Thaler à croix bourguignon

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Patagon Philips IV. Frappé à Bruxelles. 1621

Le thaler à croix bourguignon (en allemand : « Albertusthaler », « Kreuztaler », et en slave oriental, « крестовым (krestovym, croix)», « крыжаком (kryžakom, crucifixion[réf. souhaitée])», « кости (Kosti, Os), полупатагоны (Polupatagony), четвертьпатагоны (četvert patagony)»[1] ), appelé aussi en français « écu à la croix de Bourgogne » ou « patagon »[2], est un type de thaler, une pièce d'argent frappée pour la première fois au début du XVIIe siècle dans les Pays-Bas espagnols. Le nom, en allemand, provient du gouverneur des Pays-Bas d'alors, Albert VII de Habsbourg. Le poids du « patagon » était sensiblement inférieur à celui du thaler standard, qui était l'étalon monétaire officiel du Saint-Empire[3],[4],[5].

On produisait 9 ½ thaler par poids de marc au lieu de 9 : cette pièce, qui pèse donc en moyenne 24,65 g d'argent fin, fut très populaire au sein de l'économie baltique et devint la principale monnaie d'échange dans cette région au XVIIe siècle.

La popularité de cette pièce la plaça sur une note d'égalité avec les autres thalers, après que le thaler impérial (9-Taler Reichsfuß) pesant 25,98 g d'argent fin (soit 9 pièces par poids de marc) a été frappé[6],[7]. Par conséquent, et en vertu de la loi de Gresham, le thaler à croix bourguignon s'imposa dans l'Empire au détriment des pièces plus titrées, ce qui poussa certaines régions du Nord à réformer leur système monétaire le .

Le thaler Albertus[modifier | modifier le code]

Portrait d'Albert et d'Isabelle sur un ducaton similaire au patagon (1618).

Le patagon originel montrait à l'avers les armoiries bourguignonnes entourées d'une inscription en latin : Albertus et Elisabeth D. G. Archiduc. Austr. Duces Burg. Bra. Z. (Albert et Isabelle, par la grâce de Dieu, archiduc d'Autriche, [duché de] Bourgogne, Brabant et Zélande). Au revers, la croix de Bourgogne (ici dérivée de celle de saint André) formée de deux bâtons noueux aux branches coupées, feuillus en leurs extrémités, entrecroisés en leur centre, et liés par un chenet stylisé auquel est appendu le collier de l'ordre de la Toison d'or avec l'inscription Pace et iustitia (paix et justice)[3],[8]. Le thaler Albertus est donc aussi appelé thaler à croix ou thaler bourguignon[3].

Selon Friedrich von Schrötter, en 1612, l'archiduc-gouverneur Albert, et son épouse Isabelle, ont d'abord été représentés sur une petite pièce valant 18 patards (équivalente au sol). Le contexte économique connaît une forte affluence d'argent venant des mines du Potosi. Le thaler Albertus portait, au revers, la Croix de saint André, et les armoiries espagnoles. Les troupes espagnoles ont fini par appeler cette pièce du mot générique « patacón » (dérivatif du mot arabe « batakká »). Le thaler Albertus fut frappé dans les Pays-Bas espagnols jusqu'à la fin de la domination espagnole, soit aux environs de 1700[6]. Le thaler Albertus a été remplacé, dans cette région, à partir de 1755 par le Kronentaler, monnaie de transaction instituée sur le territoire du Saint-Empire par Marie-Thérèse d'Autriche[9].

Provinces-Unies[modifier | modifier le code]

Dans les Provinces-Unies des thalers ont été frappés de 1659 à 1802 à l'imitation du Patagon. Le nom officiel était ducat d'argent. Le ducat d'argent avait à l'avers les armoiries au lion néerlandaises, et au revers un homme debout en armure[6].

Beaucoup de patagons furent frappés dans les ateliers monétaires d'Anvers et de Bruxelles.

Propagation[modifier | modifier le code]

Pour le commerce vers les régions de l'Est à partir de la Baltique (Pologne, Russie, Empire ottoman) le thaler Albertus au XVIIIe siècle fut un moyen de paiement important et internationalement reconnu[3]. En Russie, il est appelé « efimok » (patagon contremarqué). Il faut attendre 1810 pour voir ce type de thaler apparaître dans les transactions commerciales en Livonie, Kurzeme et Zemgale[8].

Pièces de monnaie par lieu d’émission[6] :

La croix bourguignonne apparaît sur toutes ces frappes[3].

Pièces subdivisionnaires[modifier | modifier le code]

Outre le patagon, une série de monnaies en argent plus petites fut émise d'une valeur de : 1/2 patagon, 1/4 de patagon, 1/8 de patagon (ou escalin) ; on trouvait aussi des patards, des 1/2 patards et des liards, série complétée plus tard par des valeurs d'1/16 de patagons (1616), des ducatons et 1/2 ducatons (1618)[3],[11].

La pièce de 80 ferding, une monnaie d'argent frappée originellement à Riga, équivalait à 1 thaler Albertus ; 1 ferding valait 6 pfennig prussiens[12].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Money Rijksdaalder Nederlanden
  2. D'après la notice établie par Migne (1832) le « Patagon » est une « monnaie d'argent de Flandre qui a cour à peu près sur le pied de l'écu de France de soixante sols ; ce mot vient de l'espagnol patacon ; cette monnaie était grande comme un écu blanc et avait pour légende d'un côté Albertus et Elizabetha Dei gratia avec une espèce de croix de saint André au milieu de laquelle il y avait une couronne et de l'autre côté pour légende Archiduces Austria duces Burgundiœ et Brab avec un écusson couronné au dedans duquel étaient deux petits lions. Ces patagons étaient du poids de vingt deux deniers et tenaient de fin dix deniers sept grains. Aujourd'hui le patagon est fixé à trois livres argent courant faisant dix florins six sols monnaie fabriquée il est au titre de dix deniers du poids de 508 grains et vaut cinq livres un sol argent de France. Les patagons ont été reçus longtemps en France pour quarante huit pour cinquante huit et enfin pour soixante sols ses diminutions sont les demis et les quarts. Il s'en fabriquait autrefois beaucoup en Franche Comté quelques-uns au poids et au titre de ceux de Flandre et quelques autres un peu plus forts comme ceux qui avaient une croix a feuillages couronnée d'un côté et de l'autre les armes de Bourgogne qui pesaient vingt deux deniers douze grains et tenaient de tin dix deniers quatorze grains » - dans Jacques-Paul Migne, Encyclopédie théologique : ou, Série de dictionnaires sur toutes les parties de la science religieuse, tome 32, « Dictionnaire numismatique », 1832 Lire en ligne.
  3. a b c d e et f Brockhaus Bilder-Conversations-Lexikon, Band 1.
  4. Pierer's Universal-Lexikon, Band 1
  5. Friedrich Frhr. v.
  6. a b c et d Friedrich Frhr v.
  7. Walter Haupt: Sächsische Münzkunde, Deutscher Verlag der Wissenschaften, Berlin 1974, S. 169
  8. a et b Pierer's Universal-Lexikon, Band 1.
  9. Pierer's Universal-Lexikon, Band 9.
  10. Numismatischer Verlag Künker. Künker Auktion 127 - Münzen und Medaillen aus Mittelalter und Neuzeit, Deutsche Münzen seit 1871. Consulter en ligne
  11. Le Patagon sur Musée de la banque nationale de Belgique
  12. Pierer's Universal-Lexikon, Band 6.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Wiert Jan Wieringa, The Interactions of Amsterdam and Antwerp with the Baltic region, 1400–1800 : De Nederlanden en het Oostzeegebied, 1400–1800., Springer, , 199 p. (ISBN 978-94-017-5952-6, lire en ligne)
  • Friedrich Frhr v. Schrötter (1970) Wörterbuch der Münzkunde. de Gruyter, Berlin. Zweite, unveränderte Auflage.

Voir aussi[modifier | modifier le code]