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Utilisateur:Michka B/Rafles des 2 et 5 mars 1943 à Nancy

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Les rafles des 2 et 5 mars 1943 qui ont eu lieu à Nancy font partie des rafles oubliées qui se sont déroulées de fin janvier à mi-mars 1943. Elles se situent dans une période où le Troisième Reich fait face à des revers importants qui l’obligent à incorporer de plus en plus d’ouvriers dans l’armée. En plus du STO, la réorientation des finalités des camps de concentrations vers l’industrie de guerre conduit Himmler à trouver « 35000 hommes aptes au travail » comme esclaves.

Elles vont toucher des hommes de 16 à 62 ans pris au hasard dans la rue, les bars ou chez eux.

Ces rafles ne s’inscrivent pas dans celles de la Shoah (déportations de persécution) mais font partie de l’opération Meerschaum.

Contexte général[modifier | modifier le code]

En 1942, l’Allemagne nazie ne parvient pas à faire capituler l’URSS et concentre, à partir de fin juin, ses efforts pour la conquête des champs de pétrole du Caucase au sud. C’est urgent car la principale source d’approvisionnement est la Roumanie dont les raffineries de Ploiești ont été bombardées le 12 juin par les britanniques. Les soviétiques arrêtent cette offensive à Stalingrad. La bataille pour la prise de la ville débute le 11 juillet 1942 et va durer près de six mois et demi.

La Wehrmacht mobilise de plus en plus d’allemands et les ouvriers qualifiés commencent à manquer à l’industrie de guerre.

Sauckel est chargé du recrutement de main-d’œuvre dans les pays occupés. Il réclame à l’État français 250 000 hommes pour travailler en Allemagne. Le 30 mai 1942, Laval lance la campagne pour la Relève (sur la base du volontariat) afin de soutenir l’Allemagne dans « son effort de guerre contre le bolchevisme ». En août, cela s’avère un échec. Le gouvernement de Vichy publie la loi du 4 septembre 1942 permettant de prélever des salarié(e)s dans les entreprises (loi s’appliquant donc à toute la France (occupée ou non). Le quota est atteint à la fin de l’année 1942.

Mais les Alliés débarquent, en Afrique du Nord, le 8 novembre : les allemands envahissent la zone "libre" trois jours plus tard.

Pour fournir une main-d'œuvre esclave pour les entreprises d’armement, mettre sous terre les ateliers les plus secrets… Himmler, chef de la SS, initie, le 4 décembre, l’opération Meerschaum visant à envoyer en camp "35 000 hommes aptes au travail".

Mi-décembre, 300 000 ouvriers allemands supplémentaires sont mobilisés aux armées. Le 1er janvier 1943, Sauckel fait une nouvelle demande de 250 000 hommes pour la fin mars.

Le 2 février, l’Allemagne nazie et ses alliés sont lourdement battus par les soviétiques à Stalingrad (514000 morts ou blessés, 240000 prisonniers).

Laval améliore la loi du 4 septembre en la structurant comme l’ancien service militaire : par classe d’âge . C’est le Service du Travail Obligatoire (loi et décret du 16 février) dont la mise en place se fait en quinze jours. C’est l’État français, avec son administration, sa police et sa gendarmerie, qui se charge de son organisation sur l’ensemble du territoire, soulageant ainsi les forces d’occupation..

Après recensement, les préfets (français) convoquent individuellement (avec menaces), via les maires, les jeunes concernés à la visite médicale d’aptitude dans les chefs-lieux de canton. Cette phase doit être bouclée pour le 5 mars ; les départs pour l’Allemagne devant suivre.

Mais la SS et la Wehrmacht ont aussi leurs objectifs fixés.

Les rafles du 2 mars 1943[modifier | modifier le code]

Contexte[modifier | modifier le code]

Pour Nancy et ses alentours, 850 jeunes sont convoqués pour la visite le 1er mars à 8h30 et 1450, des cantons Nord et Ouest, le lendemain à la même heure dans les grands salons de l'Hôtel de ville. Le 2, certains viennent avec les bus affrétés par leur municipalité, parfois accompagnés par leur maire, d'autres en voiture entre copains. C'est un peu comme avant la guerre, comme un jour de conseil de révision et cela ne c'était pas produit depuis trois ans... c'est un peu un esprit de fête... Tous ne pouvant pas passer, il leur est demandé de revenir plus tard. Ils ont donc quartier libre jusque là. Ceux qui habitent loin restent sur le centre-ville. De nombreux groupes déambulent donc dans les rues environnantes. La rue Saint-Jean, la grande artère où se trouvent de nombreuses brasseries (dont certaines avec orchestre) est une destination toute trouvée.

Déroulement[modifier | modifier le code]

Première rafle[modifier | modifier le code]

Entre 10 h et 11h, la police allemande (la Gestapo) intervient sur toute la rue pour "vérification d'identité". Les policiers entrent dans les brasserie. Ils y retiennent les jeunes présent et y font rentrer ceux qui ont été pris aux alentours. Des bus affrétés pour l'occasion. En bas de la rue Saint-Jean, au Point Central, ceux de la Brasserie la Lorraine sortent par la 2ème porte de l'établissement, celle de la rue Saint-Dizier. À l'autre bout de la rue, place Maginot, d'autres bus embarquent d'autres jeunes. Pour un autre brasserie, c'est par une ruelle que les "oisifs" sont poussés dans une voiture. Une centaine de personnes sont amenés à la prison Charles Ⅲ qui a été divisée pour avoir un quartier allemand.

Deuxième rafle[modifier | modifier le code]

À partir de 17h30, la police allemande cible le quartier de la place Carnot. Des lycéens pensionnaires de Poincaré avaient fini leur bac blanc et avaient eu le droit d'aller se détendre. Des étudiants faisaient une pose en rentrant du sport. Avec d'autres jeunes, ils sont pris à la brasserie La Viennoise (angle rue des Michottes) ainsi que des passants. Un bus emmènent entre 40 et 50 personnes à Charles Ⅲ.

Dans le cas de ces deux rafles, aucun incident n'avait eu lieu auparavant.

Bilan de la rafle du 2 mars 1943[modifier | modifier le code]

Entre 140 et 150 jeunes gens ont été raflés ce jour-là. Cinq d'entre eux sont libérés au hasard. 82 ont pu être identifiés par les recherches actuelles.

Les deux tiers font partie des classes d'âge convoquées pour la visite médicale, mais il y a aussi 2 élèves du lycée Poincaré qui ont tout juste 17 ans et quatre autres jeunes hommes de plus de 24 ans.

La plupart viennent des communes proches de Nancy : Mais on recense 8 jeunes du village de Pulligny venus "faire la fête" après leur visite médicale à Vézelise

13 raflés sont étudiants, 4 élèves-maîtres au lycée Poincaré.

Entre 30 et 40 travaillent dans les usines de Pompey et Frouard. Ils sont nécessaires à la production servant aux allemands. Un administrateur allemand, malgré un premier refus des SS, arrive à les faire libérer. S'ajoute à ce groupe un étudiant qui arrive à s'y glisser.

La rafle du 5 mars 1943[modifier | modifier le code]

Contexte[modifier | modifier le code]

Le 1er mars, un quart des 900 convoqués pour le convoi pour l'Allemagne, à la gare de Nancy, ne s'est présenté. Les autorités d'occupations doivent frapper les esprits.

Le quartier Saint-Sébastien, de quartier des artisans attirés par Charles Ⅲ, est devenu un quartier dont les bâtisses se délabrent. Depuis les années 1920, la ville de Nancy y voyait un quartier insalubre et commençait les préemptions. Le quartier mal-famé était l'endroit désigné pour trouver les "oisifs" et ceux qui n'avaient pas de travail stable...

Déroulement[modifier | modifier le code]

À 6h du matin, la Wehrmacht boucle le périmètre du quartier. Il forme un rectangle qui part de la rue Saint-Jean à la rue Cyfflé dans un sens et de la rue des Ponts aux rues Lallement et de l'Équitation de l'autre.

Les hommes qui sont dans les rues, sortant de chez eux ou traversant le quartier sont arrêtés. Chaque appartement est visité et les hommes de 18 à 50 ans sont priés de descendre pour une "vérification d'identité". Peu importe qu'ils soient anciens combattants ou chargés de famille, environ 250 hommes sont conduits à la prison Charles Ⅲ.

Bilan de la rafle du 5 mars 1943[modifier | modifier le code]

Parmi les raflés, 140 ne peuvent pas "justifier d'un emploi défini" et tombent sous le coup de la loi du 4 septembre 1942. Dans l'état actuelles des recherches, seuls 94 ont été formellement identifiés.

Bilan de l'action Meerschaum en Meurthe-et-Moselle[modifier | modifier le code]

Bien que le journal collaborateur L'Écho de Nancy (qui s'était emparé de L'Est Républicain) n'ai aucunement parlé de ces rafles dans les jours suivants, la nouvelle s'est vite répandue dans la population.

À l'arrivée des raflés, trois réfractaires au STO qui ne s'étaient pas présentés à la gare le 1er mars se trouvaient à Charles Ⅲ.

Au 11 mars, une trentaines d'arrestations individuelles par la Gestapo sur les arrondissements de Briey et Nancy sont recensées dans le rapport du préfet.

Le préfet Schmidt ne se tient pas seulement au courant du décompte : avec la police française et la gendarmerie, il organise la traque de ceux qui ne se sont pas présenté à la gare. Des contrôles d'identité sont menés, le 9 mars, à la gare, le 27 mars, à la sortie des cinémas.

Le devenir des raflés[modifier | modifier le code]