Utilisateur:Huesca/Brouillon4

Une page de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

L’ottomanisme est une idéologie développée au XIXe siècle, qui visait à rassembler dans une même « nation ottomane » l'ensemble des nationalités que réunissait alors l’Empire ottoman. Dans le cadre des réformes engagées pour rendre l'empire ottoman plus apte à répondre aux défis du temps (notamment l'émergence des grandes puissances d'Europe occidentale, les empiètements russes sur le territoire ottoman et le développement des nationalismes au sein de l'empire), il constitua l'idéologie officielle de l'État jusqu'au début du XXe siècle. Mais confronté aux difficultés inhérentes à tout empire multi-ethnique et multi-confessionel pour créer un sentiment national unique d'une part, au caractère contradictoire de cette volonté avec d'autres aspects des politiques menées d'autre part, l'ottomanisme fut peu à peu marginalisé par d'autres idéologies comme le panislamisme et le turquisme et finalement abandonné dans le cadre de l'éclatement de l'empire ottoman consécutif à sa défaite lors de la Première Guerre mondiale.


Une volonté de créer une « nation ottomane »[modifier | modifier le code]

À la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle, l’Empire ottoman était caractérisé par une forte diversité religieuse et culturelle. Le Sultan garantissait la protection des millets, même si les non-musulmans étaient exclus des charges militaires et de l’accès aux emplois publics.

Cependant, confrontées à l'affaiblissement de leur puissance et aux remises en cause de l'intégrité de l'empire sous la pression conjuguée des puissances européennes à l'extérieur, des premiers mouvements nationalistes serbes et grecs en son sein, les autorités d’Istanbul adoptèrent une politique de réformes inspirées pour une part du modèle occidental. Dans ce cadre, elles souhaitaient aligner l'empire sur les conceptions européennes de la nation, avec l'objectif de constituer un État peuplé de citoyens égaux et dotés d’un fort sentiment patriotique. De ce point de vue, l'article 8 de la Constitution de 1876 constitua bien l'aboutissement de l'ottomanisme : « Tous les individus sujets de l'Empire ottoman, quelle que soit leur religion ou confession, sont appelés, sans exceptions, des Ottomans ». On perçoit ici l'influence d'une conception française de la Nation. Ainsi, l'historien Johann Strauss souligne que « les jours fastes de l'ottomanisme coïncident avec les deux périodes constitionnelles de 1876 et de 1908 et leur slogan "Liberté, égalité, fraternité" »[1].

Le difficile passage de la théorie à la pratique dans le cadre d'un empire multi-confessionel[modifier | modifier le code]

Cette volonté de susciter le développement d'un sentiment national ottoman se heurta à de nombreuses difficultés, liées en premier lieu au caractère multi-confessionel de l'empire ottoman. En effet, la prééminence dont la religion dominante de l'empire, l'islam, avait toujours joui en son sein rendait délicate l'acceptation d'une égalité des droits, dans le cadre d'une nation ottomane unifiée, entre musulmans, chrétiens, juifs, etc[1]. Les minorités religieuses non musulmanes exprimaient d'ailleurs elles-aussi de fortes réticences dans la mesure où cette uniformité de la nation entraînerait nécessairement l'abandon de la relative autonomie dont ces communautés jouissaient au sein de l'empire et des privilèges afférents qu'elles avaient obtenus et vus confirmés dans le cadre du « Firman des réformes » (Hatt-i Hümayun) de 1856[1]. Enfin, les grandes puissances européennes elles-mêmes n'étaient pas favorables à un processus qui, à terme, rendrait plus difficile leur interventionnisme dans les affaires intérieures de l'empire ottoman sous prétexte de défendre les droits des minorités musulmanes (comme les druzes pour le Royaume-Uni) ou non musulmanes (comme les maronites pour la France).

Par ailleurs, contrairement au modèle canonique en la matière, il était difficile de construire la nation autour d'une langue commune reconnue comme un patrimoine commun. En effet, le turc ne constituait pas une « langue nationale » dans la mesure où, s'il constituait l'idiome commun à la classe dirigeante, il n'était dominant qu'en Anatolie, l'arabe étant largement majoritaire dans le reste de l'espace asiatique de l'empire. En outre, les élites non musulmanes, tout en étant également turcophones, « privilégiaient leur propre langue « nationale » (grec, arménien, etc.) ou le français »[1].

Pour favoriser le développement d'une identité nationale ottomane, les ottomanistes cherchèrent à développer un enseignement public commun aux différentes nationalités composant l'empire et tentèrent d'étendre aux non-musulmans l'obligation du service militaire, mais dans les deux cas, cette politique fut trop partielle pour être efficace[1].

Les tentatives d’égalisation des individus[modifier | modifier le code]

En 1839, le rescrit impérial de Gülhâne proclame l’égalité des individus devant les biens et la protection des droits. La taxe imposée aux non-musulmans, la Djizia, est supprimée à la suite de l’édit de Hatt-i Hümâyûn en 1856. L’égalité fiscale est accompagnée par une laïcisation de la justice : les tribunaux seront désormais mixtes, et seront compétents pour trancher les litiges des musulmans autant que des non-musulmans.

Les difficultés rencontrées[modifier | modifier le code]

Afin de ne pas perdre la fidélité des millets, Istanbul a conservé leurs avantages : ils exercent librement leur religion, organisent leur système institutionnel, leurs écoles, leurs collecte d’impôts. La conservation de système contrevient aux principes d’un État égalitaire, et ne fera que développer, en marge du processus d’ottomanisation, les particularismes et les désirs d’indépendance.

Enfin, les Turcs eux-mêmes refusent l’occidentalisation et la réformation de leur société.

La patrie ottomane[modifier | modifier le code]

Le rôle de l’école[modifier | modifier le code]

Conformément au modèle français, l’Empire ottoman veut scolariser ses citoyens. Dès 1838 est fondé une première école de médecine. En 1839, les premières écoles secondaires voient le jour, avant d’être généralisées à tous les villages de plus de 500 âmes en 1869, sans être obligatoire. L’idée d’une méritocratie étendue à tout l’Empire se concrétise.

La contre-ottomanisation[modifier | modifier le code]

Une fois de plus, au lieu d’harmoniser les rapports entre les communautés, l’ottomanisation de la société développe les clivages religieux. Les millets se recentrent sur eux-mêmes et forgent leur propre identité nationale et culturelle. La patrie ottomane voit ainsi difficilement le jour.

Conclusion[modifier | modifier le code]

L’ottomanisme est un échec pour l’Empire. Il ne fera que développer une schizophrénie grandissante à l’intérieur de la société, et fera perdre à Istanbul son aura de grande tolérance dont elle jouissait, et ce, depuis le Moyen Âge.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d et e Johann Strauss, « Ottomanisme », in François Georgeon, Nicolas Vatin, Gilles Veinstein, Dictionnaire de l'empire ottoman, Fayard, 2015, p. 328

{{Portail|Empire ottoman}} [[Catégorie:Histoire de l'Empire ottoman]]