Richard de Bourgogne

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Richard le Justicier
Illustration.
Fuite des Normands devant l'armée de Richard, duc de Bourgogne.
Fonctions
Comte d'Autun

(38 ans)
Prédécesseur Boson V de Provence
Successeur Raoul
Comte d'Auxerre

(33 ans)
Prédécesseur Hugues l'Abbé
Successeur Raoul
Comte de Nevers
v. 890
Prédécesseur Guillaume Ier d'Aquitaine
Successeur Raoul
Comte de Troyes

(27 ans)
Prédécesseur Adalelme de Troyes
Successeur Raoul
Comte de Sens

(26 ans)
Prédécesseur Eudes
Successeur Raoul
Marquis de Bourgogne

(20 ans)
Prédécesseur aucun (fondation)
Successeur aucun (dissolution)
Duc de Bourgogne

(3 ans)
Prédécesseur aucun (fondation)
Successeur Raoul
Biographie
Titre complet Comte d'Autun, d'Auxerre, de Nevers, de Troyes, et de Sens,
Puis Marquis de Bourgogne,
Puis duc de Bourgogne.
Dynastie Bivinides
Nom de naissance Richard de Vienne
Date de naissance
Date de décès
Père Bivin de Vienne
Fratrie Boson de Provence
Richilde, épouse du roi Charles II le Chauve
Conjoint Adélaïde de Bourgogne
Enfants Raoul
Hugues
Boson
Ermengarde

Richard de Bourgogne dit le Justicier, né en 858 et mort en 921, est un grand seigneur féodal, considéré comme le premier des ducs de Bourgogne.

La famille[modifier | modifier le code]

Origines et ascendance[modifier | modifier le code]

Richard de Bourgogne, né à Vienne, en 858, est issu de la maison des Bivinides de Lotharingie.

Il est le fils de Bivin de Vienne, comte d'Ardenne et de Metz, et abbé laïc de Gorze[1].

Il a pour frère aîné Boson, roi de Bourgogne cisjurane-Provence en 879, duc de Lombardie, duc de Provence, comte d'Autun, de Berry, de Chalon, de Mâcon et de Troyes, chambrier du roi Louis II le Bègue, et abbé laïc de Saint-Maurice d'Agaune.

Il a pour sœur Richilde d'Ardennes, seconde épouse du roi de France Charles II dit le Chauve[2].

Mariage et descendance[modifier | modifier le code]

Richard de Bourgogne épouse, en 888, Adélaïde de Bourgogne (v. 870-?), fille de Conrad II, duc de Bourgogne Transjurane et comte d'Auxerre. De leur union naissent[3] :

Le comte justicier[modifier | modifier le code]

Avant de réfléchir aux facteurs expliquant ce surnom de "justicier", il faut souligner que Richard ne fut pas surnommé de la sorte de son vivant. Les mentions lui attribuant ce surnom se trouvent dans des chroniques bien postérieures rédigées entre le milieu du XIe siècle et la première moitié du XIIe siècle, que sont la Chronique de l'abbaye de Saint-Bénigne de Dijon, le Chronicon d'Hugues de Flavigny, ou encore la Chronique de l'abbaye St-Pierre de Bèze[4],[5]. Le caractère "justicier" de Richard est donc bien plus un artifice littéraire postérieur qu'une réalité politique ou sociale contemporaine du comte.

Le vainqueur des Normands[modifier | modifier le code]

En 888, Richard, alors comte d'Auxerre défait une première fois, avec l'appui de Géran, évêque d'Auxerre, dans la plaine de Saint-Florentin (dans l'actuelle Yonne), les Normands qui s'étaient introduits en Bourgogne et avaient déjà dévasté la ville de Bèze (dans l'actuelle Côte-d'Or).

Dix ans plus tard, les Normands sont de retour dans la région, hivernant entre Tonnerre et Montbard, et le comte Richard les défait pour la deuxième fois, d'abord à Argenteuil-sur-Armançon, puis à Saint-Florentin, avant de les repousser jusque dans la vallée de la Seine.

En 911, toujours appuyé par Géran, le comte Richard défait une dernière fois les Normands, et bat Rollon (?-v. 930), leur chef, aux portes de Chartres que ce dernier assiégeait jusqu'alors[2].

Le défenseur des rois carolingiens[modifier | modifier le code]

Le comte Richard sert les rois carolingiens durant sa vie, avec une grande loyauté, notamment lors de la sécession de Boson de Provence (844-887), son frère, et lors de la lutte pour le trône de Francie occidentale contre Eudes (v. 852-898).

La guerre contre Boson de Provence[modifier | modifier le code]

À la mort de Louis II le Jeune, roi d'Italie et empereur d'Occident, en 875, le comte Richard et son frère Boson (844-887) escortent le roi de Francie occidentale Charles II le Chauve jusqu'en Italie, où il se fait couronner empereur par le pape Jean VIII.

Le nouveau souverain d'Occident fait Boson duc de Lombardie. Chassé l'année suivante par Carloman, roi de Francie orientale, il reçoit les États de Provence et le titre de roi, sans pouvoir toutefois être indépendant.

En 879, Louis II le Bègue (846-879), successeur de Charles II le Chauve, nomme Boson de Provence tuteur de ses deux premiers fils cohéritiers Louis (v. 865-882) et Carloman (v. 865-884). Ce dernier profite de la minorité des deux futurs rois de Francie occidentale et de son autorité de tuteur pour se proclamer roi indépendant et absolu de Provence. Ce royaume se constitue alors de la Provence, du Dauphiné, de la Savoie, du Lyonnais, de la Franche-Comté, des diocèses de Mâcon, de Chalon, de Viviers, d'Uzès, de Vienne, de Valence, d'Avignon et d'Arles.

Cette initiative ne laisse pas sans réaction les deux frères, qui devenus rois, et avec le concours de leurs partisans, dont le comte Richard, et de Charles III le Gros, roi de Francie Orientale, se lancent dans la reconquête du royaume de Provence.

Le comte Richard reprend la ville de Mâcon en 880, puis en 882 celles de Lyon et de Vienne, où il constitue prisonniers Ermengarde, sa belle-sœur, Engelberge, sa nièce, et Louis (empereur Louis III l'Aveugle), son neveu, qu'il fait mener à Autun.

Cette guerre ne prend fin qu'en 887, avec la mort de Boson[6].

La lutte contre Eudes[modifier | modifier le code]

Lors de la lutte, qui oppose, entre 892 et 897, Charles (Charles III le Simple), troisième fils, posthume, du roi de Francie occidentale carolingien Louis II le Bègue et héritier légitime du trône, au robertien Eudes, comte de Paris, puis marquis de Neustrie, proclamé roi des Francs en 888, le comte Richard soutient loyalement Charles. En effet, il participe, entre autres, à la conjuration pacifique de 892, visant à éloigner le roi Eudes en Aquitaine pour permettre à Charles de se faire sacrer roi à Reims, quelques mois plus tard, puis, en 894, accueille en ses terres et protège ce dernier des troupes parjures du roi de Francie orientale, Arnulf[7].

Le médiateur de Courtenot[modifier | modifier le code]

En 896, le comte Richard, devenu en outre de comte d'Auxerre, comte de Troyes, en 894, organise, à Courtenot (dans l'actuelle Aube), dans le comté de Troyes, un plaid au cours duquel il donne raison à Berthard, abbé de Montiéramey, et son avoué Adrevert, contre Rainard de Vergy, comte de Bar-sur-Seine, son vassal, accusé d'avoir utilisé par la force, à son service, des hommes de Chaource[8], dépendants de l'abbaye de Montiéramey depuis 893[9].

Le premier duc de Bourgogne[modifier | modifier le code]

La Bourgogne aux XIe et XIIe siècles.

À l'issue de la guerre contre Boson de Provence, Richard de Vienne reçoit, pour ses services, le comté d'Autun, qui appartenait jusqu'alors au dit Boson, son frère[10].

En 888, il devient maître du comté d'Auxerre, par son mariage avec Adélaïde de Bourgogne, fille de Conrad II, duc de Bourgogne Transjurane et d'Auxerre, qui le lui apporte en dot[11].

En 890, il acquiert le comté de Nevers sur le comte Guillaume Ier[12].

En 894, il s'empare du comté de Troyes en profitant des troubles semés par la mort du comte Adalelme de Troyes (?-894).

Enfin, il conquiert, l'année suivante, sur le roi Eudes, le comté de Sens[13].

En 898, le comte Richard est autorisé par ce même souverain à fusionner ses comtés[14]. Il prend alors le titre de marquis (marchio) de Bourgogne, jusqu'en 918, puis celui de duc (dux), jusqu'à sa mort, en 921[15].

Autres titres et dignités[modifier | modifier le code]

Outre son titre ducal, Richard de Bourgogne est membre du conseil royal et, de 894 à sa mort en 921, abbé laïc des abbayes de Saint-Germain d'Auxerre[16] et de Saint-Denis-lès-Sens[17].

Mort et succession[modifier | modifier le code]

Peu avant sa mort, dressant le bilan de sa vie, le duc Richard répond à Mgr Gaudry, qui l'exhorte à demander pardon à Dieu d'avoir répandu le sang: « Si j'ai à me repentir, c'est de n'en avoir pas versé davantage, parce qu'en faisant mourir un brigand j'ai sauvé la vie à cent honnêtes gens; la mort d'un seul a suffi pour retenir ses complices et les empêcher de faire plus de mal. »[17]

Il meurt à Auxerre[18], en 921[17].

Son fils aîné Raoul, lui succède à la tête du duché de Bourgogne jusqu'en 923.

Cependant, cette donation n'est pas du goût du frère puîné Hugues le Noir ni de Hugues le Grand, alors comte de Paris et marquis de Neustrie, qui se liguent contre le nouveau duc.

Cette querelle intestine prend fin, en 938, par le traité de Langres divisant le duché en trois parts égales; mais il faut attendre 943 pour que Louis IV d'Outremer, roi de Francie occidentale, donne le duché réunifié à Hugues le Grand, qui le conserve jusqu'à sa mort, en 956[19].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Crété-Protin Isabelle., « Richard le Justicier (896-921) » dans Église et vie chrétienne dans le diocèse de Troyes du IVe au IXe siècle), Presses Universitaires du Septentrion, Villeneuve d'Ascq, 2002. p. 307.
  • Settipani Christian, La Préhistoire des Capétiens (481-987). Première partie : Mérovingiens, Carolingiens et Robertiens, Nouvelle histoire généalogique de l'auguste maison de France, vol. 1, P. van Kerrebrouck, Villeneuve d'Ascq, 1993.
  • Giry Arthur, « Études carolingiennes » dans Études d'histoire du Moyen Âge dédiées à Gabriel Monot, Paris, 1897. p. 133-134.
  • Eckel Auguste, Charles le Simple, Paris, 1889. p. 17.
  • Un Religieux bénédictin de la Congrégation de Saint-Maur, L'art de vérifier les dates des faits historiques, des chartes, des chroniques, et autres monuments…, G. Després, Paris, 1770 (2e édition). p. 11-13.
  • Chasot de Nantigny Louis, Les généalogies historiques des rois, ducs, comtes, etc. de Bourgogne, Le Gras, Paris, 1738. p. 12-13 ; 39 ; 49 ; 103.

Liens externes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Poupardin René, « La famille de Boson », dans Le royaume de Provence sous les Carolingiens (855-933?), Émile Bouillon, Paris, 1901. p. 40.
  2. a et b Un Religieux bénédictin de la Congrégation de Saint-Maur, L'art de vérifier les dates des faits historiques, des chartes, des chroniques, et autres monuments…, G. Després, Paris, 1770 (2e édition). p. 11-12.
  3. Settipani Christian, La Préhistoire des Capétiens (481-987). Première partie : Mérovingiens, Carolingiens et Robertiens, Nouvelle histoire généalogique de l'auguste maison de France, vol. 1, Patrick van Kerrebrouck, Villeneuve d'Ascq, 1993.
  4. René Poupardin, Le royaume de Provence sous les Carolingiens (855-993?), Paris, É.Bouillon, , p. 333
  5. (la) Chronique de l'abbaye de Saint-Bénigne de Dijon, suivie de la chronique de l'abbaye de Saint-Pierre de Bèze, édité par Louis-Émile Bougaud et Joseph Garnier, Dijon, Darantière, éditeur-imprimeur, (lire en ligne), p. 123
  6. Un Religieux bénédictin de la Congrégation de Saint-Maur, L'art de vérifier les dates des faits historiques, des chartes, des chroniques, et autres monuments…, G. Després, Paris, 1770 (2e édition). p. 234.
  7. Eckel Auguste, Charles le Simple, Paris, 1889. p. 17.
  8. Crété-Protin Isabelle, « Richard le Justicier (896-921) » dans Église et vie chrétienne dans le diocèse de Troyes du IVe au IXe siècle), Presses Universitaires du Septentrion, Villeneuve d'Ascq, 2002. p. 307.
  9. Giry Arthur., « Études carolingiennes » dans Études d'histoire du Moyen Âge dediées à Gabriel Monot, Paris, 1897. p. 107-136.
  10. Chasot de Nantigny Louis, Les généalogies historiques des rois, ducs, comtes, etc. de Bourgogne, Le Gras, Paris, 1738. p. 49.
  11. Chasot de Nantigny Louis, Les généalogies historiques des rois, ducs, comtes, etc. de Bourgogne, Le Gras, Paris, 1738. p. 13.
  12. Société nivernaise, Bulletin de la Société nivernaise des sciences, lettres et arts : seconde série, tome 1, Imprimerie Fay, Nevers, 1863. p. 484.
  13. Chasot de Nantigny Louis, Les généalogies historiques des rois, ducs, comtes, etc. de Bourgogne, Le Gras, Paris, 1738. p. 39.
  14. Chasot de Nantigny Louis, Les généalogies historiques des rois, ducs, comtes, etc. de Bourgogne, Le Gras, Paris, 1738. p. 12.
  15. Richard Jean (dir.), Histoire de la Bourgogne, Privat, 1988. p. 131.
  16. Jean Lebeuf, Mémoire concernant l’histoire ecclésiastique et civile d’Auxerre, vol. 2, , 569 p. (présentation en ligne). Page 43.
  17. a b et c Un Religieux bénédictin de la Congrégation de Saint-Maur, L'art de vérifier les dates des faits historiques, des chartes, des chroniques, et autres monuments…, G. Després, Paris, 1770 (2e édition). p. 12.
  18. Courtépée Claude, Histoire abrégée du duché de Bourgogne, depuis les Eduens, les Lingons et les Séquanois..., Causse, 1777, p. 196.
  19. Un Religieux bénédictin de la Congrégation de Saint-Maur, L'art de vérifier les dates des faits historiques, des chartes, des chroniques, et autres monuments…, G. Després, Paris, 1770 (2e édition). p. 12-13.