Rose d'or
La Rose d'or est un ornement béni par le pape, destiné à honorer des souverains ou des sanctuaires catholiques. Comme son nom l'indique, il représente une rose, un bouquet de roses ou un petit rosier en or massif. Il était attribué à un souverain fidèle chaque année par le pape le quatrième dimanche de Carême[1].
Histoire
La rose d'or apparaît dès le début du Moyen Âge. La première mention attestée est une bulle de 1049, dans laquelle Léon IX exempte le couvent de Sainte-Croix de Woffenheim (Alsace)[pas clair] à condition que l'abbesse envoie annuellement une rose d'or au Saint-Siège. La chronique de Saint-Martin de Tours mentionne le plus ancien don connu d'une rose d'or par le pape : don d'Urbain II au comte Foulque IV d'Anjou, en 1096. Dès le bas Moyen Âge, le don d'une rose d'or pour honorer un souverain supplante le don des clefs de Pierre, institué au VIIIe siècle.
La rose est traditionnellement portée en procession, de la basilique Sainte-Croix-de-Jérusalem jusqu'au palais du Latran, lors du dimanche de Lætare (quatrième dimanche de Carême), également appelé dimanche de la Rose pour cette raison. Elle est d'abord portée par le pape lui-même. Par la suite, quand le poids de la rose augmente, un clerc est chargé de cette tâche. C'est à cette occasion que le pape bénit, dans la sacristie de Sainte-Croix, le baume et le musc destinés à la rose, avant que celle-ci ne soit portée par un ablégat à son destinataire, ou remise à un ambassadeur résident. En 1895, la charge de porter la rose d'or est confiée à un camérier secret de cape et d'épée.
À l'époque contemporaine, Jean-Paul II a remis des roses d'or à de nombreux sanctuaires dédiés à la Vierge Marie, comme celui de Lourdes en France, d'Aparecida au Brésil ou de Guadalupe au Mexique. Le pape Benoît XVI a notamment donné la Rose d'Or au Sanctuaire de Jasna Góra (Pologne) en 2006 ; en 2007 à la basilique d'Aparecida, au Brésil; le 12 mai 2010 à Notre Dame de Fatima et le 2 février 2011 au Sanctuaire de Notre-Dame de Montaigu (Scherpenheuvel), en Belgique.
Le pape François a offert à quatre reprises une rose d'or à un sanctuaire marial : à Notre Dame del Cobre (Cuba), en septembre 2015 ; à Notre Dame de Guadalupe (Mexique), en février 2016 ; à Notre Dame de Czestochowa (Pologne), en juillet 2016 ; et à Notre Dame de Fatima pour le centenaire des apparitions en mai 2017.
Représentation et symbolique
La plus ancienne représentation de la rose d'or (XIIIe siècle) est une rose seule portant en son cœur une petite coupe ajourée contenant du baume et du musc. Avec Sixte IV, le dessin se complique : la rose d'or représente également des tiges épineuses, des feuilles ou encore des bourgeons ; des pierres précieuses sont serties dans le bijou. Par la suite, on y ajoute un piédestal et un vase. Ainsi, en 1668, la rose d'or envoyée par Clément IX à Marie-Thérèse d'Autriche, épouse de Louis XIV, pèse 4 kilos.
La rose d'or, si elle est un présent coûteux, revêt également une importance symbolique : la rose symbolise le Christ — la rose rouge en particulier symbolisant sa Passion. On interprète en ce sens un verset du Cantique des cantiques : « Je suis la fleur des champs et le lis des vallées » (2-1), ou encore un verset du livre d'Isaïe : « et il sortira un rejeton de la souche de Jésée, et une branche de ses racines fructifiera ». Cette signification mystique est présente dans les lettres accompagnant la rose, ou encore dans les sermons prononcés le dimanche de Lætare.
Exemplaires connus
La plupart des roses d'or ont été fondues par leur destinataire, afin de récupérer l'or à des fins monétaires. Les exemplaires subsistant sont donc peu nombreux :
- dans le trésor de la cathédrale de Bénévent ;
- dans le Musée sacré de la Bibliothèque vaticane ;
- dans la basilique Saint-Jean de Latran ;
- au Musée national du Moyen Âge, sis en l'hôtel de Cluny, à Paris ;
- au Palazzo Communale de Sienne ;
- à la Schatzkammer de la Hofburg à Vienne ;
- au Musée de la Légion d'honneur, sis en l'Hôtel de Salm, à Paris.
Les destinataires de roses d'or
- la basilique Saint-Pierre de Rome (5 roses)
- la basilique Saint-Jean de Latran (4 roses)
- la basilique de l'Oratoire Saint-Joseph (Montréal, Québec, Canada)
- 1096 : Foulque IV le Réchin, comte d'Anjou
- 1148 : Alphonse VII de Castille
- 1163 : Louis VII de France
- 1244 : Raimond Bérenger IV, dernier comte de Provence de la Maison de Barcelone
- 1251 : Chapitre de l'Église Saint-Just de Lyon
- 1323 : Amédée V de Savoie[2]
- 1326 : Bernard VIII, comte de Comminges[2]
- 1329 : Bernard VIII, comte de Comminges (pour la 2e fois)[2]
- 1348 : Louis Ier de Hongrie
- 1368 : Jeanne Ire de Naples
- 1434 : Ranuce Farnèse
- 1435 : Sigismond Ier du Saint-Empire
- 1444 : Henri VI d'Angleterre
- 1448 : Casimir IV de Pologne
- 1457 : Charles VII de France
- 1460 : Jean II d'Aragon (août 1460)[3]
- 1465 : Frédéric Ier de Naples
- 1474 : Frédéric de Montefeltro
- 1477 : Louis III de Mantoue[4]
- 1493 : Isabelle la Catholique
- 1506 : Manuel Ier du Portugal
- 1524 : Jean III du Portugal)
- 1524 : Henri VIII d'Angleterre (3 roses)
- 1576 : Don Juan d'Autriche, vainqueur de la Bataille de Lépante, le , contre la flotte turque
- Sebastiano Venier, doge de Venise ;
- Urszula Mayerin, chambellan et maîtresse de Sigismond III de Pologne
- 1592 : Henri de Valois, roi de Pologne, futur Henri III de France
- 1595: Morosina Morosini, épouse du doge Marino Grimani
- 1668 : Marie-Thérèse d’Autriche, reine de France
- 1701 : Marie-Louise Gabrielle de Savoie, reine d'Espagne
- 1730 : Violante-Béatrice de Bavière, gouvernante de la ville de Sienne
- 1736 : Marie Leszczynska, reine de France
- 1759 : Francesco Loredano, doge de Venise
- 1776 : Marie-Christine de Habsbourg-Lorraine, archiduchesse d'Autriche
- 1825 : Marie-Thérèse d'Autriche-Este, reine de Sardaigne
- 1832 : Marie-Anne de Sardaigne, impératrice d'Autriche
- 1842 : Marie II, reine de Portugal
- 1849 : Maria Pia de Savoie (le jour de son baptême)
- 1856 : Eugénie de Montijo, impératrice des Français
- 1868 : Isabelle II, reine d'Espagne
- 1886 : Marie-Christine d'Autriche, reine d'Espagne
- 1889 : Isabelle de Bragance, princesse impériale du Brésil
- 1892 : Amélie d'Orléans, reine de Portugal
- 1893 : Marie-Henriette de Habsbourg-Lorraine, reine des Belges
- 1927 : Sœur Thérèse de l'enfant Jésus et de la sainte Face (décédée en 1897) (), 1re célébration de sa fête après sa canonisation
- 1937 : Hélène de Monténégro, reine d'Italie
- 1956 : Charlotte Ire, grande-duchesse de Luxembourg
Postérité
Dans le principe, elle fut souvent offerte au préfet de Rome. Plus tard, l'usage prévalut de l'envoyer à quelque royal souverain, à quelque prince qui s'était illustré par sa valeur, à quelque princesse renommée pour sa vertu ou sa charité envers les pauvres. Assez longtemps les empereurs d'Allemagne la reçurent à l'époque de leur couronnement. Lorsque le Saint-Siége fut établi à Avignon, on convint d'offrir la rose d'or à la personne la plus digne qui se trouvait à la cour pontificale à l'époque du carême. De nos jours, toutes ces traditions diverses sont en usage : tantôt la rose est envoyée à des princes ou des princesses que le Pape veut honorer, tantôt le Souverain Pontife l'offre lui-même à quelqu'un des grands seigneurs de sa cour, ou à quelque personnage de distinction qui a assisté à la cérémonie, quelquefois c'est à une ville tout entière ou à une église qu'il en fait présent (Lorsque le Pape est absent de Rome, la cérémonie de la bénédiction de la rose n'a pas lieu : on se contente, en cette circonstance, d'exposer sur l'autel de la Sixtine une rose précédemment bénite.
C'est ce qui se pratiqua sous le pontificat de Pie VI, l'année du voyage que fit ce pape en Autriche. Durant les dernières années de la vie de Clément XII, ce pontife, ayant été frappé de cécité, et ne pouvant par conséquent paraître dans les cérémonies chrétiennes , bénissait la rose dans un de ses oratoires particuliers : elle était ensuite transportée dans le sanctuaire où se tenait la chapelle papale (Extrait des notes do A, Manavit.)).
Pour la chapelle papale, le IVe dimanche de Carême, les insignes des cardinaux sont de couleur rose; l'étole du Pape et les ornements du célébrant, qui est ordinairement un cardinal-prêtre, sont également de couleur rose, aussi bien que les tentures du devant de l'autel. Tout cela est la continuation de la même pensée dans la liturgie de l'Église[1].
Notes et références
- Cdl Balthasar, « Rome, IVe dimanche de Carême: la rose d'or - Les carnets du Cardinal Balthasar », Les carnets du Cardinal Balthasar, (lire en ligne, consulté le )
- Müntz 1901, p. 8.
- Jaime Vicens Vives, « La politique européenne du royaume d'Aragon-Catalogne sous Jean II (1458-1479) », Annales du Midi, vol. 65, no 23, , p. 408 (DOI 10.3406/anami.1953.5929, lire en ligne).
- (it) Treccani.it. Ludovico III Gonzaga.
Voir aussi
Bibliographie
- Eugène Müntz, « Les Roses d'or pontificales », Revue de l'art chrétien, 5e série, vol. 12 (44), , p. 1-11 (lire en ligne).
- (en) Golden Rose, Catholic Encyclopedia, .
- C. Burns, Philippe Levillain (dir.), Dictionnaire historique de la papauté, Paris, Fayard, (ISBN 2-213-618577).
Lien externe
- la Rose d'or de Minucchio da Siena (1330), au musée de Cluny.