Mouvement punk

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Deux punks britanniques dans les années 1980.

Le mouvement punk, qui se centre sur le punk rock, s'appuie sur divers types d'idéologies, de modes et autres formes d'expression, incluant art visuel, danse, littérature et films. À l'origine aux États-Unis, le mot « punk » décrit la musique basée sur des guitares électriques des groupes « garage » des années 1960 tels The Sonics, The Seeds, 13th Floor Elevators et des groupes de Détroit, The Stooges et MC5, ce qui est maintenant appelé protopunk (60's punk en anglais) pour éviter une confusion. Le mot punk aurait été utilisé la première fois par Lester Bangs (critique rock) pour qualifier la musique des Motor City Five (MC5).

Influences[modifier | modifier le code]

Groupe jouant sur la petite scène du 924 Gilman Street à Berkeley, en Californie.

Les influences du punk-rock sont aussi le groupe américain The New York Dolls, mais aussi les groupes de rock britannique comme The Who et The Kinks première manière. Au début des années 1970, un autre groupe américain électronique Suicide, mené par Alan Vega, est l'une des premières formations à être qualifés de Punk. D'autres artistes de sa scène new-yorkaise du club CBGB du milieu des années 1970, (Patti Smith, Television) et The Heartbreakers avec Johnny Thunders et Jerry Nolan, se démarquent par leur démarche et leur éthique, intransigeantes. On constate un fort désir de retourner à la spontanéité et la simplicité du rock primitif et un rejet de ce que les punks ont perçu comme prétentieux, mercantile et pompeux dans l'arena rock des années 1970, engendrant les formes grandiloquentes du heavy metal et du rock progressif. Par contraste, le punk a délibérément renforcé la simplicité de ses mélodies, refusant toute démonstration ostentatoire de virtuosité, engageant n'importe qui à former son propre groupe dans sa cave ou son garage et adoptant un format de chanson plus court (environ 3 minutes). Les paroles ont apporté une nouvelle radicalité d'expression dans les sujets politiques et sociaux, traitant souvent de l'ennui urbain et du chômage. Les thèmes sexuels étaient abordés de façon crue et ne se limitaient plus à l'amour sublimé qui était chanté ailleurs ou aux métaphores suggestives (et souvent transparentes, d'ailleurs) qui avaient cours dans le rock (puis la pop) et qui avaient suscité à l'origine de vives polémiques.

Aux États-Unis, les Ramones ont posé, à partir de 1974, les jalons du punk américain. The Germs, formés autour de Pat Smear, ont sorti en 1977 leur single Forming/Sexboy (live), souvent considéré comme le tout premier disque punk de Los Angeles. Richard Hell et ses Voidoids est un autre jalon important, tant pour l'image (T-shirts déchirés et port d'épingles à nourrices) que pour le son avec leur titre Blank Generation. À New York, le magazine Punk est fondé en 1975 par le dessinateur John Holmstrom, Ged Dunn et Legs McNeil. Au Royaume-Uni, certains ont pu écrire que des groupes traditionnellement rattachés au courant « pub rock », l'équivalent des garage bands américains au milieu des années 1970, pourraient représenter les prémices de l'explosion punk britannique de 1976-77, en raison de l'énergie de leur musique et de leur vitesse d'exécution ; parmi eux : Doctor Feelgood ou Eddie and the Hot Rods.

Arrière-scène du 924, Gilman Street.

Même si le premier groupe punk britannique[1] ayant sorti un disque fut The Damned dont le premier single vinyle parut confidentiellement durant l'été 1976 (son titre phare étant New rose), les véritables débuts du mouvement ont été les premiers concerts des Sex Pistols au Roxy Club et au 100 Club de Londres et l'interview du groupe dans une émission de large audience. Cependant, le manager des Sex Pistols, Malcolm McLaren, s'était considérablement inspiré de groupes américains pour créer les Sex Pistols. Il avait en effet suivi le groupe New York Dolls en tournée quelques années auparavant, et décida de partir son mouvement plus « anglais » sur sa ville natale.

Plusieurs acteurs de la scène musicale de ce temps prennent les Sex Pistols pour des enfants. Jerry Nolan, batteur de New York Dolls.

Le passage des Sex Pistols et du Bromley Contingent à la télévision a suscité un véritable engouement mais aussi une très vive hostilité (aboutissant à l'interdiction de la plupart de leurs concerts), qui fut l'un des engrais essentiels du phénomène. À partir de là le punk, médiatisé, a enflammé une partie de la jeunesse. La scène punk londonienne influence notablement la chanteuse allemande Nina Hagen en particulier dans son album Unbehagen, sorti en 1979. En France, les pionniers du mouvement furent le « petit cercle d'initiés » qui se créa autour d'Élodie Lauten. Revenant du CBGB's à New York, où elle avait entendu Patti Smith réciter d'étranges poèmes rock toutes les nuits, elle fit découvrir à ceux qui allaient former Angel Face et European Son (et plus tard, Métal Urbain), à Alain Pacadis et à Patrick Eudeline (qui décida alors de former le premier line-up d'Asphalt Jungle), cette vague explosive qui commençait à envahir la planète. De son côté, Marc Zermati, qui avait depuis plusieurs mois ouvert une boutique, l'Open Market, rue des Lombards (dans les Halles), où se côtoyaient Iggy Pop, les Flaming Groovies et Doctor Feelgood lorsqu'ils passaient à Paris, et aussi Yves Adrien, organisa, en , le premier festival punk de Mont-de-Marsan. The Damned clôturèrent les deux journées de délires. Au même moment, Philippe Bone, passant l'été à Londres, ramenait en France le premier single de ce groupe « vinylisé » paru chez un petit label indépendant qui venait juste d'en presser quelques exemplaires. C'est ainsi que New Rose, sur la face A de ce disque, retentit pour la première fois dans un lieu public en France, au Gibus.

Culture punk[modifier | modifier le code]

L'expression « punk » reste associée aujourd'hui à la période 1976-1980, incarnée par les Sex Pistols, The Clash, The Damned, Stiff Little Fingers, Buzzcocks, The Saints, Ramones, Strychnine et Stalag en France, entre autres et à une nouvelle forme d'énergie, d'esthétique et de radicalité prenant le pas sur la contestation hippie de la décennie précédente. La scène permet aussi à plusieurs chanteuses de percer et d'être les leaders de groupes avec notamment Siouxsie Sioux pour Siouxsie and the Banshees, Poly Styrene avec X-Ray Spex, et le quatuor féminin The Slits. À Londres, Malcolm McLaren, le manager des Sex Pistols était vu comme l'initiateur machiavélique et secret du mouvement. On note aussi l'influence du mouvement situationniste et du mouvement Dada dans l'esthétique et l'activisme punk, dominés par une économie de moyens et un sens aigu de l'auto-dérision. Ces courants ont marqué l'avant-garde du mouvement punk britannique, avec les Sex Pistols et leurs « satellites » : le Bromley Contingent (leur cercle rapproché), la boutique Sex de Malcolm McLaren et de la styliste Vivienne Westwood, Jordan, « créature » travaillant pour eux, The Flowers of Romance, etc. Le couple McLaren-Westwood a su habilement faire des Sex Pistols, dont ils se chargeaient de confectionner les tenues, leurs ambassadeurs les plus médiatiques, posant ainsi les fondations de l'apparence punk telle qu'elle reste ancrée dans la culture populaire.

Dans d'autres domaines artistiques, le graphiste Jamie Reid, proche des situationnistes, avait précédemment travaillé dans les revues Suburban Press et King Mob. Les pochettes de disques, dans les mains des graphistes punks, servent d'instrument de détournement des valeurs sociales et de la culture populaire comme la pochette du disque des Dead Kennedys Bedtime for Democracy. Pourtant la petite histoire a surtout gardé du punk des symboles : les épingles à nourrice utilisées comme bijoux, les coupes de cheveux extrêmes et colorées comme la crête iroquoise (mohawk en anglais) qui n'est d'ailleurs apparue qu'à partir du début des années 1980, le piercing (souvent avec des épingles de nourrice), le tatouage et la réappropriation « artistique » des vêtements de masse[2]. Après le punk pauvre est apparu le « punk chic », recyclage commercial et industriel de ce qui en 1977 s'inventait dans la rue. Au-delà du nihilisme prétendu ou affiché, le punk est un mouvement assez largement créatif et solidaire, un mouvement qui en profondeur semble avoir posé les bases de différentes alternatives sociales et économiques, qui ont parfois réussi à durer.

La scène punk s'est exportée mondialement, a créé une scène propre avec ses labels (Rough Trade, Factory, New Rose, Bondage Records, All or Nothing Records, Folklore de la zone mondiale…) et concerts alternatifs autogérés. Les groupes punk alternatifs comme Bérurier Noir ou Crass ont imposé des places de concert moins chères, les travellers ont inventé des modes de vie alternatifs, le mouvement des squats alternatifs est également issu de l'autonomie active voulue et animée par l'esprit originel du mouvement, qui cherche d'abord à vivre autrement et remet en question le mode de vie bourgeois traditionnel. La vague punk a vu naître également une presse underground indépendante, les fanzines créés par des amateurs. Aux États-Unis parmi les plus connus : Maximumrocknroll et Flipside, au Royaume-Uni Sniffin' Glue, en France New wave (réapparu en 2004), On est pas des Sauvages, Hello Happy Taxpayers, etc. Chaque scène locale a eu au moins son fanzine édité avec des informations, un graphisme différent, des entrevues avec les groupes locaux ou en tournée. Le magazine Factsheet Five a énuméré et chroniqué les milliers de publications underground des années 1980 et années 1990.

Des centaines d'expériences de squats communautaires et autogérés, ont accueilli et fait rayonner le mouvement punk. On peut penser par exemple, au Wagon, entre 1997 et 2004, à Saint Brieuc.

Période[modifier | modifier le code]

Si le punk a émergé en 1976, à l'époque dite de l'Hiver du Mécontentement et de la fin du Consensus d'après-guerre, durant la sortie de la chanson New Rose puis progressé jusqu'à son apogée en 1980[3], apogée symbolisée par le film Time Square d'Allan Moyle, il marquera ensuite un temps d'arrêt après la mort de Sid Vicious en 1979 puis de Darby Crash en 1980. Enfin, l'arrivée au pouvoir ces mêmes années de Margaret Thatcher puis Ronald Reagan, la mort de John Lennon le 8 décembre clôtureront cette période de contre-culture ainsi qu'une certaine époque. Malgré l'arrivée ensuite de la Cold Wave, les années 1980 seront symboliques de la montée d'un certain individualisme et matérialisme arrivés également en France avec le tournant de la rigueur de 1983 par le nouveau gouvernement socialiste et signifiant la fin du social, accéléré en 1986 avec les décès de Daniel Balavoine et Coluche mettant fin à un certain anticonformisme, créant un conformisme consensuel, conformisme qui est dénoncé sur le film réalisé par Vincent Maël Cardona Les Magnétiques sorti en novembre 2021[4].

Postérité[modifier | modifier le code]

Depuis son apparition à la fin des années 1970, le punk côtoie et échange avec d'autres cultures underground comme le reggae, notamment grâce à Don Letts (le punky reggae party de Bob Marley et Lee Perry), ou le ska, pour donner naissance à des groupes comme The Specials, Madness ou The Selecter. Par ailleurs, il a fortement inspiré, de par ses convictions, des groupes « hybrides », à la frontière du hard rock et du punk tels Motörhead, et Nashville Pussy. Le punk a eu une influence durable sur toute la musique contestataire, dans la continuité de la culture underground des seventies qui subsiste aux États-Unis, au Royaume-Uni, en France, aux Pays-Bas, et dans bien d'autres pays.

Punk rock[modifier | modifier le code]

Chronologie[modifier | modifier le code]

LibertinesThe IntelligenceRise AgainstThe StrokesMcluskyIkara ColtUncommonmenfrommarsThe White StripesBlack DiceWolf EyesLightning BoltAt the Drive-InSum 41MillencolinThe LocustMelt-BananaShellacSublime (groupe)Blink 182Blink 182The CasualtiesThe OffspringGreen DayGreen DayNirvana (groupe)MadballBiohazard (groupe)MudhoneyFugaziThe Jesus LizardThe MelvinsRancidNOFXSuicidal TendenciesBérurier NoirBad ReligionButthole SurfersBig BlackSwansThe ExploitedDead KennedysMinutemen (groupe)The Toy DollsThe Ex (groupe)Half JapaneseStranglersThe DamnedThe ClashTheoretical GirlsThe SlitsSex PistolsRamonesThrobbing GristleThe Modern LoversStoogesMC5Velvet UndergroundThe WhoThe Kinks

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. En ignorant Peter Hammill (vu que ce n'est pas un groupe) et l'album Nadir's Big Chance. Bien qu'usuellement estampillé « rock progressif » à défaut de pouvoir être rangé dans une seule et unique catégorie Peter Hammill a, avec cet album unique dans sa carrière, été reconnu par certains comme précurseur et source d'influence du « punk » et en particulier par des noms tels que John Lydon des Sex Pistols (Cf. Coupures de presse attestant le label « punk » en 1975 au Royaume-Uni)
  2. Philippe Liotard, « Body Modifications from Punks to Body Hackers : Piercings and Tattos in Postmodern Societies », in Damian Skinner, Contemporary Jewelry in Perspective, New York, Lark Jewelry & Beading, 2013, p. 209-214
  3. https://archive.wikiwix.com/cache/20220719212900/https://savoirs.usherbrooke.ca/bitstream/handle/11143/5720/MR91049.pdf?sequence=1&isAllowed=y.
  4. « Caméo Nancy - Les magnétiques », sur cameo-nancy.fr via Wikiwix (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) 1988, The New Wave Punk Rock Explosion, de Caroline Coon (Éditions : Omnibus Press) - 1977, premier ouvrage publié sur le mouvement punk britannique, en pleine période punk, par une journaliste elle-même devenue punk.
  • England's Dreaming, Les Sex Pistols et le punk, de Jon Savage, 2002, Éd. Allia : Publié en anglais en 1991. Ce livre présente, à travers l'histoire de son groupe le plus illustre, un historique très détaillé du mouvement punk et insiste particulièrement sur les différents aspects culturels qui le caractérise. Un discographie vient accompagner ce récit.
  • Nos années punk (Livre + Compil CD) 2003, de Christian Eudeline (Frère de Patrick, Rock-Critic et leader d'Asphalt Jungle) revient sur les premiers soubresauts de la scène française.
  • La Philosophie du Punk, de Craig O’Hara, Rytrut éditions, 2003, d’après le mémoire de sociologie de 1992 de l’auteur, ayant contribué au fanzine américain Maximumrocknroll. Publié chez AK Press en 1995 et 1999, traduit par Ladzi Galaï. Une étude de différents aspects du mouvement punk avec extraits d’interviews et commentaires, agrémentée de photos et d’iconographies. 2e édition revue et augmentée de  : présentation en ligne.
  • Chansons d’Amour, de Crass, Rytrut, 2005.[1]. Anthologie définitive et officielle de Crass, recueil de toutes les paroles de leur répertoire plus d'autres slogans de chocs et d'accès de colère symbolique de ce collectif, souvent considéré comme précurseur du mouvement anarko-punk. Édition française du livre Love Songs publié au Royaume-Uni par Pomona en 2004. Avec les textes volontairement présentés non-chronologiquement de Penny Rimbaud, Eve Libertine, Gee Vaucher, Steve Ignorant, Joy de Vivre, Tones & Jeremy Ratter, Phil Free, Pete Wright, Annie Anxiety.
  • Génération Extrême - 1975-1982, du punk à la cold-wave de Frédéric Thébault (Éditions : Camion Blanc), 2005, ouvrage présentant un panorama des mouvements musicaux de l'époque, depuis l'explosion du mouvement punk.
  • Going Underground – punk américain 1979-1992, de George Hurchalla, traduit par Ladzi Galaï, Rytrut, 2009 présentation en ligne. Sélection Prix du Livre Rock 2010. Une référence en la matière, truffé d'informations, d'interviews, commentaires et photos inédites.
  • Do it yourself!, Autodétermination et culture punk, de Fabien Hein, Le Passager clandestin, 2012.
  • Ian Glasper, Burning Britain : seconde vague punk britannique, Rytrut éditions, 2015, traduit par Frédéric Jalabert; Nico Poisson, David Mourey et Ladzi Galaï présentation en ligne.
  • Volume ! Luc Robène et Solveig Serre (La scène Punk en France (1976/2016) éditions Mélanie Seteun
  • Caroline de Kergariou, No Future. Histoire du punk, éditions Perrin, , 766 p. (lire en ligne).

Filmographie[modifier | modifier le code]

  • Terror on Tour, 1980.
  • Times Square, 1980.

Liens externes[modifier | modifier le code]