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La tragi-comédie est une forme théâtrale caractérisée par une action romanesque, des personnages de haute extraction, un dénouement heureux et un refus des règles de la tragédie[1]. Le terme est apparu en France chez le dramaturge Robert Garnier au XVIe siècle, orthographié tragecomedie. Ce genre a connu un très grand succès en France dans les années 1630-1640. Il est assez difficile de définir les limites de la tragi-comédie à cette époque parce que les auteurs revendiquaient le refus de toute règle. On pouvait alors voir dans la tragi-comédie une sorte de tragédie à fin heureuse parce que la tragédie n'était définie que par son personnel noble et mythologique. Dans les années 1640, les partisans d'un théâtre beaucoup plus normé prennent de plus en plus d'importance et la tragédie répondant aux règles classiques prend le dessus sur la tragi-comédie.

Le cas du Le Cid de Corneille est un exemple intéressant à cet égard car il a été publié en 1637 en tant que tragi-comédie et requalifié en tragédie dès 1648 alors que Corneille n'avait pas encore effectué de modification majeure de la pièce[2]. On peut donc considérer que ce n'est pas la pièce mais la perception qu'on avait des différents genres théâtraux qui a évolué entre ces deux dates.[3] En effet, l'intrigue du Cid comporte de nombreux éléments caractéristiques d'une tragi-comédie : il raconte une histoire d'amour dans laquelle un obstacle empêche à un moment donné la réunion des deux amants. À la fin de la pièce, cet obstacle sera levé et le dénouement sera heureux et nuptial ce qui est à l'époque une caractéristique des comédies et des tragi-comédies. Par ailleurs, on a beaucoup reproché à Corneille l'invraisemblance de la fin et un respect très discutable des trois unités. De fait, même s'il est déjà influencé par les règles qui commencent à s'imposer à la fin des années 1630, Corneille conserve dans cette pièce une liberté de composition héritée de la tragi-comédie et que l'on ne trouvera plus dans ses tragédies ultérieures. Pour autant, la pièce annonce la dramaturgie classique parce que les conflits omniprésents qui la constituent ne se manifestent pas à travers des combats spectaculaires sur scène mais à travers le travail du langage. Ainsi le duel entre Rodrigue et Don Gomes s'achève très vite alors que les célebrissimes stances du Cid rendent compte longuement du conflit intérieur qui travaille Rodrigue. Ce refus du spectaculaire au profit d'un travail sur le discours et les sentiments des personnages sera caractéristique de l'esthétique classique et explique que le Cid en soit resté une exemple majeur alors qu'il est encore très influencé par le genre de la tragi-comédie qui s'oppose aux caractéristiques de l'écriture classique.

Le mélange des genres fut peu représenté par la suite dans le théâtre français, tout au plus trouve-t-on des pièces ou les genres s'alternent sans se mêler. Victor Hugo tente pourtant d'imposer avec son théâtre romantique une écriture entre sublime et grotesque, mais il faudra attendre le XXe siècle et le théâtre de l'absurde pour que le public accepte de concevoir que le rire ne nuit pas obligatoirement à la profondeur dramatique.


Liens utiles[modifier | modifier le code]

  • Compte-rendu du livre d'Hélène Saby La tragi-comédie de Corneille à Quinault sur le site fabula.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. L'Histoire de la littérature française de Brunel chez Bordas la définit comme un "drame romanesque et mouvementé insoucieux des règles et qui finit bien".
  2. La pièce sera à nouveau publiée en tant que tragédie en 1660 avec des modifications importantes.
  3. On reprend ici des éléments de la présentation du Cid par Georges Forestier dans l'édition du Cid parue à la société des textes français modernes en 2001.

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