No poo

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Étiquette de shampoing néerlandais, où la cible marketing de l'industrie est clairement identifiée : les femmes, et plus précisément les jeunes femmes

La pratique no poo (abrév. de « no shampoo », litt. « sans shampoing ») fait partie d'un mouvement hygiéniste qui vise à réduire ou bannir les produits lavants pour la toilette des cheveux[1]. Les no poo affirment que le lavage à l'eau, le séchage mécanique, et le brossage sont suffisants pour assurer un soin des cheveux de qualité.

Dans le monde anglophone, on parle de mouvement « no soap no poo »[2], « low poo » ou « water-only »[3], ou de « slow cosmétique ». Dans le monde francophone, les termes consacrés oscillent entre l'anglicisme « no poo » et « ceux qui se lavent à l'eau »[4],[5], et on associe la démarche au minimalisme[6]. Le mouvement no poo est voisin du mouvement no soap.

Histoire[modifier | modifier le code]

Drene, l'un des premiers shampoings synthétiques lancé par Procter & Gamble dans les années 1930

Dans l'Égypte antique, le shampoing était fait d'acide citrique, de savon et d'eau[7]. En 1931, un chimiste français, Eugène Schueller, futur créateur de L'Oréal, lance un shampooing à base de matières synthétiques, le Platinosel. En 1934, c'est au tour de Dop, premier shampooing grand public[8]. Procter & Gamble lance un shampoing synthétique et non-savonneux, Drene, au cours des années 1930.

Le mouvement des no soap apparait à la fin des années 2000[9]. En 2007 par exemple, un animateur radiophonique lance un défi public de se passer de shampoing pendant six semaines et annonce ensuite que, sur les 500 participants du défi, 86% ont déclaré que « leurs cheveux étaient soit plus beaux, soit identiques » après le défi[10].

Motivations[modifier | modifier le code]

Les motivations des no poo sont multiples : faire des économies[11],[12], refus de la chimie[13], respect de l'équilibre naturel du corps humain[14], lutte contre la pollution[15], lutte contre les stéréotypes de genre[16],[17].

Fondement scientifique[modifier | modifier le code]

En février 2016, une étude de l’association de consommateurs UFC Que Choisir montre que, sur 200 shampoings, seule une minorité (26, soit 13 %) ne présente « aucun risque identifié à ce jour »[18]. Certains produits présentent des « risques significatifs » pour les « Tout-petits (0-3 ans) » (pour 7 d'entre eux), d'autres pour les « Femmes enceintes » (pour 3 d'entre eux), d'autres pour les « Enfants adolescents (3-16 ans) » (pour 3 d'entre eux), et 3 d'entre eux pour les 3 catégories à la fois[18].

Bien que les débats soient encore ouverts chez les dermatologues[19], le fondement scientifique du mouvement des No Poo repose sur l'idée d'équilibre du microbiome qui recouvre le cuir chevelu : une régulation naturelle intervient entre bactéries commensales et pathogènes. Le lavage avec des produits à base de savon, d'antiseptiques voire d'antibiotiques (aluminium) perturbe cet équilibre, et favorise la prolifération de colonies bactériennes responsables au mieux de mauvaises odeurs, au pire de pathologies cutanées y compris les pellicules.

L'hypothèse d'une hyper-production de sébum en réaction à l’agression du cuir chevelu par les shampoings est controversée. Le docteur Philippe Assouly, dermatologue de l’hôpital Saint-Louis (Paris) a une approche mesurée : « C’est vrai que si on agresse beaucoup la peau elle produit plus de sébum. Et c’est pareil pour le cuir chevelu. »[16]

Mais il y a une « injonction esthétique à avoir le cheveu souple, propre, pas huileux et en même temps sans aucun frisottis », selon Christian Bromberger, auteur de Les sens du poil. Une anthropologie de la pilosité (Créaphis Éditions, 2015).

Un dermatologue[Qui ?] a prouvé, en payant des prisonniers pour qu'ils ne se lavent pas les cheveux pendant un mois, que le nombre de ceux-ci ayant développé des pellicules n'avait pas évolué de manière significative[20].

La pratique a émergé dans le mouvement new age, mais elle est soutenue par certains médecins, qui font des liens entre l'émergence des maladies de la peau (eczéma, psoriasis, acné…) et l'arrivée sur le marché occidental des produits lavants[21].

Références[modifier | modifier le code]

  1. « No-poo ou comment laver ses cheveux sans shampoing », sur LExpress.fr, (consulté le )
  2. (en-US) « 5 Steps to Go No Poo - The "No Poo" Shampoo Method », sur Biome,
  3. (en-GB) « Water Only Hair Washing: The Dirty Truth », sur Hairstory,
  4. C. L., « Elle n’utilise plus de gel douche ni de savon pour se laver à l'eau depuis des années… Voici les résultats sur sa peau et son odeur », sur Femina,
  5. Laetitia Birbes, alias Le corps La maison L'esprit, « Bilan: Mon Année SANS Savon (feat. La Carologie) », sur Youtube,
  6. Fabien Olicard, « Elle ne se lave qu'à l'eau depuis un AN », sur Facebook,
  7. (en) Patrick Patrick et John Thompson, An Uncommon History of Common Things [« une histoire inhabituelle des choses habituelles »], National Geographic Books, , 304 p. (ISBN 978-1-4262-1227-7, lire en ligne), p. 194
  8. Agnès Walch, « Le shampoing », Historia,‎ , p. 54 (ISSN 0750-0475)
  9. Unknown, « LittleOwlCrunchyMomma: Haven't Washed My Hair For Three Years », sur LittleOwlCrunchyMomma (consulté le )
  10. (en-US) Anna Jane Grossman, « Of Course I Washed My Hair Last Year (I’m Almost Certain) », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
  11. Virginie Lamort de Gail, « Le No-poo : et si on arrêtait de se laver les cheveux ? », sur Madmoizelle, (consulté le )
  12. « C’est du propre », sur Society (consulté le )
  13. Julie Rambal, « Rester sale? C’est du propre! », Le Temps,‎ (ISSN 1423-3967, lire en ligne)
  14. William Thorp, « No Soap Opera », sur Society, (consulté le )
  15. Isabelle Choquet, « No Soap : qu'est-ce que ce mouvement qui bannit le savon et le shampoing ? », sur RTL,
  16. a et b Daphnée Leportois, « Pourquoi les femmes espacent de plus en plus leurs shampoings », sur Slate.fr, (consulté le )
  17. « Le marketing genré, une méthode aujourd'hui dépassée ? », sur Master 2 Communication Média Hors Média (M2 CMHM) - IAE Bordeaux, (consulté le )
  18. a et b « Substances toxiques dans les cosmétiques », sur www.quechoisir.org (consulté le )
  19. Abigail Cline, Laura N. Uwakwe et Amy J. McMichael, « No sulfates, no parabens, and the "no-poo" method: a new patient perspective on common shampoo ingredients », Cutis, vol. 101, no 1,‎ , p. 22–26 (ISSN 2326-6929, PMID 29529111, lire en ligne, consulté le )
  20. (en) Roach, Mary, « Chapter 10: Houston, We Have a Fungus », dans Packing for Mars, New York, W. W. Norton & Company, (ISBN 9780393068474), p. 191
  21. (en-US) James Hamblin, « You’re Showering Too Much », sur The Atlantic, (consulté le )