Nikon de la Montagne Noire

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Nikon de la Montagne Noire
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XIe siècleVoir et modifier les données sur Wikidata

Nikon de la Montagne Noire (en grec médiéval : Νίκων του Μαύρου Όρους) est un moine et écrivain religieux byzantin né à Constantinople vers 1025 et mort en Syrie ou en Arménie à la fin du XIe ou plutôt au début du XIIe siècle[1].

Biographie[modifier | modifier le code]

Issu d'une famille aristocratique byzantine, il embrasse d'abord la carrière militaire et commande une armée sous le règne de l'empereur Constantin IX Monomaque. Appelé, dit-il, par une injonction de la Mère de Dieu, il entre dans le monastère que Luc, ancien métropolite d'Anazarbe, a fondé dans les Monts Amanus (la « Montagne Noire »), au nord d'Antioche, et qui comprend environ 150 moines[2]. Choisi par Luc pour lui succéder, il entre en conflit avec la communauté en tentant de renforcer la discipline et est expulsé[3].

Ordonné prêtre par Théodose III, patriarche orthodoxe d'Antioche de 1057 à 1059, il est chargé par lui de réformer les monastères du nord de la Syrie et de les soumettre à l'autorité épiscopale. Toutefois il refuse le titre d'archimandrite des monastères de la province d'Antioche que lui offre le patriarche. Pendant le long interrègne qui suit (1059-1089), sa mission est confirmée par les locum tenentes (proexarchontes) successifs du patriarcat.

Nikon tente de fonder son propre monastère, dont il rédige la règle (typikon), mais l'entreprise échoue et la communauté se disperse. Il rejoint alors le monastère Saint-Siméon-le-Jeune, sur la « Montagne Admirable » (près de la ville actuelle de Samandağ). Au moment de la conquête d'Antioche par le sultan seldjoukide Suleyman Ier (1084), il se réfugie plus au nord, dans la région d'Erzincan, où vivent à l'époque des Arméniens unis à l'Église byzantine appelés les Tzatoi (Dzaiths en arménien)[4],[5]. Il défend l'usage de l'Arménien dans la liturgie par ces moines face à ses collègues byzantins qui regardent cette action avec défiance[6]. Il y intègre un monastère de la Mère de Dieu dit « τοῦ Ῥοιδίου » (c'est-à-dire « de la Grenade »). Ce nom a été longtemps lu par erreur « de Raithu », ce qui explique qu'on parle dans d'anciennes publications de « Nicon de Raithu » ou « Nicon du Sinaï », désignations qui sont toutefois erronées.

Nikon connaît le patriarche Jean l'Oxite (1089-1100), qu'il cite comme « le patriarche Jean », et il vit également jusqu'après la prise d'Antioche par les croisés en juin 1098. On ne sait s'il meurt au monastère Saint-Siméon-le-Jeune (selon Mgr Joseph Nasrallah) ou à celui du Roidion (selon A. Solignac).

Œuvre[modifier | modifier le code]

Trois ouvrages sont conservés de cet auteur :

  • les Interprétations des commandements du Seigneur, également appelées Pandectes[7] : il s'agit d'un florilège de textes extraits des Saintes Écritures, de la littérature patristique et de traités de droit canon, le tout organisé en 63 chapitres, « œuvre de jeunesse » selon l'auteur lui-même, composée sous le règne de l'empereur Constantin X Doucas (1059-1067), inspirée des Pandectes d'Antiochos, moine du monastère Saint-Sabas de Jérusalem au VIIe siècle ; il existe une version abrégée par l'auteur lui-même ; traduction en arabe peut-être du vivant de l'auteur (titre arabe : Al-Ḥāwī, ouvrage très diffusé chez les chrétiens arabophones), en slavon au XIIIe ou XIVe siècle[8], en éthiopien en 1582.
  • le Taktikon, ouvrage en 40 chapitres : les deux premiers sont des typika de monastères (le premier sans doute de celui qu'il a tenté de fonder, le second du Roidion), le troisième est un extrait du dernier chapitre des Pandectes, les 37 autres sont constitués de la correspondance de Nicon avec des supérieurs de monastères de la province d'Antioche ; mention est faite de la restauration du monastère Saint-Siméon-le-Jeune (détruit par les Seldjoukides en 1085) après la conquête de la région par les croisés en 1098 ; traduction arabe antérieure à la prise d'Antioche par les Mamelouks en 1268 (et la destruction des monastères) ; traduction en slavon contemporaine de celle des Pandectes.
  • le Petit Livre, composé en 1088, traité sur six sujets différents de discipline ecclésiastique, avec insistance sur la nécessaire soumission des monastères aux évêques.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Joseph Nasrallah, « Un auteur antiochien du XIe siècle : Nicon de la Montagne Noire (vers 1025 - début du XIIe siècle) », Proche-Orient Chrétien 19, 1969, p. 150-162.
  • Aimé Solignac, article « Nicon de la Montagne Noire, moine antiochien, XIe siècle », Dictionnaire de spiritualité, vol. 11, Paris, 1982, col. 319-320.
  • Charles De Clercq, Les textes juridiques dans les Pandectes de Nikon de la Montagne Noire, Venise, Tipografia dei Padri mechitaristi, 1942.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. A. P. Kazhdan, Alice-Mary Maffry Talbot, Anthony Cutler et Timothy E. Gregory, The Oxford dictionary of Byzantium, Oxford University Press, (ISBN 0-19-504652-8, 978-0-19-504652-6 et 978-0-19-989063-7, OCLC 22733550, lire en ligne) :

    « Melchite ecclesiastical writer; born Constantinople ca.1025, died in monastery of St. Symeon the Stylite the Younger, near Antioch, between ca.1100 and 1110 (Nasrallah, infra 152) or in monastery of Roidiou (Solignac, infra 319). According to his own testimony in the Taktikon, Nikon was born to a family of archontes and served in the army under Constantine IX. He then retired from the world, was tonsured by Luke, former metropolitan of Anazarbos, and settled in the monastery that Luke had founded on the Black Mountain north of Syrian Antioch. After Luke's death, Nikon met with hostility from the other monks when he attempted to impose monastic discipline, and he was eventually forced to leave. After attempting to found his own monastery, he settled in the monastery of Symeon the Younger on the Wondrous Mountain. When the Seljuks conquered Antioch in 1084, he moved to the monastery of the Virgin of the Pomegranate (Theotokos tou Roidiou). Nikon compiled the Pandektai, a collection of statements by the councils and church fathers concerning canon law that was to serve as a compendium for wandering monks. His Taktikon, in 40 chapters, is also a collection of authoritative texts on canonical and liturgical problems and includes a typikon for the monastery of Roidiou. Nikon's works were soon translated into Arabic and Church Slavonic. »

  2. Gilbert Dagron, « L'homme sans honneur ou le saint scandaleux », Annales, vol. 45, no 4,‎ , p. 929–939 (DOI 10.3406/ahess.1990.278878, lire en ligne, consulté le )
  3. (en) Milka Levy-Rubin, « M. Levy-Rubin, " 'The Errors of the Franks' by Nikon of the Black Mountain: between Religious and Ethno-Cultural Conflict”, Byzantion, 71 (2001), pp. 422-437. », Byzantion,‎ (lire en ligne, consulté le )
  4. A. P. Kazhdan, Alice-Mary Maffry Talbot, Anthony Cutler et Timothy E. Gregory, The Oxford dictionary of Byzantium, Oxford University Press, (ISBN 0-19-504652-8, 978-0-19-504652-6 et 978-0-19-989063-7, OCLC 22733550, lire en ligne) :

    « (Τζα̑τοι, Τζα̑θοι, etym. unknown), Armenians who belonged to the Greek church. The Armenian version of Basil the Great's Hexaemeron uses the word cayt῾ to render “Valentinians.” After the 10th C. it was applied to Armenians who were Chalcedonian, in opposition to the Gregorian Monophysite church. (See also Iberians.) The Armenian historian Uxtanes (10th C.?) promises to discuss the Cayt῾, but the relevant part of his History is lost. The term is more common in the 12th–13th C. In Greek the Tzatoi are first mentioned in the 11th-C. Taktikon of Nikon of the Black Mountain (ed. Beneševič, 11.7). »

  5. Isabelle Augé, « Le choix de la foi chalcédonienne chez les Arméniens », Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, no 9,‎ (ISSN 1760-5776, DOI 10.4000/cerri.871, lire en ligne, consulté le )
  6. Teresa Bałuk-Ulewiczowa, Armenia Christiana : Armenian religious identity and the Churches of Constantinople and Rome (4th-15th century), (ISBN 978-83-233-4190-1 et 83-233-4190-7, OCLC 965759655, lire en ligne)
  7. « 1 and 2 Clement in the Pandektes of Nikon of the Black Mountain », sur academic.oup.com (consulté le )
  8. THOMAS ROSÉN, « A Recent Contribution to the Corpus Editionum of Medieval Slavonic Texts », Harvard Ukrainian Studies, vol. 21, nos 3/4,‎ , p. 463–472 (ISSN 0363-5570, lire en ligne, consulté le )