Site classé ou inscrit en France

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Plaque commémorant Bréhat comme premier site classé en France.

Un site classé ou inscrit, en France, est un espace naturel ou bien une formation naturelle remarquable dont le caractère historique, artistique, scientifique, légendaire ou pittoresque appelle, au nom de l'intérêt général, la conservation en l’état (entretien, restauration, mise en valeur...) ainsi que la préservation de toutes atteintes graves (destruction, altération, banalisation...). Un tel site justifie un suivi qualitatif, notamment effectué via une autorisation préalable pour tous travaux susceptibles de modifier l'état ou l'apparence du territoire protégé[1].

Du point de vue légal, cette protection s’effectue au titre de la loi du 21 avril 1906, puis par la loi du 2 mai 1930, codifiée dans les articles L. 341-1 à 22 du code de l'environnement français lors de sa création par l’ordonnance du 18 septembre 2000. L'île de Bréhat fut en 1907 le premier site classé en vertu de la loi de 1906, néanmoins, les cascades de Gimel (Corrèze), classées à leur tour en 1912, avaient été le premier site naturel protégé, dès 1898.

Depuis 1906, les sites classés cohabitent avec d’autres régimes de protection, et leurs objectifs se recoupent en partie : les ZPPAUP instaurés en 1993 (remplacés en 2010 par les AVAP) et qui incluent « des paysages plus ordinaires et des espaces urbains, que le zonage permet de reconnaître et de valoriser dans des politiques intégrées de développement local[2] », Natura 2000 qui désigne des sites d'importance communautaire au niveau européen.

Critères

Les critères définis par la loi du 2 mai 1930 relative à la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque conduisent à protéger des espaces d’une très grande diversité :

  • Espaces naturels qui méritent d’être préservés de toute urbanisation et de tout aménagement
  • Paysages marqués tant par leurs caractéristiques naturelles que par l’empreinte de l’homme
  • Parcs et jardins
  • Écrins paysagers des monuments et des ensembles monumentaux pour lesquels le périmètre de protection prévu par la loi modifiée du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques est insuffisant.

En réalité, certains sites protégés au titre de la dite loi ne représentent pas du tout des sites naturels : il s'agit de places publiques ou de rues, avec les façades et toitures des bâtiments donnant sur ces places ou rues, même si les arbres et plantes sont complètement absents de ces lieux[n. 1]. Peuvent également être protégés des bâtiments isolés avec leurs abords, qu'il s'agisse de parcs ou simplement de pelouses, et que ces bâtiments soient inscrits ou classés au titre des Monuments historiques ou pas[3].

En 1861, pour la première fois en France, était protégé au nom de sa valeur paysagère, à la demande des peintres de l’école de Barbizon, un espace naturel d’un millier d’hectares en forêt de Fontainebleau.

Il y a, en 2015, près de 2 700 sites classés, soit 1 026 342 hectares, et environ 4 000 sites inscrits, soit 1 500 000 hectares environ[4]. Au total, plus de 4 % du territoire est protégé au titre des sites.

La loi sur la protection des sites prévoit deux niveaux de protection, l’inscription et le classement (comme pour les monuments historiques)[5].

Procédure

Procédure de classement de site inscrit [6]

L’initiative appartient à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. La commission peut décider d’elle même de proposer l’inscription d’un site. Elle peut le faire aussi sur la proposition de l’administration, d’un particulier, d’une association ou d’une collectivité.

L’inscription est prononcée par arrêté du ministre chargé des sites. Le consentement du ou des propriétaires n’est pas requis. Celui qui conteste l’inscription peut exercer un recours contre l’arrêté d’inscription devant les juridictions administratives qui exercent un contrôle sur la légalité de la mesure.

L’arrêté portant l'inscription est notifié directement aux propriétaires du monument naturel ou du site.

Procédure de classement de site classé [7]

La commission départementale de la nature, des paysages et des sites se prononce sur le principe de protection d’un site sur la base d’une proposition émanant de ses membres ou de l’administration.

Une enquête est ouverte par le préfet pour permettre à tout intéressé, et non pas seulement aux propriétaires de présenter ses observations. La commission départementale de la nature, des paysages et des sites émet son avis sur le projet de classement au vu du résultat de l’enquête. La décision de classement est prise

  • par arrêté du ministre chargé de l’environnement après avis de la commission supérieure des sites, en cas d’accord du propriétaire


Conséquences de la protection

Logotype des sites naturels français

L’inscription ou le classement d'un site lui donne un statut de protection, garantie par l'État (Chauleur en 1978 évoque des sites naturels d’État[8]). Il peut aussi changer son image et sa notoriété (reconnaissance d'une qualité paysagère remarquable voire exceptionnelle), ce qui peut parfois augmenter la pression humaine sur le site (parkings sauvages, apparition anarchiques et/ou saisonnières d'aménagements d'accueils, de restauration...).

Ni l'inscription ni le classement n'impliquent un programme automatique de restauration écologique ou paysagère. Cependant, s'il y a accord des collectivités concernées, un site qui s'est avec le temps dégradé (à la suite d'une surfréquentation par exemple) peut bénéficier d'une intégration dans le Réseau des grands sites de France, qui implique alors un programme de restauration[9]. S'il fait partie d'une réserve naturelle ou est concerné par un programme de renaturation (faisant par exemple suite au Schéma régional de cohérence écologique SRCE), il peut aussi faire l'objet d'un plan de gestion restauratoire ou d'une dynamique de réhabilitation écopaysagère.

En « site inscrit »

En « site inscrit », comme en site « en instance de classement », seules les “opérations d'exploitation courante des fonds ruraux” sont exemptées de déclaration ou d’autorisation (ce qui n'est pas le cas en site classé)[10]. Tout projet d'aménagement ou de modification du site est soumis à un avis simple de l'ABF, à l'exception des démolitions qui sont soumises à son avis conforme.

Lorsqu’un site est inscrit, l’État intervient par une procédure de concertation en tant que conseil dans la gestion du site, par l’intermédiaire de l’Architecte des bâtiments de France qui doit être consulté sur tous les projets de modification du site. Les effets d’un site inscrit sont suspendus par l’institution d’une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, remplacées depuis peu par les AVAP (aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine[11]).


En « site classé »

Dans un site classé, toute modification de l’état ou l’aspect du site est soumise à autorisation spéciale (art. L. 341-10), délivrée, en fonction de la nature des travaux, soit par le ministre chargé des sites après avis de la Commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS) voire de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages, soit par le préfet du département qui peut saisir la CDNPS mais doit recueillir l’avis de l’Architecte des bâtiments de France.

La loi n'autorise pas d'exception au régime d’autorisation[n. 2].

  • Les sites classés sont inconstructibles, sauf exception. Les travaux y sont alors encadrée par l’article L. 341-10 du Code de l’Environnement qui prévoit que : « Les monuments naturels ou les sites classés ne peuvent être ni détruits ni modifiés dans leur état ou leur aspect sauf autorisation spéciale » (ne pouvant être délivrée que par le ministre de l'environnement) ; Toute déclaration préalable de travaux y relève du préfet, après avis de l’architecte des bâtiments de France (ABF).
  • Les permis de construire , permis d'aménager, ou permis de démolir sont soumis à l'autorisation préalable expresse du ministre chargé de l'Environnement, après qu’ils ont été soumis pour avis à la CDNPS.
  • Certains aménagements peuvent être autorisés s'ils ne vont pas à l'encontre des motifs de classement du site.
  • L’existence d'un périmètre sauvegardé n’a aucun effet juridique sur les sites classés ou inscrits, ceux-ci conservant leur propre régime d’autorisation de travaux parallèlement à celui du secteur sauvegardé. La protection au titre des sites est sans incidence réelle sur l’application du Plan de sauvegarde et de mise en valeur si le site n’est qu’inscrit, mais il n’en est pas de même si le site est classé. Dans tous les cas cependant il va de soi que l’étude du Plan de sauvegarde et de mise en valeur doit avoir prévu le régime des espaces remarquables afin d’éviter les conflits quant à leur protection ou leur évolution. Pour les immeubles ou ensembles urbains protégés au titre de la loi du 2 mai 1930, la Commission nationale des secteurs sauvegardés se substitue aux Commissions départementale et supérieure des sites.
  • Les projets de travaux en sites classés sont instruits par les inspecteurs des sites des Directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL et/ou les ABF, et sont soumis à autorisation spéciale relevant, comme vu ci-dessus, soit du préfet soit du ministre chargé des sites.
    Les dossiers sont présentés devant la Commission départementale des sites(CDNPS) présidée par le préfet de département avec l'avis de l'architecte des bâtiments de France, pour les prescriptions architecturales. Le rapporteur du dossier est soit l'inspecteur des sites, soit l'ABF, selon que le projet relève de l'aménagement paysager ou de l'architecture. Exceptionnellement, certains dossiers peuvent passer devant la « commission supérieure des sites, perspectives et paysages ».
  • La publicité est interdite de manière absolue, quelle qu'en soit la forme.
  • L'exploitation courante des fonds ruraux et l'entretien des constructions ne sont pas concernés par le régime d'autorisation. Comme toute activité humaine (circulation, chasse, pêche, activité de loisirs...) dès lors qu'elle ne donne pas lieu à des travaux ou installations et n'a pas d'impact sur l'aspect des lieux.

Rôles de l'ABF et de l'inspecteur des sites

L’Architecte des bâtiments de France et l'inspecteur des sites sont les garants administratifs de la qualité du paysage. Ils veillent sur les espaces inscrits ou classés au titre des sites. L'ABF, du fait de ses compétences dans le domaine du patrimoine bâti, s'intéresse plus aux aspects construits du site et à la conservation des traces de l'empreinte humaine inscrites dans le paysage (ex. : murets, murs de soutènement, haies, talus, terrasses, ruines, canaux, etc.). L'inspecteur des sites de la DREAL veille au maintien de la qualité paysagère du site, au respect des motifs qui ont présidé à son classement. Il intègre aussi les autres dimensions environnementales dans les projets qui sont soumis à son examen, notamment la protection des milieux naturels, écosystèmes, habitats naturels, espèces végétales, composantes de la « naturalité » des sites dont dépend en grande partie leur qualité paysagère.

Ils donnent leurs avis sur les travaux à exécuter dans les sites.

C'est l'inspecteur des sites qui est chargé de réaliser les dossiers de classement ou d'inscription au sein de la DREAL, soit en régie soit avec l'aide d'un bureau d'études.

Cadre législatif

La loi du 2 mai 1930 a été plusieurs fois modifiée (notamment par la loi n° 57-740 du 1er juillet 1957) et a finalement été codifiée dans le code de l’environnement, notamment les articles L. 341-1 à L. 341-22.

Notes et références

Notes

  1. Par exemple des sites inscrits par arrêté du 17 décembre 1948 à Senlis (Oise) : la place Saint-Pierre ; les Places publiques du Parvis, Notre-Dame et St-Frambourg ; la rue de la Treille ; les façades sud de la rue de Beauvais ; cf. « Senlis - Place Saint-Pierre » ; « Senlis - Places publiques du Parvis, Notre-Dame et St-Frambourg » ; « Senlis - Rue de la Treille » ; et « Senlis - Façades sud de la rue de Beauvais » sur le site « DREAL Picardie - Recherche par commune des zonages du patrimoine naturel et paysager de Picardie » (consulté le ).
  2. En matière de jurisprudence, citons l’arrêt de la Cour de cassation (chambre crim., 18 septembre 2007, n° 06-87759) par lequel le propriétaire d'un bien, situé sur une parcelle privée communale – en site classé – dont il avait repris le bail, a entrepris des travaux de démolition et de reconstruction de l'ouvrage après avoir obtenu l'avis favorable du maire : Le propriétaire a été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour avoir effectué ces travaux sans permis de construire et sans l'autorisation spéciale prévue pour toute modification d'un site classé. Et le maire a été poursuivi comme complice de ces délits. La Cour a ainsi rappelé que l'autorisation de construire au titre d'un bail relatif à un immeuble du domaine privé communal ne vaut ni permis de construire ni autorisation spéciale au titre des sites classés.

Références

  1. Articles L. 341-1 à 22 du code de l’environnement
  2. Samuel Depraz, Géographie des espaces naturels protégés, Armand Colin, , p. 159.
  3. Par exemple des sites inscrits par arrêté du 17 décembre 1948 à Senlis (Oise) ; cf. « Senlis - Hôtel Carter et ses abords » ; « Senlis - Hôtel Parseval et ses jardins » ; « Senlis - Pavillon Saint-Martin et son parc » ; et, monument non protégé au titre des Monuments historiques, « Senlis - Hôtel sis 14 rue Bellon et ses abords » sur le site « DREAL Picardie - Recherche par commune des zonages du patrimoine naturel et paysager de Picardie » (consulté le ).
  4. « Ministère de l'écologie et du développement durable et de l'énergie - Politique des sites/données », sur Ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie, (consulté le )
  5. Les sites et monuments naturels classés et inscrits : des outils au service de la protection des paysages, Site du Ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables
  6. DREAL Franche-Comté, « Sites inscrits », sur www.franche-comte.developpement-durable.gouv.fr, (consulté le )
  7. DREAL Franche-Comté, « Sites classés », sur www.franche-comte.developpement-durable.gouv.fr, (consulté le )
  8. Chauleur Y. (1978), Constitution de sites naturels d’État, Délégation à la Qualité de la Vie, 3 p.
  9. Duval, M., & Gauchon, C. (2007, April). Analyse critique d'une politique d'aménagement du territoire, les Opérations Grands Sites. In Annales de géographie (No. 2, pp. 147-168). Réseau des grands sites de France ; Armand Colin. résumé
  10. La gestion forestière en site classé
  11. « DRAC Ile-de-France- AVAP », sur DRAC, (consulté le )

Bibliographie

  • Les sites en France, un patrimoine à découvrir, brochure du ministère chargé de l’Environnement.[réf. incomplète]
  • « pour mémoire » La loi de 1930 à l’épreuve du temps : les sites, atouts pour les territoires, Actes de la journée d’études du 29 novembre 2010, revue du ministère de l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement, lire en ligne
  • Anne Vourc’h et Jean-Marc Natali, Sites naturels : contribution du tourisme à leur gestion et à leur entretien : guide du savoir-faire, Agence française de l'ingénierie touristique (AFIT), coll. « Les Cahiers de l'AFIT », , 139 p. (ISBN 2-910388-60-3, BNF 37209846)
  • Jacqueline Morand-Deviller, Le droit de l'environnement, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Que sais-je ? », , 8e éd. (1re éd. 1987), 127 p. (ISBN 978-2-13056362-4, BNF 41120803)

Annexes

Articles connexes

Liens externes