Titre de victoire

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Un titre de victoire est une qualité nobiliaire accordée par un monarque généralement pour commémorer la victoire d'un général sur un champ de bataille. Cette pratique a d'abord été utilisée dans la Rome antique, avant d'être remise au goût du jour sous le Premier Empire. Cette « mode » napoléonienne atteindra notamment le Royaume-Uni et la Russie.

Titres de victoire romains[modifier | modifier le code]

Dans la Rome antique, les titres de victoires sont assez fréquents. La pratique veut que le général victorieux adopte comme surnom le nom de l'ennemi vaincu. Ainsi, Publius Cornelius Scipio se fait-il appeler « l'Africain » (Africanus) à la suite de sa victoire sur Carthage. Les exemples ne manquent pas : Numidicus, Isauricus ou encore Germanicus. Les Romains cherchent ainsi à exprimer leur supériorité sur les autres peuples et à assoir leur renommée à travers la Méditerranée.

Généralement, ces titres de victoire, accessoires du nom, sont attribués par le Sénat, ce qui fait que sous la République, ils reflètent assez bien la réalité : le titulaire a véritablement obtenu une victoire contre un peuple ennemi de Rome. Mais avec l'instauration de l'Empire, c'est moins souvent le cas. Certains empereurs romains font une accumulation de titres de victoire partiellement fictifs. Les titres de victoires font l'objet d'une véritable récupération politique qui sert la gloire des empereurs. D'autres, voulant mettre l'accent sur une victoire en particulier ajoutent Maximus, comme par exemple Philippe l'Arabe, qui se fait appeler Germanicus Maximus.

Titres de victoire médiévaux[modifier | modifier le code]

Après la chute de Rome, la pratique des titres de victoire se poursuivit, même si la forme évolue légèrement. Charlemagne se fait ainsi appeler Dominator Saxonorum, c'est-à-dire « le maître des saxons », après avoir soumis par la force les derniers peuples païens de l'Empire. Sous Louis le Germanique et ses successeurs, la Saxe devait devenir l'un des quatre duchés de la Francie orientale.

Les empereurs byzantins, dépositaires de la culture romaine, reprennent à leur profit cette pratique. Basile II se fait appeler « le tueur de bulgares » (Bulgaroctone). Pareillement, Édouard Ier d'Angleterre se fait appeler « le Marteau des Écossais » (Hammer of the Scots) ou Alexandre de Novgorod, qui après la bataille de la Neva est surnommé « Alexandre Nevski », c'est-à-dire « de la Neva ».

Titres de victoire modernes[modifier | modifier le code]

Avec l'époque moderne, la pratique des titres de victoire rencontre celle des titres nobiliaires : au lieu de donner au vainqueur le nom de l'ennemi, les monarques européens préfèrent décerner un titre de noblesse du nom d'une bataille en particulier.

France[modifier | modifier le code]

Premier Empire[modifier | modifier le code]

Pour auréoler davantage son prestige militaire, Napoléon va accorder de nombreux des titres de victoires à ses généraux. La plupart reçoit le titre de duc de l'Empire, mais certains obtiennent le titre de prince de l'Empire et un est comte de l'Empire :

Monarchie de Juillet[modifier | modifier le code]

Louis-Philippe ne conféra qu'un seul titre de victoire :

Second Empire[modifier | modifier le code]

Bien que Napoléon III ne soit pas un stratège aussi brillant que son oncle, il essaie de renouer avec la gloire passée en conférant lui aussi des titres de victoire :

Suggestion durant la Grande Guerre[modifier | modifier le code]

A la suite de la bataille de la Marne de 1914, certains cercles proposèrent de donner au général Joseph Joffre le titre de « duc de la Marne »[1],[2],[3]. Le Conseil d’État, qui reçut cette proposition, préféra l'autoriser à changer son nom en « Joffre de la Marne », possibilité qu'il n'utilisa pas[4].

Royaume-Uni[modifier | modifier le code]

Beaucoup de titres de victoire ont été créés dans les pairies d'Angleterre, de Grande-Bretagne ou du Royaume-Uni. Par exemple, Louis Mountbatten devient le 1er vicomte Mountbatten de Birmanie en 1946 pour son rôle lors de la reconquête de la Birmanie. Un autre exemple très connu est celui du maréchal Bernard Montgomery de la seconde guerre mondiale, 1er vicomte Montgomery d'Alamein, notamment vainqueur de la seconde bataille d'El Alamein, pendant la guerre du Désert qui l'a opposé aux troupes du général allemand Erwin Rommel.

Russie[modifier | modifier le code]

En Russie impériale, de nombreux titres de victoire sont décernés, en particulier pendant le règne de la Grande Catherine. Parmi les plus connus, il y a :

Autriche et Hongrie[modifier | modifier le code]

Les Habsbourg ont décerné très peu de titres de victoire, mais la pratique se développe lors de la Première Guerre mondiale, il y a notamment :

  • 1789 — Paul Kray, baron de Craiova et de Topolya pour sa prise de Craiova ;
  • 1915 — Alexandre Szurmay, baron Szurmay de Uzsok pour son rôle au col d'Uzsok dans les Carpates orientales ;
  • 1917 — Victor Dankl, comte Dankl de Krasnik pour sa victoire à Krasnik ;
  • 1917 — Étienne Sarkotic, baron Sarkotic de Lovćen pour sa prise du mont Lovcen ;
  • 1917 — Ignace Trollmann, baron Trollmann de Lovcenberg pour son rôle au mont Lovcen ;
  • 1918 — Joseph Roth, baron Roth de Limanowa-Lapanow pour son rôle lors à Limanowa.

Italie[modifier | modifier le code]

Beaucoup de titres de victoire ont été créés après l'unification italienne et notamment pendant la Première Guerre mondiale, les plus célèbres sont :

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. [Texier 1988] Alain Texier, Qu'est-ce que la noblesse ? – Histoire et droit, Paris, éd. Tallandier, coll. « Approches », , 601 p. (ISBN 2-235-01780-0 et 978-2235017800), p. 430
  2. Jacques Jourquin, Les maréchaux de la grande guerre (1914-1918) : dictionnaire comparé et portraits croisés, 14 18 Éditions, (lire en ligne), p. 61
  3. Emmanuel PIERRAT et Laurent KUPFERMAN, Le Paris des Francs- Maçons, Cherche Midi, , 220 p. (ISBN 978-2-7491-3142-9, lire en ligne)
  4. « Joseph JOFFRE », Le courrier de Mondement, Association Mondement 1914 - Les soldats de la Marne - Joffre - Foch, no 17,‎ , p. 4 (lire en ligne)
  5. Ce titre est particulier, en ce qu'il est le seul à ne pas avoir été attribué pour commémorer une victoire militaire, mais au contraire une « victoire » diplomatique.

Articles connexes[modifier | modifier le code]