Sélim Ier

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Sélim Ier
Illustration.
Le sultan Sélim Ier par Konstantin Kapıdağlı, vers 1800.
Titre
Sultan ottoman

(8 ans, 4 mois et 29 jours)
Prédécesseur Bajazet II
Successeur Soliman le Magnifique
Gouverneur du sandjak de Trébizonde (tr)

(~ 23 ans)
Prédécesseur Ilyass Bey
Successeur Sinan Bey
Biographie
Dynastie Dynastie ottomane
Date de naissance
Lieu de naissance Amasya (Empire ottoman)
Date de décès (à 49 ans)
Lieu de décès Çorlu (Empire ottoman)
Père Bajazet II
Mère Gülbahar Hatun (en)
Fratrie Nigar Hatun, Şirin Hatun, Gülruh Hatun, Bülbül Hatun, Hüsnüşah Hatun, Gülbahar Hatun, Muhtereme Hatun
Conjoint Hafsa Sultan, Ayşe Hatun
Enfants Soliman , Şehzade Salih, Şehzade Musa, Şehzade Korkut, Şehzade Orhan, Üveys Pacha, Hatice Sultan, Hafize Sultan, Şah Sultan, Beyhan Sultan, Fatma Sultan, Gevherhan Sultan, Kamerşah Sultan, Yenişah Sultan, Hanim Sultan, Şehzade Sultan
Héritier Soliman le Magnifique
Religion Islam
Résidence Palais de Topkapı

Signature de Sélim Ier
Liste des souverains ottomans

Sélim Ier (Yavuz Sultan Selim Han) dit « le Brave » ou « le Terrible » (en turc : yavuz, « brave », « hardi », « audacieux ») (né le [1] à Amasya – mort le à Constantinople) fut le 9e sultan de l'Empire ottoman.

Contrairement aux croyances, Sélim ne se proclame pas calife et les sultans ottomans n'ont pas attendu Sélim Ier pour s'attribuer de temps à autre le titre de calife[2],[3]. Il succéda à son père Bajazet II.

Il a eu six fils, dont Suleyman, plus connu sous le nom de Soliman le Magnifique, qui lui succéda à sa mort.

Aujourd'hui, le troisième pont traversant le Bosphore, le pont Yavuz Sultan Selim, porte son nom.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse[modifier | modifier le code]

Né à Amasya le , Sélim est le plus jeune fils de Bajazet II. Sa mère est Gülbahar Hatun, une des épouses de Bajazet II.

Nommé gouverneur de Trébizonde par son père en , Sélim mit à profit cette fonction pour se familiariser avec l'administration et pour mener quelques campagnes militaires victorieuses. Très proche des janissaires, dont il adopte partiellement le costume, il est considéré comme frugal et économe, très religieux et rusé. Il organisa un réseau d’espionnage efficace dans tout le pays et dans les pays voisins. Il fit la conquête d'une partie de la Géorgie, correspondant aux provinces de Kars, d'Erzurum et d'Artvin.

Prise du pouvoir[modifier | modifier le code]

Sélim Ier par John Young, 1815.

L'année suivante, Sélim entra en rébellion contre son père, qu'il finit par contraindre à l'abdication avec l'aide des janissaires en 1512. Il tua ses frères et neveux pour éliminer tout prétendant au trône. Il donna la preuve de son intransigeance en exécutant devant leurs hommes deux officiers ayant montré des signes d'insubordination.

Unification de l’Anatolie[modifier | modifier le code]

Sélim ne rompit pas la paix avec les puissances chrétiennes, en revanche à l’est les Safavides constituaient un danger pour l’Empire ottoman. Le chah de Perse Ismaïl Ier diffusait le chiisme que Sélim considérait comme une horrible hérésie. Le but de Sélim était d’éliminer les Safavides et de rétablir ainsi l’unité des musulmans. Le , il partit vers Sinop. Il y laissa un détachement de 40 000 soldats et partit en campagne vers l’Iran avec le reste de l’armée, soit 100 000 soldats. L’armée d’Ismaïl comprenait elle aussi 100 000 hommes, mais elle était beaucoup moins bien équipée et surtout l’artillerie ottomane était très supérieure. La bataille eut lieu à Tchaldiran (province de Van) le . Les Ottomans sortirent vainqueurs, mais le Chah put s’échapper.

Erzincan et Bayburt furent envahis et la forteresse de Kemah (près d’Erzincan) fut prise. Sélim continua son avancée et entra dans Tabriz. Tout l’Est de l’Anatolie passa sous la domination ottomane. Le , Sélim se retira de Tabriz pour se diriger vers le Karabagh (Karabağ), mais il préféra se replier sur Amasya pour y passer l’hiver.

En , Sélim conquiert le beylik des Dulkadir (Dulkadiroğlu) lors de la bataille du mont Turna (en) (province de Kahramanmaraş) le . La principauté devint l'eyalet de Dulkadir.

Conquête de l'Égypte[modifier | modifier le code]

Les Safavides s’allièrent avec les Mamelouks du Caire. En apprenant cela, Sélim partit aussitôt, en juin 1516, en campagne vers l’Égypte. Le , la citadelle d’Antep (aujourd’hui Gaziantep en Turquie) se rendit, ainsi que celle de Besni (dans la province d’Adıyaman).

La bataille eut lieu à Marj Dabiq aux environs d’Alep (Syrie). Deux ans exactement après la bataille de Tchaldiran, ce sont cette fois les Mamelouks qui sont écrasés par la supériorité des armées ottomanes. Le sultan mamelouk Qânsûh al-Ghûri est tué et le calife abbasside al-Mutawakkil III est fait prisonnier. Sélim entra dans Alep le . Le jour suivant, les prières furent dites en son nom, le déclarant calife.

Une campagne éclair lui fait prendre la Syrie et le Liban, puis il traverse le désert du Sinaï en 13 jours. Il battit les Mamelouks une nouvelle fois aux environs du Caire à la bataille de Ridaniya le . Le dernier sultan mamelouk est exécuté le .

Le La Mecque et Médine étaient territoires ottomans. Le calife al-Mutawakkil abdiqua en faveur de son père al-Mustamsik. Ce dernier remit dans les mains de Sélim les insignes du pouvoir califal. Sélim envoya à Constantinople les objets sacrés (turc : Emanat-ı Mukaddes) l'épée, la robe, l'étendard et des dents du prophète et transforma Constantinople en centre du califat[4].

Il resta encore au Caire pendant huit mois et revint à Constantinople le .

Sur les mers[modifier | modifier le code]

Sélim Ier sur son lit de mort, miniature ottomane du Selim-Nameh, XVIe siècle.

Les frères Barberousse Arudj puis Khayr ad-Dîn, chefs des corsaires d'Alger, étaient en lutte contre l'Espagne des Rois catholiques. Sélim leur accorda une aide matérielle en leur fournissant des navires.

Vers 1518, Khayr ad-Dîn Barberousse décida de s'allier complètement à l'Empire ottoman en faisant allégeance au sultan, qui lui donna le titre de pacha et de beylerbey avec une troupe de 2 000 janissaires munis d'artillerie, puis de 4 000 volontaires ayant le statut de janissaires.

La domination turque sur l'Algérie et la Tunisie ne sera complète que sous le règne de Soliman.

Sa mort[modifier | modifier le code]

Selim Yavuz mourut le d'un cancer à l'âge de quarante-neuf ans, alors qu'il préparait une expédition contre l'île de Rhodes. Il laissait à son fils Süleyman, futur Soliman le Magnifique, un empire en pleine expansion qui s'étendait sur l'Europe, l'Asie et l'Afrique. Son chroniqueur et conseiller, Idris-i Bidlisi, mort la même année, laissa une biographie inachevée du sultan, le Selim-Nameh (Livre de Sélim).

Sélim écrivait des poèmes en persan sous le pseudonyme de Mahlas Selimi. Dans l'un d'eux, il écrit :

« Un tapis est assez large pour contenter deux soufis mais le monde n'est pas assez large pour deux rois. »

Son türbe a été élevé derrière la mosquée du sultan Selim Ier, construite en son honneur par son fils et successeur Soliman, dans l'actuel district de Fatih à Istanbul.

Héritage[modifier | modifier le code]

La marine turque lui rendit hommage en rebaptisant Yavuz Sultan Selim (puis Yavuz tout court) le croiseur de bataille SMS Goeben vendu par l'Allemagne à l'empire ottoman durant la Première Guerre mondiale.

Dans la culture[modifier | modifier le code]

  • Il apparait dans le jeu vidéo Assassin's Creed Revelations, où il revient victorieux de la guerre le confrontant à son père avec le titre de sultan. Il tue son frère qui a attenté à la vie de son fils Suleyman et il confronte brièvement le personnage principal (Ezio Auditore da Firenze), qu'il somme de quitter Constantinople sous peine de le faire exécuter.
  • Il est l'antagoniste final de la campagne d'Ismaïl de l'extension The Royals Mountains d'Age of Empires II: Definitive Edition.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Halil İnalcık, s.v. dans Encyclopaedia of Islam, vol. IX, 1997, p. 127.
  2. Pierre-Jean Luizard, Le choc colonial et l'islam, La Découverte, (lire en ligne), Gilles Veinstein, la question du califat ottoman
  3. Selim s'empare des insignes du pouvoir califal détenus au Caire, cependant la transmission du titre de calife au sultan ottoman est une fiction créée au plus tôt à la fin du XVIIIe siècle. Voir :
    • (en) Clifford Edmund Bosworth, op. cit. (lire en ligne), « The caliphs in Cairo 659-923/1261-1517 », p. 9.
    • Janine & Dominique Sourdel, op. cit., « Abbassides, 749-1517 », p. 11.
    • Janine & Dominique Sourdel, op. cit., « Califat », p. 181, précise que le titre officiel de calife et de commandeur des croyants n'a jamais été pris par les Ottomans. C'est la constitution ottomane de 1876 qui prévoit que « le sultan en tant que calife est le protecteur de la religion musulmane. »
  4. Concernant cette transmission du titre de calife, Bernard Lewis écrit :

    « Il n'y a pas l'ombre d'un doute que cette histoire soit apocryphe. Ni les historiens égyptiens ni les historiens ottomans du XVIe siècle n'y font la moindre allusion et il est inconcevable qu'un événement de cette ampleur soit passé inaperçu. De temps en temps, les Ottomans firent usage de titres califaux, mais beaucoup d'autres monarques musulmans relativement mineurs en firent autant. […] L'ère du califat universel était révolue et aucun souverain musulman n'y prétendit jusqu'à ce que l'idée en fut ressuscitée par les Ottomans à la fin du XVIIIe siècle.
    Cette revendication surgit pour la première fois dans le traité de Kaïnardji en 1774. […] Afin de sauver la face, le sultan, tout en renonçant à la souveraineté politique sur la Crimée, fut autorisé à proclamer que « en tant que chef religieux suprême de l'Islam », il était le chef religieux des Tatars. »

    — Bernard Lewis, Islam, Paris, Gallimard, coll. « Quarto », , 1333 p. (ISBN 978-2-07-077426-5), « Le langage politique de l'islam / Gouvernants et gouvernés », p. 732.

    Cette proclamation aurait manifestement violé la tradition arabe et plusieurs hadiths qui prévoient que le calife doit toujours être un membre de la tribu mecquoise des Quraych :

    « Abd Allah ben `Umar, rapporte : Le Messager de Dieu disait : Le califat restera parmi les Quraych même s'il ne reste que deux personnes sur terre »

    — (en) « Sahih de Muslim, livre 020, no 4476 », sur Compendium of Muslim Texts, University of Southern California.

    En 1922, ce prétendu titre de calife sera mis en avant par la Grande Assemblée nationale de Turquie qui élit Abdülmecid II comme « calife » alors qu'il succède à Mehmed VI qui a été déchu du titre de sultan par la révolution menée par Mustafa Kemal Atatürk.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Olivier Bouquet : Pourquoi l'Empire ottoman ? : Six siècles d'histoire, 2022, Éditeur Folio; édition illustrée (ISBN 2072941431)

Annexes[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

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Lien externe[modifier | modifier le code]