Maroilles (fromage)

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Maroilles
Pays d’origine
Région
Lait
Pâte
Appellation
Nommé en référence à
Volume commercialisé
4 241 t ()Voir et modifier les données sur Wikidata
Aire de production
200 000 ha ()Voir et modifier les données sur Wikidata

Le maroilles ou marolles, prononcé [maʁwal]/[maʁɔl], est une appellation d'origine désignant un fromage dont la production et la transformation s'effectuent dans la Thiérache française[1] (départements du Nord et de l'Aisne). Ce fromage au lait de vache doit son nom au bourg de Maroilles où existait une importante abbaye dans la communauté, qui achetait les fromages aux agriculteurs producteurs fermiers pour les revendre après affinage.

Sa meilleure période de consommation s'étend de juillet à mars[2].

Cette appellation est enregistrée comme AOC (décret du ), . Il est actuellement régi par le décret du (JO du ) et d'une AOP depuis 1996[3].

Histoire[modifier | modifier le code]

Un vendeur de maroilles au XVIIe siècle.

En 960, sur demande d'Enguerrand, l'évêque de Cambrai, le fromage fut affiné plus longuement, et prit bientôt le nom de « maroilles »[4].

Ce fromage a longtemps été exclusivement une production/transformation fermière et était un des produits dus par les paysans au titre de la dîme[4].

La vache productrice de lait usuellement exploitée pour ce fromage se nommait « maroillaise », était issue de la race Picarde et la rouge flamande. La maroillaise était particulièrement adaptée au pays herbager qu'est la Thiérache[5] et donnait au lait une grande valeur fromagère grâce à son taux protéique et son taux de matière grasse. Elle a disparu entre les deux guerres et a été dans un premier temps remplacée par la rouge flamande. puis par des croisements entre cette dernière et des races danoises[6].

Après la sortie du film Bienvenue chez les Ch'tis, les ventes de maroilles ont augmenté de 25 % entre 2008 et 2010[7]. En revanche lors du premier confinement de 2020 en France, elles ont chuté de 70 %[8].

Méthode d'obtention du maroilles[modifier | modifier le code]

En 2013, seulement onze agriculteurs producteurs fermiers maîtrisent le processus d'obtention du maroilles originel, c'est-à-dire sous sa forme fermière. Ils assurent donc la production du lait et sa transformation à la ferme en fromage au lait cru.

Production du lait[modifier | modifier le code]

Outre la production/transformation fermière minoritaire, le volume de production laitière dévolu au maroilles industriel est assuré par 339 agriculteurs qui vendent leurs laits crus réfrigérés à trois transformateurs industriels[9].

Transformation en fromages[modifier | modifier le code]

En 2013, le volume de transformation en fromage se partage donc entre onze producteurs-transformateurs fermiers (265 tonnes) et trois transformateurs industriels (3 867 tonnes) [10]. La filière de transformation en fromage ne compte pas d'artisan.

Le maroilles est transformé à partir de lait cru ou pasteurisé. Après un temps d'attente suite à l'emprésurage, le fromage est démoulé et aussitôt salé, puis placé dans un hâloir où il se couvre d'une légère moisissure bleue. Il est ensuite débleui par brossages puis mis dans des caves aux caractéristiques naturelles.

Le maroilles a une odeur caractéristique et une saveur corsée. Sa masse moyenne est de 700 grammes, avec un affinage optimal de cinq à sept semaines.

Consommation[modifier | modifier le code]

Sa période de consommation optimale s'étale de mai à août après un affinage de huit à dix semaines mais il est aussi excellent de mars à décembre. Lors de l'affinage, il se colore d'une robe orangée, plus ou moins foncée, lisse et brillante. Il peut se consommer cuit en tarte au maroilles ou en goyère (tarte salée à servir en entrée chaude) ou participer à la fin du repas sur un plateau de fromages. Le maroilles entre également dans la composition de sauces accompagnant traditionnellement un filet mignon ou du lapin rôti[11].

L'accord usuel associe le maroilles à la bière : bières d'abbaye, bières de fermentation haute telles que la 3 Monts ou autres bières blondes locales comme l'Angelus ou la Choulette[12].

Pour Pierre Casamayor[13], le maroilles peut se marier avec un vin de Champagne, mais le vin y perdra en finesse. Une eau de vie affinée (marc de Bourgogne ou de Champagne) ou un vin blanc très aromatique (gewurztraminer vendange tardive par exemple) peuvent aussi faire l'affaire. En revanche, les vins rouges légers sont cassés par les arômes forts du fromage. Un vin plus structuré peut aussi en pâtir, prenant un goût métallique.

Le maroilles contient environ 9 mg de zinc pour 100 grammes, ce qui en fait une des meilleures sources de zinc parmi les fromages[14].

Variantes et fromages dérivés du maroilles[modifier | modifier le code]

Le maroilles connaît plusieurs variantes différant par la forme ou la taille du fromage comme le dauphin, le mignon ou le sorbais [15].

Le vieux-lille[modifier | modifier le code]

Le vieux-lille est une pâte de maroilles, fabriquée en Avesnois (et non à Lille), salé deux fois, dont l'affinage est prolongé plusieurs mois par des lavages répétés à l'eau salée. Au bout de 5 à 6 mois, sa pâte finit par devenir grisâtre et collante[16]. Il se conserve de fait plus longtemps que le maroilles. Sans croûte, de couleur grisâtre à odeur légèrement ammoniacale, son goût est plus prononcé, plus salé et un peu piquant. À l'origine, il était fabriqué pour l'hiver, période de l'année où on ne trouvait ni lait ni fromage.

En 1960, Nikita Khrouchtchev, alors chef d’État de l’URSS de passage à Lille, apprécia tellement ce fromage qu’il s’en fit livrer au Kremlin[17].

Il bénéficie du label régional Nord-Pas-de-Calais par arrêté du . Le vieux-lille possède de nombreux synonymes: « gris de Lille, puant de Lille » et autrefois « maroilles gris ».

La boulette d'Avesnes[modifier | modifier le code]

Maroilles (à gauche) et boulette d'Avesnes (forme conique).

La boulette d'Avesnes est fabriquée à partir de maroilles blanc frais, enrichi de persil, d'estragon et de clous de girofle. De forme conique, elle est façonnée à la main, puis recouverte de paprika ou de roucou, ce qui lui confère sa couleur rouge brun et son goût un peu relevé et âcre.

Le fort de Béthune[modifier | modifier le code]

Le fort de Béthune, ou puant macéré, est composé de restants de fromages malaxés avec du vin blanc, parfois du genièvre, de l'eau-de-vie, du cumin et du beurre. Consommé après quelques jours ou semaines de fermentation, c'est un fromage de couleur grisâtre qui servait de casse-croûte aux mineurs au XIXe siècle et au début du XXe siècle[18],[19].

Formats[modifier | modifier le code]

Le maroilles, de forme carrée, se décline en quatre tailles[4],[20],[21] :

  • Maroilles ou « Gros » : (4/4) 12,5 à 13 cm de côté et 6 cm d'épaisseur, poids d'environ 720 g. Son affinage dure 5 semaines.
  • Sorbais : (3/4) 12 à 12,5 cm de côté et d'environ 4 cm d'épaisseur, poids d'environ 540 g. Son affinage dure 4 semaines[22].
  • Mignon : (1/2) 11 à 11,5 cm de côté et 3 cm d'épaisseur, poids d'environ 360 g. L'affinage dure 3 semaines[23].
  • Quart : (1/4) 8 à 8,5 cm de côté et 3 cm d'épaisseur, poids d'environ 180 g.Son affinage dure 2 semaines.

Le maroilles au cinéma[modifier | modifier le code]

Le maroilles eut son heure de gloire grâce à la scène du petit-déjeuner du film Bienvenue chez les Ch'tis. Le film expose ainsi la pratique habituelle qu'auraient les habitants de la région du Nord-Pas-de-Calais de tremper du maroilles dans leur café[24]. À la sortie du film, les ventes du fromage connaissent une augmentation[25].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. [1]
  2. « Manger du reblochon l’été, du mont-d’or l’hiver : quelle saisonnalité pour les fromages ? », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  3. Décret officiel.
  4. a b et c Maroilles, sur le site produits-laitiers.com.
  5. « L'industrie laitière en Thiérache et dans le Hainaut français » (consulté le )
  6. « La Flamande et ses produits laitiers | www.rougeflamande.fr », sur www.rougeflamande.fr (consulté le )
  7. « Journal économique et financier », sur La Tribune (consulté le ).
  8. « Le maroilles du Nord et les frites belges victimes de la crise due au coronavirus », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  9. « Fiche produit », sur inao.gouv.fr (consulté le ).
  10. « Chiffres clés 2013 des produits sous signes de la qualité et de l’origine, produits laitiers AOP produit par l'INAO et le CNAOL » (consulté le )
  11. « Les recettes de bière et maroilles », sur Shukarcooking.com
  12. Olivier Poussier, « Fromages “forts”, bières et vins », La Revue du vin de France, no 550,‎ .
  13. Pierre Casamayor, L'école des alliances, les mets et les vins, Paris, Hachette pratique, , 301 p. (ISBN 978-2-01-236461-5 et 2-01-236461-6)
  14. Maroilles : minéraux
  15. Jean Froc, Balade au pays des fromages : Les traditions fromagères en France, p. 114
  16. « Fromage Vieux-Lille », sur quiveutdufromage.com (consulté le ).
  17. Vieux-Lille, description du Vieux-Lille sur le site androuet.com (Le fromage par Androuet).
  18. « Fort de Béthune », sur le site du maître-fromager Androuet (consulté le )
  19. Jean Froc, Balade au pays des fromages : Les traditions fromagères en France, p. 192 et 201
  20. « Le maroilles », présentation d'André Leroy sur le site tourisme-culture-thierache.jimdo.com
  21. Maroilles, description du Maroilles AOC sur le site androuet.com (Le fromage par Androuet, maître fromager affineur).
  22. Sorbais, description du Sorbais sur le site androuet.com (Le fromage par Androuet).
  23. Mignon, description du Mignon sur le site androuet.com (Le fromage par Androuet).
  24. On dit que dans le Nord-Pas-de-Calais... « Le maroilles se trempe dans le café ! », livre de Marie Tranchant, publié le 9 octobre 2014, Éditions Ouest-France (site web bonnelecture.fr).
  25. « Le maroilles : Bienvenue chez les Ch'tis », article du site web du journal La Tribune, 18 juillet 2010.

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Laurence Quélen et Anne Dupuy, Le Maroilles : Dix façons de le préparer, Édition de l'Épure, , 24 p. (ISBN 978-2-914480-27-7)
  • Jean Froc, Balade au pays des fromages : Les traditions fromagères en France., Versailles, Éditions Quæ, , 239 p. (ISBN 2-7592-0017-5, lire en ligne)
  • Claire Delfosse, « L’appellation d’origine du maroilles. Comment définir l’aire de production d’un fromage en liaison avec celle du pays ? » », Ruralia, no 15,‎ (lire en ligne)

Articles connexes[modifier | modifier le code]

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Liens externes[modifier | modifier le code]