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En mathématiques et plus précisément en analyse fonctionnelle , les mesures de Carleson sont des classes de mesures positives et finies sur le disque unité fermé du plan complexe , ou plus généralement sur des sous-ensembles de
R
n
{\displaystyle \mathbb {R} ^{n}}
ou
C
n
{\displaystyle \mathbb {C} ^{n}}
. Elles ont été introduites par Lennart Carleson pour caractériser les mesures
μ
{\displaystyle \mu }
telles que l'opérateur d'inclusion formelle
i
:
H
p
→
L
p
(
μ
)
{\displaystyle i:H^{p}\to L^{p}(\mu )}
est borné , où
H
p
=
H
p
(
D
)
{\displaystyle H^{p}=H^{p}(\mathbb {D} )}
est un espace de Hardy et
D
{\displaystyle \mathbb {D} }
est le disque unité de
C
{\displaystyle \mathbb {C} }
.
Fenêtre de Carleson S(z)
On note :
D
=
{
z
∈
C
∣
|
z
|
<
1
}
{\displaystyle \mathbb {D} =\{z\in \mathbb {C} \mid |z|<1\}}
le disque unité de
C
{\displaystyle \mathbb {C} }
;
T
=
{
z
∈
C
∣
|
z
|
=
1
}
=
∂
D
{\displaystyle \mathbb {T} =\{z\in \mathbb {C} \mid |z|=1\}=\partial \mathbb {D} }
le cercle unité .
Pour
z
=
r
e
i
θ
∈
D
{\displaystyle z=r\mathrm {e} ^{\mathrm {i} \theta }\in \mathbb {D} }
, on définit les ensembles
S
(
z
)
⊂
D
{\displaystyle S(z)\subset \mathbb {D} }
et
I
(
z
)
⊂
T
{\displaystyle I(z)\subset \mathbb {T} }
par
S
(
z
)
=
{
ρ
e
i
γ
∈
D
∣
r
≤
ρ
<
1
,
|
γ
−
θ
|
≤
1
−
r
}
{\displaystyle S(z)=\lbrace \rho \mathrm {e} ^{\mathrm {i} \gamma }\in \mathbb {D} \mid r\leq \rho <1,|\gamma -\theta |\leq 1-r\rbrace }
I
(
z
)
=
{
e
i
γ
∈
D
∣
|
γ
−
θ
|
≤
1
−
r
}
.
{\displaystyle I(z)=\lbrace \mathrm {e} ^{\mathrm {i} \gamma }\in \mathbb {D} \mid |\gamma -\theta |\leq 1-r\rbrace .}
Soit
μ
{\displaystyle \mu }
une mesure positive sur
D
{\displaystyle \mathbb {D} }
. On dit que
μ
{\displaystyle \mu }
est une mesure de Carleson si
μ
(
S
(
z
)
)
=
O
(
|
I
(
z
)
|
)
{\displaystyle \mu (S(z))=O(|I(z)|)}
quand
|
z
|
→
1
{\displaystyle |z|\rightarrow 1}
, où
|
I
(
z
)
|
{\displaystyle |I(z)|}
désigne la longueur d'arc de l'intervalle
I
(
z
)
{\displaystyle I(z)}
.
En d'autres termes,
μ
{\displaystyle \mu }
est une mesure de Carleson si elle satisfait la condition suivante :
∃
C
>
0
∀
z
∈
D
μ
(
S
(
z
)
)
≤
C
(
1
−
|
z
|
)
.
{\displaystyle \exists C>0\quad \forall z\in \mathbb {D} \quad \mu (S(z))\leq C(1-|z|).}
On dit que
μ
{\displaystyle \mu }
est une mesure de Carleson évanescente si
μ
(
S
(
z
)
)
=
o
(
|
I
(
z
)
|
)
{\displaystyle \mu (S(z))=o(|I(z)|)}
quand
|
z
|
→
1
{\displaystyle |z|\rightarrow 1}
, c'est-à-dire :
∀
ε
>
0
∃
η
>
0
∀
z
∈
D
|
z
|
≥
1
−
η
⇒
μ
(
S
(
z
)
)
≤
ε
(
1
−
|
z
|
)
.
{\displaystyle \forall \varepsilon >0\quad \exists \eta >0\quad \forall z\in \mathbb {D} \quad |z|\geq 1-\eta \Rightarrow \mu (S(z))\leq \varepsilon (1-|z|).}
Soit
p
∈
[
1
,
+
∞
[
{\displaystyle p\in [1,+\infty [}
, soit
H
p
(
D
)
{\displaystyle H^{p}(\mathbb {D} )}
l'espace de Hardy et
μ
{\displaystyle \mu }
une mesure positive sur
D
{\displaystyle \mathbb {D} }
. Alors
μ
{\displaystyle \mu }
est une mesure de Carleson si et seulement si l'opérateur de plongement
i
:
{
H
p
→
L
p
(
μ
)
f
↦
f
{\displaystyle i:{\begin{cases}H^{p}&\to &L^{p}(\mu )\\f&\mapsto &f\end{cases}}}
est borné (ou encore : continu )[ 1] , c'est-à-dire qu'il existe une constante
C
{\displaystyle C}
telle que pour toute fonction
f
{\displaystyle f}
polynomiale sur
D
{\displaystyle \mathbb {D} }
on a l'inégalité suivante :
∫
D
|
f
|
p
d
μ
≤
C
sup
r
<
1
∫
0
2
π
|
f
(
r
e
i
t
)
|
p
d
t
2
π
⋅
{\displaystyle \int _{\mathbb {D} }|f|^{p}d\mu \leq C\sup \limits _{r<1}\int _{0}^{2\pi }|f(r\mathrm {e} ^{\mathrm {i} t})|^{p}{\frac {\mathrm {d} t}{2\pi }}\cdot }
Par densité des polynômes dans
H
p
{\displaystyle H^{p}}
, l'identité est donc vérifiée pour toute fonction
f
∈
H
p
{\displaystyle f\in H^{p}}
.
L'opérateur d'inclusion
i
:
H
p
→
L
p
(
μ
)
{\displaystyle i:H^{p}\rightarrow L^{p}(\mu )}
est compact si et seulement si
μ
{\displaystyle \mu }
est une mesure de Carleson évanescente[ 2] .
Soit
1
≤
p
<
q
<
+
∞
{\displaystyle 1\leq p<q<+\infty }
et
μ
{\displaystyle \mu }
une mesure positive sur
D
{\displaystyle \mathbb {D} }
. L'inclusion
i
μ
:
H
p
→
L
q
(
μ
)
{\displaystyle i_{\mu }:H^{p}\rightarrow L^{q}(\mu )}
est bornée si et seulement si
μ
{\displaystyle \mu }
satisfait :
∃
C
>
0
μ
(
S
(
z
)
)
≤
C
|
I
(
z
)
|
q
p
.
{\displaystyle \exists C>0\quad \mu (S(z))\leq C|I(z)|^{\frac {q}{p}}.}
Soit
μ
{\displaystyle \mu }
une mesure positive sur
D
¯
=
D
∪
T
{\displaystyle {\overline {\mathbb {D} }}=\mathbb {D} \cup \mathbb {T} }
. Toute fonction
f
∈
H
p
{\displaystyle f\in H^{p}}
se prolonge en une fonction
f
∗
(
ξ
)
{\displaystyle f^{\ast }(\xi )}
définie pour presque tout
ξ
∈
T
{\displaystyle \xi \in \mathbb {T} }
par la formule :
f
∗
(
ξ
)
=
lim
r
→
1
f
(
r
ξ
)
{\displaystyle f^{\ast }(\xi )=\lim \limits _{r\rightarrow 1}f(r\xi )}
Alors on peut définir
∫
D
¯
|
f
|
p
d
μ
:=
max
(
∫
D
|
f
|
p
d
μ
|
D
,
∫
T
|
f
∗
(
ξ
)
|
p
d
μ
|
T
(
ξ
)
)
.
{\displaystyle \int _{\overline {\mathbb {D} }}|f|^{p}d\mu :=\max \left(\int _{\mathbb {D} }|f|^{p}d\mu _{\vert _{\mathbb {D} }},\int _{\mathbb {T} }|f^{\ast }(\xi )|^{p}d\mu _{\vert _{\mathbb {T} }}(\xi )\right).}
Alors on a le théorème suivant : L'inclusion
i
μ
:
H
p
→
L
p
(
μ
)
{\displaystyle i_{\mu }:H^{p}\rightarrow L^{p}(\mu )}
est bornée si et seulement si
μ
|
D
{\displaystyle \mu _{\vert _{\mathbb {D} }}}
est une mesure de Carleson sur
D
{\displaystyle \mathbb {D} }
et
μ
|
T
{\displaystyle \mu _{\vert _{\mathbb {T} }}}
est absolument continue par rapport à la mesure de Lebesgue
m
{\displaystyle m}
de
T
{\displaystyle \mathbb {T} }
, et sa densité
d
μ
|
T
d
m
{\displaystyle {\frac {\mathrm {d} \mu _{\vert _{\mathbb {T} }}}{\mathrm {d} m}}}
est essentiellement bornée[ 3] .
La mesure de Lebesque
μ
=
λ
2
π
{\displaystyle \mu ={\frac {\lambda }{2\pi }}}
(
1
{\displaystyle 1}
-dimensionnelle) du cercle unité
T
{\displaystyle \mathbb {T} }
est une mesure de Carleson. Les généralisations du théorème de Carleson impliquent que l'inclusion
i
:
H
p
→
L
p
(
T
)
{\displaystyle i:H^{p}\rightarrow L^{p}(\mathbb {T} )}
est un opérateur borné . D'autre part, on peut montrer que cette inclusion est une isométrie , non surjective .
La mesure d'aire
A
{\displaystyle {\mathcal {A}}}
du disque est une mesure de Carleson évanescente. En effet, elle satisfait :
A
(
S
(
z
)
)
≤
π
(
1
−
|
z
|
)
2
=
o
(
1
−
|
z
|
)
{\displaystyle {\mathcal {A}}(S(z))\leq \pi (1-|z|)^{2}=o(1-|z|)}
quand
|
z
|
→
1.
{\displaystyle |z|\rightarrow 1.}
On note
A
p
{\displaystyle A^{p}}
l'espace de Bergman défini comme l'espace des fonctions holomorphes sur
D
{\displaystyle \mathbb {D} }
telles que
∫
D
|
f
(
z
)
|
p
d
A
(
z
)
<
+
∞
.
{\displaystyle \int _{\mathbb {D} }|f(z)|^{p}d{\mathcal {A}}(z)<+\infty .}
En appliquant le théorème de compacité de Carleson on obtient que l'inclusion formelle
i
:
H
p
→
A
p
{\displaystyle i:H^{p}\rightarrow A^{p}}
est un opérateur compact (donc borné).
Si le support de
μ
{\displaystyle \mu }
est inclus dans un compact de
D
{\displaystyle \mathbb {D} }
, alors c'est une mesure de Carleson évanescente.
↑ (en) Lennart Carleson, « Interpolations by Bounded Analytic Functions and the Corona Problem », Annals of Mathematics , 2e série, vol. 76, no 3, 1962 , p. 547-559 .
↑ (en) Peter L. Duren , Theory of Hp Spaces , 1970 (lire en ligne ) .
↑ (en) Oscar Blasko et Hans Jarchow, « A note on Carleson measures for Hardy Spaces », Acta Scientiarum Mathematicarum , 2005 .
Théorème de différentiation de Lebesgue
Walter Rudin , Analyse réelle et complexe [détail des éditions ]