Utilisateur:Lostinthiswhirlpool/Brouillon Roland Gerbeau

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A voix nue[modifier | modifier le code]

Roland Gerbeau (1/5), 13.12.2010, A voix nue, France Culture, Par Martin Pénet, réalisation Vincent Abouchar.

Gosse de Vincennes devenu chanteur de charme, Roland Gerbeau a conservé des accents de sa jeunesse dans le Paris populaire de l'avant-guerre. L'esprit pétillant et la gouaille intacte, il peut aujourd'hui nous raconter sans fard le parcours semé de bonheurs et d'embûches d'un autodidacte qui a hérité de sa mère son goût pour la musique. Doué d'une jolie voix et encouragé par ses camarades d'adolescence, il a tenté sa chance dans la chanson dès l'âge de seize ans, en 1936.

Les radio-crochets sur les postes privés, les soirées au bal musette comme chanteur d'orchestre, les numéros d'attraction dans les entractes de cinémas, les séances d'enregistrement pour pousser un refrain sur des disques de danse, les cabarets de Pigalle avec leurs orchestres de tango où, à la veille de la guerre, il finit par présenter son propre tour de chant : autant d'étapes obligées pour espérer percer dans un métier où les places sont chères.

Arrive la guerre qui marque son parcours de façon indélébile. Appartenant à la classe 40, il est mobilisé le 8 juin, une semaine avant l'armistice… Il est alors transféré avec ses camarades dans les chantiers de jeunesse en Auvergne, où il restera jusqu'à la fin de l'année. Rendu à la vie civile, il rentre début 1941 dans un Paris occupé où il reprend sa carrière de chanteur. Ni collabo, ni résistant ("j'avais charge de famille"), il traverse la vie artistique de cette période troublée : les cabarets et leur public d'Allemands, les galas, Radio-Paris, l'épuration… En témoin direct, il raconte aujourd'hui tout cela avec une sincérité qui l'honore.

En 1942, il devient ami de Charles Trenet qui lui confiera la création de plusieurs chansons appelées à devenir des grands standards : "Que reste-t-il de nos amours", "Douce France". Il fait la première partie de son spectacle à l'ABC en 1943 et le suit en tournée à travers la France. C'est là qu'au printemps 1944 Trenet compose "La mer" et l'offre à Roland qui en fera le tout premier enregistrement à la Libération. Rappelé avec sa classe sous les drapeaux en 1945, Gerbeau est affecté au théâtre aux armées de la 2e DB. Il chante à Berlin pour un gala de la Résistance en 1946, puis part en avion pour l'Indochine avec d'autres artistes afin de distraire les troupes du général Budet. Sur la route, il est présenté à Gandhi, à Ho-Chi-Minh et au roi Sihanouk.

Fin 1947, après avoir été le premier à enregistrer "Ma cabane au Canada" (qui hélas pour lui restera inédit et deviendra un grand succès par Line Renaud), Roland Gerbeau accompagne Joséphine Baker aux Etats-Unis. C'est le début de son aventure américaine qui le conduira de New York à Hollywood, puis au Mexique en 1950 (où il retrouve Baker) et enfin à Cuba. Hormis quelques retours en France (1953 et 1955) et des séjours au Brésil, Cuba restera son port d'attache durant une dizaine d'années. Il verra ainsi se succéder les régimes de Socarras, Batista et Castro. Habitué des cabarets de La Havane ou de Santiago, où on le surnomme Rolando, parfois même "C'est si bon", il met à son répertoire les standards internationaux écrits en France.

Rappelé par la mort de sa mère, il rentre définitivement au pays en 1960. Dans un climat musical bien changé, il s'oriente vers les relations publiques. Engagé chez Pathé-Marconi en 1964 comme attaché de promotion pour la télévision, il s'occupera pendant vingt ans des plus grands artistes de la firme, en particulier de Tino Rossi. Il participe au lancement de vedettes comme Adamo, Yves Duteil, Téléphone…

De temps à autre, il enregistre encore quelques albums de succès de charme de la Belle Epoque signés Paul Delmet et écrit ses propres chansons. Au moment où il prend sa retraite, en 1985, il connaît un petit triomphe avec une de ses compositions, "Sainte Rita", qui lui ouvre les portes des émissions de Pascal Sevran et celles de Radio Montmartre où il sera animateur pendant six ans. Aujourd'hui âgé de 91 ans et retiré en Normandie, Roland Gerbeau continue à écrire des chansons inspirées par l'actualité et reste connecté sur le monde via Internet.

Connaissez-vous Roland Gerbeau ?[modifier | modifier le code]

C'est lui qui déclarait en 1987 à France-Soir : Qui sait que j'ai créé les grands succès qui sont devenus les tubes des autres ? Qui sait que c'est moi qui ai lancé Douce France avant Charles Trenet, puis La mer et Que reste-t-il de nos amours ? Qui sait que Piaf m'avait offert La vie en rose qu'elle trouvait trop mielleuse pour elle et même que j'ai créé Ma cabane au Canada sur un disque 78 tours qui n'est jamais sorti ? Entré dans les variétés à l'âge de 18 ans, Roland Gerbeau a pourtant connu une belle carrière internationale. Et c'est Charles Trenet, ami fidèle jusqu'au bout, qui lui a donné son envol. Aujourd'hui fringant octogénaire, ce chanteur de charme reste un témoin privilégié. Injustement absent sur le net, il est grand temps de lui consacrer un article. Flash-back !

La rencontre

Le petit Roland naît à Vincennes en 1919 dans une famille ouvrière. Suite au décès prématuré de son père, il travaille dès l'âge de 13 ans comme apprenti imprimeur. Il chante déjà tout le temps et fréquente assidûment les guinguettes des bords de Marne. C'est en remportant un concours d'amateurs au Poste Parisien en 1937 que Roland Gerbeau décide de son avenir de chanteur. Il a 18 ans.

Lorsque la guerre éclate, Roland Gerbeau fait partie de l'orchestre de Richard Blareau. Il se produit au Gaumont, au Grand Rex et au Moulin Rouge. Brièvement mobilisé puis envoyé dans les Chantiers de Jeunesse, en 1941, le chanteur retrouve une place dans un cabaret de la place Blanche. Et c'est là qu'une rencontre décisive va décider de l'envol de sa carrière :"Trenet passait à ce moment là au Cirque Médrano et venait dîner dans ce cabaret après le spectacle. Il m'a entendu chanter, est revenu le lendemain soir avec son imprésario, et m'a proposé de débuter quinze jours plus tard à l'ABC, en première partie de son récital. (...) Ce soir-là, il m'a également promis qu'il m'écrirait une chanson.";

Ce sera Douce France, ni plus ni moins ! Au départ, précise Roland Gerbeau à Richard Cannavo, il me l'avait donnée complètement. (...) Évidemment moi je n'étais pas très connu et je ne faisais des disques que de temps en temps, surtout pendant l'Occupation. (...) On enregistrait surtout les très grandes vedettes, et les jeunes passaient ensuite. Tout ceci, Charles le savait très bien. Et il y avait à l'époque un garçon qui était un nom énorme dans la chanson : André Claveau. (Notons que cet artiste vient tout juste de mourir... dans l'indifférence générale des média !) Alors, lorsque Charles eut écrit Douce France, qu'il me destinait, je sais qu'il a essayé de la donner à Claveau. Mais Claveau (...) avait des séances d'enregistrement très planifiées, avec des titres également très planifiés, et la chanson de Trenet attendait toujours d'être enregistrée. (...)Un jour que j'étais allé voir Charles à l'ABC il m'a dit, en sortant de scène, dans sa loge : "Bon, eh bien, puisque Claveau ne la chante pas, je te la donne, tu fais ce que tu veux avec..." Je l'ai évidemment enregistrée tout de suite, c'est-à-dire bien avant Charles, en 1943 ! C'est d'ailleurs une chanson qui a beaucoup contribué à me faire connaître : chanter Douce France, cette année-là, au plus fort de l'Occupation, c'était l'assurance d'un public attentif, et ravi !

De 1942 à 1944, Roland Gerbeau suit Charles Trenet dans une tournée qui l'emmène à travers toute la France. On imagine mal, aujourd'hui, le succès incroyable que pouvait rencontrer le Fou Chantant qui, parfois, chantait devant 3000 personnes. Et comme, à l'époque, Charles, n'aimait guère interpréter des ballades, il laissait Roland Gerbeau les chanter, pour se consacrer, lui, à un répertoire plus swing.

C'est parti : de plus en plus de radios programment le protégé de Charles qui, parallèlement, fréquente les plus grands music-hall et chante dans les programmes des plus grandes vedettes de l'époque : Jules Berry, Edith Piaf, Georgius, Lucienne Boyer et Yves Montand, alors jeune débutant.

Un moment unique...

Autre souvenir mémorable : Roland Gerbeau était présent lorsque Charles Trenet a composé son plus grand succès, La mer. On connaît l'anecdote, souvent rapportée : C'était en juillet 1944. Avec Charles Trenet, (...) nous avions pris le train pour aller à Perpignan, en compagnie de son secrétaire et de son pianiste Léo Chauliac. Il faisait très chaud. A hauteur de l'étang de Thau, Charles Trenet s'est levé, a baissé la fenêtre du compartiment et a commencé à chantonner. Il venait de composer La mer.

Mais Trenet n'avait, semble-t-il, guère confiance dans ce genre de chansons faites à la va vite. Et, de fait, ce tube monumental démarrera très mal puisque les quelques tentatives qu'il fit alors pour imposer ce titre au public ne rencontrèrent guère de succès. Trenet essaye alors de placer sa chanson à une spécialiste du genre, Suzy Solidor, qui lui répond : Des chansons sur la mer, on m'en envoie dix par jour !... Elle a dû s'en mordre les doigts car c'est véritablement cette oeuvre qui aura fait la fortune de Trenet. En fait, précise Richard Cannavo, sur les quelques centaines de titres qu'il a déposés à la SACEM, La mer a elle seule aurait suffi pour le rendre célèbre à jamais. C'est donc fin '45, soit quelques mois avant son Maître, que Roland Gerbeau se surprend à enregistrer La mer !

Non, Charles n'écrivait pas une chanson pour la donner à un autre chanteur. C'était tout simplement un ami, c'était le copain qui écrivait instinctivement pour quelqu'un qu'il aimait bien ; donner une chanson, c'était une de ses manières de marquer son amitié. Roland a aussi assisté à la naissance de Bonsoir jolie madame, Swing troubadour, Le soleil a des rayons de pluie et d'une quantité d'autres titres, toujours avec cette même facilité apparente, une espèce de grâce, sidérante.

. Depuis les Amériques jusqu'à Castro !

La carrière de Roland Gerbeau est maintenant lancée. Il rencontre Jo Bouillon, son orchestre et sa femme Joséphine Baker qu'il accompagne pour une longue tournée aux Etats-Unis. Juste avant son départ, Roland Gerbeau enregistre Ma cabane au Canada se promettant de revenir en France dès la commercialisation de son disque. Un disque qui ne sortira jamais car, 6 mois plus tard, l'auteur, Loulou Gasté donne sa chanson à sa femme Line Renaud qui l'enregistre avec le succès qu'on connaît. Frustré, Roland décide alors de rester aux Etats-Unis qu'il parcourt avec Edith Piaf, les Compagnons de la Chanson et toujours Joséphine Baker. Ainsi, jusqu'en 1960, il se produira dans des cabarets à Hollywood, au Brésil, au Venezuela, en Haïti et à Cuba où il passera plusieurs années avant et un peu après la révolution. C'est là qu'il rencontre Che Guevara et Fidel Castro, comme en témoigne une photo mémorable.

Des années Pathé Marconi... à sainte Rita

De retour en France, au début des années '60, la carrière de Roland Gerbeau prend un tournant décisif. La déferlante yéyé a tout balayé et l'heure n'est plus aux chanteurs de charme. Alors, il entre chez Pathé-Marconi en qualité d'attaché de presse. Pendant 20 ans, il y côtoiera les plus grands : Louis Armstrong, les Beach Boys, Duke Ellington, Joe Cocker, Count Basie, Lionel Hampton, les Jackson Five, Marvyn Gaye... de jeunes débutants, aussi, comme Adamo, Julien Clerc, Nicolas Peyrac, Céline Dion ou même ces jeunes chevelus promis à une carrière mythique, les Beatles.

Mais Roland n'a pas, pour autant, abandonné son premier métier. Sa voix chaude fait revivre les grands succès de la Belle Epoque, puis ceux de la Libération sur deux productions phonographiques qui est, aujourd'hui, difficile de dénicher. De temps en temps, il écrit et compose aussi. Ainsi, en 1983, convaincu d'être atteint d'un cancer, Roland Gerbeau se rend en pèlerinage à l'église Sainte Rita de Nice. Un double miracle s'y produit puisqu'il sort de l'église guéri en fredonnant la chanson Sainte Rita, qu'il enregistre dans la foulée en guise de reconnaissance. Mieux, l'engouement du public pour cette prière lui permet de remonter sur les planches et de se retrouver en bonne place au Top 50 de Canal Plus ! Un chanteur sur le retour est parfois un chanteur qui revient..., écrit Philippe Bouvard dans sa chronique de France-Soir.

Un inédit : Soufflez, soufflez les bougies

Roland Gerbeau avait promis à Tino Rossi de lui écrire une chanson pour sa rentrée au Casino de Paris. En 1981, il s'exécute, écrit les paroles et, pour que ce soit plus fort, demande à son ami Trenet d'en écrire la musique. Il accepte. "En février, Charles Trenet m'invita à la Villa Médicis, sa maison de La Varenne pour me faire écouter ce Soufflez soufflez les bougies, qu'il venait de terminer. Son pianiste Christian Remy était là pour l'accompagner. Il a chanté la chanson en modifiant quelques paroles. J'ai enregistré ce grand moment en continu avec le petit magnétophone que j'avais amené. C'était magnifique, Charles et son humour toujours percutant nous la jouait au grand Trenet des plus beaux jours, sous les éclats de rire de la Marquise (Madame Breton, son éditrice), raconte Roland Gerbeau.

Un grand regret : Charles Trenet n'enregistrera pas cette chanson qu'il n'interpréta jamais non plus sur scène. Qu'à cela ne tienne, en septembre 2002, Roland ouvre son portefeuille et pour remercier Charles Trenet de lui avoir ouvert les portes du Music Hall, 60 ans plus tôt, il édite sur CD, et à ses frais, cet enregistrement inédit. Tiré à 1000 exemplaires, le disque est disponible (s'il en reste ?) en écrivant à Roland Gerbeau, BP 5 à F27220 Bois-Le-Roi.

J'ai moi-même découvert cet enregistrement grâce à notre membre breton Patrick Boisselet et je le remercie de m'avoir fait partager cette belle découverte. Elle mérite vraiment le détour et a été le point de départ de cet article. Je remercie également très chaleureusement Roland Gerbeau, lui-même qui, de sa retraite au L'Habit, m'a très gentiment répondu et m'a fait parvenir l'abondante documentation et les illustrations qui m'ont permis de vous proposer le bref survol de sa belle carrière.

Laissons d'ailleurs à Roland Gerbeau le soin de conclure cet article avec le superbe témoignage d'amitié qu'il a livré à Richard Cannavo, en 1989 : ... Pour moi, voir Trenet aujourd'hui encore reste une fête, parce que je sais qu'on va rire, il va faire des mots, il a toute une panoplie de bons mots qu'il a engrangés au fil des jours, et il est heureux de nous l'offrir et de toute faire éclater comme des feux de Bengale, de toute faire exploser comme des crackers. Il n'a pas changé, il a toujours un côté gamin en lui. Quand il quitte sa maison par exemple, il ne marchera pas comme un monsieur de 70 ans ; il part au pas de course. Le côté juvénile reprend toujours le dessus. L'autre jour, je l'ai rencontré à la SACEM, il avait l'air en pleine forme. Il m'a dit un grand bonjour et est parti en descendant les escaliers deux par deux. Il le fera même s'il a mal aux jambes ! (...) Peut-être qu'après il s'est écroulé dans la rue, mais devant nous, il pétillait. Il est comme ça, Charles, il est fantastique. Unique. (...) Il reste Trenet, en somme c'est le fou chantant. Et ça n'est pas fabriqué du tout, ça n'est pas un personnage qu'il se compose, c'est lui, c'est en lui.... Actuellement Roland travaille avec un ami compositeur, Benoît LETARD, avec lequel il a créé un hommage à Claude Nougaro intitulé La Nougaronne et Miserabilis. Bien d’autres titres ont été écrits ensemble, que l’on retrouve dans la nouvelle édition du CD de Sainte Rita.