Utilisateur:Regis estebe

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'Star. Nîmes est star'. Nîmes est dans l’œil du cyclone Féria. Il est de bon ton désormais de s’y faire voir, comme à Roland Garros, au Grand Prix de Monaco, au prix de Diane ou du Jockey Club et pourquoi pas au stade vélodrome de Marseille. Les nîmois finissent à peine de fêter leurs héros sportifs que leur ville charrie déjà des foules migratrices aux mœurs de consommateurs urbains, aux délicatesses de fêtard aux débordements d’aficionados en visite, comme des cousins venus faire du pétard, pour faire nombre, pour faire loi. Sous le ciel d’azur, dans la chevelure des platanes vides des pépiements d’oiseaux, il fait chaud, très chaud, dehors, dedans. Les trottoirs font des claquettes, les gens dansent, boivent, parfument d’exotisme pour une semaine les « mais » de l’ordinaire de leur vie. Denis Loré dessine à l’encore de chine le portrait de Simon Casas entre les cornes de son deuxième toro. Des Miuras buissonniers sont allés sans prévenir reconnaître l’herbe des Costières, pré de leurs amis les crocodiles. Le sport et la fête se mélangent. Et soudain, toutes les frontières de la folie sont faites pour être dépassées. René Girard ex joueur de fott, danse la comparsita avec ses chaussures à crampons, Bernard Viviès rugbyman rase ses moustaches de gaulois entre deux rasades de fino, et le grand Fred Volle, lassé du hand, devient le nouvel interprète de James Bond en fumant des cigarettes monogrammées. La Féria est devenue une énorme machine maîtrisée et complètement déréglée qui brasse des émotions, des couleurs, des rythmes, des lumières, des époques, des langues. Les voix sont murmurantes, les accents polyglottés, les tons goudronnés par des poignées de cigarettes, et mille et une halte dans les bodegas. Les rires des filles sont déréglés, perchés, chats perchés. Refrains à fleur de lèvres. Élégance provocatrice. Nîmes s’amuse à corps perdu, comme si chaque instant était le dernier. Sentiments ? Avec ou sans assentiments ? Clips, claps, croquignolettes belles à croquer, marionnettes jolies à montrer, cœurs en bandoulière, femmes chics, nymphettes chocs, très mode et plutôt amusantes, amours conjugaux mis au clou le temps d’une faena. Les arènes voient défiler leur présent, leur passé, leur avenir tauromachique. Et le monde de l’aficion redécouvre que Bizet est bien le Rouget de l’Isle des corridas. Et puis, le ciel devient d’étain, le démon de l’oubli jette son voile sur la ville, pendant que le cœur de la Camargue vient mouiller doucement aux sources du jardin de la Fontaine pour mieux y décharger ses cargaisons de folklore, de chansons, de musiques, de parfums nocturnes. Les derniers noctambules, les premiers lève-tôt, appuyés aux tréteaux (même si c’est très tard) des bodegas, accueillent d’un claquement de langue étonné le goût insolite au fond de leur premier ou dernier verre. In fino véritas ! Les pendules cessent un instant de mesurer dignement la progression du temps, contrariées par les heures carillonnées. Et c’est déjà demain. Toute une ville est prête pour brasser une nouvelle journée avec excès et optimiste, pour avaler encore, avant que la fête ne s’arrête, quelques gorgées de bonheur. Prête pour s’en aller au bras d’un autre lendemain de fête.


C'est la Feria !