Production d'électricité

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La production d'électricité est essentiellement un secteur industriel qui approvisionne ses consommateurs en énergie électrique adaptée à leurs besoins. Pour les fournisseurs d'électricité, il s'agit de la première étape de cet approvisionnement, qui est suivie du transport et de la distribution et comprend le stockage.

La production d'électricité est réalisée depuis la fin du XIXe siècle dans des centrales électriques. Les centrales transforment des énergies primaires, généralement grâce à des générateurs électriques entraînés soit par une machine thermique alimentée en combustible fossile (charbon, gaz naturel ou pétrole), en combustible organique (biomasse, déchets) ou en fission nucléaire, soit directement par l'énergie mécanique hydroélectrique ou éolienne. L'énergie solaire et la géothermie sont d'autres sources d'énergie électrique également exploitées.

La part de l'électricité dans la consommation finale d'énergie s'élevait à 18,9 % en 2017 au niveau mondial. La production mondiale d'électricité est issue en 2018 des combustibles fossiles pour 64 %, du nucléaire pour 10 % et des énergies renouvelables pour 26 % (hydroélectricité 16 %, éolien 5 %, biomasse 3 %, solaire 2 %). Les deux principaux pays producteurs d'électricité totalisent 42,5 % de la production mondiale : Chine 25,8 % et États-Unis 16,7 %.

Un Turbo-alternateur dans une centrale thermique.
Une turbine hydraulique avec sa génératrice.
Deux éoliennes.

Histoire

En 1868, l'inventeur belge Zénobe Gramme améliore la dynamo, à courant continu, point de départ de l'industrie électrique moderne, et fonde la Société des machines magnétoélectriques Gramme avec l'industriel Hippolyte Fontaine. Quelques années plus tard, les boulevards des grandes capitales sont illuminés par la bougie (en) Iablotchkov alimentée par des machines Gramme, avant qu'elle soit supplantée par les lampes à incandescence de Thomas Edison[1],[2],[3]. La deuxième révolution industrielle est en marche.

En 1878, une centrale hydroélectrique de 7 kW est construite par William George Armstrong à Cragside en Angleterre. Elle tire son énergie de lacs situés sur la propriété de l'ingénieur, via des dynamos, et alimente sa demeure ainsi que des machines et bâtiments de ferme[4].

En 1882, Thomas Edison construit la centrale de Pearl Street Station, première aux États-Unis. Elle abrite six dynamos « Jumbo » mues par des machines à vapeur, celle-ci étant produite grâce au charbon, et fournit du courant continu dans un rayon de 800 m[5]. D'une capacité de 1 200 lampes, elle éclaire 85 maisons, bureaux et boutiques de Manhattan[6]. Moins d'un an plus tard, d'autres centrales, toujours plus puissantes, éclairent plus de 430 immeubles new-yorkais avec plus de 10 000ampoules. C'est également la première centrale à cogénération, dont la chaleur résiduelle est distribuée aux bâtiments voisins et la pression de vapeur vendue aux usines locales. La technologie sera par la suite adoptée dans le monde entier.

En 1890, le courant alternatif sort vainqueur de la guerre des courants l'opposant aux partisans du courant continu. La production centralisée d'électricité se généralise alors, grâce au transport à haute tension de l'énergie.

Moyens de production

Les moyens de production sont diversifiés et dépendent de nombreux facteurs :

  • les techniques disponibles ;
  • la réactivité de mise en œuvre ;
  • la production nécessaire ;
  • le rendement possible ;
  • les coûts d'investissement, d'exploitation et de déconstruction ;
  • le coût des éventuelles matières premières ;
  • la disponibilité locale de ces matières premières ou les moyens d'acheminement ;
  • les impacts écologiques occasionnés ; etc.

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Enjeux environnementaux

L'électricité est communément présentée comme une « énergie propre ». En effet, les équipements l'utilisant n'émettent, localement, ni gaz polluant, ni gaz à effet de serre. Toutefois, l'électricité n'est pas une énergie disponible naturellement sur Terre. Elle est produite par conversion d'énergie primaire en énergie électrique, or la plupart des processus de production d'électricité, et en particulier ceux les plus répandus au début du XXIe siècle, ont des effets néfastes sur l'environnement :

De plus, la construction de tout ouvrage et de toute machine requiert des matériaux et de l'énergie grise, qui impliquent eux-mêmes pollution, rejets et autres impacts environnementaux. L'analyse du cycle de vie révèle ainsi, par exemple, qu'une éolienne est responsable d'émissions indirectes de CO2 qui représentent, moyennées sur sa durée de vie, 12,7 g/kWh, les 1113e de ces émissions ayant lieu lors de sa fabrication[7] ; par ailleurs, toute l'énergie qu'elle produit pendant sa première année de fonctionnement ne fait que compenser celle qui a été dépensée pour la mettre en service[8] (heureusement, le taux de retour énergétique sur l'ensemble de sa durée de vie est un des meilleurs parmi les énergies renouvelables). À titre de comparaison, l'énergie nucléaire est responsable d'émissions dans le même ordre de grandeur, le solaire photovoltaïque de 40 à 45 g/kWh, le thermique à gaz de 400 à 500 g/kWh et le thermique à charbon de 1 000 g/kWh[9],[10],[11].

L'électricité, comme toutes les formes ou vecteurs énergétiques, génère des impacts environnementaux, économiques et sociaux que l'on cherche à limiter. Un des enjeux admis pour le XXIe siècle est donc celui d'une production à partir de ressources moins polluantes, plus fiables, sûres et renouvelables, et capables de se substituer aux centrales thermiques et nucléaires. Dans ce contexte, certains États mettent en place des politiques environnementales, comme le paquet climat-énergie en Europe, visant à inciter les producteurs d'électricité à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et donc leurs contributions directes ou indirectes au dérèglement climatique.

Techniques de production d'électricité

Techniques largement utilisées

Techniques nouvelles

Techniques en développement

La production

La production d'énergie électrique est obtenue par conversion d'une autre forme d'énergie.

Énergie mécanique

Toutes les centrales ci-dessus fonctionnent par conversion finale de l'énergie mécanique en énergie électrique par l'intermédiaire d'une génératrice comme une machine synchrone (alternateur) qui produit du courant alternatif ou une dynamo qui produit du courant continu.

Énergie photovoltaïque

Une centrale solaire photovoltaïque convertit une partie de l'énergie du rayonnement solaire en courant continu via un capteur solaire photovoltaïque. Cette énergie peut être stockée dans des batteries ou convertie en courant alternatif par un onduleur.

Énergie thermoélectrique

Les centrales thermoélectriques utilisent l'énergie thermique, qui est convertie via des modules thermoélectriques qui produisent du courant continu.

Énergie gravitationnelle

L'énergie potentielle gravitationnelle est exploitée dans les usines marémotrices, les barrages hydroélectriques et les centrales au fil de l'eau.

Généralisation

La plupart du temps, l'électricité est produite à partir d'une source de chaleur, en utilisant la vapeur d'eau comme colporteur d'énergie. La vapeur fait alors tourner des turbines qui sont couplées à des générateurs électriques. Les énergies hydroélectrique et éolienne sont des exceptions, puisque c'est l'énergie de l'eau, et du vent, en déplacement qui produit un travail directement dans une turbine couplée à un générateur.

Les centrales nucléaires utilisent souvent un circuit primaire et un circuit secondaire de vapeur, afin d'isoler physiquement le réacteur nucléaire de la salle des générateurs et du reste des installations.

Certaines installations, dites à cogénération, combinent la génération d'électricité et de chaleur. Cette dernière peut être utilisée pour des processus industriels , en microcogénération pour le chauffage domestique, ou dans des réseaux de chaleur. Ces centrales électriques combinées, brûlant habituellement du gaz naturel, atteignent les meilleurs rendements, après les centrales hydroélectriques.

Il existe aussi des centrales à cycle combiné (CCC) qui, pour être plus efficientes et donc moins polluantes par kilowatt-heure produit, utilisent l'énergie calorifique résiduelle des gaz d'échappement de la turbine à gaz pour produire de la vapeur utilisée dans une turbine à vapeur entraînant un second alternateur.

Des expériences sont en cours pour utiliser la géothermie pour produire de l'électricité en creusant à très grande profondeur dans des roches dures, ce qui permet de réchauffer un fluide caloporteur alimentant en vapeur une turbine (via une pompe à chaleur quand la température est trop faible).

Tous les véhicules automobiles non électriques utilisent un petit alternateur couplé mécaniquement au moteur principal pour une génération locale d'électricité basse tension, une batterie d'accumulateurs le remplaçant pendant l'arrêt du moteur principal.

Des unités d'appoint ou de secours, appelées groupes électrogènes, permettent une fabrication d'électricité ponctuelle, ils utilisent tous un moteur à explosion pour entraîner la génératrice. et peuvent être :

  • des groupes transportables pour une utilisation d'équipements électriques hors des lieux électrifiés ;
  • de gros générateurs, utilisés pour pallier les coupures dues au fournisseur d'électricité. Les hôpitaux, certains services publics, ou les grandes entreprises ne pouvant supporter un arrêt brutal de leurs processus industriels possèdent ainsi des groupes électrogènes à démarrage automatique.

Les États-Unis en particulier comptent beaucoup sur les combustibles fossiles pour l'électricité (pétrole, gaz naturel, charbon). Les complexités de sécurité liées à l'énergie nucléaire font qu'aucune centrale nucléaire n'a été construite aux États-Unis depuis les années 1970 (à la suite de l'accident nucléaire de Three Mile Island, dans l'État de Pennsylvanie).

Planification et régulation de la production

L'énergie électrique ne se prêtant pratiquement pas au stockage, l'équilibre entre la production et la consommation d'électricité doit être assuré à tout instant par un gestionnaire de réseau. Or, la demande électrique fluctue de façon journalière[12] (selon les besoins des ménages notamment), hebdomadaire (selon les aléas climatiques) et annuelle (variations saisonnières).

En conséquence, un plan journalier de production d'énergie est établi par les fournisseurs d'électricité et les différents moyens de production sont activés au gré des variations de consommation prévues ou imprévues. Par exemple, en France, les centrales nucléaires fournissent la « base », c'est-à-dire de très grandes quantités d'électricité (de 900 à 1 450 MW par centrale) ; les centrales thermiques peuvent démarrer en quelques heures et fournissent la « semi-base », en service permanent ou saisonnier ; enfin, les barrages hydro-électriques répondent en quelques minutes à la « pointe » de consommation électrique.

Statistiques de production mondiale

La part de l'électricité dans la consommation finale d'énergie s'élevait à 18,9 % en 2017 au niveau mondial, contre 9,4 % en 1973[13].

En 2018, la répartition des sources de production était la suivante :

Production mondiale d'électricité par source
Source 2018 (TWh) Variation
2017-2018
Part en
2000
Part en
2018
Charbon 10 116 +2,6 % 39 % 38 %
Pétrole 903 -3,9 % 8 % 3 %
Gaz naturel 6 091 +4,0 % 18 % 23 %
Total fossiles 17 110 +3,1 % 65 % 64 %
Nucléaire 2 724 +3,3 % 17 % 10 %
Hydraulique 4 239 +3,1 % 17 % 16 %
Biomasse-déchets 669 +7,4 % 1 % 3 %
Éolien 1 217 +12,2 % 0 % 5 %
Solaire PV 570 +31,2 % 0 % 2 %
Autres EnR 144 +4,2 % 0 % 1 %
Total EnR 6 839 nd 18 % 26 %
Total 26 672 +4,0 % 100 % 100 %
Source des données : Agence internationale de l'énergie[14]
PV = photovoltaïque ; EnR = énergies renouvelables.
Production d’électricité des principaux pays en 2017[15]
Pays Production

TWh

% mondial % fossiles % nucléaire % EnR
1 Chine 6 635 25,8 % 70,5 % 3,7 % 25,8 %
2 États-Unis 4 286 16,7 % 62,8 % 19,6 % 17,6 %
3 Inde 1 532 6,0 % 80,2 % 2,5 % 17,3 %
4 Russie 1 094 4,3 % 64,0 % 18,6 % 17,4 %
5 Japon 1 068 4,2 % 76,7 % 3,1 % 20,1 %
6 Canada 658 2,6 % 18,9 % 15,4 % 65,7 %
7 Allemagne 654 2,5 % 52,9 % 11,7 % 35,4 %
8 Brésil 589 2,3 % 18,1 % 2,7 % 79,2 %
9 Corée du Sud 567 2,2 % 69,4 % 26,2 % 4,4 %
10 France 562 2,2 % 11,2 % 70,9 % 17,9 %
11 Arabie saoudite 348 1,4 % 100 % 0 % 0,04 %
12 Royaume-Uni 338 1,3 % 47,7 % 20,8 % 31,5 %
13 Mexique 322 1,3 % 80,6 % 3,4 % 16,0 %
14 Iran 308 1,2 % 92,5 % 2,4 % 5,1 %
15 Turquie 297 1,2 % 70,4 % 0 % 29,6 %
16 Italie 296 1,2 % 62,2 % 0 % 37,8 %
17 Espagne 276 1,1 % 45,8 % 21,0 % 33,2 %
18 Taïwan 268 1,0 % 85,8 % 8,4 % 5,8 %
19 Australie 258 1,0 % 84,3 % 0 % 15,7 %
20 Afrique du Sud 255 1,0 % 88,9 % 5,6 % 5,5 %
21 Québec (Canada)[16],[17] 176 0,7 % 1,0 % 0 % 99,0 %
Total monde 25 721 100 % 64,5 % 10,2 % 25,3 %

Régulation dans le monde

Depuis plusieurs années, une table ronde réunit annuellement les régulateurs des États-Unis et l'association des régulateurs de l'Union européenne (CEER[18]). En 2006, une plate-forme de partage en ligne a été créée[19] par les régulateurs de l'énergie.

En octobre 2009, 200 régulateurs de l'énergie et 11 associations régionales ont créé une « Confédération internationale des régulateurs de l'énergie » (ICER)[20] pour échanger des informations sur les « bonnes pratiques » concernant les questions liées à la régulation de l'énergie.

Quatre thèmes et groupes de travail ont été retenus par l'ICER :

  • sécurité de l'approvisionnement ;
  • changement climatique (le G8 des ministres de l'énergie, réuni à Rome en mai 2009, avait demandé aux régulateurs de se coordonner pour une meilleure adaptation aux dérèglements climatiques) ;
  • compétitivité et accessibilité ;
  • meilleures pratiques et formation.

Notes et références

  1. (en) « History of the Public Lighting of Paris », Nature, vol. 132,‎ , p. 888–889 (DOI 10.1038/132888c0, lire en ligne, consulté le ).
  2. « Les bougies Jablochkoff à Londres », L’électricité, no 8,‎ (lire en ligne, consulté le ) sur Gloubik Sciences.
  3. « Notice nécrologique », La Nature, no 1089,‎ (lire en ligne) sur Gloubik Sciences.
  4. (en) « Hydro-electricity restored to historic Northumberland home », sur BBC News, (consulté le ).
  5. (en) Electrical world, vol. 80, McGraw-Hill, (lire en ligne).
  6. « Centrale électrique », sur L'Internaute (consulté le ).
  7. Cycleco, « Analyse du Cycle de Vie de la production d’électricité d’origine éolienne en France » [PDF], sur ADEME, (consulté le ), p. 78.
  8. Thierry de Larochelambert, « Énergie éolienne : une analyse du cycle de vie performante », sur Énergie Société Écologie, (consulté le ).
  9. « L'analyse de cycle de vie de l’éolien », sur Journal de l'éolien (consulté le ).
  10. « 1/8 - Nucléaire et énergies renouvelables : des technologies complémentaires pour la transition énergétique », sur Société française d'énergie nucléaire, (consulté le ).
  11. Kevan Saab, « Éoliennes : quel est leur vrai bilan carbone ? », sur Contrepoints, (consulté le ).
  12. « Courbes journalières », sur RTE (entreprise) (consulté le ).
  13. (en) Agence internationale de l'énergie, Key World Energy Statistics 2019 (page 34), 26 septembre 2019 [PDF].
  14. (en)Global Energy & CO2 Status Report - Data tables, Agence internationale de l'énergie, 27 mars 2019.
  15. (en)Statistics data browser - World : Electricity 2017 (onglet « Data tables »), Agence internationale de l’énergie, 24 septembre 2019.
  16. « Profil », sur Hydro-Québec (consulté le ).
  17. « Énergie propre », sur Hydro-Québec (consulté le ).
  18. « Conseil des régulateurs européens de l’énergie », CRE (consulté le 21 septembre 2017).
  19. (en)International Energy Regulation Network - IERN, sur iern.net
  20. L'annonce a été faite à Athènes le , lors du 4e forum mondial de la régulation de l'énergie.

Voir aussi

Articles connexes

Lien externe

  • (en) Tomorrow, « Electricity map » (consulté le ) : carte interactive montrant les production, consommation et flux d'électricité ainsi que les ressources éolienne et solaire.