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Trêve de Noël

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Trêve de Noël
Gravure figurant un épisode des trêves de Noël parue dans le The Illustrated London News en 1915.
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L'expression trêve de Noël désigne les trêves et cessez-le-feu spontanés ayant eu lieu pendant Noël et le réveillon de Noël pendant la Première Guerre mondiale.

Ces trêves concernent des troupes allemandes, britanniques, belges et françaises dans les tranchées, en particulier celles entre les troupes britanniques et allemandes stationnées le long du front de l'Ouest en 1914, et dans une moindre mesure en 1915.

Ces trêves furent cependant limitées.

Début du conflit

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La Première Guerre mondiale oppose la Triple-Entente aux Empires centraux[1]. Le , le Royaume-Uni déclare la guerre à l'Allemagne à la suite de l'ultimatum contre la Belgique, pays dont elle garantit la neutralité[2]. Les troupes allemandes avancent jusqu'à 70 km de Paris en passant par le territoire belge et l'ouest de la France. Du au , lors de la première bataille de la Marne, les Français et les Britanniques réussissent à forcer une retraite allemande en exploitant une lacune entre la Ire et la IIe armée, mettant fin à l'avance allemande en France[3]. L'armée allemande se retire au nord de la rivière Aisne et se fortifie, instituant les débuts d'un front statique à l'Ouest qui durera trois ans. À la suite de cet échec, les forces en opposition tenteront de se déborder dans une course vers la mer, et étendront rapidement des réseaux de tranchées de la mer du Nord à la frontière suisse[4].

Approche de Noël

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Dans toute l’Europe, des campagnes de collecte sont organisées pour distribuer des cadeaux de Noël aux soldats du front[5].

Les soldats britanniques reçurent une boîte estampée à l’effigie de la princesse Mary contenant du chocolat, du tabac et un message du couple royal. Les forces allemandes reçurent de Guillaume II des pipes (pour les soldats) et des paquets de cigarettes (pour les officiers). Quelques jours avant Noël, Raymond Poincaré visita l’entrepôt parisien où les cadeaux pour les soldats français étaient en train d’être amassés[5]. Les soldats allemands reçoivent aussi des sapins fournis par l'armée[6].

Le , le pape Benoît XV demande aux belligérants de consentir à une trêve. Les gouvernements allemands, belges et britanniques répondent en premiers temps favorablement. Les gouvernements des pays à majorité orthodoxes refusent et le gouvernement français ne veut pas interférer avec les offensives en cours[7].

Plusieurs eurent lieu le long du front de l’Ouest, en particulier celles entre forces britanniques et allemandes[5].

Trêves entre Britanniques et Allemands

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Article sur les trêves de Noël publié dans le The Thetford and Watton Times le 13 février 1915.

Des soldats allemands et britanniques entonnèrent des chants de Noël repris par le camp d'en face. Plus tard , les hommes passèrent du temps ensemble en dehors des tranchées comme jouer au football ou au cartes par exemple, ils échangèrent également des salutations ainsi que des cadeaux, comme du rhum ou des cigares[5].

Trêves entre Français et Allemands

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Une croix, au Saint-Yvon (Comines-Warneton) (à gauche) en Belgique en 1999, pour célébrer le site de la trêve de Noël pendant la Première Guerre mondiale en 1914.

Il y eut également des trêves dans les batailles opposant des soldats français et allemands. Cependant, celles-ci sont bien moins connues, probablement en raison du grand nombre de documents censurés par les autorités militaires à cause de leur contenu (descriptions d'opérations militaires susceptibles d'arriver aux mains de l'ennemi, description péjorative en conflit avec la désinformation faite par les journaux français de l'époque, etc.). Aujourd'hui, de nombreux témoignages de soldats français ayant fraternisé avec des soldats allemands sont disponibles dans des archives historiques[8],[9]. Un épisode de cessez-le-feu est détaillé par Frédéric Branche, soldat du 99e régiment d'infanterie positionné près de Fontaine-lès-Cappy :

J'ai écrit hier ma lettre du nouvel an pour maman. Cela m'a donné le cafard pour une partie de la journée. Pour tous, les fêtes de fin d'année auront de la tristesse : amis et ennemis, tous souffrent de la séparation avec la famille et même il semble que les hommes aient voulu faire trêve à leur tuerie, comme semble le prouver le fait suivant[10].

Près de la Meuse, une compagnie allemande a demandée aux français de faire feu à blanc, sur leur tranchée,  afin de repousser l’inspection journalière[11].

Peter Knight et Stefan Langheinrich, descendants de vétérans de la Grande Guerre, lors du dévoilement du mémorial de la trêve de 1915, en 2008.

Noëls suivants

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Le commandement allié notamment a pris toutes les mesures pour éviter un rapprochement avec l’adversaire. Par exemple, les troupes sont fréquemment déplacées pour éviter la moindre accointance avec les soldats d’en face[12].

Historiographie

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Les témoignages sur le camp des premiers soldats ayant organisé des trêves diffèrent[12].

Fréquence des fraternisations

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Ces trêves restent des cas isolés pendant le conflit[12]. Par exemple, aucune unité canadienne n'a participé à des trêves[13]. Selon Yves Le Maner : « les trêves de Noël 1914 sont une exception qui confirme la règle, celle d'une violence guerrière débridée. »[14].

Matchs de football

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Des témoignages rapportés et indirects firent leur apparition dans les journaux et dans les courriers, mais les témoignages directs, d’une personne ayant assisté à un match ou bien en ayant directement disputé un, sont rares[5].

L’existence d’un match a pu être authentifiée grâce à deux lettres écrites par des soldats britanniques, le caporal Albert Wyatt et le sergent Frank Naden, qui y décrivent une partie à Wulvergem. Le récit d’Albert Wyatt fut publié dans un article du Thetford Times décrivant une « partie de ballon entre deux lignes de tir. »[5].

À l’aide de méthodes similaires, des historiens purent confirmer l’existence d’un autre match à Frelinghien[5].

Le match entre Britanniques et Allemands est immortalisé par une statue symbolique inaugurée par l’UEFA le à Ploegsteert[11]. En , pour célébrer le centenaire de la Première Guerre, une revanche est organisée à Aldershot[12].

Après la Première Guerre mondiale

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Les trêves de Noël sont peu documentées par les livres d’histoire, les commentaires des acteurs de l’époque et même les analyses des spécialistes. Cela s'explique par l’élan patriotique qui accompagne le souvenir de la guerre[12].

Dans les arts et la culture populaire

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  • Le clip de Pipes of Peace de Paul McCartney met en scène cette trêve.
  • La Trêve de Noël de la chanteuse Celeen'A (paroles/musique de Céline Schmink) évoque les cessez-le-feu de Noël lors de la Grande Guerre.
  • de Pierre Lachat évoque la nuit de Noël 1914.
  • Christmas Truce du groupe Sabaton traite de la trêve de Noël de 1914[15].
  • Smiling from Across de Dusk of Delusion parle de la trêve de Noël (2020)[16].

Filmographie

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Télévision

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Documentaires
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Références

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  1. (en) H.P. Willmott, World War I, New York, Dorling Kindersley, , 319 p. (ISBN 0-7894-9627-5)
  2. (en) « Daily Mirror Headlines : The Declaration of War », sur bbc.co.uk, (consulté le )
  3. (en) Annika Mombauer, « The Battle of the Marne : Myths and Reality of Germany's "Fateful Battle" », The Historian, vol. 68, no 4,‎ , p. 747–769 (DOI 10.1111/j.1540-6563.2006.00166.x)
  4. (en) William R. Griffiths, The Great War, Wayne, NJ, Avery Publishing Group, (ISBN 0895293129)
  5. a b c d e f et g @NatGeoFrance, « Trêve de Noël 1914 : ce qu'il s'est vraiment passé dans les tranchées », sur National Geographic, (consulté le )
  6. Le Maner 2014, p. 122.
  7. Le Maner 2014, p. 121.
  8. « Les Français à Verdun - 1916 », sur LesFrancaisAVerdun-1916.fr (consulté le )
  9. « Collectif de Recherche International et de Débat sur la guerre de 1914-1918 », sur crid1418.org (consulté le )
  10. « En 1914, la trêve de Noël dans les tranchées de la Somme, où les soldats français fraternisaient avec les Allemands », sur France 3 Hauts-de-France, (consulté le )
  11. a et b Maxime, « 25 décembre 1914 : Noël dans les Tranchées », sur Mémoire et Histoire, (consulté le )
  12. a b c d et e Noël 1914 : une trêve dans les tranchées | Historia
  13. Anciens Combattants Canada, « La trêve de Noël 1914 - Histoire - Noël au front - Se souvenir de ceux qui ont servi - Commémoration - Anciens Combattants Canada », sur www.veterans.gc.ca, (consulté le )
  14. Le Maner 2014, p. 123.
  15. « SABATON - Christmas Truce (Official Music Video) » (consulté le )
  16. « DUSK OF DELUSION - Smiling from across - Live @ L'Autre Canal » (consulté le )

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Articles connexes

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Bibliographie

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Liens externes

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