)^(k+1) ; comme k = 1 /(t-1), quand t tend vers 1, k tend l’infini. On sait (4) que ((1+k)/k)^k tend vers « e » quand k tend vers l’infini, et donc x  e quand t tend vers 1 ; de même ((1+k)/k)^(k+1) tend aussi vers e quand k  inf et y  e aussi quand t tend vers 1. Dans l’intervalle (0,1), quand t va de 0 à 1, x décroît de +inf à e, et y croît de 1 à e.

Variation de x et y pour 1 < t < +inf.[modifier | modifier le code]

Nous avons vu que quand t tend vers 1, x et y tendent vers e. Quand t tend vers + inf, 1/(t-1) tend vers 0. On considère alors Ln(x) = Ln(t) / (t-1) ; on sait (3) que Ln(a) / a tend vers 0 quand a tend vers l’infini, et donc Ln(x) = Ln(t) / (t-1) tend vers 0 quand t tend vers l’infini ; il en découle que x  1 quand t  +inf. De son côté, y = t^(t/(t-1))  +inf quand t  +inf. En effet t / (t-1)  1 quand t  +inf, donc y  t^1 et y  inf quand t  +inf. En résumé, quand t  inf y  inf et x  1 ; la courbe représentative possède donc une seconde asymptote x = 1. Dans l’intervalle 1 < t <+inf, quand t va de 1 à +inf, x décroît de e à 1 et y croît de e à +inf.

Dérivée.[modifier | modifier le code]

On peut écrire y^x = x^y sous forme d’une fonction implicite f(x,y) = y^x – x^y = 0. Si on désigne par f’.x et f’.y les dérivées partielles de f par rapport à x et y, la dérivée y’(x) est égale à –(f’.x) / (f’.y) (5). f’.x = (y^x). Ln (y) – y. (x)^(y-1) f’.y = x. (y)^(x-1) – (x^y).Ln(x) dy/dx = -f’.x / f’.y = {(y^x). Ln (y) – y.(x)^(y-1)} / {(x^y).Ln(x) - x.(y)^(x-1)} Le premier membre peut s’écrire (y^x). Ln (y) – (y/x)(y^x). De même, en remarquant que x^y = y^x, on peut mettre le second membre sous la forme (y^x).Ln(x) – (x/y)(y^x). En simplifiant le quotient des deux par (y^x) il vient : dy/dx = (Ln(y) –y/x) / (Ln(x) – x/y) = {(y – x.Ln(y)) / x} / {(x – y.Ln(x)) / y} soit (y / x). ((y – xLn(y) / (x – y.Ln(x)). Sachant que x.Ln(y) = y.Ln(x) on peut écrire y’(x) = (y / x). (y – y.Ln(x)) / (x – x.Ln(y)) = (y² / x²). {(1 – Ln(x)) / (1 – Ln(y))}. On peut aussi l’exprimer en fonction du paramètre t ce qui donne / y’(x) = t².(t - 1 – Ln(t) / (t – 1 - t.Ln(t)

Tracé de la courbe Considérons la dérivée y’(x) = (y² / x²). {(1 – Ln(x)) / (1 – Ln(y))} On a vu que dans l’intervalle (0,1), quand t va de 0 à 1, x décroît de +inf à e, et y croît de 1 à e. Donc ici Ln(x) > 1 et Ln(y) < 1  (1 – Ln(x) < 0 et (1 – Ln(y) > 0. Le quotient des deux est négatif  y’(x) < 0. Dans l’intervalle 1 < t <+inf, quand t va de 1 à +inf, x décroît de e à 1 et y croît de e à +inf. Cette fois Ln(x) < 1 et Ln(y) > 1  1 – Ln(x) > 0 et (1 – Ln(y) < 0. Le quotient des deux est encore négatif  y’(x) < 0. Quand t tend vers 1, x et y tendent vers la même valeur e et y’(x)  -1. La dérivée est toujours négative, la fonction est décroissante, et continue pour x # e . Elle part de +inf le long de l’asymptote x = 1, passe par (2,4), par (e,e) où elle coupe la droite y = x, par (4,2) et décroît le long de l’asymptote y = 1.

Cas où x et y sont négatifs. On a vu que le couple (-2,-4) et son symétrique (-4,-2) satisfont à l’équation y^x = x^y ; en fait, écrire (-4)^(-2) = (-2)^(-4) revient à écrire 1 / (-4)^2 = 1 / (-2)^4 d’où (-2)^4 = (-4)^2. En valeur absolue (-2)^4 est égal à 2^4, de même pour (-4)^2 et 4^2. Tout couple (a, b) tel que a^b = b^a pourrait donc s’écrire (-a)^(-b) = (-b)^(-a), ou ce qui revient au même (-a)^b = (-b)^a, à condition que le calcul soit toujours possible, ce qui justement n’est pas le cas. En effet, les seules valeurs entières pour x = ((1+k)/k)^k et y = ((1+k)/k)^k+1 sont données par k = 1 et k = - 2 . Toutes les autres valeurs de x et y sont fractionnaires quel que soit k ; or x et y vont ensuite jouer le rôle d’exposants fractionnaires pour y et x négatifs. Or, pour un nombre négatif un exposant de la forme p / q doit respecter certaines conditions pour que le calcul soit possible (6). Il doit d’abord s’agir d’une fraction irréductible – en effet (-12)^(6/10) est un nombre positif alors que (-12)^(3/5) est un nombre négatif bien que 6/10 = 3/5. Ensuite il faut que p et q soient impairs pour que (- a)^(p/q) soit négatif ; si p est impair et q pair il n’y a pas de solution réelle pour un nombre négatif ; enfin si est p est pair et q impair, le résultat est positif. Reprenons la forme donnée par Euler pour x et y : x = ((1+k)/k)^k et y = ((1+k)/k)^(k+1). Il est clair que k et 1+k ne peuvent être simultanément pairs ou impairs, et (1+k)/k est une fraction irréductible car aucun des facteurs premiers de k ne divise k+1, et il en est de même de toute puissance de cette fraction. Si k est impair, 1+k est pair, et inversement ; dans le premier cas la fraction peut être exposant d’un nombre négatif, mais pas dans le second (il n’y a pas de racine paire d’un nombre négatif). Les seuls cas possibles avec x et y négatifs correspondent à k entier, soit positif et impair (k = 2n-1) soit négatif et pair (k = - 2n) avec n =1,2,3…. Ainsi pour k = 3, x = 64/27 et y = 256/81, et on a bien (-256/81)^(-64/27) = (-64/27)^(-256/81); pour k = 1 on retrouve (-2,-4). Il y a donc une infinité de couples x<0 y<0 tels que y^x = x^y. Si on prend la forme de Goldbach, la même suite est donnée, soit par t = 2n/(2n-1), soit par l’inverse t = (2n-1)/2n ce qui change y en x et x en y . Comme le fait de changer x en y et y en x ne change pas la fonction, à tout couple x = a, y = b correspond un couple x = b, y = a et l’ensemble des points correspondant à x et y négatifs est symétrique par rapport à la droite y = x. On ne peut prendre pour k une fraction a/b car on arrive à des exposants irrationnels appliqués à des nombres négatifs - on sait approcher un irrationnel par un rationnel a/b à moins de « epsilon » près, mais appliqué à un nombre négatif ce rationnel a/b, selon qu’il est choisi impair/impair, pair/impair, ou impair/pair donnera un résultat, soit négatif, soit positif, soit complexe ; autrement dit, le résultat d’un exposant irrationnel appliqué à un nombre négatif est indéterminé.

Cas x<0 et y>0. Supposons x<0 égal à (-a) ; la fonction s’écrit alors y^(-a) = (-a)^y, soit 1 / y^a = (-a)^y ou (y^a).((-a)^y) = 1 et elle se ramène à l’étude de la fonction (y^x).(x^y) = 1 pour des valeurs négatives de x. Ce n’est plus la fonction étudiée ici qui, elle, peut s’écrire (y^x) / x^y) = 1.






(2) Commissaire et Cagnac, cours de math.spé, livre 2 chap.11. (3) Idem, livre 2 chap. 1. (4) Idem, livre 2 chap. 4. (5) Idem, livre 2 chap. 12 (6) Idem, livre 1 chap. 2

  1. J. Anderson in The American Mathematical Monthly vol.111 p.668 à 679.
  2. Commissaire et Cagnac, cours de math.spé, livre 2 chap.11.