Voir la source de Grandes compagnies

{{Redirect homophones|routiers|routier}}{{confusion|Grande Compagnia}}
[[Fichier:Brigniais.jpg|vignette|<center>Les [[Tard-venus]] défont en 1362 à [[Bataille de Brignais|Brignais]], près de [[Lyon]], l'[[ost]] royal.<br> ''[[Chroniques (Froissart)|Chroniques]]'' de [[Jean Froissart]] ([[Chroniques de Froissart (manuscrit de Gruuthuse)|manuscrits Gruuthuse]]), Paris, [[Bibliothèque nationale de France|BnF]], [[Manuscrit|ms.]] Français 2644, {{3e}} quart du {{s-|XV|e}}.</center>]]
Les [[Compagnie (militaire)|compagnies]] de [[mercenaire]]s recrutées du {{XIIe siècle}} au {{XIVe siècle}}, privées d'employeurs pendant les périodes de paix, se regroupaient en bandes appelées '''grandes compagnies''', et vivaient au détriment des populations. Ces mercenaires étaient désignés comme « routiers », car appartenant à une « route » (une « troupe armée » en ancien et moyen français), et aussi « ribauds », « cottereaux » <ref>[https://books.google.fr/books?id=IPLlyf8X6OUC&pg=PA369&lpg=PA369&dq=froissart+route&source=bl&ots=FVxOHqF1Hk&sig=wrGoj-nZ8DnMR6JtA6ouRKEgyuA&hl=fr&ei=ulO5Ta7mIYqbhQe-vuj_Dg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=4&ved=0CCsQ6AEwAw#v=onepage&q=froissart%20route&f=falseChroniquesChroniquesde Chroniques de Froissart]</ref>{{,}}<ref name="chartes">[http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bec_0373-6237_1946_num_106_2_449361 Boussard Jacques. Les mercenaires au {{s-|XII|e}} : Henri II Plantegenêt et les origines de l'armée de métier. In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1946, tome 106. {{p.|189-224}}.]</ref>ou « [[brabançons]] »

== Début de la présence permanente dans les armées royales ==
Une première vague de [[Compagnie (militaire)|compagnies de routiers]] est apparue au {{XIIe siècle}} et {{XIIIe siècle}}. Ces mercenaires étaient déjà présents au début du {{XIIe siècle}}. Ils participent notamment à la guerre civile en [[Angleterre]] (qui oppose le Roi [[Étienne_d'Angleterre| Étienne]] à [[Mathilde l'Emperesse|Mathilde]] la mère d'[[Henri II d'Angleterre|Henri II]] entre [[1137]] et [[1153]])<ref name="Edp">L'Empire des Plantagenet  - 2004 - Aurell Martin</ref>; mais ils sont intégrés de façon permanente à l'armée du roi d'Angleterre [[Henri II d'Angleterre|Henri II]] à partir de [[1159]]. Il faut attendre les années [[1180]] pour constater le même phénomène dans les troupes du roi de France sous [[Philippe Auguste]]<ref name="chartes"/>.

== Un corps décisif dans les batailles  ==
Ces Routiers étaient des éléments importants des armées d'[[Henri II d'Angleterre]] puis de ses fils [[Richard Ier d'Angleterre]] et [[Jean d'Angleterre|Jean sans Terre]]. Ces troupes de mercenaires aguerris, organisées et très mobiles pour l'époque constituaient un élément décisif dans les batailles. Elles permirent à Henri II d'Angleterre de remporter plusieurs victoires. Le roi de France [[Philippe Auguste]] dut lui aussi avoir recours aux compagnies de routiers pour vaincre les [[Plantagenêt]]<ref name="Edp"/>.

Un autre exemple de leur importance : au début de son règne, [[Jean d'Angleterre|Jean sans Terre]] était plus riche et plus puissant que le roi de France, mais en 1204, Jean ne paya pas ses mercenaires ; certains, comme [[Lupicaire]], passèrent dans le camp ennemi ; de l'autre côté, Philippe Auguste avait, au moins, la troupe de mercenaires de [[Lambert Cadoc]] qui lui permit de prendre [[Château Gaillard (Les Andelys)|Château Gaillard]]<ref>[https://books.google.fr/books?id=L00VAAAAQAAJ Histoire de la conquête de la Normandie par Philippe-Auguste en 1204 - Adolphe Poignant - 1854]</ref>.

== Les grandes compagnies en France ==

=== {{XIIe siècle}} et {{XIIIe siècle}} ===
==== Chefs routiers célèbres ====
{{Loupe|Chefs routiers célèbres}}
* [[Curbaran]]<ref name="HB67">[https://books.google.fr/books?id=XvpAAAAAcAAJ Histoire du Berry: Volume 2  (1844 - Louis Reinal - page 67)]</ref>
* [[Raymont Brun]]<ref name="HB67" />
* [[Lambert Cadoc]]
* [[Mercadier]]
* [[Lupicaire]]
* [[Martin Algais]]
* [[Louvart]]
* Brandin
* [[Falcaise|Falco ou Falcaise]]<ref name="GMA398">La guerre au Moyen Âge (1999 - Philippe Contamine - page 398)</ref>
* [[Guillaume d'Ypres]]
* [[Renaud de Dammartin]]<ref name="GMA398" />
* Arnaud<ref name="GMA398" />
* [[Courberan]]<ref name="GMA398" />

==== Origines géographiques ====
Les routiers proviennent de nombreuses régions. Mais beaucoup sont issus de régions pauvres comme la [[Provence]] et les [[Pyrénées]] ou de zones surpeuplées telles que le [[Duché_de_Brabant|Brabant]], la [[Comté_de_Flandre|Flandre]] et le [[Comté_de_Hainaut|Hainaut]]<ref  name="GMA398" />.

==== Noms désignant les routiers ====
Les routiers sont désignés avec une [[Chefs routiers célèbres|grande variété de noms]] provenant, notamment, de leurs origines géographiques ou de leurs tenues<ref  name="GMA398" /> :
* [[Allemands]]
* [[Aragonais]]
* Bandouliers (de ''bandolero'', brigand en espagnol : originaires des Pyrénées)
* [[Basques]]
* [[Brabançons]]
* [[Bretons]]
* [[Catalans]]
* [[Cottereau|Cotereaux]] : Provenant de couteau ou de cottier (paysan pauvre) ou encore de [[coterie]]
*[[Gascons]]
*[[Comté de Hainaut|Hennuyers]]
* Mainades
* [[Navarrais]]
* Paillers : Ils portaient une paille sur leur chapeau comme signe distinctif
* Ravisseurs
* Routiers
* Triaverdins

=== {{XIVe siècle}} ===
Les grandes compagnies étaient des troupes d'aventuriers qui, financées par les princes en temps de guerre, vivaient de pillage et de rançons en temps de paix ou de trêve. Elles désolèrent la France au {{s-|XIV|e}}, sous les règnes de [[Jean II de France|Jean II]] et de [[Charles V de France|Charles V]].

En 1356 des compagnies de gens d'armes et de brigands se répandent dans les régions situées entre la [[Seine (fleuve)|Seine]] et la [[Loire (fleuve)|Loire]] et y commettent toutes sortes d'excès. Ils infestent particulièrement les routes de Paris à [[Orléans]], à [[Chartres]], à [[Vendôme]] et à [[Montargis]].

Un de leurs principaux chefs est un [[Pays de Galles|Gallois]] nommé Ruffin, qui s'enrichit de ses brigandages et devient [[Chevalerie|chevalier]]. Ces compagnies occupent ou [[Rançon au Moyen-Age|rançonnent]] [[Saint-Arnoult-en-Yvelines|Saint-Arnoult]], [[Gallardon]], [[Bonneval (Eure-et-Loir)|Bonneval]], [[Cloyes]], [[Étampes]], [[Arpajon|Châtres]]<ref>Châtres est l'ancien nom d'[[Arpajon]]</ref>, [[Monthléry]], [[Pithiviers|Pithiviers-en-Gatinais]], [[Larchant]], [[Milly-la-Forêt|Milly]], [[Château-Landon]], [[Montargis]], [[Yèvre-le-Châtel|Yèvre]]… Pendant ce temps [[Robert Knolles]] se met à la tête de brigands anglo-navarrais et rançonnent les frontières de la Normandie, où ils gagnent bien {{unité|100000|écus}}<ref name="CF5">[[Chroniques de Froissart]] volume 5</ref>.

Elles se recrutaient parmi des étrangers de toutes nationalités et surtout des Germaniques que le roi [[Édouard III|Édouard III d'Angleterre]] avait licencié après le [[traité de Brétigny]], en 1360.

Le {{date-|24 octobre 1360}}, Édouard III charge Guillaume de Grantson et Nicolas de Tamworth de faire évacuer les forteresses de [[Champagne (province)|Champagne]], de [[Brie (région)|Brie]], des [[duché de Bourgogne|duché]] et [[comté de Bourgogne]], de l'[[Orléanais]] et du [[Gâtinais]]. Thomas Fogg et Thomas Caun celles du [[Comté du Perche|Perche]], du [[Chartrain]], et du [[Drouais]]. Le sire de Pommiers, Bérard et Arnaud d'Albret celles du [[Berry]], du [[Duché de Bourbon|Bourbonnais]], de la [[Touraine]] et de l'[[Auvergne]]. Amauri de Fossat et Hélie de Pommiers celles du [[Périgord]], du [[Quercy]] et de l'[[Agenais]]. Le [[captal de Buch]] [[Jean de Grailly]], le sire de Montferrand et Thomas de Holland, celles de la [[Normandie]], de l'[[Anjou]] et du [[Maine (province)|Maine]].

Irrités de leurs déprédations, les paysans les battirent en plusieurs rencontres et les dispersèrent pour quelque temps. 

Le [[Connétable de France|connétable]] [[Bertrand Du Guesclin]] fut employé à emmener ces compagnies en Espagne pour débarrasser le royaume de France ; elles y soutinrent contre [[Pierre Ier de Castille|Pierre le Cruel]] la cause de [[Henri II de Castille|Henri de Trastamare]], son demi-frère.
[[Fichier:Péninsule ibérique en 1369.png|vignette|Les grandes compagnies durant la guerre civile espagnole]]

[[Chefs routiers célèbres]] :
*[[Arnaud de Cervole]], dit l'Archiprêtre.
* [[Croquart]]
* [[Bernardon de la Salle]]
* [[Hugues de Calveley|Hugh Calveley]]
* [[Robert Knolles]]
* [[Seguin de Badefol]]
* [[Bertucat d'Albret]]
* John Creswell
* Cahours

Après avoir placé sur le trône [[Henri II (roi de Castille)|Henri de Trastamare]], les compagnies rentrent en France. Une des compagnies pille [[Vire]] en [[1368]]<ref>{{Article|prénom1= Yves | nom1= Buffetaut |titre= La prise de Vire par les Grandes Compagnies |périodique= Itinéraires de Normandie |numéro = 15 |mois= septembre | année= 2009 |pages= 60-64 |issn= 1950-9324|résumé= http://itineraires-de-normandie.com/article.php?idarticle=284 }}</ref>, puis, conduite par John Creswell et Folcquin Lallemant, s'empare de [[Château-Gontier]]<ref>{{CouanierLaunayHistLaval}}, {{p.|105}}.</ref>.

==== Les Tard-Venus ====
Les [[Tard-Venus]] sont des mercenaires démobilisés après le [[traité de Brétigny]] du {{date-|8 mai 1360}} : Le 24 octobre 1360, une trève est conclue entre [[Jean II le Bon]] et [[Édouard III|Edouard III]]. Le roi d'Angleterre ordonne à tous ses capitaines de libérer les diverses places fortes tenues dans le royaume de France. Les mercenaires abandonnés sans solde décident de guerroyer pour leur propre compte<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Bernard Descroix|titre=Seguin de Badefol, ce fils d'iniquité qui fit trembler Anse et la France entière|lieu=Lyon 69009|éditeur=Société d'Archéologie du Beaujolais|année=1992|pages totales=108|passage=31}}</ref>. Sous les ordres de [[Petit Meschin]] et [[Seguin de Badefol]], ils sévirent de la Bourgogne au Languedoc. En 1362, à [[Bataille de Brignais|Brignais]], ils défirent [[Jacques Ier de Bourbon-La Marche|Jacques de Bourbon]], [[comte de La Marche]], envoyé contre eux.
{{Loupe|Tard-Venus}}

==== La Compagnie Blanche ====
{{loupe|Compagnia Bianca}}
Cette compagnie s'est formée après la [[paix de Brétigny]] du {{date-|8 mai 1360}} sous les ordres de [[John Hawkwood]].

==== Les ''Bretons'' et les ''Anglais'' en Dauphiné ====
De 1374 à 1411, ces compagnies accompagnent successivement le [[Jean III d'Armagnac|comte d'Armagnac]], [[Raimond VIII de Turenne|Turenne]] et [[Olivier Du Guesclin|Du Guesclin]] durant les conflits en Provence et en Italie ([[Grand Schisme d'Occident|Grand Schisme]] entre papes [[Papauté d'Avignon|d'Avignon]] et de Rome, guerres de Provence entre [[Louis Ier de Naples|Louis d'Anjou]] et la [[Jeanne Ire de Naples|Reine Jeanne]]).

Leur surnom symbolise pour les [[Dauphinois (habitants)|Dauphinois]] l'impact des guerres de Cent Ans sur leur province. L'un de leurs exploits est d'avoir pris le [[Tour penchée de Soyons|château de Soyons]] en 1381, d'où ils seront délogés par [[Charles de Bouville|Bouville]], gouverneur du [[Dauphiné]] et le [[Olivier V de Clisson|maréchal de Clisson]].

Principaux capitaines : ''Guilhem Camisard'', [[Amaury de Sévérac]], le ''Bâtard de Bertusan'', ''Jean de Broquiers''<ref>Pour de plus amples détails, voir notamment leurs démêlés avec le [[Louis II de Poitiers-Valentinois|comte de Valentinois]].</ref>...

=== {{XVe siècle}} ===
==== Les Écorcheurs ====
Les [[Écorcheurs]] sont des mercenaires démobilisés qui désolèrent la France au {{s-|XV|e}} après le [[traité d'Arras (1435)|traité d'Arras]] de 1435

==== Les Coquillards ====
Les [[Coquillard]]s sont également des mercenaires désœuvrés originaires principalement d’[[Alsace]] et de [[Suisse]].

[[Chefs routiers célèbres]] :
* [[Alexandre de Bourbon|Le bâtard de Bourbon]]
* [[Antoine de Chabannes]]
* [[Étienne de Vignolles]], dit ''La Hire''
* [[Rodrigue de Villandrando]]
* [[Jean Poton de Xaintrailles]]

== Ailleurs ==
Les grandes compagnies ne sont pas uniquement propres à la France. On peut citer la Compagnie catalane des [[Almogavres]], soldats mercenaires au service de la [[Couronne d'Aragon|Couronne d’Aragon-Catalogne]], majoritairement catalans et aragonais, qui avait vu le jour dans la péninsule Ibérique à l’occasion des guerres contre les Sarrasins, entre le {{s mini-|XIII|e}} et le {{s-|XV|e}}, et qui alla aider l'empereur byzantin [[Andronic II Paléologue]] contre les Turcs.
=== En Italie ===
{{loupe|Compagnia di ventura}}
Leur apparition date de la fin des [[années 1200]] et début des [[années 1300|1300]] : 
[[Bande]]s formées de soldats professionnels, pour la plupart issus des basses classes sociales, prêts à tuer et à se faire tuer pour de l'argent ou pour un quelconque butin. 
Au cours de {{s-|XV|e}} la plupart des princes italiens utilisaient ces troupes professionnelles dans l'art de la guerre car leurs membres avaient un niveau élevé de formation et étaient experts dans l'utilisation des nouvelles armes. 
La première unité de grande importance est la [[Compagnia di San Giorgio]], formée par [[Mastino II della Scala]] et confiée aux ordres de [[Lodrisio Visconti]] qui, lancée à la conquête de [[Milan]], fut battue à la [[bataille de Parabiago]].

Le déclin de ces compagnies mercenaires s'amorce avec la naissance et le renforcement des États nationaux. 

La dernière compagnia di ventura célèbre est celle commandée Giovanni de' Medici, connu comme [[Jean des Bandes Noires]] (« Giovanni dalle Bande Nere »), au début du  [[Cinquecento]].

== Lutte contre les grandes compagnies ==

[[Image:Jaqueries et compagnies.svg|right|300px|thumb|'''Royaume de France entre 1356 et 1363 : Jacqueries et Compagnies'''
{{Légende/Début}}
{{Légende|#C0CC66|Possessions de Charles de Navarre}}
{{Légende|#EA8B9D|Territoires contrôlés par Édouard III avant le traité de Brétigny}}
{{Légende|#BF80FF|Le premier traité de Londres cède l'Aquitaine des [[Plantagenêt]]s aux Anglais et règle la [[guerre de Succession de Bretagne]] par une alliance du duché avec l'Angleterre}}
{{Légende|#8E80FF| Le deuxième traité de Londres comprend en plus la Normandie et le Maine}}
{{Ligne de légende|orange dotted 2px|Chevauchée d'Édouard III en 1359-60}}
{{Légende|#BF80FF|Territoires cédés par la France à l'Angleterre par le [[traité de Brétigny]] (suit le tracé du premier traité de Londres)}}
{{Légende/Fin}}]]

La lutte contre les compagnies est l'un des enjeux majeurs du retour de captivité de [[Jean II le Bon|Jean II]]. Ce dernier tente de les utiliser les unes contre les autres. Ainsi, en 1363, plutôt que de leur faire la guerre, [[Philippe II de Bourgogne]] prend à son service [[Arnaud de Cervole]] dit ''l'Archiprêtre'' dont les troupes rançonnent la Bourgogne (il est même parrain du premier fils du jeune duc){{sfn|Autrand|1994|p=499|loc=|id=}}. Le routier reçoit de fortes rétributions de Philippe le Hardi et de Jean le Bon pour éviter les pillages{{sfn|Autrand|1994|p=503|loc=|id=}}. Cette stratégie se révèle désastreuse et se termine par la [[bataille de Brignais|défaite de Brignais]] où les troupes levées par le roi sont mises en déroute par les compagnies en partie à cause de la trahison de l'Archiprêtre. Ce dernier récidive à la [[bataille de Cocherel]], où il négocie avec les Navarrais puis quitte le champ de bataille en prétextant une reconnaissance{{sfn|Autrand|1994|p=500|loc=|id=}}. Philippe le Hardi doit employer toute sa science de la diplomatie pour calmer la colère du roi [[Charles V le Sage|Charles V]], et il soutiendra d'ailleurs Arnaud de Cervole jusqu'en 1366 date au cours de laquelle le routier est assassiné par un de ses propres hommes.

Dès 1364 et l'avènement de Charles V le ton change. Le rétablissement de l’autorité royale et de l’économie passe par l’éradication des grandes compagnies qui saignent le pays. Charles V doit faire comprendre que le royaume n’est plus un havre pour les pillards. Il traite le problème avec la plus grande rigueur et fermeté : il fait appliquer la loi et ne négocie pas avec les truands. Il réorganise l'armée en déléguant à ses frères l'organisation de la réponse militaire au sein de chaque principauté{{sfn|Autrand|1994|p=518|loc=|id=}}. C’est rapidement tout le pays qui s’organise contre les grandes compagnies. Chevaliers, villes, paysans envoient des contingents d'hommes pour les combattre. Les routiers français sont exécutés et les étrangers de quelque valeur soumis à rançon. Ainsi Philippe le Hardi, à la tête de l'une de ces armées, mène campagne contre elles en Normandie et dans la [[Beauce (France)|Beauce]]{{sfn|Autrand|1994|p=514|loc=|id=}}. En Bourgogne, c'est [[Hugues Aubriot]], futur [[prévôt de Paris]] mais pour l'heure [[bailli]] de Dijon, et non pas le duc qui mène la vie rude à l'Archiprêtre. Cette lutte permet de roder de petites armées formées de volontaires aguerris sous commandement de chefs expérimentés et fidèles comme [[Bertrand du Guesclin|Bertrand Du Guesclin]].

En 1365, la fin de la [[guerre de Succession de Bretagne]] démobilise de nombreux guerriers bretons. Les petits groupes étant vulnérables, ils se regroupent en grandes compagnies. Le pape [[Urbain V]] ayant eu l'idée de financer une croisade pour emmener les compagnies{{sfn|Minois|2016|p=192|loc=|id=}}, en 1365 Philippe et son oncle [[Charles IV (empereur du Saint-Empire)|l'empereur Charles IV]] descendent en Avignon proposer une croisade vers la Hongrie. Le pape finance l'expédition et Philippe croit se débarrasser d'Arnaud de Cervole. L'Archiprêtre part avec une armée qui ne dépasse pas Strasbourg car les villes ferment leurs portes à l'arrivée des routiers, la croisade ravage la [[Lorraine]], les [[Massif des Vosges|Vosges]] et les bords du [[Rhin]]{{sfn|Autrand|1994|p=501|loc=|id=}}. On propose d'acheminer la croisade par mer, mais les routiers refusent : c'est un nouvel échec.

Fin 1365, Charles V réussit enfin à se débarrasser d'une bonne partie des grandes compagnies qui ruinent le pays. Afin de placer son allié [[Henri de Trastamare]] sur le trône de [[Royaume de Castille|Castille]] et de combattre les Anglais ailleurs que dans le royaume, il fait financer par le pape une croisade contre l'[[émirat de Grenade]]. Personne n'est dupe, si [[Bertrand du Guesclin|Bertrand Du Guesclin]] recrute parmi les grandes compagnies c'est bien pour les mener contre le roi de Castille, [[Pierre Ier de Castille|Pierre le Cruel]], un proche du [[Édouard de Woodstock|Prince noir]] Édouard de Woodstock. Mais le pape doit lui aussi se débarrasser de ces mercenaires qui le soumettent à tribut{{sfn|Favier|1980|p=308|loc=|id=}}. Dès que la croisade a quitté le royaume, c'est l’hallali : les routiers restant sur les territoires sont éliminés sans ménagement par les forces royales{{sfn|Minois|2016|p=195|loc=|id=}}. En Castille, le succès est rapide et Henri de Trastamare est couronné le {{date-|5 avril 1366}}{{sfn|Favier|1980|p=309|loc=|id=}}. Mais à peine les compagnies démobilisées, elles sont regroupées par le Prince noir en soutien à Pierre le Cruel. Henri de Trastamarre est vaincu à [[bataille de Nájera|Nájera]]{{sfn|Favier|1980|p=310|loc=|id=}}et Bertrand du Guesclin est fait prisonnier. Henri de Trastamare doit de nouveau s'enfuir en France et Pierre le Cruel reprend le pouvoir. Mais les grandes compagnies engagées avec l'argent du pape sont massacrées, et d'autre part, cette victoire coûte très cher aux Anglais, car Pierre le Cruel n’a pas les moyens de payer l’armée qui l’a remis sur le trône. C’est ruiné et devant se débarrasser des grandes compagnies que le Prince noir regagne l’Aquitaine.

En 1368, [[Louis d'Anjou]], lieutenant du roi en Languedoc, finance Henri de Transtamare afin qu'il remobilise les routiers partis vers le Languedoc pour qu'il puisse reprendre sa couronne{{sfn|Minois|2016|p=203|loc=|id=}}. Il en utilise le plus grand nombre pour attaquer la Provence, sur laquelle il a des vues et pour faire pression sur le pape qui vient de réinstaller le Saint-Siège à Rome à la fureur de Charles V qui perd ainsi un de ses plus puissants relais diplomatiques. La Provence ayant fait front contre l'assaut, et [[Jeanne Ire de Naples|Jeanne de Naples]] ayant fait miroiter au duc d'Anjou une éventuelle adoption, ce dernier renvoie les compagnies avec Bertrand Du Guesclin à leur tête soutenir Henri de Trastamare.

Mais une partie des grandes compagnies est partie vers le nord et pille l'Auvergne et le Berry alors que le duc [[Jean Ier de Berry|Jean]] est encore retenu en otage en Angleterre pour garantir l'exécution du traité de Brétigny. Philippe le Hardi organise la défense de la Bourgogne selon le principe de la [[terre déserte]] ; il fait le vide devant l'ennemi et tient toutes les forteresses{{sfn|Autrand|1994|p=546|loc=|id=}}. Faute de ravitaillement, les grandes compagnies vident les lieux et marchent sur Paris mais les mercenaires se heurtent à l'armée royale et refluent vers le Poitou où ils finissent par se faire acheter par le roi Charles V. Elles sont alors incorporées en 1369 à l’armée française qui va participer dès lors à la reconquête des territoires concédés à l'Angleterre par le traité de Brétigny{{sfn|Favier|1980|p=311|loc=|id=}}.

== Annexes ==
=== Bibliographie ===
==== Études historiques ====
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Françoise|nom1=Autrand|lien auteur1=Françoise Autrand|titre={{nobr|Charles {{V}}}}|sous-titre=le Sage|lieu=Paris |éditeur=Fayard|année=1994|pages totales=909|isbn=2-213-02769-2|présentation en ligne=http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1995_num_50_3_279387_t1_0612_0000_001}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Germain|nom1=Butaud|titre=Les compagnies de routiers en France (1357-1393)|lieu=Clermont-Ferrand|éditeur=LEMME edit|collection=Illustoria. MA|numéro dans collection=2|année=2012|pages totales=103 |isbn=978-2-917575-28-4|présentation en ligne=https://www.cairn.info/revue-historique-2013-2-page-411.htm#pa67}}.
* {{Article|langue=fr|prénom1=Philippe |nom1=Contamine|lien auteur1=Philippe Contamine|titre=Les compagnies d'aventure en France pendant la guerre de Cent Ans| périodique=Mélanges de l'École française de Rome. Moyen Âge, Temps modernes|lieu=Rome|éditeur=École française de Rome|tome=87 |numéro= 2|année= 1975|passage=365-396|lire en ligne=http://www.persee.fr/doc/mefr_0223-5110_1975_num_87_2_2332}}.
* {{Ouvrage |langue=fr |prénom1=Jean |nom1=Favier |lien auteur1=Jean Favier |titre=La Guerre de Cent ans |éditeur=Fayard |lieu=Paris |année=1980 |pages totales=678 |isbn=2-213-00898-1}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Georges|nom1=Minois|lien auteur1=Georges Minois|titre=La Guerre de Cent Ans|éditeur=Perrin|collection=Tempus|lieu=Paris|numéro dans collection=319|année=2016|année première édition=2008|pages totales=804|isbn=978-2-262-06454-9}}.
* {{Article|langue=fr|prénom1=Hercule |nom1=Géraud|lien auteur1=|titre=Les routiers au douzième siècle| périodique=[[Bibliothèque de l'École des chartes]]|lieu=Paris|éditeur=Typographie de Firmin Didot frères|tome=3|année= 1841-1842|passage=125-147|lire en ligne=http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bec_0373-6237_1842_num_3_1_451648}}.
* {{Article|langue=fr|prénom1=Hercule |nom1=Géraud|lien auteur1=|titre=Mercadier. Les routiers au treizième siècle| périodique=Bibliothèque de l'École des chartes|lieu=Paris|éditeur=Typographie de Firmin Didot frères|tome=3|année= 1841-1842|passage=417-447|lire en ligne=http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bec_0373-6237_1842_num_3_1_451658}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Guilhem |nom1=Pépin |directeur1=oui |prénom2=François |nom2=Lainé |directeur2=oui |prénom3=Frédéric |nom3=Boutoulle |directeur3=oui |titre=Routiers et mercenaires pendant la guerre de Cent ans. Hommage à Jonathan Sumption |sous-titre=actes du colloque de Berbiguières, 13-14 septembre 2013 |éditeur=Ausonius |lieu=Bordeaux / Pessac |numéro dans collection=28 |année=2016 |pages totales=357 |isbn=978-2-35613-149-2 |présentation en ligne=http://deremilitari.org/2016/07/guilhem-pepin-francoise-laine-and-frederic-boutoulle-eds-routiers-et-mercenaires-pendant-la-guerre-de-cent-ans-hommage-a-jonathan-sumption-ditcham/ |lire en ligne=https://books.openedition.org/ausonius/16277}}.
* Manuel Sanchez, « Les villes de Catalogne et les Grandes Compagnies, 1360-1380 », dans ''Villes en guerre ({{sp-|XIV| - |XV}}). Actes du colloque tenu à l’université de Provence (Aix-en-Provence, 8-{{date-|9 juin 2006}})'', Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, 2008.
* {{Article |langue=fr |auteur1=David Fiasson |illustrateur=Edouard Groult |titre=Les grandes compagnies : Soldats de fortune, rapaces de haut vol |périodique=[[Guerres & Histoire]] |numéro=61 |mois=juin |année=2021 |pages=42-47 }}.

==== Littérature ====
* Une des pièces en prose du recueil ''[[Gaspard de la nuit]]'' d'[[Aloysius Bertrand]], [http://fr.wikisource.org/wiki/Les_Grandes_Compagnies_(1364) ''Les Grandes Compagnies (1364)''], évoque ces mercenaires durant la [[guerre de Cent Ans]].
* [[Arthur Conan Doyle]], ''[[La Compagnie Blanche]]'', Phébus, 1995.
* Alexandre Dumas, ''Le Bâtard de Mauléon''.

== Articles connexes ==
*[[Roger de Flor]]
*[[Les Almogavres à Gallipoli]]
*[[Compagnie catalane]]
*[[Berenguer d'Entença]]
*[[Bernat de Rocafort]]
*[[Bataille de Brignais]]
*[[John Hawkwood]]
*[[Bernardon de la Salle]]
*[[Chefs routiers célèbres]]

== Notes et références ==
{{références|colonnes=2}}

== Liens externes ==
* [http://www.persee.fr/web/ouvrages/home/prescript/article/shf_0000-0000_1904_num_4_1_953_t1_0074_0000_8 notices bibliographiques.]
* Jean-Philippe Genêt, introduction du colloque international ''Routiers et mercenaires d'Aquitaine, d'Angleterre et d'ailleurs (v. 1340-1453) : rôle militaire et impact sur les sociétés locales'', château de Berbiguières (Périgord), 13-{{date-|14 septembre 2013}}, {{voir en ligne|url=https://www.youtube.com/watch?v=kyV0IAAG25Y}}.
* {{en}} Kelly de Vries, « Perrinet Gressart : Joan of Arc's Penultimate Enemy », colloque ''Routiers et mercenaires d'Aquitaine, d'Angleterre et d'ailleurs (v. 1340-1453) : rôle militaire et impact sur les sociétés locales'', château de Berbiguières (Périgord), 13-{{date-|14 septembre 2013}}, {{voir en ligne|url=https://www.youtube.com/watch?v=YrmKRH5rAls}}.
* [[Bertrand Schnerb]], « Compagnons aventureux et mercenaires dans les armées des ducs de Bourgogne (v. 1400-v. 1420) », colloque ''Routiers et mercenaires d'Aquitaine, d'Angleterre et d'ailleurs (v. 1340-1453) : rôle militaire et impact sur les sociétés locales'', château de Berbiguières (Périgord), 13-{{date-|14 septembre 2013}}, {{voir en ligne|url=https://www.youtube.com/watch?v=IU01vvGeN94}}.
* [[Philippe Contamine]], « Un « marmouset » contre les compagnies : Jean de Blaisy (+ 1396) », colloque ''Routiers et mercenaires d'Aquitaine, d'Angleterre et d'ailleurs (v. 1340-1453) : rôle militaire et impact sur les sociétés locales'', château de Berbiguières (Périgord), 13-{{date-|14 septembre 2013}}, {{voir en ligne|url=https://www.youtube.com/watch?v=km4C2HIbVYs}}.

{{Portail|histoire militaire|Moyen Âge tardif}}

[[Catégorie:Groupe et type de mercenaires de la guerre de Cent Ans]]
[[Catégorie:Institution militaire médiévale|C]]