Transformation de Legendre

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La transformation de Legendre est une opération mathématique qui, schématiquement, transforme une fonction définie par sa valeur en un point en une fonction définie par sa tangente. Elle tire son nom du mathématicien Adrien-Marie Legendre.

Les cas classiques d'utilisation de la transformation de Legendre se rencontrent en thermodynamique et en mécanique lagrangienne. En thermodynamique, elle permet de calculer le potentiel thermodynamique adapté à des conditions particulières. En mécanique, elle permet de passer du lagrangien à l'hamiltonien et vice versa.

Introduction

Une fonction f peut être représentée de plusieurs façons. La façon la plus usuelle est de la représenter par la valeur que prend la fonction en un point x. La courbe représente géométriquement la fonction f.

De nombreux problèmes peuvent être plus facilement résolus si on représente différemment la fonction f. Ceci est par exemple le cas de la transformation de Fourier, où la fonction est représentée par ses coefficients de Fourier. La transformation de Fourier fait partie d'une classe générale qu'on appelle les transformations intégrales.

La transformation de Legendre

Une autre façon de représenter une fonction, que l'on suppose convexe pour l'instant, est d'utiliser non pas l'intégrale, mais la dérivée de la fonction. On se donne une droite de pente p pour laquelle on va chercher le point où la droite est tangente à la courbe de la fonction. On repère l'ordonnée à l'origine u où la droite croise l'axe y. Etant donnée la fonction convexe f, à chaque valeur de p correspond une valeur de u, ce que l'on peut noter par :

La fonction g est appelée la transformée de Legendre de la fonction f.

La transformée de Legendre de la fonction .

La courbe a exactement la même information que la courbe . Ceci veut dire que si nous connaissons f, nous pouvons déduire la fonction g, et réciproquement. Nous verrons ci-dessous que f est elle-même la transformée de Legendre de g.

Concrètement, soit le point où la droite de pente p est tangente à la courbe. L'équation de la droite s'écrit donc :

et la droite croise l'axe y au point d'ordonnée :

où :

Les notations ne servent qu'à une simplification de l'écriture : il faut se souvenir que quand on note , la variable est bien p ; est elle-même une fonction de p via la relation . Il serait plus précis d'écrire :

mais la notation serait beaucoup plus lourde.

Exemple fondamental

Soit la fonction . Soit la droite de pente p. Cette droite est tangente à la courbe au point d'abscisse . L'équation de la droite tangente dans le plan est :

La droite croise donc l'axe y à . La transformée de Legendre de la fonction est donc .

En généralisant, il n'est pas difficile de démontrer que si , alors :

Transformée de Legendre et enveloppe

La fonction f est l'enveloppe des droites .

Dans le plan cartésien, on se donne une famille de droites paramétrées par leurs pentes p et passant par le point sur l'axe des ordonnées ; g est la transformée de Legendre de f. L'équation de ces droites, paramétrée par p, est donc :

D'après la définition de la transformée de Legendre, la courbe de la fonction f est l'enveloppe de ces droites.

Par ailleurs, l'équation d'enveloppe est donnée par :

p est une fonction de x telle que :

Comme , nous voyons que la fonction f est la transformée de Legendre de la fonction g. Comme pour d'autres transformations, une inversion de signe est nécessaire pour la deuxième transformation.

Le concept d'enveloppe peut être utilisée pour définir les transformées de Legendre de façon purement géométrique.

Transformation de Legendre et optimisation

Transformation de Legendre et minimisation.

La transformation de Legendre peut être également interprétée comme une opération de minimisation. Cette deuxième interprétation est très utilisée par exemple en thermodynamique. Considérons la courbe et la droite . Etant donnée la pente p, on peut rechercher pour quelle valeur de x leur différence est minimale.

En d'autres termes, étant donnée p, pour quelle valeur de x, la fonction est-elle minimum ?

Il est évident qu'en prenant la dérivée partielle par rapport à x de la fonction , nous aboutissons à la relation :

.

Pour cette valeur , la différence entre les deux fonctions est donc :

Nous voyons que la fonction g n'est rien d'autre que la transformée de Legendre de la fonction f définie plus haut.

Convention de signe

Comme pour les autres transformations intégrales, il n'y a pas de convention unique sur les signes. On peut voir indifféremment ou ou

Applications en physique

Thermodynamique

Supposons que l'on connaisse l'énergie libre d'un système pour toute température et volume fixés (comme un gaz parfait dans un cylindre à volume fixe).

Nous allons mettre en contact notre système avec un réservoir de pression (une force constante par unité de surface) et laisser libre le volume (par exemple, un piston capable de se mouvoir dans un cylindre). L'enthalpie libre du système est maintenant :

La fonction F est toujours l'énergie libre à volume fixe, pV le travail effectué. Le principe du minimum en thermodynamique affirme que le volume V va varier (le gaz se détend ou se comprime) jusqu'à atteindre une valeur d'équilibre telle que l'énergie libre soit minimale. Dans ce cas, est une fonction de p,T,... et l'enthalpie libre vaut :

est tel que :

Nous voyons donc que G(T,p,...) est la transformée de Legendre de l'énergie libre F(V,T,...) par rapport à la variable V. On appelle d'ailleurs G enthalpie libre.

De façon générale, considérons l'énergie libre d'un système où les sont des paramètres extensifs. La variable conjuguée au paramètre extensif est :

Si maintenant nous mettons notre système en contact avec un réservoir de à fixée, la quantité extensive va évoluer pour minimiser la quantité :

est le travail effectué par le changement de . Le nouveau potentiel thermodynamique dépend du paramètre intensif et non du paramètre extensif . Nous pouvons ainsi passer d'un potentiel thermodynamique à un autre en prenant des transformées de Legendre successives. Le choix du potentiel thermodynamique adéquat pour un problème se fait en fonction des paramètres (intensif ou extensif) que l'expérimentateur peut contrôler.

Les définitions de la thermodynamique font que le signe de la variable conjuguée n'est pas toujours négatif selon la dérivée partielle, mais parfois positif. Il faut prendre cela en compte lors des passages entre les potentiels.

Cas du formalisme hamiltonien en mécanique classique

Le rapport entre le formalisme lagrangien et le formalisme hamiltonien en mécanique classique évoque de façon immédiate la transformation de Legendre.

Partons du lagrangien :

qui est une fonction des coordonnées généralisées , des vitesses généralisées et du temps t. Définissons , le moment généralisé associé à la coordonnée généralisée par :

On définit alors le hamiltonien, , par :

qui est la transformée de Legendre du lagrangien.

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

  • RKP Zia, Edward F Redish et Susan R Mckay, « Making Sense of the Legendre Transform » texte intégral
  • Robert A. Alberty, « Use of Legendre transforms in chemical thermodynamics (IUPAC Technical Report) » abstract