Pont des Trous
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Le pont des Trous est une porte d'eau de style gothique, érigée au XIIIe siècle, encadrée de deux tours et enjambant le fleuve Escaut à Tournai, en Belgique.
L'arche centrale a été dynamitée au début de la Seconde Guerre mondiale. Lors de la reconstruction après la guerre, les deux arches intactes ont été démontées puis l’ensemble a été reconstruit selon de nouvelles proportions – en partie avec les matériaux des arches historiques – pour élargir l’arche centrale, et l'ensemble du pont a été rehaussé de 2,40 m pour faciliter la navigation fluviale[1],[2], tout en préservant ce qui définissait l'ouvrage en tant que porte d'eau médiévale.
En 2019, les trois arches sont « déconstruites » et adaptées pour augmenter le gabarit navigable afin de favoriser le trafic fluvial. Les travaux débutent en août 2019 et se terminent début 2023. Le pont est inauguré le 14 et le 15 avril 2023.
Historique
[modifier | modifier le code]Du XIIIe siècle au XXe siècle
[modifier | modifier le code]C'est l'un des principaux vestiges de l'architecture militaire médiévale de Belgique et l'un des monuments emblématiques de Tournai. Cet ouvrage faisait partie de la troisième enceinte de Tournai, appelée aussi seconde enceinte communale (XIIIe siècle). Il défendait le cours de l'Escaut dans sa traversée de la ville et était donc l'une des deux portes d'eau de Tournai. Des grilles coulissantes permettaient de barrer le cours du fleuve[3]. La tour de la rive gauche - « tour du Bourdiel » - date de 1281. La tour située sur la rive droite, dite « tour de la Thieulerie », a été construite entre 1302 et 1304.
En 1340, lors du siège de la ville, un assaut y sera mené par des milices flamandes et des troupes anglaises. La légende veut que cette attaque ait été repoussée en raison de l’apparition - dans les fumées des combats - de la Vierge Marie à la tête d’une armée d’anges… En ex-voto, la tour de la Thieulerie abrita pendant des siècles une statue représentant la Sainte Vierge. Cette dernière disparaîtra lors de la restauration de 1847. Aujourd'hui, la niche située au-dessus de la porte de la tour de Thieulerie témoigne de cette histoire.
En 1515, la tour de la Thieulerie est intégrée aux fortifications construites dans le quartier du château par Henri VIII. La tour du Bourdiel est englobée dans un boulevard d'artillerie dont des vestiges subsistent dans le Jardin de la Reine.
Lors de la canalisation de l’Escaut voulue par Louis XIV, le Pont des Trous sera enterré de 2,5 à 2,8 m à la suite de la construction des quais. Il demeurera en l'état jusqu’au XIXe siècle. En 1847, il fait l’objet d’une restauration : le toit de la courtine ainsi que les murs intérieurs sont enlevés. Ils ne seront jamais rétablis.

Le pont des Trous est classé une première fois en 1936. Lors de la Seconde Guerre mondiale, le , les troupes anglaises, battant en retraite, décidèrent de faire sauter tous les ponts de la ville, y compris le Pont des Trous. Seules les arches furent réellement impactées. Les tours furent miraculeusement épargnées malgré un dynamitage programmé. Au préalable des travaux de restauration qui s’imposaient, le Pont des Trous fit l'objet d'une procédure de déclassement. La reconstruction eu lieu en 1948. Il fallut attendre le pour que l'édifice (monument et site) soit à nouveau classé par Arrêté de la Région wallonne[4], et ce, en raison de « sa valeur scientifique et esthétique ».
Dans les années 1970, un premier projet de mise à gabarit (1 350 tonnes) de l’Escaut menaça l’édifice. Finalement, l’opposition des Tournaisiens imposa l’utilisation d’un alternat pour la navigation afin de préserver les quais et le monument.
Démolition des arches en 2019
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Depuis 2013, la Région wallonne fait de la mise à gabarit de l'Escaut une priorité, afin de profiter de l'aménagement du canal Seine Nord-Europe. Ainsi, au début du XXIe siècle, l'architecture du pont est à nouveau remise en cause[5]. Les défenseurs du patrimoine demandent, à défaut du "petit contournement", de préserver les éléments qui définissent le pont des Trous en tant que porte d'eau médiévale : aspect fortifié, courtine et trois arches en arc brisé[6]. Divers projets d'aménagement visent à élargir l'arche centrale, voire la supprimer complètement, bien qu'un projet de contournement du pont, plus coûteux, ait été proposé[7]. Un débat commence entre les autorités communales et les défenseurs du patrimoine tournaisien[8]. L'administration affirme le caractère impératif de l'élargissement fluvial qui pourrait augmenter l'activité économique de la ville. Un collectif, emmené par Pierre-Emmanuel Lenfant (Réseau Archeologia.be) et Philippe Pierquin (Association "Les Amis de la Citadelle"), se met en place dès 2013 à la suite de l'officialisation d'un premier projet : l'option "Résille".
Face à une contestation grandissante, la Ville de Tournai organise une consultation populaire sur le choix du matériau à utiliser pour élever l'arche centrale : pierre ou résille[9],[10]. Le , 79% des votants s'expriment en faveur de la pierre. Par la suite, une série de réunions et d'ateliers citoyens sont organisés qui aboutissent à un projet élaboré par l'architecte Olivier Bastin. Ce projet respecte l'utilisation de la pierre et opte pour une architecture plus épurée, plus moderne que l'esquisse initiale[10].
Dans ce contexte tendu, le 9 juillet 2018, Pierre-Emmanuel Lenfant dépose une Alerte Patrimoine auprès de l'ICOMOS International étant donné le risque d'un déclassement UNESCO du beffroi de Tournai.
Malgré les craintes exprimées, le Conseil communal vote le 28 janvier 2019, majorité contre opposition, la modification de la voirie communale et le plan d'alignement. Le projet d'Olivier Bastin est donc validé malgré les risques.
Le 19 mars 2019, la Presse est informée de l'abandon du projet Bastin (Courrier de l'Escaut du 20 mars 2019). Des garanties seront alors données pour préserver une version traditionnelle. L'idée d'un recours devant le Conseil d'Etat est définitivement abandonnée[11],[12].
Le 10 juillet 2019, la question du Pont des Trous, du musée des Beaux-Arts et du Smart Centre est évoquée lors de la 43ème session du comité du patrimoine mondial de l'UNESCO.
Les travaux de déconstruction débutent le en présence de la ministre Marie-Christine Marghem[13],[14],[15].
Réconstruction et réouverture
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Les travaux de reconstruction sont menés de 2019 à 2023[16],[17].
Le 14 et le 15 avril 2023, le nouveau pont est inauguré en présence du bourgmestre Paul-Olivier Delannois. Des animations sont projetées et de la musique est diffusée. L’événement dure 2 jours et rassemble au total plus de 10 000 personnes[18].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- ↑ Caractérisation patrimoniale du Pont des Trous, évaluation des impacts des différents tracés proposés pour sa traversée et recommandations
- ↑ Les Beautés du Tournaisis : Le Pont des Trous
- ↑ « Pont des Trous (porte d’eau du 13e siècle) », Découvrir Tournai, sur Tournai.be (consulté le ).
- ↑ Arrêté de la Région wallonne
- ↑ Le problème, ce sont les écluses ! , lavenir.net, 27 juin 2013
- ↑ « Pont des Trous - Retour sur une initiative citoyenne en faveur d'un monument emblématique de la Ville de Tournai (2013-2019) | Tournai - Unesco - Patrimoine - Wallonie », sur archeologia.be (consulté le )
- ↑ « Pont des Trous de Tournai : quatre options présentées », sur www.lavenir.net (consulté le )
- ↑ « Pont des Trous: Rudy Demotte est persuadé que le dossier va se débloquer », sur RTBF Info, (consulté le )
- ↑ « Consultation populaire Pont des Trous : le 25 octobre 2015 », sur TOURNAI.be (consulté le )
- « Tournai : Le nouveau pont sera plus moderne que sur les photos de la consultation populaire », sur RTBF Info, (consulté le )
- ↑ Pont des Trous de Tournai : le projet contemporain est abandonné
- ↑ « Voici à quoi ressemblera le nouveau pont des Trous à Tournai », sur RTBF Info, (consulté le )
- ↑ Destruction du pont des Trous : Marghem déplore le manque d'empathie envers la population
- ↑ Denis Vanderbrugge, « Tournai: le Pont des Trous vit ses dernières heures », Régions, sur RTBF, (consulté le ).
- ↑ « Tournai s'apprête à dire adieu à son pont médiéval trop étroit pour la navigation », sur www.lefigaro.fr, (consulté le )
- ↑ « Voici à quoi ressemblera le nouveau pont des Trous à Tournai », sur RTBF (consulté le )
- ↑ « Fin des travaux du Pont des Trous : Tournai prépare une grande fête qui « restera dans les annales » », sur La Voix du Nord, (consulté le )
- ↑ « Polémiques, drakkar sur l’Escaut, mapping… l’inauguration du Pont des Trous de Tournai restera dans les mémoires », sur sudinfo.be, (consulté le )
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Jean Housen, « Tournai - pont des Trous », Bulletin de la Commission royale des monuments, sites et fouilles, Commission royale des Monuments, des sites et fouilles, 2004-2005, p. 62-64 (ISBN 2-87401-130-4, lire en ligne [PDF])
- Christine Renardy, Le patrimoine insolite de Wallonie, Namur, Agence wallonne du Patrimoine, coll. « Carnet du Patrimoine » (no 157), , 72 p. (ISBN 978-2-39038-013-9), p. 44.
- Bernard Hasquenoph, Le pont des Trous : histoire d'un fake patrimonial, Independently Published, (ISBN 979-8390701706)
Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- Photo du pont des trous en 1940, avec l'arche centrale détruite
- Étienne Boussemart, « Le Tournai d’avant : 15 h 20 le 19 mai 1940 : pourquoi? », Régions, sur l'avenir.net, (consulté le ).
- Scaldistournai, « Tournai - Déconstruction des arches du Pont des Trous », Dossier de presse [PDF], Service public de Wallonie, .