Meuse (fleuve)

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Meuse
Maas, Maes, Moûse, Mosa
Illustration
La Meuse à Monthermé.
Carte.
Le bassin de la Meuse
Caractéristiques
Longueur 950 km
Bassin 36 000 km2
Bassin collecteur Meuse
Débit moyen 357 m3/s (Lith[1])
Régime pluvial océanique
Cours
Source Pouilly-en-Bassigny - (Haute-Marne, France)
· Altitude 409 m
· Coordonnées 47° 58′ 28″ N, 5° 38′ 01″ E
Embouchure mer du Nord (Haringvliet)
· Localisation Hollande-Méridionale
· Altitude m
· Coordonnées 51° 42′ 52″ N, 4° 24′ 21″ E
Géographie
Principaux affluents
· Rive gauche Bar, Sormonne, Viroin, Molignée, Sambre, Mehaigne, Légia, Geer, Dieze
· Rive droite Mouzon, Vair, Aroffe, Chiers, Semois, Lesse, Bocq, Hoyoux, Ourthe, Gueule, Swalm, Roer, Niers
Pays traversés Drapeau de la France France
Drapeau de la Belgique Belgique
Drapeau des Pays-Bas Pays-Bas
Régions traversées Drapeau de la France France : Grand-Est (Haute-Marne, Vosges, Meuse, Ardennes)

Drapeau de la Belgique Belgique : Wallonie (Province de Namur, Province de Liège), Flandre (Province de Limbourg)

Drapeau des Pays-Bas Pays-Bas : Province de Limbourg, Province du Brabant-Septentrional, Province de Gueldre, province de Hollande-Méridionale

Principales localités Neufchâteau, Commercy, Saint-Mihiel, Verdun, Sedan, Charleville-Mézières, Nouzonville, Revin, Givet, Dinant, Namur, Andenne, Huy, Liège, Maasmechelen, Maastricht, Ruremonde, Venlo

Sources : SANDRE:« B---0000 », Géoportail, Banque Hydro

La Meuse Écouter (/møz/) (néerlandais : Maas, wallon : Moûse) est un fleuve européen de 950 kilomètres de long dont le bassin, relativement étroit, est orienté sud-nord. Elle traverse la France, la Belgique et les Pays-Bas et se jette dans la mer du Nord. Elle prend sa source à 409 mètres d’altitude à Pouilly-en-Bassigny.

Présentation

Le bassin versant de la Meuse a une superficie de 36 000 km2, dont un tiers en Région wallonne : un accord a été signé en 2002 (Accord international sur la Meuse ou accord de Gand) par la France, la Région flamande, la Région wallonne et la Région Bruxelles-Capitale (trois entités fédérées de Belgique), le grand-duché de Luxembourg, les Pays-Bas et l’Allemagne en vue de gérer toutes les questions relatives à ce cours d’eau, jusque dans la manière dont les autorités politiques concernées s’entendent pour en préserver les intérêts qu’elles partagent. La carte jointe à l'accord ne mentionne d'ailleurs pour la Belgique que ces entités, même si les parties contractantes ont tenu ensuite, pour des raisons formelles, à ce que l’État belge y figure aussi.

La Meuse a constitué l’une des frontières entre le Saint-Empire romain germanique et la France au Moyen Âge et l'est restée dans les faits jusqu'au XVIIe siècle.

Par ailleurs, ce fleuve est considéré comme étant le plus vieux fleuve du monde[2]. Le fait que la Meuse traverse le massif ardennais, formé durant le Paléozoïque, explique pour partie cette interprétation.

L'historien Marc Suttor considère que le fleuve au Moyen Âge, de Sedan à Maastricht, se comparait en importance par le trafic à la Seine et au Rhin[3], fleuves qui permettent encore aujourd'hui l'acheminement des marchandises vers les trois ports fluviaux les plus importants d'Europe, Paris, Duisbourg et Liège.

La Meuse a fait l'objet d'un documentaire, Les gens du fleuve, réalisé en 2012 par Xavier Istasse[4].

Géographie

La Meuse en France

Source de la Meuse à Pouilly-en-Bassigny.
La Meuse à Commercy vers 1912, longée d'un côté par la Ligne de Paris-Est à Strasbourg-Ville et de l'autre par le Canal de l'Est.

La Meuse prend sa source en France dans le Bassigny, petite région naturelle située dans le Sud du département de la Haute-Marne (région Grand Est), à Pouilly-en-Bassigny, petit village relevant de la commune du Châtelet-sur-Meuse. Son lieu de source est alors à 409 mètres d'altitude. La Seine, la Marne et l'Aube prennent leur source non loin de celle de la Meuse, sur le plateau de Langres.

Le fleuve quitte rapidement le département de la Haute-Marne. Dans les Vosges, un phénomène géologique particulier a lieu au niveau de Bazoilles-sur-Meuse : les pertes de la Meuse, où le fleuve s'infiltre en sous-sol pour ressurgir à Neufchâteau. Au niveau de Neufchâteau, la Meuse quitte une plaine argileuse pour pénétrer le front des côtes de Meuse et couler dans une vallée étroite et calcaire. Elle passe au pied de la basilique du Bois-Chenu et auprès de la maison de Jeanne d'Arc à Domrémy-la-Pucelle. Dans le département de la Meuse, qui lui doit son nom, elle poursuit son cours dans une étroite vallée au sol calcaire, recevant les eaux de courts affluents. Elle arrose Commercy, Saint-Mihiel, Verdun, Dun-sur-Meuse où le fleuve quitte les côtes de Meuse pour rejoindre la plaine argileuse de la Woëvre. Il y serpente alors sur un terrain à très faible pente. À Stenay, la Meuse pénètre de nouveau dans une vallée étroite et traverse un nouveau front de côtes, l'extrémité nord des côtes de Moselle.

La Meuse traverse les Ardennes. Elle continue à serpenter dans une vallée de plus en plus étroite. Elle arrose Mouzon dont le centre est une île entourée des bras de la Meuse. Le fleuve rejoint ensuite une plaine herbeuse et argileuse de nouveau assez large. Il reçoit la Chiers par la droite avant de traverser la ville de Sedan et de continuer son parcours vers le nord. Il bute alors sur les contreforts du Massif ardennais et vire à 180° vers le sud puis peu après plein ouest, en longeant l'ancien massif montagneux couvert de forêts. Peu après, il reçoit l'eau de la Bar par la gauche et celle de la Vence à Charleville-Mézières. Charleville s'est développée à un endroit où la Meuse semble hésiter sur son cours : elle fait trois boucles d'ouest en est avant de reprendre la direction du nord. Elle pénètre alors dans le massif de l'Ardenne par une vallée très étroite dont les pentes sont densément boisées ; elle est longée par la Voie verte Trans-Ardennes et une voie de chemin de fer de Charleville à Givet. Elle traverse maintenant des sols schisteux, noirs. À partir de là, les méandres sont nombreux jusqu'à la sortie de l'Ardenne.

Boucle de la Meuse à Monthermé.

La Meuse traverse Nouzonville, Bogny-sur-Meuse, puis Monthermé, où elle reçoit la rivière Semois (orthographe belge) ou Semoy (orthographe française) en rive droite et où de nombreux points de vue (le plus haut surplombe la vallée de 230 mètres) permettent d'admirer les alentours, enfin Revin, construite sur trois méandres. À proximité de la ville, deux lacs à différentes altitudes permettent le fonctionnement d'une station de transfert d'énergie par pompage-turbinage d'une puissance de 1 000 MW à Saint-Nicolas.

Elle traverse Fumay, l'ancienne cité de l'ardoise avant de passer par Givet, dernière commune française avant la frontière et près de laquelle se trouve au sud, la Centrale nucléaire de Chooz. Lorsqu'elle quitte le territoire français, la Meuse a parcouru 486 kilomètres en suivant grossièrement une direction Sud-Nord[5].

La Meuse à Laifour dans les Ardennes françaises.

Dans sa partie ardennaise la Meuse est bordée par la voie verte de Montcy-Notre-Dame à Givet. À la fois piste cyclable et lieu de promenades, elle suit le tracé de l'essentiel des boucles du fleuve.

Organisme gestionnaire

L'EPAMA ou Etablissement Public d'Aménagement de la Meuse et de ses Affluents est un syndicat mixte créé le [6].

Les barrages de navigation

Le contrat de modernisation des barrages de navigation sur la Meuse[7]

Le , Voies Navigables de France (VNF) a signé avec la Société BAMEO le premier partenariat public privé (PPP) sur voies navigables pour la modernisation de 25 barrages fluviaux sur la Meuse équipés de bouchures en élastomère gonflables à l’eau, en remplacement des barrages manuels à aiguilles construits en 1870.

Le contrat de PPP de 312 millions d’Euros d’une durée de 30 ans porte sur la conception, la construction, le financement, l’exploitation, la maintenance et le gros entretien renouvellement des ouvrages.

Il constitue un enjeu majeur  en termes de navigabilité, de sécurité et de biodiversité.

L’automatisation des barrages permet de sécuriser le travail des techniciens et de réguler la ligne d’eau pour la navigation. La modernisation des barrages s’accompagne du rétablissement de la continuité écologique des cours d’eau grâce à la construction de passes à poissons sur chacun des ouvrages ainsi que de la production d’énergie verte avec la création de 3 centrales hydro-électriques à Givet, Ham-sur-Meuse et Fumay et la mise en conformité de la microcentrale de Revin (anciennement FHYM- Forces Hydrauliques de la Meuse).

La Meuse en Belgique

Siège du Gouvernement wallon.
Centrale nucléaire de Tihange.
Canal Albert et entrée du port autonome de Liège.

La Meuse entre en Belgique wallonne au niveau de Heer à une altitude de 98 mètres. Elle a alors achevé sa traversée de l'Ardenne sensu stricto. Elle pénètre dans la province de Namur.

Les régions géographiques rencontrées sont d'abord la Fagne-Famenne, où elle baigne Hastière, puis le Condroz où elle passe entre les rochers et les jardins de Freÿr avant de recevoir la Lesse sur la droite à l'entrée de Dinant. Elle arrose ensuite Yvoir et Godinne.

À Namur, la Meuse reçoit la Sambre par la gauche et prend la direction Est-Nord-Est. Elle coule entre Condroz au sud et Hesbaye au nord. Avant de quitter la province, elle arrose Andenne.

Elle est selon Jean-Pol Hiernaux, « à l'articulation de toutes ses provinces et au confluent de la Sambre et de la Meuse où elle unit les bassins liégeois et hainuyer[8] ». François Bovesse estime que « Namur unit la Sambre et la Meuse à ses pieds et tout le sang wallon y bat comme en un cœur ».

Dans la province de Liège, la Meuse traverse l'ancien bassin houiller wallon. Elle reçoit la Mehaigne sur sa rive gauche puis arrose Huy, où elle reçoit le Hoyoux sur sa rive droite. Un peu plus loin, elle aide au refroidissement de la centrale nucléaire de Tihange.

Dans un cadre de plus en plus industrialisé, elle longe ensuite les installations sidérurgiques de Seraing. À Liège, elle reçoit l'Ourthe par la droite et coule de nouveau vers le Nord.

Un peu avant Herstal, ses eaux sont utilisées pour alimenter le canal Albert. L'important port autonome de Liège s'est implanté entre ces deux voies d'eau. La Meuse sépare à ce moment la fin du plateau hesbignon en rive gauche et le Pays de Herve en rive droite.

Le fleuve quitte la Wallonie à Visé, après un parcours de 128 kilomètres et à une altitude de 47 mètres. De Namur à Visé, la Meuse sert à la production d'électricité avec six centrales hydroélectriques.

C'est en Wallonie que le bassin versant de la Meuse est le plus étendu puisqu'il y est de 12 000 km2, soit le tiers de sa superficie totale.

C'est là aussi que se situe le port fluvial le plus important de tout son parcours et qui est aussi l'un des ports fluviaux le plus important d'Europe, le port autonome de Liège.

Le total des marchandises transportées en Wallonie était en 2014 de quelque 40 millions de tonnes, principalement sur la Meuse et la Sambre[9].

Après une brève incursion aux Pays-Bas, via Maastricht, la Meuse sert de frontière entre la Belgique et les Pays-Bas au niveau de leurs provinces de Limbourg respectives. Elle arrose Maasmechelen puis Maaseik, avant de quitter définitivement le territoire belge qu'elle a parcouru au total sur 183 kilomètres.

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La Meuse aux Pays-Bas

La Meuse à Maastricht.
La Meuse près de Gennep.
La Meuse avec des bateaux, près de Grave aux Pays-Bas.

Après avoir commencé à faire office de frontière entre la province belge de Liège et la province néerlandaise de Limbourg à Eijsden, la Meuse arrose la ville néerlandaise de Maastricht. À partir de là, elle fait office de frontière entre la province flamande de Limbourg et son homonyme néerlandaise, jusqu'à une dizaine de kilomètres après Maaseik, où la frontière néerlando-belge s’oriente vers l'Ouest. La Meuse poursuit son cours vers le Nord, en s'orientant légèrement vers l'Est et la frontière néerlando-allemande, qu'elle suivra sur une centaine de kilomètres. Après avoir passé la ville limbourgeoise de Roermond à l'Ouest, et traversé la ville de Venlo, elle parcourt encore une cinquantaine de kilomètres jusqu'à la frontière entre les provinces de Limbourg et de Brabant-Septentrional. Elle s’incurve pour prendre la direction de l'Ouest, pour servir de frontière entre les provinces de Gueldre (au Nord) et de Brabant-Septentrional. Un peu plus au Nord, un des principaux bras du Rhin, le Waal, s'écoule plus ou moins parallèlement vers l'Ouest. Le Rhin inférieur coule encore plus loin au Nord. Le Waal et la Meuse sont reliés par le canal de la Meuse au Waal au niveau de Nimègue. Le fleuve continue à s'écouler droit vers l'Ouest. Son nom change plusieurs fois, avant qu'il ne se jette dans la mer. Ces noms sont successivement :

Toutefois lorsque le débit est faible, le Haringvlietdam est fermé. Les eaux rejoignent alors la Vieille Meuse et le Nieuwe Waterweg.

Avant la réalisation du plan Delta, l'île d'Overflakkee séparait le flux en deux bras de mer : au Nord, le Haringvliet et au Sud le Volkerak, puis le Krammer et le Grevelingen. Mais aujourd'hui, avec la construction du Philipsdam, les eaux de la Meuse ne vont plus dans le Volkerak.

Partage des eaux du Rhin et de la Meuse dans leur delta commun.
La Meuse à Appeltern.

Actuellement, l'embouchure de la Meuse est donc le bras de mer Haringvliet. Celui-ci se trouve à une distance considérable au Sud du Nieuwe Waterweg, l'embouchure principale du Rhin, qui se jette dans la mer du Nord une trentaine de kilomètres après être passé au sud de Rotterdam. Plusieurs bras d'eau qui correspondent à l'ancien cours de la Meuse portent encore son nom, même si, lorsque le Haringvlietdam est ouvert, l'eau provenant réellement du fleuve ne les traverse plus :

  • la Vieille Meuse (Oude Maas) qui se sépare du Waal à l'Est de son embouchure dans le Haringvliet. Ce bras se dirige vers ce Nieuwe Waterweg ;
  • la Meuse de Brielle (Brielse Maas) ;
  • la Nouvelle Meuse (Nieuwe Maas) qui traverse Rotterdam. Cependant l'eau qui coule dans la Nouvelle Meuse provient en grande partie du Rhin, ce qui fait qu’on doit appeler Rotterdam une ville rhénane (Rijnstad) plutôt qu’une ville mosane (Maasstad).

L'embouchure de la Meuse forme avec celle de l'Escaut (« de Schelde » en néerlandais) et celle du Rhin un large delta, partiellement barré par les ouvrages du plan Delta, avant de se jeter dans la mer du Nord au bout d'un cours de 950 km.

Abusivement, la Meuse est souvent considérée comme une rivière confluente du Rhin et non un fleuve en lui-même. En particulier, elle ne fait pas partie des grands fleuves français enseignés à l'école primaire en France car elle n'y fait que la moitié de son parcours total et son bassin y est relativement étroit (pour des raisons géologiques et physiques elle ne reçoit pas un affluent important du Rhin : la Moselle), par conséquent son débit est plutôt faible. Par contre, en Belgique et aux Pays-Bas, elle est considérée comme un fleuve important, car elle sert de façon primordiale au transport de marchandises, elle a façonné l'histoire et la géographie de ces pays. Pour des raisons historiques, les géographes néerlandais considèrent même que le Rhin se jette dans la Meuse, puisque le bras principal du Rhin se nomme la Nouvelle Meuse, ce qui n'est pas justifié hydrauliquement.

Affluents

La Meuse traverse des régions très arrosées, notamment le massif des Ardennes, et possède des affluents nombreux et souvent abondants mais assez courts. Ses principaux affluents sont : la Saônelle, le Mouzon, le Vair, la Chiers, la Semois, la Lesse, le Bocq, le Hoyoux, l'Ourthe et la Roer sur la rive droite, la Bar, la Sormonne, le Viroin, la Molignée, la Sambre, la Mehaigne et le Geer sur la rive gauche.

Écologie

La Meuse a été très artificialisée sur une partie de son parcours par des barrages et des berges artificielles et un contrôle de son niveau.

Au XXe siècle, hormis dans les bras de l'ancienne Meuse très en aval, les saumons y sont devenus rares et les truites également. Certains sections étaient très polluées (biologiquement presque désertes ou colonisées par quelques organismes très résistants à la pollution, dont tubifex et larve d'un chironome), et les mise en chômage du fleuve (ouverture des barrages pour entretien) mettaient à nu une grande partie des fonds et berges en y tuant de nombreux organismes aquatiques[10]. Juste en aval des barrages, de grandes quantités d'orbanismes profitaient de la réoxygénation de l'eau et pouvaient être présents en très grande quantité (par exemple H Damas décrivait en 1941 les fonds pierreux situés en aval des barrages de la Meuse belge (où l'eau se réoxygène) comme grouillante de milliers d'individus de 3 espèces de gammares (Rivulogammarus puler, Echinogammarus berilloni et Carinogammarus roeselli) y grouillent[10]). D'autres curiosités sont également signalées[11] au début du XXe siècle par l'inventaire biologique, dont :

  • Branchiura sowerbyi (Beddart), vers oligochète un peu plus gros qu'un tubificide, de 6 à 13 cm, et d'un peu plus de 1 mm de diamètre, dont la queue se termine par un plumeau aplati faisant fonction de branchie, qui vit dans les racines ou dans un tube vertical qu'il creuse dans la boue voire dans l'argile compacte[11] ;
  • Urnatella gracilis (Leidy)[11].

Depuis, le Castor fiber recolonise progressivement les berges de la Meuse depuis quelques décennies (sans y construire de barrages de castors en raison de la profondeur de l'eau).

On a montré en Belgique que la diversité et les patrons (patterns) génétiques de plantes qu'on pensait uniquement ou principalement hydrochores ne confirmaient pas l'hypothèse d'un flux descendant très marqué, soit (conclut l'étude) parce qu'on a sous-estimé l'importance d'un transport de graines vers l'amont (par zoochorie a priori) pour ces plantes (ex : Rorippa sylvestris, une sorte de cresson sauvage), soit que des phénomènes récurrents d'extinction/recolonisation de sous-populations au sein de la métapopulation aient fortement hétérogénéisé cette flore, ces deux explications pouvant s'additionner[12].

La biodiversité de la Meuse est partiellement protégée par la création du parc naturel régional des Ardennes qui se traverse par la voie verte Trans-Ardennes.

Hydrologie

Le fleuve suit d'abord son cours naturel, soumis à des étiages bas et des crues importantes et n'est plus navigable que par portions.

Plus en aval, toujours sur le territoire français, il est canalisé — en empruntant parfois la branche nord du canal de l'Est.

Après Saint-Mihiel, il permet le gabarit Freycinet (250 tonnes à 1,80 mètre d'enfoncement). À partir de Givet, il devient navigable pour les péniches de 1 350 tonnes.

Puis du port autonome de Liège jusqu'à Rotterdam, il admet des bateaux de type rhénan (2 500 tonnes) et des barges 2 × 4 500 tonnes.

Le canal des Ardennes relie la Meuse à l'Aisne et donc à la Seine.

Le canal Albert relie la Meuse (à partir de Liège) à l'Escaut (et Anvers), en passant par le bouchon de Lanaye.

Le projet avorté du canal de l'Ourthe prend également naissance à Liège. Il devait initialement permettre d'atteindre le bassin rhénan et desservir l'actuel Luxembourg grâce à une liaison Meuse-Moselle.

La Meuse est parcourue par de nombreuses embarcations de plaisance. Ses profonds méandres lors de la traversée du massif des Ardennes sont autant de lieux touristiques.

Une grande crue eu lieu en janvier et , elle a dépassé celle de 1886 à Nouzon.

Les débits

  • Le débit de la Meuse à Domrémy-la-Pucelle, avant la confluence avec le Vair, est de 13,3 m3/s. L'apport des 5 m3/s du Vair fait passer ce débit à 18,5 m3/s, et la Meuse devient dès lors un cours d'eau d'importance moyenne. Son débit passe à 21,2 m3/s à Vaucouleurs[13], 24,2 à Commercy[14], 30,5 à Saint-Mihiel[15], 47,3 à Stenay[16], plus de 80 à Sedan et 107 à la sortie de Charleville-Mézières[17].
  • Le débit moyen observé à Heer (commune d'Hastière), peu en aval de Givet, à la frontière franco-belge, entre 1995 et 2004 est de 163,2 m3/s, avec un maximum moyen de 221,0 m3 en 2001, et un minimum moyen de 100,3 en 1996[18].
  • Le débit moyen à Namêche, peu en aval de Namur, observé durant la même période 1995-2004, est de 210,8 m3/s, avec un maximum moyen de 297,1 m3 en 2001, et un minimum moyen de 122,0 en 1996.

Les débits à la frontière franco-belge

La Meuse n'est pas un fleuve très régulier. Son débit a été observé durant 56 ans (1953-2008), à Chooz, localité du département des Ardennes située en amont de la ville de Givet, c'est-à-dire à peu de distance de la frontière franco-belge[19]. La surface ainsi étudiée est de 10 120 km2, mais ne comprend pas les bassins de la Houille, de l'Alyse et de quelques autres ruisseaux.

Le module du fleuve à Chooz est de 144 m3/s (non compris les débits de la Houille, de l'Alyse, etc.).

La Meuse présente des fluctuations saisonnières de débit bien marquées. Les hautes eaux se déroulent en hiver et au tout début du printemps, et se caractérisent par des débits mensuels moyens allant de 225 à 277 m3/s, de décembre à mars inclus (avec un maximum en février). À partir du mois d'avril, le débit diminue rapidement jusqu'aux basses eaux d'été qui ont lieu de juin à octobre, entraînant une baisse du débit mensuel moyen jusqu'au plancher de 51,4 m3 au mois d'août et 50,5 m3 au mois de septembre. Mais ces moyennes mensuelles cachent des fluctuations plus prononcées sur de courtes périodes ou selon les années.

Débit moyen mensuel (en m3/s)
Station hydrologique : B7200010 - La Meuse à Chooz (Île Graviat), à peu de distance de la frontière franco-belge, pour un bassin versant de 10 120 km2 et à 99 m d'altitude
(08/12/2013 - données calculées sur 61 ans de 1953 à 2013[20])
Source : Banque Hydro - Ministère de l'écologie et du développement durable

Aux étiages, le VCN3 peut chuter jusque 11 m3/s en cas de période quinquennale sèche, ce qui peut être considéré comme sévère pour un aussi puissant cours d'eau.

Les crues peuvent être extrêmement importantes. Les QIX 2 et QIX 5 valent respectivement 690 et 950 m3/s. Le QIX 10 est de 1 100 m3/s, le QIX 20 de 1 300 m3, tandis que le QIX 50 se monte à 1 500 m3/s. Ce qui signifie par exemple que tous les 50 ans (en moyenne), il faut s'attendre à une crue de l'ordre de 1 500 m3/s, ce qui correspond au débit moyen du Rhône à Valence après avoir reçu les eaux de l'Isère.

Le débit instantané maximal enregistré à Chooz a été de 1 610 m3/s le , tandis que la valeur journalière maximale était de 1 560 m3/s le même jour. Si l'on compare la première de ces valeurs à l'échelle des QIX du fleuve, l'on constate que cette crue était nettement supérieure au niveau cinquantennal défini par le QIX 50, et donc tout à fait exceptionnelle.

La Meuse est un fleuve abondant. La lame d'eau écoulée dans cette partie essentiellement française de son bassin versant est de 452 millimètres annuellement, ce qui est nettement supérieur à la moyenne d'ensemble de la France (320 millimètres). Le débit spécifique (ou Qsp) atteint 14,3 litres par seconde et par kilomètre carré de bassin.

La Meuse en crue à Ruremonde (Pays-Bas) en janvier 2011.

Géomorphologie et évolution du lit

La traversée du sud au nord du massif ardennais par le cours de la Meuse est une particularité remarquable de ce fleuve. Habituellement, les cours d'eau partent d'un massif pour rejoindre la plaine et ensuite la mer.

Le creusement de cette vallée est dû à une chronologie particulière des évènements géomorphologiques de la région :

  • durant l'Oligocène, il y eut une ouverture du fossé rhénan accompagnée d'une surrection (soulèvement) de ses épaulements, la Forêt-Noire et les Vosges. À partir des Vosges s'organise un réseau hydrographique : Meuse, Moselle, Meurthe (la Moselle était, il y a plusieurs millions d'années, un affluent de la Meuse, se jetant dans ce fleuve à hauteur de Pagny-sur-Meuse qui a subi une capture au profit du Rhin) ; L'ancien cours a permis la construction du Canal de l'Est entre Toul et Pagny-sur-Meuse
  • Il y a plus d'1 million d'années, l'Aisne passait à Dom-le-Mesnil et suivait l'actuel cours de la Meuse entre Dom-le-Mesnil et Nouzonville, incluant les méandres de Charleville-Mézières[21] (La Warenne et Montcy-saint-Pierre). La Meuse passait à Gespunsart et Neufmanil par une vallée fossile où passent actuellement la Vrigne et la Goutelle et formait son confluent avec l'Aisne à Nouzonville[21]. A hauteur de Dom-le-Mesnil. Il y a 900 000 ans, l'érosion de la rive gauche concave a fini par faire se rejoindre le méandre de la Meuse et le méandre de l'Aisne : la Meuse a alors fait son nouveau confluent avec l'Aisne à Dom-le-Mesnil et a abandonné son ancien cours par Gespusart et Neufmanil[21]. Par la suite, l'Aisne a été capturée à son tour, abandonnant son cours en une vallée fossile où coule actuellement la Bar. Cet ancien cours a permis de tracer le canal des Ardennes.
  • au cours de ces derniers millions d'années, par flambage de la croûte, le massif ardennais s'est soulevé, là où passait déjà la Meuse. Cette surrection lente (moins d'1 mm par an) a néanmoins permis au fleuve de conserver par érosion son niveau de base en creusant au fil des années une profonde vallée dans le massif des Ardennes. Cela explique la profondeur du ravinement que représente la vallée de la Meuse dans les Ardennes.

Cela explique comment ce cours d'eau a pu garder sa pente alors que le relief l'entourant a pris une pente inverse. Par exemple, la Sormonne et ses affluents de la rive gauche (L'Ormeau, le Rau de Bassigny, le Rau de Charoué, Le Ruisseau de la Bassée) coulent dans une direction générale inverse à celle de la Meuse.

Circulation de la Meuse à contresens de ses affluents entre Charleville et Revin

Cela produit, en outre, des situtations étranges dans le réseau hydrographique, avec des affluents qui coulent en sens inverse de la Meuse. A Deville, en rive gauche, le ruisseau du Bois de Waibes forme un confluent en angle obtus avec la Meuse ; le Ruisseau de Maubié s'approche de la Meuse aussi en angle obtus mais il est canalisé ; toutefois, sur la carte d'état major, il formait un confluent en angle obtus. En rive droite, à Laifour, la source ferrugineuse donne naissance à un ruisseau qui, sur ses derniers mètres, coule en sens inverse de la Meuse ; il ne forme de pas confuent du fait de la présence de la voie verte trans-Ardennes qui coupe son cours et sous laquelle il est obligé de s'infiltrer. En rive droite encore, le ruisseau de La Jauny (et plus en aval où il rejoint le ruisseau de la Petite Commune) coule du nord vers le sud alors que la Meuse coule du sud vers le nord et ne se détourne vers l'ouest que sur les deux cents derniers mètres de son cours : il approche avec un angle obtus mais les derniers mètres avant le confluent, sous la voie verte, sont canalisés. Toutefois, sur la carte de Cassini comme sur la carte d'état major du XIXe siècle, c'est bien un angle obtus qui forme le confluent. En rive gauche, juste après le pont de la D1 depuis Laifour en direction de Revin, en face de la route descendant vers la voie verte trans-ardennes, un ruisseau sans hydronyme arrive dans le Meuse en s'écoulant en sens inverse et avec un angle obtus dépassant les 100 degrés d'arc. A Revin, il en est presque de même en rive gauche avec le Rau de la Fallière, même si la position du confluent sur le méandre de Saint-Nicolas ne forme pas d'angle obtus.

Selon certains auteurs, cette situation est instable. Le réseau hydrographique du bassin devrait se réorganiser au détriment de la Meuse. D'une part, la partie inférieure de son cours en France deviendra un affluent de l'Aisne, donc de la Seine, dévié vers le sud à l'entrée de l'Ardenne par la vallée de la Bar. D'autre part, son cours supérieur deviendra un affluent de la Moselle, et donc du Rhin, à partir du fossé de Neufchâteau.

Le cours du fleuve a varié au cours de l'histoire récente à cause de la faible altitude de la plaine avale. L'homme est souvent intervenu.

Modification du cours de la Meuse en 1904, l'ancien lit mineur en cyan et le nouveau en bleu.

Le fleuve coulait à travers l'Oude Maasje, puis vers 1273, le lit a dévié via l'actuelle Afgedamde Maas vers le nord-ouest, jusqu'au confluent avec le Waal, ceci jusqu'en 1904.

Depuis les inondations de la Sainte-Élisabeth en 1421, le Waal et la Meuse se joignaient à Gorinchem pour former le Merwede.

La Nouvelle Meuse s'est ensablée et le Nieuwe Waterweg, artificiel, a été ouvert en 1872 pour que Rotterdam puisse rester un port maritime.

Le Canal de Heusden a été creusé en 1883 quand l'Afgedamde Maas a commencé à s'ensabler.

Afin de lutter contre les inondations, la Meuse a été barrée en 1904, après Well, selon les plans de Cornelis Lely et redirigée vers un nouveau bras artificiel la Bergsche Maas, qui se poursuit ensuite par l'Amer vers le Hollands Diep[22]. La Vieille Meuse est maintenant un des bras du Rhin et ne reçoit plus d'eau de la Meuse, mais continue à garder son nom. La navigation reste possible entre l'Afgedamde Maas, devenu un quasi bras mort et le Rhin. La porte de garde: Kromme Nolkering peut s'abaisser en cas de nécessité, tandis que l'écluse Wilhelmine près de Giessen veille à ce que les eaux des deux fleuves soient séparées.

L'embouchure du fleuve jusqu'au XVIIe siècle, appelée la Meuse de Brielle, a été finalement été barrée en 1950 et forme un bras mort, la Brielse Maas.

De nos jours, une petite partie des eaux du fleuve se déverse dans le Dordtsche Kil, le reste allant dans le Haringvliet ; de là elles se déversent d'une manière artificiellement régulée, à travers le Haringvlietdam, dans la mer du Nord et dans le Spui pour rejoindre la Vieille Meuse.

Histoire

Toponymie

La première trace écrite en latin qui mentionne le fleuve est le mot de genre masculin Mǒsa, ae[23]. Le nom du fleuve est probablement antérieur à la période romaine et remonte au moins à la période gauloise et à la langue celtique. L'étymologie de Mosa est inconnue selon les auteurs classiques[24]. Sur la Table de Peutinger, la Meuse n'est pas appelée Mosa, mais Flumen Patabus[25]. Pourtant les termes romans initialement masculins mosa et mosella, ce dernier simple diminutif du premier, sont compris par la tradition paysanne lorraine, ils désignent des eaux à lisières mouvantes, c'est-à-dire un espace ripuaire qui varie selon les saisons[26]. C'était le cas autrefois pour la Meuse entre Saint-Mihiel et Stenay mais aussi pour une grande partie du cours de la Moselle, au point que les vastes prairies et espaces près des rives étaient occupés par les paysans durant la longue période d'étiage et abandonnés lors des crues rapides ou les hautes eaux se maintenant longtemps. D'ailleurs, les deux cours d'eau mentionnés pouvaient s'appeler originellement et indistinctement Mosa avant que quelques auteurs gallo-romains et mérovingiens, parmi lesquels Venance Fortunat, commencent à fixer les appellations respectives.

De l'hydronyme féminisé en latin médiéval, Mosa est également issu l'adjectif français mosan[27]. Divers toponymes sont également dérivés de la même racine que mosa : le nom de la ville de Mouzon signifierait « la mercuriale ou lieu de négoce et de commerce près du marais » que l'on peut simplifier en « marché de la Meuse » en celtique (Moso-magus). On peut aussi citer Maastricht (en latin Mosa Trajectum), mais aussi une multitude de lieux-dits autrefois.

Une artère commerciale au Moyen Âge

Artère économique de premier ordre depuis l'Antiquité, la Meuse garda son influence dans les échanges commerciaux noués pendant la période mérovingienne, comme en témoigne la diffusion de techniques et de motifs, attestée dans les fouilles archéologiques. Elle fut aussi la colonne vertébrale de l'évêché de Liège, devenu principauté épiscopale dans la seconde moitié du Moyen Âge. Ainsi l'autorité du Prince-évêque s'étendait-elle sur des faubourgs (ou des villes entières) reliés entre eux par le fleuve : Dinant, Namur, Andenne, Huy. Dans chacune de ces villes, un pont et une église dédiée à Notre-Dame percevaient un droit de passage, alimentant le trésor épiscopal.

Marc Suttor considère que le trafic sur la Meuse se compare avec celui de la Loire, de la Seine et du Rhin, notamment du vin, la principale marchandise transportée sur les grands fleuves européens au Moyen Âge et à la Renaissance, un trafic égal au XVIe siècle à la production bordelaise de vins[28].

Profitant de cet axe commercial, l'orfèvrerie mosane (et notamment la dinanderie, soit le travail du laiton) se développa pendant tout le Moyen Âge. La « légende historique » rapporte que la pratique de la dinanderie opposa Bouvignes à Dinant ; Philippe de Commynes l'a bien raconté dans ses chroniques et Jules Michelet en a été frappé.

Fleuve frontière

À partir de la fin du XIIIe siècle, la Meuse a été une des Quatre Rivières définissant la limite entre le royaume de France et le Saint-Empire romain germanique. Cette limite, justifiée par le souvenir du traité de Verdun de 843, allait de la source du fleuve à la ville de Mézières et passait au milieu des principautés qu'elle rencontrait, notamment le duché de Bar. Cette frontière était une réalité mais surtout un objet de représentation, stylisant les différentes limites (fiscale, judiciaire et féodale) du royaume [29]. Les riverains du Moyen Âge ont conscience de la divergence entre l'idée officielle d'une limite fluviale et la réalité de frontières complexes. À partir de 1390, dans les enquêtes royales, les témoins affirment que des bornes de bronze sont immergées dans le fleuve, sans que personne ne les ait vues. Ce mythe montre le respect qui entoure cette limite sacrée entre France et Empire[30].

Après l’annexion de la majeure partie de l’Alsace et des Trois-Évêchés de Metz, Toul et Verdun à la France par le traité de Westphalie en 1648, la Meuse n'était plus frontière de fait, mais elle reste une référence scolaire jusqu'au XVIIIe siècle en France. En Allemagne, le Deutschlandlied (« chant d’Allemagne »), devenu l’hymne national allemand officiel en 1922, y fait allusion. La première strophe du poème de Fallersleben fait référence à la distribution des peuples germanophones au début du XIXe siècle et l'extension de la Confédération germanique à cette époque, retirée en 1945, qui dit que l’Allemagne s’étend

Von der Maas bis an die Memel
Von der Etsch bis an den Belt
« De la Meuse jusqu’au Niémen »,
« De l’Adige jusqu’au Petit Belt ».

Ce souvenir du Saint Empire était aussi la négation des revendications françaises sur la frontière du Rhin.

Le sac de Dinant et de Liège

Le duc de Bourgogne Philippe le Bon prit Dinant en 1466, l'incendia et fit massacrer ses habitants en les jetant liés deux par deux dans la Meuse. Deux ans plus tard, Liège subissait le même sort. Dinant et Liège faisaient toutes les deux partie de la principauté de Liège alors que Bouvignes faisait partie du comté de Namur, déjà bourguignon. Plus qu'une querelle de clocher, il faut y voir des motifs politico-économiques dépassant largement le microcosme dinantais : qui contrôle le fleuve contrôle l'économie.

Fleuve industriel

Les usines à Saint-Georges-sur-Meuse (milieu du XIXe siècle).
Aquarelle de J. Fussell.

Industrielle, la Meuse l'est déjà au Moyen Âge et certains historiens découpent ainsi une zone industrielle qui va de Dinant à Liège. Elle le deviendra encore plus avec la révolution industrielle. Les forges et fourneaux de l'Ardenne qui transformèrent le fer à partir du charbon de bois durant des siècles, vont voir leur travail transporté par des petites rivières rapides qu'ils utilisaient pour leur industrie, vers les plus grandes comme la Sambre (qui se jette dans la Meuse à Namur) et la Meuse. Au cours d'une seconde révolution industrielle, que l'on peut faire débuter avec l'avènement de la Belgique, la deuxième puissance industrielle au monde va s'édifier, de Charleroi à Liège, à la verticale des bassins houillers anglais, du Nord français et de la Lorraine franco-allemande. Seule la Haute Meuse échappera à la fièvre houillère, supplantée par la Sambre reliant Charleroi aux débouchés de la mer du Nord. Progressivement, la sidérurgie prit le pas sur l'extraction minière en Belgique, suivant toujours les bassins de la Meuse médiane et de la Sambre. Cette sidérurgie, aujourd'hui en déclin, subsiste toujours malgré tout et a été intégrée dans l'accord Mittal-Arcelor mais souffre de la concurrence internationale et de la crise économique de 2008.

Le cauchemar de 1914

Fleuve tragique, la Meuse a été chaque fois sur le parcours des invasions et des rivalités européennes. Le , les 100e, 101e, 103e, 108e, 178e, 182e régiments d'infanterie de l’armée impériale allemande, après avoir été rejetés sur la rive est de la Meuse par les soldats français de Franchet d'Esperey (parmi lesquels le lieutenant Charles de Gaulle), les rejettent définitivement sur l'autre rive. Lors de l'assaut français, réussi, la population a fraternisé avec les soldats de Franchet d'Esperey et chanté de multiples fois La Marseillaise. Comme en d'autres villes de Belgique ou de France, les Allemands sont persuadés (à tort) qu'ils ont affaire à des francs-tireurs (souvenirs du conflit de 1870, hantise qui devient hallucination). À Dinant, leur « fausse croyance sincère »[31] va transformer la ville en enfer de Bosch : plusieurs quartiers seront entièrement détruits par le feu. On compte 674 victimes civiles fusillées par les régiments allemands, le plus important massacre se situe en août 1914.

Mai 1940

En 1939, la France a déclaré la guerre à l'Allemagne et se prépare à repousser l'invasion de celle-ci. Dans le cadre du plan défensif français, la Meuse joue un rôle important puisque c'est sur une bonne partie de son cours supérieur (en France, du confluent avec la Chiers jusqu'à Namur, en Belgique) que le Commandement Français compte arrêter les Allemands dans le cadre du plan Dyle.

Plus en aval, les Belges la défendent notamment par le fort d'Ében-Émael pour protéger Liège.

Ce fort tombera le , lendemain de l'offensive allemande ; les Belges évacueront la position fortifiée de Liège puis celle de Namur, y laissant uniquement des troupes de forteresse.

En amont, prenant de vitesse les Français, le , c'est un peu au Nord de Dinant, à Houx que les premiers fantassins allemands traversent la Meuse. Le lendemain, les troupes allemandes de Guderian franchissent également la Meuse à Sedan provoquant la Percée de Sedan, ainsi qu'à Monthermé. Leur infanterie traverse également à Givet et Profondeville, mais échoue à Nouzonville et Charleville-Mézières avant que les Français n'évacuent leurs dernières positions sur la Meuse le , une brèche large de Namur jusqu'à l'extrémité Ouest de la ligne Maginot a été ouverte dans le front allié, que les Français ne peuvent combler faute de réserves suffisantes. Les unités blindées allemandes s'y engouffrent et atteignent la Manche près d'Abbeville le , prenant à revers les armées alliées dans le nord de la France et la Belgique. La bataille de France est déjà virtuellement perdue.

La Meuse européenne

Un programme d'action a été mis en place pour la période 1998-2003[32] et en 2002, lors de la signature du Traité de la Meuse, également appelé Accord de Gand, la France, les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg ont marqué leur coopération sur la cogestion du fleuve avec les deux États et les deux Régions belges. Les projets incluent le retour des grands salmonidés[33] dans le bassin et la restauration progressive de la libre circulation des poissons dans tout le Bénélux[34],[35],[36], alors qu'une Directive européenne (Directive cadre sur l'eau, ou DCE[37]) demande le retour du Bon état écologique en 2015 (sauf dérogations à justifier).

Culture

L’Art mosan

La Meuse, qui traverse l'Est de la Belgique de part en part, a donné son nom à l’art mosan qui regroupe un ensemble de productions d'inspiration carolingienne, réalisées principalement dans l'ancien diocèse de Liège (400-1559), entre le Saint-Empire romain germanique et la France de 900 à 1600, et qui permet de mettre en perspective l'Histoire de la Wallonie et de la Principauté de Liège dans une longue durée culturelle avec l'architecture et les belles collégiales d'Hastière, de Nivelles, de St-Barthélémy à Liège, le travail du bois, de l'ivoire, des métaux (les fonts baptismaux de St-Barthélémy, la dinanderie, par exemple).

Un exemple en est la Crucifixion en calcaire sculpté, de la fin du Xe siècle, provenant de Berne et conservé à Fribourg, dans laquelle le Crucifié tient la tête droite[38].

Hommages littéraires

Charles Péguy a mis ces vers dans la bouche de Jeanne d'Arc, née à Domrémy sur la Meuse :

Adieu Meuse endormeuse et douce à mon enfance,
Qui demeures aux prés où tu coules tout bas.
Meuse adieu : j'ai déjà commencé ma partance
En des pays nouveaux où tu ne coules pas.

Dans son livre Une certaine idée de la Wallonie, qu'il a tenu à illustrer par une peinture d'Henri Blès, Paul-Henry Gendebien décrit la démarche intellectuelle du grand peintre mosan en pensant à tous les lieux en Europe où l'on peut voir ses œuvres : « L'Europe voit qu'un paysage du maître wallon - qui est mosan et qui ne peut qu'être mosan - est aussi le paysage par excellence, ce qui le hisse par le fait même au rang d'image de l'Univers. »

André Dhôtel est un Mosan qui, de la Meuse française à la Meuse belge, a écrit ce roman extraordinaire dont Bayard est le héros[réf. nécessaire], Le Pays où l’on n’arrive jamais. Il y a dans ce livre, curieusement, le fantasme de la mer et des grandes villes flamandes ou néerlandaises où la Meuse rejoint la mer parmi les cathédrales et les beffrois.

Il existe de nombreux liens tout au long du parcours de la Meuse tant dans son parcours français que belge. Rita Lejeune a dressé la carte des toponymes liés à la légende de Bayard, du Plateau de Langres à Maastricht.

Jacques Brel évoque la Meuse dans « Je suis un soir d'été » ou encore dans « Il neige sur Liège ».

Dominique A cite la Meuse dans sa chanson « La pleureuse », soulignant le côté sombre du cours d'eau comparé au bleu du Danube.

En plombeur de ces dames
Ou en consolateur,
Si tu y trouves ton compte
J'inonderai ton cœur.
Et que le beau Danube
Se transforme en la Meuse
Et je suis ta pleureuse
Oui, je suis ta pleureuse
Pour toujours ta pleureuse.

Patrick Beurard-Valdoye a consacré l'une de ses œuvres poétiques, Mossa, à la Meuse.

Hommages militaires

La Meuse est mentionnée dans le refrain du chant militaire Verdun ! On ne passe pas, écrit en 1916 par Eugène Joullot et Jack Cazol, à l'occasion de la bataille de Verdun.

Et Verdun, la victorieuse,
Pousse un cri que portent là-bas
Les échos des bords de la Meuse,
Halte là ! On ne passe pas !

Hommages divers

Un reptile marin découvert près de Maastricht, a été nommé "Mosasaurus" (« lézard de la Meuse ») en hommage à ce fleuve traversant la ville où il a été découvert.

Galerie

Bibliographie

  • Jules Michelet, Histoire de France (Tome VI) in Œuvres complètes de Michelet, édition définitive et corrigée, Flammarion, Paris, 1893-1898.
  • Jules Michelet, Journal, Gallimard, Paris, 1959-1976 (Tome I).
  • Félix Rousseau (historien wallon), La Meuse et le pays mosan en Belgique. Leur importance historique avant le XIIIe siècle, (Éditions Culture et civilisation, Bruxelles 1977.
  • Philippe de Commynes, Mémoires in Historiens et chroniqueurs du Moyen Âge, Gallimard, Paris, 1952
  • Paul Berben et Bernard Isselin, Les panzers passent la Meuse, Laffont, Paris, 1967 et Editions J'ai lu Leur aventure N°A209.
  • Félix Rousseau (historien wallon), L'Art Mosan, Duculot, Gembloux, 1970
  • Catalogue de l'exposition Rhin-Meuse, Bruxelles, Cologne, 1972.
  • Félix Rousseau, La Wallonie, terre romane, Institut Destrée, Charleroi, 1977.
  • Rita Lejeune, Les légendes épiques in La Wallonie, le pays et les hommes (Tome I, Lettres, arts, culture), La Renaissance du livre, Bruxelles, 1974-1986, pages 119-135.
  • John Horne et Alan Cramer, Les Atrocités allemandes, Tallandier, Paris, 2005.
  • Marc Suttor, Vie et dynamique d'un fleuve. La Meuse de Sedan à Maastricht (des origines à 1600) (Bibliothèque du Moyen Âge, 24), Turnhout, De Boeck & Larcier s.a., 2006. (ISBN 2-8041-5041-0).
  • Patrick Beurard-Valdoye, "MOSSA" (éd. Al Dante, 2002), poésie.
  • Jacquemyn, H., Honnay, O., Van Looy, K. & Breyne, P. (2006) Spatiotemporal structure of genetic variation of a spreading plant metapopulation on dynamic riverbanks along the Meuse River. Heredity, 96, 471–478.
  • Léonard Dauphant, La frontière de la Meuse de Philippe IV à François Ier, in Frontières oubliées, frontières retrouvées. Marches et limites anciennes en France et en Europe, Enquêtes et Documents no 41, Presses Universitaires de Rennes, 2011, p. 221-234.
  • Collectif, Mosa Nostra : La Meuse Mérovingienne, de Verdun à Maastricht. Ve siècle-VIIIe siècle, Agence Wallonne du patrimoine, coll. « Carnets du patrimoine » (no 28), , 64 p.

Voir aussi

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Notes et références

Notes

Références

  1. Rijkswaterstaat, Rijksinstituut voor Kust en Zee/RIKZ: Tienjarig overzicht 1981–1990, Den Haag
  2. (en) P.H. Nienhuis, Environmental History of the Rhine-Meuse Delta, , 640 p. (ISBN 978-1-4020-8213-9, lire en ligne), p. 357.
  3. La Meuse de Sedan à Maastricht
  4. Présentation de la Meuse sur Eurochannel
  5. SANDRE, « Fiche canal de l'est (B---0000): La Meuse en France » (consulté le )
  6. « Etablissement Public d'Aménagement de la Meuse et de ses Affluents », sur www.epama.fr (consulté le )
  7. « Bameo », sur www.bameo.fr (consulté le )
  8. Connaître la Wallonie, site consulté le 15-11-2016
  9. global wallon
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  11. a b et c Damas, H. (1938). Sur la présence dans la Meuse belge de Branchiura sowerbyi (Beddart), Craspedacusta sowerbyi (Lankester) et Urnatella gracilis (Leidy). In Annales de la Societe royale zoologique de Belgique (Vol. 69, pp. 293-310). Société Royale Zoologique de Belgique.
  12. Olivier Honnay, Hans Jacquemyn, Kris Nackaerts, Peter Breyne et Kris Van Looy, Patterns of population genetic diversity in riparian and aquatic plant species along rivers ; Journal of Biogeography (J. Biogeogr.) (2010)
  13. Banque Hydro - station B1340010 - La Meuse à Vaucouleurs (ne pas cocher la case "Station en service")
  14. Banque Hydro - station B2130010 - La Meuse à Commercy (ne pas cocher la case "Station en service")
  15. Banque Hydro - station B2220010 - La Meuse à Saint-Mihiel (ne pas cocher la case "Station en service")
  16. Banque Hydro - station B3150020 - La Meuse à Stenay (ne pas cocher la case "Station en service")
  17. Banque Hydro - station B5600010 - La Meuse à Montcy-Notre-Dame (ne pas cocher la case "Station en service")
  18. Région wallonne - débit des principaux cours d'eau [xls]
  19. Banque Hydro - Station B7200010 - La Meuse à Chooz (Île Graviat) (option Synthèse)
  20. Banque Hydro - MEDDE, « Synthèse de la Banque Hydro - La Meuse à Chooz (Île Graviat) (B7200010) » (consulté le )
  21. a b et c Albert PISSART, Leendert KROOK et Dominique HARMAND, « Modifications du tracé de la Meuse dans la région de Charleville-Mézières en liaison avec les captures de l'Aisne et de la Moselle », Bulletin de la Société géographique de Liège № 35,‎ , p. 29-39 (lire en ligne)
  22. « Entstehung der Bergsche Maas »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?); niederländisch. Abgerufen am 30. Juni 2009
  23. On le trouve chez les auteurs classiques César, Pline l'ancien, Tacite, ....
  24. Jean Loicq, « Avant le latin, la Gaule Belgique », dans Daniel Blampain et al. (dir.) Le Français en Belgique, Duculot, Bruxelles, 1997, p. 8.
  25. Le dernier terme indique que la Meuse est déjà un "grand chemin de navigation et de transport", à l'instar des antiques couloirs de la Moselle et du Rhin.
  26. Le terme mosa, produit de l'altération d'un vieux mot gaulois plus complexe, signifierait en s'appliquant aux eaux ou au rivières "montante(s)/descendante(s)" ou "mouvante(s)", non seulement dans le sens de l'écoulement du courant majeur du lit, mais latéralement à celui-ci. L'application à une localité terrestre indique la présence d'un certain type de marais ou marécage éphémère.
  27. Trésor de la langue française informatisé.
  28. Marc Suttor, Vie et dynamique d'un fleuve. La Meuse de Sedan à Maastricht (des origines à 1600) (Bibliothèque du Moyen Âge, 24, Turnhout, De Boeck & Larcier s.a., 2006, p. 301-327
  29. L. Dauphant, Le Royaume des Quatre Rivières, L'espace politique français (1380-1515), Seyssel, Champ Vallon, 2012, p. 117-129
  30. L. Dauphant, La frontière de la Meuse de Philippe IV à François Ier, in Frontières oubliées, frontières retrouvées. Marches et limites anciennes en France et en Europe, Enquêtes et Documents no 41, Presses Universitaires de Rennes, 2011, p. 222-224.
  31. comme le disent deux historiens irlandais, John Horne et Alan Kramer, dans Les Atrocités allemandes (Tallandier, Paris, 2005)
  32. C.I.P.M.-I.C.B.M., 1998. Programme d'action "Meuse" 1998-2003- Actieprogramma "Maas" 1998 - 2003. Commission internationale pour la Protection de la Meuse - Internationale Commissie voor de Bescherming van de Maas, Liège, 28 pages
  33. MRW (2007) La réintroduction du saumon atlantique dans le bassin de la Meuse : synthèse et résultats. Ministère la Région wallonne, 25 pages (avril 2007) (Rédaction par Malbrouck, C., J.C. Micha et J.C. Philippart http://environnement.wallonie.be/publi/education/saumon2000.pdf
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  37. Union européenne (2000) Directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2000, établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau. Journal officiel de l’Union européenne du 22 décembre 2000 , L 327, ( http://europa.eu.int/eur - lex/lex/fr/index.htm Eur-Lex).
  38. François Boespflug, La Crucifixion dans l’art : Un sujet planétaire, Bayard Editions, , 559 p. (ISBN 978-2-227-49502-9), p. 57-58
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