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Slovénie unie

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La carte du territoire et des provinces slovènes, conçue par Peter Kozler lors du Printemps des peuples de 1848, s'est érigée en un symbole emblématique de l'unité nationale slovène.

La Slovénie unie (en slovène : Združena Slovenija), également désignée sous l'appellation de « Slovénie intégrale », constitue la dénomination initiale d'un projet politique inabouti, formulé par le mouvement national slovène au cours du Printemps des peuples de 1848.

Ce programme revendiquait trois objectifs principaux :

  1. L'unification de l'ensemble des terres de peuplement slovène, alors éparses au sein de l'empire d'Autriche (comprenant notamment la Carniole, la Basse-Styrie, le duché de Carinthie, le Littoral autrichien et une partie de la Hongrie royale), en une entité administrative distincte et autonome, un « royaume » slovène, demeurant sous l'égide de la couronne des Habsbourg.
  2. L'instauration de l'égalité des droits pour la langue slovène dans la sphère publique, l'éducation et l'administration face à la prééminence de l'allemand.
  3. Une opposition résolue au projet d'intégration de la monarchie autrichienne au sein de la Confédération germanique, perçue comme une menace d'assimilation culturelle et politique accrue.

Bien que ces revendications furent demeurées lettre morte à l'époque, ce programme conserva, jusqu'à la Première Guerre mondiale, un statut de plateforme politique commune à l'ensemble des courants du mouvement national slovène[1].

Contexte historique

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À la suite de la rébellion viennoise de 1848, qui contraignit l’empereur Ferdinand Ier à promulguer l’abolition du système féodal et à octroyer une constitution, maintes nations intégrées à l’empire d'Autriche y discernèrent une opportunité de raffermir leurs aspirations politiques. Postérieurement au Congrès de Vienne (1815), l’ensemble des populations slovènes se trouvait, pour la première fois depuis des siècles, sous la sujétion d’un unique monarque habsbourgeois. Toutefois, leur répartition territoriale demeurait éclatée entre diverses entités administratives de la couronne : les provinces de Carniole, de Styrie, de Carinthie, de Gorizia-et-Gradisca, d’Istrie, la ville de Trieste, la Lombardie-Vénétie (incluant la Slovénie vénitienne) et le royaume de Hongrie (Prekmurje). Cette dispersion politico-administrative rendait absolument inenvisageable l’établissement d’une autonomie gouvernementale sur une base nationale unifiée.

Le programme de l’« unité slovène » fut initialement formulé le 17 mars 1848 par le prêtre et activiste politique carinthien Matija Majar. Il parut pour la première fois le 29 mars dans les colonnes du périodique national-conservateur Kmetijske in rokodelske novice, dirigé par Janez Bleiweis. L’idée émise par Majar fut ultérieurement développée et systématisée par la société des Slovènes de Vienne, alors présidée par l’éminent linguistique Franc Miklošič. Celui-ci en publia le manifeste le 29 avril dans la gazette slovène Novice, éditée à Klagenfurt. Parallèlement, le géographe Peter Kozler fit paraître une carte des territoires habités par les Slovènes, sur laquelle figuraient les délimitations ethno-linguistiques de cet espace.

Janez Bleiweis soumit ces doléances à l’archiduc Jean, puîné de l’empereur d’Autriche, lequel résidait au sein de la population slovène à Maribor depuis une quinzaine d’années. Les trois requêtes cardinales de ce programme — l’érection de la Slovénie en entité autonome, la reconnaissance officielle de la langue slovène et l’objection à l’intégration dans la Confédération germanique — furent consignées sous forme de pétition. Cinquante-et-une feuilles signées subsistent encore aujourd’hui, attestant de l’assise populaire étendue dont bénéficiait ce projet. La supplique, une fois signée, fut présentée au parlement autrichien ; néanmoins, en raison des insurrections survenues en Hongrie, l’assemblée fut dissoute avant même que la question slovène ne pût être examinée.

Conséquences

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Durant la Seconde Guerre mondiale, le chef tchetnik Stevan Moljević a idéalisé un plan dans lequel la Serbie et la Slovénie élargiraient considérablement leurs territoires et répondraient à leurs revendications territoriales après la libération des forces de l'Axe.

Les velléités politiques slovènes furent réprimées sous le régime absolutiste du baron Alexandre von Bach à compter de 1851, reléguant la mouvance nationale à une expression quasi exclusivement culturelle. Néanmoins, le programme pour une Slovénie unifiée conserva son statut de plateforme politique commune à toutes les factions du mouvement national slovène jusqu’à la Première Guerre mondiale. Il connut un essor notable durant la période des tabori (assemblées populaires en plein air) entre 1868 et 1871. Après le conflit et la dissolution de l’Autriche-Hongrie, cet idéal fut partiellement supplanté par le projet d’intégration au sein d’un État commun regroupant les Slaves du Sud, la Yougoslavie.

Après l'effondrement de l'Empire austro-hongrois en octobre 1918, et la création subséquente de l'État des Slovènes, Croates et Serbes, puis du royaume des Serbes, Croates et Slovènes, un nombre important de Slovènes, principalement dans la Marche Julienne et en Carinthie, restèrent à l'extérieur du pays. Le programme de Slovénie unie resta donc très présent dans les débats politiques et intellectuels de l'entre-deux-guerres. En avril 1941, il fut intégré au manifeste du Front de libération du peuple slovène. Après l'annexion du littoral slovène à la Yougoslavie en 1947 et le partage du territoire libre de Trieste entre l'Italie et la Yougoslavie en 1954, la principale revendication du programme de Slovénie unie – l'unification de la majorité des territoires slovènes en une entité politico-administrative unifiée et autonome – fut réalisée.

La poste slovène a procédé à l’émission d’un timbre-poste commémoratif à l’occasion du cent cinquantenaire du mouvement de la Slovénie unie.

Liste des territoires revendiqués

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Outre la Slovénie elle-même, les territoires revendiqués par le programme comprennent :

Dans l'Autriche moderne :

Dans la Croatie moderne :

Dans l'Italie moderne :

Dans la Hongrie moderne :

  • Parties sud des comtés de Vas et Zala

Références

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  • Bogo Grafenauer et al., éd. "Slovenski državnopravni programi 1848-1918", en slovène à država . Ljubljana, 1995.
  • Stane Granda, Prva odločitev Slovencev za Slovenijo . Ljubljana : Nova revija, 1999.
  • Peter Kovačič Peršin, éd., 150 let programa Zedinjene Slovenije . Ljubljana : Društvo 2000, 2000.
  • Vasilij Melik, « Ideja Zedinjene Slovenije 1848-1991 », dans Slovenija 1848-1998 : iskanje lastne poti . Stane Granda et Barbara Šatej, éd. Ljubljana, 1998.
  • Janko Prunk, Programmes narodni slovènes : Programmes narodni contre les programmes politiques slovènes de 1848 à 1945 . Ljubljana, 1986.
  • Fran Zwitter, O slovenskem narodnem vprašanju, édité par Vasilij Melik. Ljubljana, 1990.

Liens externes

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(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « United Slovenia » (voir la liste des auteurs).
  1. Payam Akhavan et Robert Howse, Yugoslavia, the Former and Future, Brookings Institution Press, (ISBN 0-8157-0253-1, lire en ligne), p. 20