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Pont des Arts

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Pont des Arts
Le pont des Arts et l'Institut de France.
Le pont des Arts et l'Institut de France.
Géographie
Pays Drapeau de la France France
Région Île-de-France
Département Paris
Commune Paris
Coordonnées géographiques 48° 51′ 30″ N, 2° 20′ 15″ E
Fonction
Franchit Seine
Caractéristiques techniques
Type passerelle
Longueur 155 m
Largeur 11 m
Matériau(x) Fonte (1804)
Acier (1984)
Construction
Construction 1801-1804-1984
Inauguration
Mise en service
Démolition 1979
Architecte(s) Louis-Alexandre de Cessart (1804),
Louis Arretche (1984)
Historique
Protection Logo monument historique Inscrit MH (1975)
Patrimoine mondial Patrimoine mondial (1991, au titre de Paris, rives de la Seine)[1]

Carte

Le pont des Arts, ou passerelle des Arts, permet de franchir le fleuve Seine, en France, à Paris. Cet ouvrage réservé aux piétons se trouve au cœur de la ville, dans le 1er arrondissement en rive droite (quai François-Mitterrand) et dans le 6e arrondissement en rive gauche (quai de Conti). Construit en fonte au tout début du XIXe siècle, il est le tout premier pont métallique établi dans la capitale française.

Devenu vétuste et fragilisé notamment par plusieurs accidents de navigation, il s'effondre partiellement en 1979. Il est ensuite reconstruit non pas à l'identique mais selon des dispositions très voisines de l'ouvrage initial.

Situé près du Louvre, musée d'art qui lui a donné son nom, il offre une vue panoramique sur l'île de la Cité, la cathédrale Notre-Dame, le musée d'Orsay, l'Institut de France, le Pont-Neuf.

Situation et accès

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Il relie les quais Malaquais et de Conti, où il fait face à l'entrée monumentale et à la coupole de l'Institut de France, dans le 6e arrondissement, au quai François-Mitterrand face à l'entrée sud de la cour carrée du palais du Louvre (qui s'appelait « palais des Arts » sous le Premier Empire), dans le 1er arrondissement de Paris. Il forme ainsi un axe entre ces deux monuments parisiens.

Le pont des Arts est inscrit au titre des monuments historiques depuis le [2].

Ce site est desservi par les stations de métro Louvre - Rivoli, Pont-Neuf, Mabillon et Saint-Germain-des-Prés.

Origine du nom

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Son nom lui vient du palais du Louvre, qui fut appelé « palais des Arts », puisque devenu musée national après la Révolution[3].

La passerelle de 1804

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Le 15 mars 1801 est prise la décision suivante : « Au nom du peuple français, Bonaparte, premier Consul, proclame loi de la République le décret suivant rendu par le Corps-Législatif, le 24 ventôse an IX, conformément à la proposition faite par le Gouvernement, le 18 dudit mois, communiquée au Tribunat le lendemain.[...] Il sera établi trois ponts à Paris, sur la Seine : le premier entre le Jardin des Plantes et l'Arsenal [pont d'Austerlitz] ; le deuxième, entre les îles de la Cité et de la Fraternité [pont de la Cité] ; le troisième, pour le passage à pied entre le Louvre et le quai des Quatre-Nations [l'actuel quai de Conti] »[4].

L'établissement de ces trois ouvrages est assuré par une société anonyme, la Compagnie des Trois Ponts, qui en obtient la concession jusqu'en 1897[4].

Le 28 avril 1801, le projet de l'ouvrage piétonnier à construire entre le Pont-Neuf et le pont Royal est présenté au Conseil général des ponts et chaussées par Louis-Alexandre de Cessart, doyen des Inspecteurs généraux des ponts et chaussées[4].

Le 25 juillet 1802 est prise une décision politique : afin de stimuler l'industrie métallurgique française et de concurrencer son homologue britannique, l'État impose à la Compagnie des Trois Ponts de construire l'ouvrage en fonte. Le surcoût est pris en charge par l'État[4].

L'ouvrage n'étant pas destiné au passage de véhicules, il a une structure légère. Il mesure dix mètres de largeur, sa longueur est de 157,50 m. Il comporte neuf arches de 16,80 m d'ouverture, qui reposent dans le fleuve sur des piles en maçonnerie. Celles-ci sont relativement élevées afin de respecter le gabarit de navigation. Il en résulte que le tablier est plus haut que les quais, ce qui impose la construction d'un escalier en maçonnerie à chaque extrémité[4].

Jean-Baptiste Launay, fondeur qui a contribué à la colonne Vendôme, est chargé de la fabrication des fermes constituant chaque arche.

L'ingénieur militaire Jacques Dillon assure la maîtrise d'œuvre des travaux et l'ouvrage est inauguré le 23 septembre 1803[4].

Le pont est agrémenté d'orangers qui sont remisés en hiver dans un local réservé à cet usage[4].

Vues historiques de la 1re passerelle

Le pont modifié de 1852

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En 1852, à la suite de l'élargissement du quai de Conti, les deux arches de la rive gauche deviennent une seule arche.

Le pont était soumis à un droit de péage[5]. Ainsi, dans le roman La Rabouilleuse d'Honoré de Balzac, Philippe Bridau « faisait cirer ses bottes sur le Pont-Neuf pour les deux sous qu'il eût donnés en prenant par le pont des Arts pour gagner le Palais-Royal »[6].

Vues historiques du pont après 1852

En 1902, l'architecte Eugène Hénard propose de le remplacer par un pont en X, deux ponts qui se croiseraient en leur milieu au centre de la Seine[7].

Le 12 avril 1943, sous l'Occupation, le corps du général Mordacq fut retrouvé en dessous du pont des Arts. Le lendemain, la radio allemande annonce son suicide, annonce reprise par les autres journaux. Cependant, l'autopsie ainsi que le rapport de police sont censurés.

En 1976, l'inspecteur général des Ponts et Chaussées rapporte la fragilité de l'ouvrage, principalement due aux bombardements des Première et Seconde Guerres mondiales et à plusieurs collisions de bateaux en 1961 et 1970.

Le pont est fermé à la circulation en 1977 et s'effondre sur deux travées soit 60 mètres en 1979 à la suite de la collision provoquée par une barge, en période de crue[8],[9]. Le pont est démonté en 1980 ; environ la moitié du pont — quatre arches — est récupérée par la ville de Nogent-sur-Marne. Après dix ans de stockage, la passerelle est remontée en bord de Marne, près du port de plaisance, où l'on peut la parcourir aujourd'hui[10]. Son inauguration en 1992 est présidée par Jacques Chirac.

Le pont de 1984

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Le pont actuel a été reconstruit entre 1981 et 1984 selon les plans de Louis Arretche, qui a diminué le nombre des arches (sept au lieu de neuf), ce qui permet leur alignement sur celles du pont Neuf, tout en reprenant l'aspect général de l'ancienne passerelle. L'acier a remplacé la fonte et la portée originelle de l'arche côté Institut, plus grande que celle des autres, a servi d'étalon à la conception des nouvelles arches[8]. La passerelle a été inaugurée par Jacques Chirac — alors maire de Paris — le .

À la fin des années 1990, un projet de construction de passerelle piétonnière franchissant le Kamo-gawa à Kyoto, au Japon, a été développé en prenant comme modèle le pont des Arts ; il ne fut néanmoins pas mené à son terme devant l'opposition de la population[11].

Le pont est rénové en 2023 pour un coût de 1,8 million d'euros. Son platelage, délabré et devenu dangereux, est entièrement remplacé. Du bois exotique africain (du bilinga), qui grise en vieillissant, est retenu pour sa durabilité. Il est en effet très résistant aux écarts de température ainsi qu'aux vibrations et le nouveau platelage devrait donc durer trente ans. Ce matériau est acheminé sur place par péniche. La surface totale remplacée est de 1600 mètres carrés. Des bancs d'un nouveau modèle sont installés[12].

Les cadenas d'amour (2008-2015)

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À partir de 2008[13], les garde-corps grillagés du pont des Arts deviennent le support de nombreux « cadenas d'amour » accrochés par des couples[14]. Cette pratique s'étend ensuite à la passerelle Léopold-Sédar-Senghor, au pont de l'Archevêché ainsi qu'à la passerelle Simone-de-Beauvoir.

Cette situation suscite une polémique sur les risques de dégradation du patrimoine engendrés par la présence de ces tonnes de cadenas (la mairie de Paris évoque 45 tonnes[14]) : endommagement des garde-corps, esthétique... Le premier adjoint de la Ville de Paris déclare en 2015 : « Plusieurs centaines de milliers de cadenas sont accrochés sur ce pont. Ils mettent à mal l’esthétisme de l’édifice, détériorent sa structure et sont susceptibles de provoquer des accidents »[15]. Ainsi, les garde-corps grillagés sont définitivement retirés le 1er juin 2015 et sont d'abord remplacés par une exposition temporaire d'œuvres de street art de Jace, eL Seed, Pantonio et Brusk[15][16], puis par des panneaux en verre à partir de l'automne 2015[17].

Le pont et les arts

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Littérature

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  • Dans La Marche à l'étoile, roman de Vercors publié en 1943, le personnage de Thomas Muritz, jeune Hongrois nourri de culture française, traverse l'Europe pour rejoindre la France qui est pour lui terre de justice et de liberté. Le héros du roman désire rejoindre le fameux, l'unique pont des Arts, merveille parisienne. Après un périple d'un mois à travers un continent tourmenté par la guerre, il arrive à son but s'enflamme pour « ce point du monde où l'on embrasse à la fois […] l'Institut, le Louvre, la Cité — et les quais aux bouquins, les Tuileries, la butte latine jusqu'au Panthéon, la Seine jusqu'à la Concorde ».
  • C'est sur le pont des Arts que Jean-Baptiste Clamence, le personnage principal et le narrateur du récit La Chute d'Albert Camus, entend un rire dont il n'identifie pas immédiatement la provenance mais qui aboutit à la nécessité pour lui de changer complètement de vie.

Le jour du centième anniversaire de la naissance de Vercors, le 26 février 2002, une plaque commémorative est apposée, quai de Conti, sur le parapet (côté aval) de l'escalier d'accès à la passerelle. Vercors rencontrait en ce lieu symbolique du rayonnement culturel de la France dans le monde Jacques Lecompte-Boinet, chef du mouvement Ceux de la Résistance, pour lui confier des exemplaires des Éditions de Minuit (dont le premier ouvrage publié fut Le Silence de la mer) destinés au général de Gaulle.

En peinture

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Jean Béraud, Un jour de vent sur le pont des Arts (vers 1880-1881), Metropolitan Museum of Art (New York).
La Seine et le Louvre, 1903,
Camille Pissarro,
musée d'Orsay, Paris.

Lieu d'exposition

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  • Au printemps 1999, durant trois mois, le pont accueille une grande rétrospective en plein air de l'œuvre de l'artiste sénégalais Ousmane Sow (1935-2016), encore peu connu du grand public ; la fréquentation de l'exposition, qui présente soixante-quinze de ses imposantes sculptures, est estimée à plus de trois millions de visiteurs[18].

Cinéma, télévision et ballet

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Vue panoramique depuis la passerelle.

« Je suis sur le pont des Arts à Paris. D'un côté de la Seine on voit la façade harmonieuse et sobre de l'Institut, bâti vers 1670 pour être un collège. Sur l'autre rive, le Louvre, construit depuis le Moyen Âge jusqu'au dix-neuvième siècle : un sommet de l'architecture classique, splendide et équilibré. En amont on voit le haut de Notre-Dame qui n'est peut-être pas la cathédrale la plus attirante, mais sûrement la façade la plus rigoureusement intellectuelle de tout l'art gothique. Les maisons qui longent les quais du fleuve montrent aussi de façon rationnelle et humaine ce que devrait être l'architecture des villes. En face de ces maisons, sous les arbres, s'alignent les boîtes des bouquinistes où des générations d'amateurs ont donné libre cours à ce passe-temps d'homme cultivé : collectionner les livres. Depuis cent cinquante ans, les élèves des Beaux-Arts passent sur ce pont pour aller étudier les chefs-d'œuvre du Louvre ; de retour dans leurs ateliers, ils discutent et rêvent de faire quelque chose qui soit digne de la grande tradition. Et sur ce pont, depuis Henry James, combien de pèlerins venus d'Amérique se sont-ils arrêtés pour respirer le parfum d'une culture aux racines lointaines, conscients de se sentir au centre même de la civilisation. »

— Kenneth Clark, Civilisation, 1969, trad. fr. Hermann, 1974.

Notes et références

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  1. « Paris, rives de la Seine », sur whc.unesco.org, UNESCO, (consulté le ).
  2. Notice no PA00085998, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  3. Félix et Louis Lazare, Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments.
  4. a b c d e f et g « Le pont des Arts », sur structurae.net (consulté le )
  5. Louis et Félix Lazare, Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments, « Arts (pont des) », p. 34, sur Gallica.
  6. La Rabouilleuse sur Wikisource.
  7. Bruno D. Cot, « Paris. Les projets fous… auxquels vous avez échappé », cahier central publié dans L'Express, semaine du 29 mars 2013, p. XI.
  8. a et b Philippe Mathieux, « Le sauvetage du pont des Arts », sur www.philippemathieux.com (consulté le )
  9. la rédaction, « Qui a construit le pont des Arts à Paris ? », sur Futura (consulté le )
  10. [PDF] Descriptif de l'opération de transfert sur le site du maître d'œuvre, tpi.setec.fr.
  11. (en) Christoph Brumann, « Deconstructing the Pont des Arts : Why Kyoto Did Not Get Its Parisian Bridge », Senri ethnological studies, National Museum of Ethnology, no 62,‎ , p. 15-24 (ISSN 0387-6004).
  12. « Nouveau plancher, rambardes sans cadenas… À Paris, le pont des Arts a achevé sa métamorphose », sur www.leparisien.fr (consulté le )
  13. « Les “cadenas d'amour” du pont des Arts ne sont pas en sécurité », 20minutes.fr, 3 mai 2010.
  14. a et b « 45 tonnes de cadenas retirées du pont des Arts »
  15. a et b « À Paris, les travaux débutent pour délester le Pont des Arts de ses "cadenas d'amour" »
  16. « Le street-art remplace les cadenas sur le pont des Arts », lemonde.fr, 2 juin 2015.
  17. « C’en est fini des “cadenas d’amour” du pont des Arts », lemonde.fr, 1er juin 2015.
  18. José Marinho, « Paris honore le sculpteur Ousmane Sow avec son «Couple de lutteurs» », sur rfi.fr, (consulté le ).
  19. « Le pont des Arts se refait une beauté », sur www.paris.fr (consulté le )
  20. « La Mémoire dans la peau (Jason Bourne) », filmfrance.net, consulté le 3 décembre 2020.
  21. Virginie Marcucci, « Quand Carrie rencontre Paris : Sex and the City de l'autre côté de l'Atlantique et du miroir », Revue française d'études américaines, Belin, no 115 « La France en Amérique »,‎ , p. 102–120 (ISBN 978-2-7011-4827-4, ISSN 0397-7870).
  22. Anne-Charlotte de Langhe et Aude Vernuccio, « Le cinoche à la trace », Le Figaroscope, semaine du mercredi 10 au 16 avril 2013, p. 6.
  23. (en) « Winslet the new face of Lancome », Raidió Teilifís Éireann, 12 juin 2007.
  24. Amélie Bertrand, « Gossip Girl en tournage à Paris », Europe 1, 7 juillet 2010.
  25. « Photos du moyen métrage », pygmali.wifeo.com (consulté le 22 juin 2011).
  26. [PDF]« La France vue par Hollywood », ambassade des États-Unis d'Amérique en France, p. 50-51 (consulté le 26 août 2011).
  27. « Le pont des Arts dans Insaisissables », parisfaitsoncinema.com.
  28. Bérénice Paul, « Après la prestation d'Aya Nakamura lors de la cérémonie d'ouverture, le pont des Arts pris d'assaut », humanite.fr, 5 août 2024.

Pour approfondir

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Bibliographie

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Articles connexes

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Liens externes

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