Notre-Dame de Groeninghe

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
(Redirigé depuis Notre Dame de Groeninge)
Notre-Dame de Groeninghe
Statue miraculeuse de Notre-Dame de Groeninghe
Matériau
Hauteur
18,5 cmVoir et modifier les données sur Wikidata

Notre-Dame de Groeninghe, parfois Notre-Dame de Groeninge (en néerlandais : Onze-Lieve Vrouw van Groeninge), est une statue en ivoire de Vierge à l'Enfant, haute de 18,5 cm. Elle aurait été conçue par un sculpteur anonyme, actif à Paris dans les années 1260[1]. Des analyses récentes par l'Institut royal du patrimoine ont confirmé la présence de traces de polychromie ancienne à sa surface[2]. Elle est actuellement vénérée à l'église Saint-Michel de Courtrai

Légende des origines[modifier | modifier le code]

Selon la légende, la statue est découverte par le pape Martin IV au cours de son pontificat (1281-1285). Après que, dans un petit bois, on ait entendu pendant plusieurs jours des chants angéliques, le pape s'y rend avec de nombreux cardinaux. Il en ramena la statue qui avait été déposée là par les anges[3].

C'est le pape Honorius IV, au cours de son pontificat (1285-1287), qui en fait don à la comtesse Béatrice de Brabant, qui en fair à son tour don à l'abbaye de Groeninghe, située dans la région de Courtrai. C'est de ce lieu que la statue tire son nom[4].

À la vénération de Notre-Dame de Groeninghe se conjugue alors la vénération du Cierge de Groeninghe, façonné à partir d'une portion de la Sainte Chandelle d'Arras que Béatrice de Brabant avait obtenue de l’évêque d'Arras en 1285[5].

Miracle de la bataille des éperons d'or[modifier | modifier le code]

Selon la légende, lors de la bataille des éperons d'or, en 1302, Gui de Namur, qui dirigeait les milices flamandes acculées, aurait tourné son regard vers l'abbaye de Groeninghe en s'écriant « Sainte Reine du Ciel, secourez-moi ! », faisant par ce cri basculer la bataille en sa faveur.

Dans le camp opposé, le roi Sigis de Mélinde (ou de Majorque), allié des Français, vit au-dessus de l'église du monastère une vive lumière et dans celle-ci la statue de Notre-Dame de Groeninghe. Demandant à son entourage de quel bâtiment il s'agissait, on lui répondit que c'était l'église du monastère, où la Vierge était particulièrement honorée et dans laquelle les religieuses devaient être en prière. « Je suis Perdu », s'exclama-t-il, « C'est là aussi que je dois mourir. » Ce qui advint, cependant que la chevalerie française était défaite[6].

Miracles du XVIIe siècle[modifier | modifier le code]

En 1636, la ville de Courtrai est frappée par une épidémie de peste. Le , est organisée une procession et une exposition de la Statue de Notre-Dame de Groeninghe, vénérée comme le salut des infirmes et la consolatrice des Affligés, ainsi que du Cierge de Groeninghe. Vénérée dans la journée sur la place du marché, elle est ensuite rapportée au monastère où elle est exposée neuf jours durant. Selon les témoins du temps, de nombreuses guérisons se produisent[7].

En 1643, lors des fêtes de l'ascension, des témoins affirment avoir entendu des chants angéliques, en particulier les litanies de la Sainte Vierge, dans l'église abbatiale de Groeninghe[8].

L’évêque Maximilien de Gand ordonne une enquête qui s'étend de 1640 à 1645[9]. Au terme de l'enquête, son successeur l’évêque François Villain de Gand reconnait comme authentiques cinq miracles :

  • le chant des Anges entendu dans l'église de Groeninghe ;
  • la résurrection de Marie Carboni Roussel, 38 mois, d'Armentières ;
  • la guérison d'un ulcère au sein droit de Madeleine Angellie, 31 ans, d'Ypres ;
  • la guérison d'un saignement de sœur Françoise de Croix, de Courtrai ;
  • la guérison d'une paralysie d'Hubert de Beausart, 19 ans, de Wazemmes.

Il reconnaît aussi 22 grâces singulières, douze grâces remarquables et, comme faveurs particulières, onze guérisons de personnes reconnues comme obsédées ou possédées par le malin[10].

Confrérie de Notre-Dame de Groeninghe[modifier | modifier le code]

Reproduction en bois de Notre-Dame de Groeninghe

En 1660, le père Joseph Hermans demande et obtient du pape Alexandre VII l'autorisation de fonder une confrérie à Notre-Dame de Groeninghe, celle-ci existe jusqu'à la Révolution française. La confrérie est rétablie le par le cardinal Caparo[11].

Transfert à l'église Saint Michel[modifier | modifier le code]

Après la Révolution française, en , la statue de Notre-Dame de Groeninghe est officiellement rendue au culte et installée dans l'église Saint Michel de Courtrai[12]. En 1841, elle est définitivement cédée par les cisterciennes dont la congrégation a cessé d'exister[13].

Couronnement[modifier | modifier le code]

En 1940, la ville de Courtrai étant sous la menace de bombardements et encombrée de réfugiés, plusieurs membres du clergé local font la promesse solennelle de s'affairer pour obtenir le couronnement de Notre-Dame de Groeninghe si la ville reste épargnée à cette période[14]. Les démarches entreprises aboutissent en 1951 lorsque le pape Pie XII donne mission à monseigneur Henricus Lamiroy de couronner la statue. C'est finalement Fernando Cento, Nonce apostolique, qui aura cette responsabilité. La cérémonie se déroule le , à l'occasion du 650e anniversaire la bataille des éperons d'or. Par manque de place dans les églises de la ville, elle a lieu sur la plaine de Groeninghe. Plus de 10 000 personnes y assistent et 60 prêtres sont nécessaires pour distribuer la communion[15].

Dévotion populaire[modifier | modifier le code]

Moederzegen[modifier | modifier le code]

Notre-Dame de Groeninghe est priée par les femmes pour le bon déroulement des grossesses et contre l'infertilité. À l'occasion d'une visite à l'église Saint-Michel de Courtrai, les femmes enceintes peuvent être bénies par un prêtre[16]. Cette tradition est connue sous le nom de Moederzegen (bénédiction de la mère)[17]. À cet effet, une cruche emplie d'eau bénite est également disponible près de l'autel[18].

Ex-votos[modifier | modifier le code]

ex-voto traditionnel à Notre Dame de Groeninghe, 1962

Autour de la dévotion à Notre-Dame de Groeninghe s'est déroulée, de la fin du XIXe à la fin de XXe siècle, la production d'Ex-votos spécifiques à la région de Courtrai : ceux-ci étaient fait de métal et avaient la forme d'un écusson ou d'un blason, évoquant les légendes du Moyen Âge. Les dédicaces y étaient peintes en caractères gothiques et rédigées en néerlandais ou en français. Les indications de lieux qui s'y trouvaient indiquaient une dévotion s'étendant en Flandre Occidentale, en Flandre-Orientale et dans le Nord de la France  Dans les années 1980, on comptait encore plus de 160 de ces ex-votos accrochés aux murs la chapelle de l'église Saint-Michel. La plupart auraient été fabriqués par Albert Viaene, entrepreneur en travaux de peinture[19]. Ces ex-votos ont tous été enlevés de la chapelle. Les derniers exemplaires de ces ex-votos sont encore visibles à la chapelle Onze-Lieve-Vrouw ter Putte à Courtrai, seulement lors de son ouverture en mai.

Plusieurs peintures assimilables à des ex-votos ont été réalisées pour commémorer les miracles ou en témoignage de dévotion à Notre-Dame de Groeninghe. Une de ces peintures, datant de la première moitié du XVIIe siècle, illustre l'exorcisme de Joosynken Callens, une adolescente âgée de 15 ans[20]. L'évènement se serait produit le [21],[22]. Une seconde, de la même époque, décrit dans quatre médaillons la découverte par le pape, le don à Béatrice de Brabant, un exorcisme et la résurrection de Maria Carboni[23]. Le peintre Jean-Baptiste van Moerkercke (1623-1673) a également réalisé au XVIIe siècle une peinture de la statue de Notre-Dame de Groeninghe, Notre Dame de Groeninghe dans une niche, entourée de fleurs et de fruit[24]

Autres offrandes[modifier | modifier le code]

La chapelle Notre-Dame de Groeninghe à Bas-Warneton.

Autrefois[Quand ?], une procession d'enfants se déroulait durant la pendant la pentecôte au terme de laquelle des bougies étaient allumées en l'honneur de Notre-Dame de Groeninghe[25]. Des médailles et des images pieuses étaient également diffusées. Aujourd'hui, les pèlerins peuvent brûler des bougies de neuvaine ornées d'une image de Notre-Dame de Groeninghe dans le sanctuaire.

Chapelles[modifier | modifier le code]

Dans la région de Courtrai et au delà, de nombreuses chapelles ont été dédiées à Notre-Dame de Groeninghe : à Bas-Warneton, à Bellegem[26], à Courtrai[27], à Dottignies[28], à Hal[29], à Koekelare[30], à Lendelede[31], à Marke[32], à Roulers[33].

Poésie[modifier | modifier le code]

En 1866, Clémence Hiers, Dame Prieure du Béguinage de Courtrai, a consacré un recueil de poèmes dédiés à Notre-Dame de Groeninghe.[réf. nécessaire]

Galerie[modifier | modifier le code]

L'église Saint Michel de Courtrai possède un ensemble de dix vitraux illustrant les légendes et l'histoire de la statue de Notre-Dame de Groeninghe.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. De Potter Guérin, p. 39.
  2. (nl) Ingrid Geelen, « Behandelingsverslag Onze-Lieve-Vrouw van Groeninge, Sint-Michielskerk Kortrijk », sur onroerenderfgoed.be, (consulté le ).
  3. Possoz, p. 44.
  4. Possoz, p. 45.
  5. Possoz, p. 63-64.
  6. Possoz, p. 33-36.
  7. Possoz, p. 47-48.
  8. Possoz, p. 46.
  9. Possoz, p. 49.
  10. Possoz, p. 70-81.
  11. Possoz, p. 50-52.
  12. Possoz, p. 52.
  13. Possoz, p. 67-68.
  14. de Clippele, p. 24.
  15. de Clippele, p. 28.
  16. Giraldo, p. 40.
  17. (nl) « Moederzegen: Zr Lieve vertelt », sur sint-michielsbeweging.be, (consulté le ).
  18. Giraldo, p. 63.
  19. Giraldo, p. 129-130.
  20. (nl) « Duiveluitdrijvingen door O.-L.-Vrouw van Groening », sur erfgoedzuidwest.be (consulté le ).
  21. (nl) « 2. Maria, het tweede kind van Joos en Mauke werd geboren in 1594. Ze huwde er op 5 november 1619 met Michiel Duhaion, de zoon van Pierre. Ze was 25 jaar oud. Samen gingen ze na een viertal jaren in Hulste wonen en kregen zes kinderen », sur korta.info (consulté le ).
  22. De Potter Guérin, p. 12-13.
  23. De Potter Guérin, p. 16-17.
  24. De Potter Guérin, p. 30.
  25. Giraldo, p. 60.
  26. « Groeningekapel », sur inventaris.onroerenderfgoed.be (consulté le ).
  27. (nl) « Kapelletje toegewijd aan Onze-Lieve-Vrouw-van-Groeninge », sur inventaris.onroerenderfgoed.be (consulté le ).
  28. Sentier nature et patrimoine Dottignies, Wallonie Picarde - antenne Mouscron, p. 8.
  29. (nl) « Kapel Onze-Lieve-Vrouw van Groeninghe », sur inventaris.onroerenderfgoed.be (consulté le ).
  30. (nl) « Kapel Onze-Lieve-Vrouw van Groeninge », sur inventaris.onroerenderfgoed.be (consulté le ).
  31. (nl) « Kapel Onze-Lieve-Vrouw van Groeninge », sur inventaris.onroerenderfgoed.be (consulté le ).
  32. (nl) « Kapel toegewijd aan Onze-Lieve-Vrouw van Groeninghe », sur inventaris.onroerenderfgoed.be (consulté le ).
  33. (nl) « Kapelletjes in West-Vlaanderen », sur kadoc.kuleuven.be (consulté le ).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Déclaration de l'origine, antiquité et dignité de l'image miraculeuse de N. Dame de l'abbaye de Groeninghe à laquelle y sont jointes les miracles arrivés par son intercession & certaines prières & dévotions pour la duement honorer et servir, Lille, Imprimerie de Jean Cramé, (lire en ligne).
  • Ernest Huysmans (O.Cist.) et Erasmus Quellinus II, Verklaeringhe van den oorsprongh, ouderdom ende weirdigheyt van het miraculeus beeldt van Onse L. Vrauwe in de Abdye van Groeninghe, Gand, Veuve de Petrus de Goesin, (lire en ligne).
  • Alexandre Possoz, Notre-Dame de Groeninghe, Tournai, Malo et Levasseur, (lire en ligne).
  • Clémence Hiers, Notre-Dame de Groeninghe : Poeme Historique, Beyaert, (lire en ligne).
  • (nl) Stéphanus de Clippele, Onze Lieve Vrouw Van Groeninghe, Tielt, Druk Lannoo, .
  • Comte Joseph de Borchgrave d'Altena, « La statuette d'ivoire de Notre-Dame de Groeninghe », dans Congrès archéologique de France. 120e session. Flandre. 1962, Paris, Société française d'archéologie, (lire en ligne), p. 172-174
  • (nl) Filippe De Potter et Sarah M. Guérin, Onze-Lieve-Vrouw van Groeninge, een uniek gotisch beeld (ca. 1260) in Kortrijk, Koninklijke Geschied- en Oudheidskundige Kring van Kortrijk, .
  • (nl) Walter Giraldo, Volksdevotie in West Vlaanderen, Bruges, Marc Van de Wiele, (ISBN 90-6966-057-1).