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Conjecture de Billaud

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La conjecture de Billaud est une conjecture en combinatoire des mots, formulée par Michel Billaud, qui concerne une propriété qu'un mot vérifie s'il en est ainsi pour ses sous-mots obtenus en effaçant toutes les occurrences d'une lettre.

Énoncé[modifier | modifier le code]

La conjecture de Billaud est la suivante :

Conjecture de Billaud — Si, pour chaque lettre apparaissant dans un mot , le mot obtenu en effaçant toutes les occurrences de dans est point fixe d'un morphisme non trivial, alors le mot lui-même est aussi un point fixe d'un morphisme non trivial.

La conjecture a été formulée en 1993[1] et est encore ouverte en 2022.

Résultats partiels[modifier | modifier le code]

La conjecture est trivialement vérifiée pour un alphabet à 2 lettres, et a été démontrée par P. Zimmermann « A problem with words from Michel Billaud » pour un alphabet à 3 trois lettres[2]. Françoise Levé et Gwénaël Richomme ont démontré[2] la conjecture dans le cas où chaque morphisme de l'énoncé n'a qu'une seule lettre expansive (une lettre est dite expansive pour un morphisme si figure dans l'image et si est de longueur au moins 2). La conjecture a été prouvée pour un alphabet à 4 lettres[3].

Exemple[modifier | modifier le code]

On considère[2] le morphisme sur donné par

, , , , , , , , .

Les lettres mortelles sont , les lettres expansives sont . Les points fixes de sont les mots de puisque en effet par exemple

.

On note FW l'ensemble des mots qui sont points fixes d'un morphisme non trivial

.

Un témoin pour un mot dans FW est un morphisme non trivial tel que . Enfin, on note le mot obtenu en effaçant toutes les occurrences de la lettre dans . Un tel mot est un héritier (heir en anglais) de .

Énoncé[modifier | modifier le code]

Théorème (Levé-Richomme) — Soit un mot avec sur un alphabet à au moins 3 lettres. Supposons que, pour tout dans , l'héritier appartient à FW et a un témoin avec une lettre expansive. Alors appartient à FW et a un témoin avec une lettre expansive

.

Une autre formulation[modifier | modifier le code]

Un mot est morphiquement primitif[4] s'il n'a pas d'autres points fixes que le morphisme identité. Par définition, un mot est morphiquement primitif si et seulement s'il n'appartient pas à l'ensemble FW. La conjecture de Billaud, par contraposition, s'énonce comme suit[5] :

Contraposée de la conjecture de Billaud — Si un mot est morphiquement primitif, alors au moins un de ses héritiers est morphiquement primitif.

Discussion[modifier | modifier le code]

Tester si un mot est morphiquement primitif peut se faire en temps linéaire[6]. La conjecture de Billaud est une implication et non une caractérisation. Ainsi, alors qu'il existe des mots morphiquement non primitifs, tels que le mot (point fixe du morphisme ,, ), dont aucun des héritiers , , et n'est morphiquement primitif, il existe également des mots tels que , qui sont morphiquement imprimitifs, mais dont certains héritiers sont morphiquement primitifs (ici et ).

Michel Billaud est, de 1984 à 2021, Maître de Conférences au Département Informatique de l'Institut Universitaire de Technologie de l'Université Bordeaux ; il est membre du Laboratoire Bordelais d'Informatique (LaBRI)[7]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Billaud 1993.
  2. a b et c Levé et Richomme 2005.
  3. Szymon Łopaciuk et Daniel Reidenbach, « The Billaud Conjecture for , and Beyond », Lecture Notes in Computer Science, Springer International Publishing, vol. 13257 « Developments in Language Theory »,‎ , p. 213–225 (ISBN 978-3-031-05578-2, DOI 10.1007/978-3-031-05578-2_17, lire en ligne).
  4. Reidenbach et Schneider 2009.
  5. Łopaciuk et Reidenbach 2022.
  6. T. Kociumaka, J. Radoszewski, W. Rytter et T. Waleń, « Linear-time version of Holub's algorithm for morphic imprimitivity testing », Theoretical Computer Science, vol. 602,‎ , p. 7–21 (DOI 10.1016/j.tcs.2015.07.055, lire en ligne).
  7. [1] Page personnelle de Michel Billaud.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • M. Billaud, « A problem with words », Letter in Newsgroup Comp. theory,‎ (lire en ligne)
  • Françoise Levé et Gwénaël Richomme, « On a conjecture about finite fixed points of morphisms », Theoretical Computer Science, vol. 339, no 1,‎ , p. 103–128 (DOI 10.1016/j.tcs.2005.01.011 Accès libre, lire en ligne)
  • Daniel Reidenbach et Johannes C. Schneider, « Morphically primitive words », Theoretical Computer Science, vol. 410, no 21,‎ , p. 2148–2161 (DOI 10.1016/j.tcs.2009.01.020 Accès libre, lire en ligne)
  • Szymon Łopaciuk et Daniel Reidenbach, « On Billaud words and their companions », Theoretical Computer Science, vol. 940,‎ , p. 231–253 (DOI 10.1016/j.tcs.2022.11.004 Accès libre, lire en ligne)
  • Szymon Łopaciuk et Daniel Reidenbach, « The Billaud Conjecture for , and Beyond », Lecture Notes in Computer Science, Springer International Publishing, vol. 13257 « Developments in Language Theory »,‎ , p. 213–225 (ISBN 978-3-031-05578-2, DOI 10.1007/978-3-031-05578-2_17, lire en ligne)