Riad Salamé

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Riad Salamé
Fonction
Gouverneur de la Banque du Liban
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Biographie
Naissance
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رياض سلامةVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Activités
Banquier, économiste, financierVoir et modifier les données sur Wikidata
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signature de Riad Salamé
Signature

Riad Salamé (en arabe : رياض سلامة), né le à Antélias, est un banquier libanais. Il est gouverneur de la Banque du Liban entre 1993 et 2023.

Banquier d’affaires chez Merrill Lynch, il est nommé gouverneur de la banque centrale en 1993. Proche du Premier ministre d’alors, Rafiq Hariri, libéral, il lève les obstacles à la libre circulation des capitaux et installe un rapport quasi fixe entre la livre libanaise et le dollar. Après avoir joui pendant 30 ans d’une aura de prestige, souvent qualifié de « magicien » de la finance, il est associé par de nombreux critiques à la faillite de l’État libanais et à l’effondrement de la monnaie nationale à partir de 2019.

Poursuivi par la justice française et la justice allemande pour détournement de fonds publics et blanchiment d’argent, Salamé fait l'objet d'un mandat d'arrêt international émis par Interpol[1],[2].

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse[modifier | modifier le code]

Né d'une famille maronite, Riad Salamé est le fils de Toufik Salamé et Renée Romanos. Il effectue sa scolarité chez les Jésuites au collège Notre-Dame de Jamhour, puis obtient une licence en économie de l'université américaine de Beyrouth[3],[4].

Carrière[modifier | modifier le code]

Entre 1973 et 1993, Riad Salamé travaille dans les bureaux de Merrill Lynch à Beyrouth et à Paris[5], en tant que cadre et membre de la direction. Il devient vice-président et conseiller financier de Merrill Lynch à Paris[6].

Il devient gouverneur de la Banque du Liban le , sur décision de Rafiq Hariri, dont il gérait la fortune à Merrill Lynch[7]. Il est ensuite reconduit pour quatre mandats consécutifs en 1999, 2005, 2011 et 2017.

Il fait preuve d’orthodoxie libérale, lève les obstacles à la libre circulation des capitaux et installe un rapport quasi fixe entre la livre libanaise et le dollar. D'après l'analyste économique Jean-Pierre Sereni, pour attirer les capitaux, il introduit un autre bénéfice, très avantageux pour ses créanciers : « Ils sont payés deux fois par le Trésor public. Tout déposant de plus d’un million de dollars peut souscrire un prêt en livres libanaises d’un montant supérieur qui lui coûte 2 % en intérêt, mais en rapporte 10 % : il additionne ainsi les intérêts payés sur le prêt en dollars et sur celui en monnaie locale. » Le Fonds monétaire international (FMI) a calculé, dans une étude parue en 2019, que le rendement sur 10 ans atteignait 17 % par an. Les banques libanaises qui montent ces opérations gagnent ainsi de fortes sommes[7].

Riad Salamé est aussi président du Conseil central de la BDL, de la Commission bancaire supérieure, de la Commission d'enquête spéciale AML/CFT et de l'Autorité des marchés de capitaux. Il est membre du Conseil des Gouverneurs du Fonds monétaire international (FMI) et du Fonds monétaire arabe (FMA). En 2012, Riad Salamé préside la réunion annuelle du FMI et du Groupe de la Banque mondiale à Tokyo[8][source insuffisante].

Le , Riad Salamé entame un mandat de deux ans pour co-présider le Conseil de stabilité financière, un groupe consultatif régional pour le Moyen-Orient et Afrique du Nord. Il a également été président du conseil des gouverneurs du fonds monétaire arabe en 2013.

En juillet 2021, il est révélé que Riad Salamé a peut-être été espionné au moyen du logiciel israélien Pegasus pour le compte de l'Arabie saoudite et des Émirats arabes unis[9].

Critiques[modifier | modifier le code]

En tant que gouverneur de la Banque centrale du Liban, après avoir joui pendant 30 ans d’une aura de prestige, souvent qualifié de « magicien » de la finance, Riad Salamé est, depuis mars 2020, associé par certains à la faillite de l’État libanais et à l’effondrement de la monnaie nationale. Pour ses détracteurs, il serait l'artisan d'une « pyramide de Ponzi » sur laquelle reposerait l'économie libanaise[10],[11]. Ce à quoi il répond notamment que « les taux d’intérêts payés au Liban étaient inférieurs à ceux payés en Égypte et en Turquie ». Aussi, il estime être « pris comme un bouc émissaire »[12]. Le banquier explique en avril 2021 que le système libanais « tient grâce à la banque centrale, qui a accumulé des reserves importantes en devises » dans le contexte de crise politique vécu depuis 2017, à la suite de la démission du Premier ministre Saad Hariri[13].

Fin décembre 2020, Riad Salamé, pointé du doigt par une partie des manifestants, annonce l'ouverture d'une enquête éthique. Celle-ci doit auditer le système financier du pays et permettre de vérifier si des personnalités politiques ont utilisé leur position pour outrepasser les restrictions bancaires sur les retraits en devises et les transferts de fonds à l'étranger. En janvier 2021, il estime que le système financier du pays peut redémarrer « si la situation politique régionale s’améliore » et si le pays reçoit l’appui « de la communauté internationale et arabe »[14],[12].

Affaires judiciaires[modifier | modifier le code]

Soupçons de détournement de fonds publics[modifier | modifier le code]

Les comptes bancaires et propriétés détenus par Riad Salamé à travers l’Europe représentent plusieurs centaines de millions de dollars[15].

En juillet 2021, le parquet national financier français (PNF) annonce que les investigations ouvertes en France sur le riche patrimoine de Riad Salamé en Europe sont confiées à des juges d’instruction anticorruption parisiens. Le PNF ouvre le 2 juillet « une information judiciaire contre X des chefs de blanchiment en bande organisée et association de malfaiteurs »[16]. Il est également soupçonné de détournement de fonds publics par les justices suisse et libanaise[15].

Le rôle-clé que détient Riad Salamé sur la scène politico-financière libanaise limite la marge de progression des enquêteurs, empêchant notamment toute levée du secret bancaire sur de multiples comptes suspects[15].

En octobre 2021, son nom apparaît aux côtés d'autres politiques libanais (Marwan Kheireddine, Najib Mikati, Muhammad Baasiri et Hassan Diab) dans l'affaire des évasions fiscales de Pandora Papers où il est stipulé que Salamé a eu recours aux paradis fiscaux[17].

Depuis le 16 mai 2023, il est l'objet d'un mandat d'arrêt international émis par la France, après son refus de se rendre à une audition au tribunal judiciaire de Paris[18].

Raja Salamé, frère cadet de Riad Salamé, est inculpé en mars 2022 pour complicité d’actes d’enrichissement illicite. Il est soupçonné de l’avoir aidé à détourner de l’argent de la banque centrale pour se constituer un luxueux patrimoine immobilier à Paris[19].

Titre honorifique[modifier | modifier le code]

Décoration[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Hélène Sallon, « Affaire Riad Salamé : la justice française émet un mandat d’arrêt international contre le banquier libanais », sur Le Monde,
  2. Raya Jalabi, « Foot-dragging over central bank chief underscores Lebanon dysfunction », sur Financial Times,
  3. « Riad Salamé : l’ingénieur du système », sur lecommercedulevant.com, (consulté le ).
  4. (en) « GOVERNER OF BANQUE DU LIBAN Riad Salamé » (consulté le ).
  5. (en) « Biographical Information », sur bdl.gov.lb,
  6. « Pour le "meilleur banquier central du monde", un remake de 2008 sera évité », sur L'Écho, (consulté le ).
  7. a et b « Le pitoyable effondrement du « miracle » financier libanais », sur Orient XXI,
  8. (en) « Annual Meetings 2012 of the International Monetary Fund and World Bank Group, October 12-14, 2012 », sur imf.org,
  9. « Au Liban, les monarchies du Golfe surveillent autant leurs amis que leurs ennemis », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne)
  10. « Riad Salamé, apprenti sorcier de la finance libanaise », sur Les Echos, (consulté le ).
  11. « Riad Salamé, la faillite du « magicien » libanais », sur Le Monde, (consulté le ).
  12. a et b « Riad Salamé, gouverneur de la Banque du Liban : "Je suis pris comme un bouc émissaire" », sur France 24, (consulté le ).
  13. « Riad Salamé: «La Banque centrale reste le dernier pilier solide du pays» », sur lefigaro.fr, (consulté le )
  14. « Riad Salamé sur France 24 : "Le système financier du Liban peut redémarrer" », sur France 24, (consulté le ).
  15. a b et c « Affaire Salamé : l’enquête transnationale bute sur le secret bancaire libanais », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne)
  16. « Ouverture d'une enquête en France sur le patrimoine du gouverneur de la Banque centrale du Liban », sur RFI, (consulté le ).
  17. Jacques Monin, « Pandora Papers : cinq ans après les Panama Papers, l’évasion fiscale se porte bien », sur France Inter, (consulté le )
  18. « Affaire Riad Salamé : la justice française émet un mandat d’arrêt international contre le banquier libanais », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  19. « Au Liban, l’étau judiciaire se resserre autour de Riad Salamé, le gouverneur de la banque centrale », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne)
  20. Décret du 31 décembre 2009 portant promotion et nomination (lire en ligne)

Liens externes[modifier | modifier le code]