Mathilde Delattre

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Mathilde Delattre
Mathilde Delattre peignant au "Hanneton", son refuge de verdure du Grand Andely, en 1937. Cliché Madeleine Tétin, Fonds Atelier Mathilde Delattre
Naissance
Décès
Nationalité
Activités
Distinction

Officier d'Académie (1899) et Officier de l'Instruction publique (1905)

1er prix de l'Union des femmes peintres et sculpteurs (1903) et Médaille d'or au Salon des Artistes Français (1930)
Site web
signature de Mathilde Delattre
Signature

Mathilde Henriette Delattre, née Casajeus dit Crillon le au Caire (Egypte) et décédée le à Levallois-Perret, est une peintre et aquarelliste française[1].

Biographie[modifier | modifier le code]

Petite-fille du photographe parisien Alexandre Casajeus dit Crillon[2],[3], Mathilde nait au Caire en 1871, où sa mère Clémentine séjourna plusieurs années auprès du khédive Ismaïl Pacha qui l'y avait invitée pour les fêtes d'inauguration du canal de Suez[4],[5]. De retour à Paris, Clémentine épouse en mai 1874[6] son cousin Paul Louis Delattre qui légitimera la fillette de trois ans[4], officiellement née de père inconnu.

Le flamboyant Ismail Pacha, géniteur présumé de Mathilde Delattre[4]. Timbre commémoratif de l'inauguration du canal de Suez en 1869

Mathilde Delattre passe son enfance entre la région de Crespin (Nord) et Paris. Elle se perfectionne à l'aquarelle auprès de Madame Leroux et accède dès 1889 au Salon des Artistes Français, puis, l'école des Beaux-Arts étant alors interdit aux femmes, devient élève de Gaston Casimir Saint-Pierre et Henry-Eugène Delacroix[7] et enfin de Ferdinand Humbert[8]. Influencée par les natures mortes complexes du 17è siècle, puis par les artiste du courant naturaliste[9], elle expose très régulièrement à partir de 1895, en particulier au Salon des artistes français[10], à la Société des amis des arts de Seine-et-Oise au château de Versailles, au Salon de l'Union des femmes peintres et sculpteurs, à la Société nationale d'horticulture[11]. Elle tient son atelier et reçoit de nombreuses élèves au 17, rue Duperré à Paris de 1905 à 1940, et enseigne dans la même période au cours spécial d'aquarelle du 17e arrondissement de la ville de Paris. Elle réside et peint également aux Andelys (Eure)[4].

Mathilde Delattre dans son atelier parisien, vers 1903. Fonds Atelier Mathilde Delattre[12]

C'est surtout à l'aquarelle, où elle se signale dans les grands formats, que sa sensibilité s'exprime le plus intensément, même si elle expose également natures mortes, paysages et portraits, et s'adonne un temps à la céramique. Ses compositions florales où elle a toujours le souci de créer un cadre, une "circonstance" aux fleurs, dégagent, selon la critique, une atmosphère très subtilement poétique, et évoluent vers un art de "plein air"[12] qui s'éloigne du pur souci de précision ou d'intensité de coloris de ses contemporaines aquarellistes[13]. Sa "grande toile "Veille de fête au cloître" est remarquée par Guillaume Apollinaire[14]. Dans les années 1900 et 1910, elle réalise également à Perros-Guirec[5]une série de petits "paysages bretons" où elle flirte avec une technique impressionniste.

Femme célibataire et indépendante, Mathilde Delattre vit de son travail artistique jusque dans les années 1930[4], contrairement à certaines de ses contemporaines qui abandonnent la carrière professionnelle. Elle accrochera ses œuvres dans plus de 130 expositions, dont une quarantaine au Salon de la Société des artistes français. Elle obtient le premier prix au Salon de l'Union des femmes peintres et sculpteurs de 1903;[15]sociétaire des Artistes français depuis 1902, elle obtient au Salon une médaille d'or en 1930[16]. Elle est nommée Officier d'Académie le [17], puis Officier de l'Instruction publique, le [18],[1]. Sociétaire à la Société Nationale de l'Horticulture de France (1902), Membre du jury et du comité de l'Union des Femmes peintres et sculpteurs, de la Société des artistes français (1912), secrétaire de la Société des aquarellistes (1938), elle introduit ses élèves dans de nombreux salons et expositions.

Etiquette d'exposition de Mathilde Delattre au Salon de l'Union des Femmes peintres et sculpteurs, vers 1900[4]

Alors que le marché de l'art se déplace des salons vers les galeristes, elle présente en 1927 une exposition particulière à la galerie Georges Petit à Paris, mais exprime une certaine réticence envers les prix excessifs des "marchands". En 1937, et comme une consécration de son travail, elle est admise par le jury, à côté d'artistes plus célèbres invitées, à l'exposition organisée à l'occasion de l'Exposition universelle "Les femmes artistes d'Europe exposent au Jeu de Paume", initiative d'ampleur inégalée regroupant des créatrices de 15 pays.

carton exposition 1927
Invitation à l'exposition particulière Mathilde Delattre, Galerie George Petit, Paris, février 1927

En 1927, elle remporte au Salon le prix Pillini, créé l'année précédente pour récompenser des artistes peintres non favorisés par la fortune. Le décès en 1931 de sa mère, qui gérait ses obligations et visiteurs à l'atelier[4], retentit sur sa production et inaugure une période de difficultés financières, aggravée par les conséquences d'accidents sur sa santé, qui la contraignent en 1942 à quitter son logement-atelier de la rue Duperré. Elle expose une dernière fois en 1943 au Salon des artistes français, Contre-jour. Sa santé la contraint en 1949 à quitter définitivement son refuge de verdure du Grand Andely, et elle finit ses jours à la résidence pour dames de la fondation Greffulhe à Levallois-Perret[4].

« Je vous écris de ma petite galerie en plein soleil tamisé par un rideau de fleurs, volubilis & grands pétunias de toutes couleurs, polygonum encore en neige & de brillants géraniums, c'est adorable (...) je crois n'avoir jamais vu si doux & si bel automne (…) cela avec les phlox & les capucines & les feuillages rouges de la vigne vierge & celui des vignes qui ne le sont plus, c'est un véritable enchantement »[19].

Principales expositions[modifier | modifier le code]

À Paris[modifier | modifier le code]

  • en 1889 puis de 1897 à 1943, au Salon de la Société des Artistes Français (médaille de bronze en 1905, médaille d'argent en 1927 et médaille d'or en 1930[20])
  • de 1890 à 1891, au Salon de la Société nationale des Beaux-Arts[21]
  • de 1895 à 1900, à la Société des Amis des arts de la Seine & Oise, au château de Versailles (médaille d'argent en 1897[22])
  • de 1897 à 1939, au Salon de l'Union des femmes peintres et Sculpteurs[23] (1er prix de l'Union en 1903)
  • de 1898 à 1932, à la Société Nationales d'Horticulture de France[11]
  • en 1899, 1900 et 1900, à l'Exposition des "XII" à la Bodinière, Paris
  • en 1908, 1909 et 1912, à l'Exposition du Syndicat des Artistes Femmes à Enghien

En province et à l'étranger[modifier | modifier le code]

  • Salons de Roubaix-Tourcoing (1896 et 1900), Le Havre (1899), Dijon (1900), Bordeaux (1901), Toulouse (1906), Cannes (1912)
  • Exposition Universelle de Turin (1911, diplôme d'honneur); Exposition internationale d'Horticulture de Saint Petersbourg (1914, médaille d'argent)[11]

Galerie d’œuvres[modifier | modifier le code]

Œuvres dans les collections publiques[modifier | modifier le code]

Elèves introduites aux Salons par Mathilde Delattre[modifier | modifier le code]

Postérité[modifier | modifier le code]

Dans les années 2020 est redécouverte une correspondance émouvante qui montre la constante énergie comme l'indépendance de cette grande artiste (« Je vous assure que mon existence manque de calme, où qu'elle se déroule - & j'ai le grand besoin de m'appartenir un peu, de vivre un peu de ma vie intérieure qui est pleine de richesses[4]) et sa famille décide de s'engager dans un travail de mémoire. En janvier 2023 est créée l'association "Atelier Mathilde Delattre", dont l'objectif est la promotion de l’œuvre et de l'artiste, à distance de toute récupération marchande. Dans cette période de reconsidération des femmes peintres oubliées ou dont les œuvres dorment au fond des collections des musées, l'association se mobilise pour une première exposition rétrospective.

Pour l'heure, la seule exposition posthume connue incluant des œuvres de Mathilde Delattre est Histoire de la peinture lors des Journées du patrimoine 2022 à Crespin, au cours de laquelle ont été accrochés les tout premiers portraits réalisés par l'artiste en 1894[42].

L'association lance un appel à toutes personnes ou institutions en possession d’œuvres ou autres témoignages sur Mathilde Delattre, aux fins d'élaboration progressive du catalogue raisonné de l'artiste.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b « Le livre d'or des peintres exposants », sur geneanet.
  2. pins59, « Auguste ABS », sur canalblog.com, L' Atelier des photographes du XIX siecle, (consulté le ).
  3. "Alexandre" Crillon est l'auteur d'un portrait présumé d'Arthur Rimbaud https://www.parismatch.com/Culture/Livres/Portrait-inedit-du-poete-La-photo-d-un-inconnu-nomme-Rimbaud-886819
  4. a b c d e f g h i et j papiers famille Tétin-Ledru
  5. a et b papiers famille Girard-Lizot
  6. Acte de mariage no 178 (vue 6/31). Archives en ligne de la Ville de Paris, état-civil du 16e arrondissement, registre des mariages de 1874.
  7. dictionnaire Bénézit: https://doi.org/10.1093/benz/9780199773787.article.B00048561
  8. C'est en 1900 que, les Beaux Arts s'ouvrant enfin aux femmes, Ferdinand Humbert y assure le premier cours exclusivement féminin https://www.grandemasse.org/breves_historiques/filiation-de-latelier-officiel-de-peinture-pour-eleves-femmes-humbert-cree-en-1900/
  9. Mathilde Delattre exposera en 1907 une toile Le chemin des chardons. Souvenir de Marlotte, témoin d'un "pèlerinage" sur le site du groupe de Marlotte, lui-même issu de celui de Barbizon.
  10. Archives de la Société des artistes français
  11. a b et c « Hortalia », sur hortalia.org (consulté le ).
  12. a et b (en) « WordPress.com », sur WordPress.com (consulté le ).
  13. (Blanche Odin, Eugénie Faux-Froidure, Marie-Thérèse Dethan-Rouliet, etc.)
  14. Le vernissage de l'Union des Femmes Peintres et Sculpteurs. L'Intransigeant, 11 février 1912, p. 2, à lire en ligne sur Gallica.
  15. « Bulletin officiel de l'Union des femmes peintres, sculpteurs, graveurs... », sur Gallica, (consulté le ).
  16. « Le Monde artiste, , (p. 377) », sur gallica.bnf.fr.
  17. Ministère de l'Instruction publique et des Beaux-Arts. Officiers d'Académie. Journal Officiel, 12 mai 1899, p. 3145, à lire en ligne sur Gallica.
  18. Ministère de l'Instruction Publique et des Beaux-Arts, « Promotion du 1er janvier 1905, Officiers de l'Instruction Publique » [doc] in F/17/40135 à F/17/40155, sur Archives Nationales, (consulté le ).
  19. Correspondance de Mathilde Delattre à sa famille, Le Hanneton, Grand Andely, 5 novembre 1943
  20. « BnF Catalogue général », sur bnf.fr, Gründ (Paris), (consulté le ).
  21. Gaïté Dugnat, préface de Pierre Sanchez: Catalogues des Salons de la Société nationale des Beaux-arts, vol. 1890-1895. L'Echelle de Jacob, Dijon
  22. « Journal des artistes », sur Gallica, (consulté le ).
  23. Pierre Sanchez, préface de Ch. Beauvalot, Dictionnaire de l'Union des femmes peintres et sculpteurs: répertoire des artistes et liste de leurs oeuvres: 1882-1965, Echelle de Jacob, Dijon
  24. Œuvre vraisemblablement détruite lors du bombardement allemand et de l'incendie du musée le 8 juin 1940.
  25. Peintures. Delattre (Mlle Mathilde). Ville d'Aurillac. Catalogue du Musée, mai 1906, p. XXXII, à lire en ligne sur Gallica.
  26. Société des Lettres Sciences & Arts de la Lozère, « PORTRAIT DE JEANNE TOURNAY, 1897, PAR MATHILDE DELATTRE. Les deux artistes partagèrent les cours des mêmes maîtres. », sur societedeslettres48.fr, (consulté le ).
  27. Peintures. 105. Lilas (aquarelle). Musée de Riom. Catalogue général, année 1919, p. 26, à lire en ligne sur Gallica.
  28. Dons faits à la Société. Beaux-Arts. Bulletin de la Société des sciences historiques et naturelles de Semur, 1898, p. XXIII, à lire en ligne sur Gallica.
  29. Née Gallien à Constantine (1870-1959), elle était connue aussi sous le nom de Gallien-Berthon. Elle est la mère du peintre Maurice Alexandre Berthon (1888-1914).
  30. a b c d e f g h i j et k https://bibliotheques-specialisees.paris.fr/ark:/73873/pf0000004127/v0001.simple.highlight=Mathilde%20Delattre.selectedTab=record
  31. alors dite Princesse des Asturies. 1891-1987
  32. Germaine Boy participera à l'école de Savièse https://www.artlog.net/fr/exhibition/ecole-de-saviese-et-artistes-reconnues
  33. Paule Collas née Paula Primer dite Collas-Primer (1885-19..) ne doit pas être confondue avec la lithographe Paule Collas présente au Salon entre 1913 et 1922.
  34. (plus tard Laigneau-Ernault)
  35. Francine Gaudrion (1882-1941) a eu longtemps son atelier dans la même rue que celui de Mathilde Delattre, au 9 de la rue Duperré.
  36. Germaine Gloria (1888-1962) est également connue comme décoratrice, illustratrice et affichiste. Elle a notamment travaillé avec Paul Colin au Salon d'Automne. Les deux sœurs Gloria sont parfois dites Gloria-Colomb (patronyme de leur mère). Germaine reste célibataire tandis que Renée épouse Marie Joseph Clément en 1915.
  37. Louise Holfeld (1882-1967) travaillera ensuite le cuir et sera dame de compagnie et héritière de la fille du sculpteur Jean-Baptiste Carpeaux.
  38. Salon des femmes peintres et sculpteurs. Marthe Huctin. Revue du vrai et du beau, 25 avril 1931, p. 9, à lire en ligne sur Gallica.
  39. Elève de Mathilde Delattre ainsi que de SaintPierre et Delacroix; sociétaire des artistes français depuis 1897: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bd6t5397332d/f508.image.r=(prOx:%20%22%C3%A9l%C3%A8ve%22%208%20%22Delattre%22)?rk=107296;4 (Bénézit)
  40. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5744167j.image.r=DELATTRE.f21.hl
  41. Jacqueline Vermandel deviendra Madame Raymond Cahen-Molina
  42. Famille Butez-Delattre et https://www.crespin.fr/culture-loisirs/journees-du-patrimoine

Liens externes[modifier | modifier le code]