Vierge noire

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Vierge noire de Rocamadour.

Les Vierges noires sont des effigies féminines qui appartiennent à l’iconographie du Moyen Âge européen. Elles figurent généralement la Vierge Marie, mais certaines d'entre elles représentent également Sara la noire ou sainte Anne. Elles tirent leur nom de leur couleur sombre, souvent limitée au visage et aux mains. La plupart d'entre elles sont des sculptures produites entre le XIe et le XVe siècle, mais parfois aussi des icônes de style byzantin des XIIIe et XIVe siècles. On trouve parmi elles de nombreuses Vierges à l’enfant.

La majorité des 450 à 500 recensées se rencontre dans le bassin méditerranéen occidental, domaine de l'art roman, avec une concentration importante dans le sud de la France où on en compte 180. La Vierge noire de Częstochowa (Pologne) est, par sa localisation, un exemple atypique. Bien que des musées en conservent, la plupart des Vierges noires sont placées dans des églises et certaines suscitent des pèlerinages importants.

Historique

Les Vierges noires romanes ont inspiré de nombreuses imitations ultérieures. À côté des Vierges, il existe en France une autre sainte noire, sainte Sarah, patronne des gitans, Roms, chez qui elle est connue comme Sara e Kali (Sarah la noire). Sa statue se trouve dans la crypte de l'église des Saintes-Maries-de-la-Mer (Bouches-du-Rhône). On trouve bien sûr des Vierges noires dans les régions du monde où vivent des populations à peau sombre, bien que leur couleur ait alors une signification clairement différente de celle des Vierges européennes.

Vierge noire de Częstochowa (voïvodie de Silésie) dans le monastère de Jasna Gora, XVe siècle.

Selon l’Église catholique, il n’existe aucun fondement théologique à la couleur de ces Vierges. On a voulu l'expliquer après coup par un passage du Cantique des cantiques (1 :5) : « Nigra sum, sed formosa » : « Je suis noire mais belle. »

Une des suppositions avancée jusqu’au milieu du XXe siècle était, pour les statues, le choix du matériau (ébène, acajou), mais les sculpteurs du Moyen Âge n'utilisaient que du bois local (noyer, chêne, tilleul, fruitiers…) facile à obtenir et plus facile à travailler. D'autres évoquaient la possibilité de dépôts de suie provenant des bougies votives, mais alors le noir ne se serait pas uniquement concentré sur les visages et les mains. Dans le cas des icônes, le noircissement serait dû à une altération des pigments, hypothèse qui ne fait pas l’unanimité. L'explication pour les vierges romanes tient au fait que les pigments à base de plomb utilisés pour les carnations se sont oxydés avec le temps et ont noirci (le « blanc de plomb[1] » se transforme en plattnérite noire[2],[3]), d'ailleurs on retrouve systématiquement la polychromie claire d'origine sous la couche noire[4],[5]. L'enfant Jésus est lui aussi noir car les pigments utilisés pour les carnations sont les mêmes. On retrouve d'autres statues de la même époque et qui ne représentent pas la vierge Marie dont les carnations sont noires. Toutefois, même si leur couleur ne provient pas à l’origine d’un choix délibéré, elle est devenue un élément important de leur identité, comme en témoignent les allusions au Cantique des cantiques mentionnées plus haut, et le fait que certaines aient été délibérément repeintes en noir sur leur totalité (comme la vierge Notre Dame de Moulins) lors de tentatives de restauration ou aient inspiré d'autres œuvres qui en ont repris la couleur. C'est à partir du XVIIe siècle que certains sculpteurs produisent des vierges d'emblée noires.

Les Vierges noires ont été assimilées aux déesses mères ou à Isis entre autres, divinités parfois représentées comme noires, par des historiens et archéologues comme Ashraf Sadek par exemple, professeur d'égyptologie à l'Université de Limoges, lui-même de confession orthodoxe copte et écrivant pour la revue Le Monde Copte, s'appuyant non seulement sur la religion comparée mais aussi sur une étude iconographique poussée, établissant une filiation entre le christianisme et les religions antiques pratiquées par exemple en Egypte avec les premiers coptes recyclant les poncifs artistiques pharaoniques [6]. D'autres chercheurs comme Sophie Cassagnes-Brouquet adoptent un point de vue allant dans le sens de certains apologistes chrétiens niant toute filiation aux religions du passé et ne voient qu'une origine strictement paléochrétienne dans l'ensemble du culte et de l'iconographie associés aux vierges noires, se référant également aux coptes et aux chrétiens éthiopiens, mais comme source originale[7].

Quelques Vierges noires romanes célèbres

Vierge noire de la cathédrale de Chartres

La Vierge noire de la cathédrale de Chartres est la Vierge-de-sous-Terre, dans la crypte, détruite en 1793. La piété attribue alors à une autre Vierge, du XVIe siècle, appelée Notre-Dame-du-Pilier, ses caractéristiques, et en particulier la couleur noire des carnations, qui lui est attribuée lors d'une restauration au XIXe siècle. Une nouvelle restauration au début du XXIe siècle rend à Notre-Dame-du-Pilier sa polychromie originelle.

Vierge noire de Notre-Dame du Puy-en-Velay

Cathédrale du Puy-en-Velay.

La Vierge noire de Notre-Dame du Puy-en-Velay mesurait environ 72 cm, taillée probablement dans du cèdre et recouverte d’une toile marouflée.

Brûlée à la Révolution, le 8 juin 1794, ses membres ne sont pas apparents et elle affecte la figure d’un triangle, par sa robe qui la ceint au col et s’évase sans un pli jusqu’au pied. L’étoffe en est décorée de ceps de vigne et d’épis de blé — allégories du pain et du vin eucharistiques —, et laisse passer, au niveau de l’ombilic, la tête de l’Enfant, aussi somptueusement couronnée que celle de sa mère[8].

La statue actuelle est une copie exposée sur le maître-autel dans la cathédrale romane du Puy-en-Velay. Elle est portée en procession le 15 août, fête de l'Assomption qui, chaque année, rassemble des milliers de personnes.

Vierge noire de Rocamadour

But d’un pèlerinage fameux, déjà fréquenté en l’an 1166, la Vierge noire de Rocamadour est une madone miraculeuse dont la tradition fait remonter l’origine au juif Zachée, chef des publicains de Jéricho, et qui domine l’autel de la chapelle de la Vierge construite en 1479.

C’est une statuette de bois, noircie par le temps, enveloppée dans une robe de lamelles d’argent qui en consolide les débris vermoulus. D'après Fulcanelli, « la célébrité de Rocamadour remonte au légendaire ermite, saint Amadour ou Amateur, lequel sculpta en bois une statuette de la Vierge à laquelle de nombreux miracles furent attribués. On raconte qu’Amateur était le pseudonyme du publicain Zachée, converti par Jésus-Christ ; venu en Gaule, il aurait propagé le culte de la Vierge. Celui-ci est fort ancien à Rocamadour ; cependant, la grande vogue du pèlerinage ne date que du XIIe siècle. »[8]

En novembre 2015, la cellule patrimoine du département du Lot a confié l'étude de cette statuette à Dominique Faunières, pour obtenir une meilleure connaissance de son état en vue d'une éventuelle restauration. L’œuvre a été scannée au Centre hospitalier Jean Rougier de Cahors par le radiologue Xavier Durbise. L'analyse des résultats a montré que la statue est composée d'une seule pièce de noyer, sans relique cachée à l'intérieur, avec une robe de métal et un collier d'argent. Sa structure est en relativement bon état malgré des décollements et des trous sur le visage et le buste. La statuette de l'enfant est fixée sur son genou droit par de grandes chevilles de bois. Les consolidations réalisées en 1949 à l'aide de plâtre et d'agrafes apparaissent clairement. Un prélèvement de bois a été effectué au printemps 2016 pour une datation par le carbone 14. Dans le cadre de cette étude, les variations de température et d'humidité de la chapelle qui abrite cette Vierge sont analysées pendant un an[9],[10].

Cette Vierge noire est réputée pour avoir une intercession efficace. Dans le livre d'or de la chapelle, on peut lire des témoignages d'intercession (ou pris comme tels) comme « Sainte Vierge, je suis venu vous prier trois fois pour avoir un enfant. Je viens d'accoucher de triplés. Merci ».

Notre-Dame de Vassivière à Besse-et-Saint-Anastaise

Située dans le Puy-de-Dôme, cette statue est portée en procession le jusqu'au sanctuaire de Vassivière (Notre-Dame de Vassivière à Besse-et-Saint-Anastaise), un édifice du XVIe siècle situé à 7 kilomètres du village. Elle y passe l'été et redescend le premier dimanche de septembre qui suit la Saint Mathieu ; ce retour s'appelle La dévalade [11]

Vierge noire à Paris

Camille Flammarion[12] parle d’une statue analogue qu’il vit dans les caves de l’Observatoire, le , deux siècles après la première observation thermométrique qui y fut faite en 1671.

« Le colossal édifice de Louis XIV, écrit-il, qui élève la balustrade de sa terrasse à vingt-huit mètres au-dessus du sol, descend au-dessous en des fondations qui ont la même profondeur : vingt-huit mètres. À l’angle de l’une des galeries souterraines, on remarque une statuette de la Vierge, placée là cette même année 1671, et que des vers gravés à ses pieds invoquent sous le nom de Nostre-Dame de dessous terre. »

Cette Vierge parisienne peu connue paraît être une réplique de celle de Chartres, la benoiste Dame souterraine[8]. Plus tard, Eugène Canseliet confirmera cette observation[13].

En 1705, l’urbaniste français De Lamare dressa le plan de la ville de Paris et y mentionna des temples d’Isis en lieu et place de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés et de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Ce fait fut encore confirmé par le père Jean du Breul qui, dans son ouvrage Théâtres des antiquités de Paris publié en 1639, dit ceci :

« Au lieu où le roi Childebert fit construire à l’église de Saint-Vincent, à présent dite de Saint-Germain-des-Prés et à laquelle il donna son fief d’Issy, la commune opinion est qu’il y avait un temple d’Isis, femme d’Osiris[14]. »

Europe

Allemagne

Autriche

Belgique

Procession de la Vierge d'Outremeuse à l'Assomption (Liège).

Croatie

Espagne

Notre-Dame de Argeme, Coria.
Notre-Dame de Candelaria, patronne des îles Canaries, basilique de la Candelaria, Tenerife.

France

Notre-Dame de Liesse à la basilique de Saint-Quentin dans l'Aisne.
Vierge noire de la cathédrale de Mende.
La Vierge noire de Saint-Jean-Cap-Ferrat.
Vierge noire de Toulouse,
basilique de la Daurade.
  • A Thuret (Puy de Dôme)
  • À Trelly (Manche).
  • À La Tronche (Isère), Vierge noire.
  • À Vaison-la-Romaine (Vaucluse), sur la colline.
  • À Verdelais (Gironde), la Vierge noire de la Basilique Notre-Dame de Verdelais, objet de pèlerinage.
  • À Vézelay (Yonne).
  • À Vichy (Allier), dans l'église Saint-Blaise. La Vierge noire est vénérée « de toute ancienneté », ainsi que le disait Antoine Gravier, prêtre communaliste au XVIIe siècle. Les archéologues datent cette sculpture du XIVe siècle, et comme l’église Saint-Blaise, où elle est déposée, ne fut construite, dans ses parties les plus anciennes, qu’au XVe siècle, l’abbé Allot, qui nous signale cette statue, pense qu’elle figurait autrefois dans la chapelle Saint-Nicolas, fondée en 1372 par Guillaume de Hames[8].
Bretagne
  • La paroisse de Rocamadour-en-Quercy a offert une Vierge noire en bois, Notre-Dame de Rocamadour, à la paroisse de Camaret, lors de la fête patronale de 2012 dédiée à la sainte.
  • À Comblessac, Ille-et-Vilaine. Tableau, Vierge noire à l'Enfant ou Vierge de Częstochowa. Maure-de-Bretagne[28], tableau mis en place en 1940 réalisé par un sous-officier polonais en formation à Coëtquidan.
  • Vierge noire, Pont-an-ilis, Bodilis. Datation XVIe siècle. Ainsi dénommée en raison de la couleur presque noire de la kersantite, la statue orne une fontaine, près de Pont-an-Ilis, le pont de l'église. Elle a les mains jointes, comme les vierges de l'Annonciation, ce qui pourrait suggérer qu'elle provient d'un groupe plus important.
  • Église du Folgoët (Finistère). Statue miraculeuse de Notre-Dame, dite « Vierge noire ».
  • Église de Guéodet, nommée encore Notre-Dame-de-la-Cité, à Quimper.
  • Guingamp dans les Côtes-d'Armor, qui serait une copie, elle-même restaurée après la Révolution, d'une Vierge noire du XIIe siècle.
  • Josselin (Morbihan). Église Notre-Dame du Roncier. En 1793, la statue originelle en bois a été brûlée. Celle que les fidèles vénèrent actuellement a été couronnée en 1868 et l’église de Josselin, érigée en basilique mineure.
  • Vierge noire, église Saint-André, Lanhélin. Datation XVIIe siècle. Cette Vierge noire présente la particularité de porter l'Enfant Jésus sur le bras droit. Elle aurait été retrouvée au milieu des ruines de la chapelle du manoir du Boishue, bénite en 1742 et démolie à la Révolution. L'œuvre, rongée par les vers, est restaurée en 1968.
  • Morlaix. Vierge noire dans un carrefour giratoire. Donne son nom à un quartier de la ville.
  • L'église de Notre-Dame de la Tronchaye, à Rochefort-en-Terre (Morbihan, diocèse de Vannes), abrite une statuette de Marie du XVe siècle, vêtue d'un long manteau jaune. Contrairement aux apparences, ce n'est pas une Vierge noire mais une œuvre en bois rendue imputrescible par un traitement spécial, d'où sa teinte foncée.

Hongrie

Irlande

Italie

Vierge noire de San Luca.

Lituanie

Luxembourg

Malte

  • Hamrun, qui serait une copie ancienne (antérieure à 1630) de la Vierge d’Atocha.

Pologne

Portugal

République tchèque

  • Maison cubiste de la rue Celetná, « À la Mère de Dieu noire » (dům "U Černé Matky Boží") à Prague.
  • Colline sacrée de Příbram.
  • Madona de Březnice,National gallerie à Prague.

Russie

Suède

Vierge noire, Suède.
  • Église du XIIe siècle dans le village Skée : potentiellement la seule statue datant d'avant la construction de l’église, il s'agit d'une Vierge noire avec un enfant décapité dans ses bras. Le visage de Marie est marqué par des cicatrices.

Suisse

Turquie

Afrique

Pour le chercheur congolais Didier Moe Loembe, la Vierge noire dont nombreux historiens ont falsifié le récit, n'est que la continuité sous d'autres formes de l'histoire de la Déesse Mère Isis (vers 10500 av. J.-C.), cette déesse noire qu'aucun mortel ne pouvait soulever et qui fut la femme du prophète Ousiré (Osiris).[réf. nécessaire]

Afrique du Sud

Algérie

La Vierge noire est située à Sant-Cruz d'Oran

Sénégal

Amériques

Bolivie

Brésil

Chili

Costa Rica

  • Basilique Nuestra Señora de los Ángeles (Notre-Dame des Anges) à Cartago.

Cuba

États-Unis

Haïti

  • Notre-Dame du Perpétuel Secours en Haïti

Mexique

Trinité-et-Tobago

Asie

Japon

  • Tsuruoka Tenshudo Catholic Church expose dans son église une statue de la Vierge Marie noire tenant Jésus -noir lui aussi, offerte par la France à l'époque Meiji, dans la ville de Tsuruoka dans le département de Yamagata.

Liban

  • Notre-Dame de Chiyah exposee dans les jardins de la chapelle Saint Antoine de Padoue a Chiyah.

Philippines

  • Nuestra Señora de la Paz y Buen Viaje de Antipolo à Antipolo (Province de Rizal).
  • Nuestra Señora de Guia, Ermita, à Manille.
  • Nuestra Señora de Guadalupe (Caceres) de Loboc, Bohol
  • Nuestra Señora de la Regla of Lapu-Lapu (Opon), Cebu

Théories alternatives : reflet de cultes païens ; approche alchimique

Pour Stephen Benko[29] (rejoint par Alexandre Hislop[30]),

« la Vierge noire est l'ancienne déesse-terre convertie au christianisme. Benko commence par montrer que de nombreuses représentations de déesses sont noires, parmi lesquelles Artemis d'Éphèse, Isis, Cérès et d'autres. Cérès, déesse romaine de la fertilité agricole, est particulièrement importante. Son équivalent grec est Déméter, Déesse-Terre. Le sol le plus fertile est noir, et plus il est noir, plus il convient pour l'agriculture. »

Dans les années 1950, avec l’avancée des études en matière de religions comparées, certains chercheurs ont envisagé que leur teinte sombre a été voulu dès l’origine. Des rapprochements ont été faits avec les déesses des anciens cultes polythéistes d'Europe occidentale que la romanisation, suivie de la christianisation, avaient fait disparaître, en particulier les déesses-mères, confortés par la présence de sanctuaires dédiés à la mère de Dieu sur les lieux d’anciens cultes païens (Cybèle, Diane, etc.). Benko et Chiavola Birnbaum ont remarqué la ressemblance entre la Vierge à l’enfant et les représentations d’Isis portant Horus datant de l’Égypte ptolémaïque. Des psychologues comme Gustafson et Begg, s’appuyant sur C. Jung, pensent y avoir reconnu un archétype maternel, ou bien un aspect chtonien et psychopompe. Laissant de côté la question des origines premières de la couleur, Monique Scheer a mis en évidence les différents symbolismes liés à la Vierge noire selon les lieux et les époques.

D'après Fulcanelli :

« Jadis, les chambres souterraines des temples servaient de demeure aux statues d’Isis, lesquelles devinrent, lors de l’introduction du christianisme en Gaule, ces Vierges noires que le peuple, de nos jours, entoure d’une vénération toute particulière. Leur symbolisme est d’ailleurs identique ; les unes et les autres montrent, sur leur soubassement, la fameuse inscription : Virgini parituræ ; à la Vierge qui doit enfanter. Ch. Bigarne[31], nous parle de plusieurs statues d’Isis désignées sous le même vocable. “Déjà, […] le savant Elias Schadius avait signalé, dans son livre De dictis Germanicis, une inscription analogue : Isidi, seu Virgini ex qua filius proditurus est (À Isis, ou à la Vierge de qui le Fils prendra naissance). Ces icônes n’auraient donc point le sens chrétien qu’on leur prête, du moins exotériquement. Isis, avant la conception, c’est, dit Bigarne, dans la théogonie astronomique, l’attribut de la Vierge que plusieurs monuments, bien antérieurs au christianisme, désignent sous le nom de Virgo paritura, c'est-à-dire la terre avant sa fécondation, et que les rayons du soleil vont bientôt animer. C’est aussi la mère des dieux, comme l’atteste une pierre de Die : Matri Deum Magnæ ideæ.” […] Un détail encore, utile pour l’hermétiste. Dans le cérémonial prescrit pour les processions de Vierges noires, on ne brûlait que des cierges de couleur verte.

Quant aux statuettes d’Isis — nous parlons de celles qui échappèrent à la christianisation —, elles sont plus rares encore que les Vierges noires. Peut-être conviendrait-il d’en rechercher la cause dans la haute antiquité de ces icônes. Witkowski[32] en signale une que logeait la cathédrale Saint-Étienne de Metz. “Cette figure en pierre d’Isis, écrit l’auteur, mesurant 0 m. 43 de haut sur 0 m. 29 de large, provenait du vieux cloître. La saillie de ce haut relief était de 0 m. 18 ; il représentait un buste nu de femme, mais si maigre que, pour nous servir d’une expression imagée de l’abbé Brantôme, 'elle ne pouvoit rien monstrer que le bastiment' ; sa tête était couverte d’un voile. Deux mamelles sèches pendaient à sa poitrine comme celles des Dianes d’Ephèse. La peau était colorée en rouge, et la draperie qui contournait la taille en noir… Une statue analogue existait à Saint-Germain-des-Prés et à Saint-Étienne de Lyon”[8]. »

Notes et références

  1. Carbonate de plomb contenu dans la céruse, coloris blanc qui est à la base de la composition utilisée dans la peinture médiévale pour figurer les carnations.
  2. Processus de dégradation des pigments à base de plomb.
  3. Pôle scientifique « peinture murales », p. 76.
  4. Hélène Leroy, Francis Debaisieux, Yves Morvan, Vierges romanes-Portraits croisés, Éditions Debaisieux, 2009, p. 34.
  5. « La Vierge noire de Montserrat, mythe d’origine, mythe catalan », Odile Impériali, Cahiers de la Méditerranée.
  6. Ashraf Sadek, extrait d'une étude publiée par la revue Connaissance des Religions dans son hors-série sur l'Icône
  7. Sophie Cassagnes-Brouquet, Jean-Pierre Cassagnes, Vierges noires : regard et fascination, Editions du Rouergue, , p. 170
  8. a b c d e et f Fulcanelli, Le Mystère des cathédrales, p.22-23.
  9. Conseil général du Lot, « Quand la Vierge noire de Rocamadour passe au scanner », Contact lotois, no 99,‎ , p. 28-29 (ISSN 1147-9000, lire en ligne [PDF]).
  10. Jean-Luc Garcia, « Les blouses blanches au chevet de la Vierge noire », sur https://www.ladepeche.fr, La Dépêche du Midi, (consulté le ).
  11. Auvergne dans la cllection de Michelin Guide de tourisme, Clermont-Ferrand, 1991, p. 58.
  12. Camille Flammarion, L’Atmosphère, Paris, Hachette, 1888, p. 362.
  13. « Une Vierge noire sous l'Observatoire de Paris » sur Rhedae Magazine.
  14. « Paris a-t-elle un lien historique avec la déesse Isis ? » sur africamaat.com.
  15. Copie en pierre d'une Vierge noire sur campus.udayton.edu.
  16. Voir sur avignon-etats-lieux.blogspot.fr et 1dedou84.centerblog.net
  17. Photo d'Avignon : une Vierge noire, sans doute pas la plus ancienne.
  18. E. Saillens, Nos vierges noires, leurs origines. Les Éditions Universelles, Paris, 1945.
  19. Voir sur ardeche-sources-loire.com.
  20. La Vierge noire sur notredame-bourgenbresse.fr.
  21. Vierge noire de Dijon sur notre-dame-dijon.net.
  22. Voir sur societe-perillos.com.
  23. Voir sur lyon-photos.com.
  24. Voir sur grandmont.pagespro-orange.fr.
  25. Voir sur patrimoine-religieux.fr.
  26. Voir sur lieuxsacres.canalblog.com.
  27. Voir sur notredameday.fr.
  28. Peinture à l'huile. Dimension(s) : h = 120 ; la = 78. Inscription : "K+R+O+L+O+W+O - KORONY+POLSKIEJ+MODL+SIE+ZA+NAMI". 2e quart XXe siècle. Auteur de l’œuvre : Mikula Stanislas (peintre).
  29. Michael P. Duricy, Black Madonnas, Marian Library, Univ. of Dayton.
  30. Alexandre Hislop, Les Deux Babylones, Paris, Fischbacher, 1972 (1re éd. 1858), p. 65.
  31. Ch. Bigarne, Considérations sur le culte d’Isis chez les Eduens. Beaune, 1862.
  32. G. J. Witkowski, L’Art profane à l’Église. France. Paris, Schemit, 1908, p. 26.

Voir aussi

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Bibliographie

  • Jean Hani, La Vierge noire et le mystère marial, Maisnie Tredaniel, 1995 (ISBN 2857077238)
  • Sophie Cassagnes-Brouquet, Jean-Pierre Cassagnes, Vierges noires, Editions du Rouergue, 2000 (ISBN 2841562239)
  • Jacques de Bascher, La Vierge noire de Paris, Tequi, 1980 (ISBN 2852444186)
  • Sylvie Vilatte, La « déuote Image noire de Nostre-Dame » du Puy-en-Velay: histoire du reliquaire roman et de son noircissement. In : Revue belge de philologie et d'histoire, tome 74 fasc. 3-4, 1996. Histoire medievale, moderne et contemporaine - Middeleeuwse, moderne en hedendaagse geschiedenis. pp. 727-760, lire en ligne
  • Charles Chassé, « Le culte breton de Sainte-Anne et la vénération des Vierges noires ». In : Annales de Bretagne, tome 52, numéro 1, 1945. pp. 60-67, lire en ligne

Articles connexes