Nous autres

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Nous autres
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Auteur Evgueni Zamiatine
Pays Drapeau de la république socialiste fédérative soviétique de Russie RSFS de Russie
Genre Roman de science-fiction
Version originale
Langue Russe
Titre Мы
Lieu de parution Paris
Date de parution 1920
Version française
Traducteur Benjamin Cauvet-Duhamel
Éditeur Gallimard
Collection Les Jeunes Russes
Lieu de parution Paris
Date de parution 1929
Nombre de pages 237

Nous autres ou Nous (selon les éditions ; titre original : Мы, littéralement « Nous ») est un roman de science-fiction satirique écrit en 1920 par l'auteur russe Evgueni Zamiatine.

Historique[modifier | modifier le code]

Le roman est publié en russe à Paris en 1920, puis en Union soviétique. Mais la publication du livre est interdite en 1923. En butte à la censure stalinienne, qu'il critique implicitement dans ses ouvrages de fiction, Zamiatine s'exile à Paris en 1931.

Le roman est traduit en France en 1929 à partir d'une traduction anglo-américaine ; il faut attendre 2017 pour avoir une traduction à partir du texte russe d'origine, sous le titre Nous (traduit par Hélène Henry, paru aux éditions Actes Sud).

Résumé[modifier | modifier le code]

Il s'agit du journal d'un homme du futur nommé « D-503 » (« Д-503 » dans le texte russe et la traduction française de 2017). Son travail consiste à fabriquer l'Intégral, un vaisseau spatial destiné à convertir les civilisations extraterrestres au bonheur, que l'État unique prétend avoir découvert. Au cours du roman, D-503 se rend compte qu'il devient, malgré lui, de plus en plus attiré par l'ancien monde (en particulier le nôtre), caractérisé par la liberté, l'imprévisible et la précarité du bonheur.

Comme dans la plupart des dystopies, l'État unique décrit dans le roman est un État totalitaire qui exerce un contrôle absolu sur toutes les activités humaines (décrites avec minutie dans la « Table des heures »). L’objectif affiché est de réaliser le bonheur collectif, auquel sont sacrifiées les libertés individuelles et jusqu’à l’individualité même, les personnes étant tenues de se fondre dans un collectif uniforme.

Analyse[modifier | modifier le code]

La société totalitaire du roman déshumanise ses membres. Les personnes sont dénommées par des codes numériques (une lettre et deux ou trois chiffres) et ne sont même plus qualifiées d’« hommes », de « femmes » ou de « personnes », mais de « numéros »[note 1].

Adaptations et influence[modifier | modifier le code]

Dans la littérature[modifier | modifier le code]

On peut retrouver des thèmes similaires dans Le Meilleur des mondes d'Aldous Huxley, Hymne d'Ayn Rand, 1984 de George Orwell[2] et Un bonheur insoutenable d'Ira Levin.

Dans son livre sur la conquête spatiale The Right Stuff (L'Étoffe des héros) l'écrivain américain Tom Wolfe identifie facétieusement les concepteurs du programme spatial soviétique (qui restaient anonymes, seuls Gagarine, Titov, Terechkova et les autres cosmonautes étaient médiatisés) à D-503, constructeur de L'Intégral. Il en fait un personnage de farceur sardonique, jouant avec les nerfs des Américains, qui avaient accumulé les déboires avec leurs propres fusées Vanguard avant le programme Mercury et mettaient les bouchées doubles pour rattraper les Soviétiques dans la course à l'espace.

Au cinéma[modifier | modifier le code]

  • Wir (de), adaptation allemande de 1982 écrite par Claus Hubalek et réalisée par Vojtěch Jasný.
  • The Glass Fortress, adaptation libre de 2016, écrite et réalisée par Alain Bourret.
  • Мы, adaptation russe de 2021 réalisée par Hamlet Dulyan.

À l'opéra[modifier | modifier le code]

En bande-dessinée[modifier | modifier le code]

Dans La Brigade chimérique de Fabrice Colin et Serge Lehman, l'URSS est dominée par un régime d'hommes et de femmes anonymes appelé « Nous Autres ». À la tête de ce régime, un robot, dont le visage évoque Staline, est appelé « Grand Frère », en référence au « Big Brother » du roman 1984 de George Orwell[3].

En musique[modifier | modifier le code]

  • Nous autres a inspiré en 2015 l'album The Glass Fortress, adaptation musicale et narrative du roman russe, par Rémi Orts Project and Alan B [1].
  • D503 en 2011 une pièce radiophonique de Franck Vigroux pour les ateliers de création radiophonique de France Culture [4]
  • Nous autres a inspiré en 2016 l'écriture de l'album For This We Fought the Battle of Ages du groupe de métal SubRosa.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Les numéros attribués aux personnages du roman sont une référence très personnelle de Zamiatine : il s'est servi des numéros des pièces de charpente métallique (quille, couples, varangues, etc.) du célèbre brise-glace Alexandre Nevski (en) dont il avait assuré le suivi du chantier lors de sa construction dans un chantier naval anglais[1].

Références[modifier | modifier le code]

  1. « Tous ces brise-glaces ont été construits en Angleterre, à Newcastle et dans les chantiers voisins ; il y a des traces de mon travail dans chacun d'eux, en particulier l’Alexander Nevsky — maintenant le Lénine ; j'ai fait la conception préliminaire, et après cela, aucun des dessins du navire n'est arrivé à l'atelier sans avoir été vérifié et signé : Bâtiment "Géomètre en chef des Brise-glaces russes" E.Zamiatin. » [La signature est écrite en anglais.] (Zamyatin ([1962])).
  2. Préface de Jorge Semprún p. 12 (Nous autres, L'Imaginaire)
  3. Clément Hummel, « Pour un imaginaire (mythique) de la fiction de genre d’avant-guerre, La Brigade chimérique (2009-2010) de Serge Lehman », Journée d'étude doctorale « Genres littéraires et fictions médiatiques »,‎ , p. 3 (lire en ligne)
  4. « Artsonores - Franck VIGROUX, D503 », sur INA

Éditions[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Katarzyna Cytlak, « Les visions noires d'un État socialiste : l'architecture comme langage critique dans Nous autres d'Evguéni Zamiatine », dans Clément Dessy et Valérie Stiénon (dir.), (Bé)vues du futur : les imaginaires visuels de la dystopie (1840-1940), Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, coll. « Littératures », , 305 p. (ISBN 978-2-7574-0887-2), p. 269-282.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]