Marie-Adélaïde de Savoie

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Marie-Adélaïde de Savoie
Description de cette image, également commentée ci-après
La princesse Marie-Adélaïde de Savoie,
Duchesse de Bourgogne
par Gobert (XVIIIe siècle).

Titres

Dauphine de France


(10 mois et 4 jours)

Prédécesseur Marie-Anne de Bavière
Successeur Marie-Thérèse d’Espagne

Duchesse de Bourgogne


(13 ans, 4 mois et 7 jours)

Prédécesseur Isabelle-Claire-Eugénie d'Autriche
Successeur Marie-Thérèse d'Autriche (1717-1780)
Biographie
Titulature Princesse de Savoie
Duchesse de Bourgogne
Dauphine de France
Dynastie Maison de Savoie
Nom de naissance Maria Adelaide di Savoia
Naissance
Turin (Savoie)
Décès (à 26 ans)
Versailles (France)
Sépulture Nécropole de Saint-Denis
Père Victor-Amédée II de Savoie
Mère Anne-Marie d’Orléans
Conjoint Louis de France, duc de Bourgogne puis dauphin de France
Enfant Louis de France : duc de Bretagne
Louis de France : duc de Bretagne puis dauphin de France
Louis de France : duc d'Anjou, futur Louis XVRoi de France
Religion Catholicisme romain

Description de cette image, également commentée ci-après

Marie-Adélaïde de Savoie, née en 1685 et morte en 1712, est une princesse issue de la maison de Savoie, duchesse de Bourgogne puis dauphine de France. Elle est la fille de Victor-Amédée II, duc de Savoie, et d'Anne-Marie d'Orléans et la mère du futur Louis XV.

Biographie

Marie-Adélaïde de Savoie
Tableau de Jean-Baptiste Santerre (1709).

Origine

Marie-Adélaïde naît le à Turin[1],[2]. Elle est la fille aînée du duc de Savoie, Victor-Amédée II, et de son épouse Anne-Marie d'Orléans[1],[3]. Anne-Marie d'Orléans est la seconde fille de Philippe de France, dit Monsieur, frère unique du roi de France Louis XIV[3]. Sa mère, sa grand-mère et son arrière-grand-mère sont françaises. La princesse sera très proche de sa grand-mère la duchesse douairière de Savoie née Marie Jeanne Baptiste de Savoie-Nemours.

Elle épouse le , en vertu du Traité de Ryswick qui met fin à la Guerre de la Ligue d'Augsbourg, Louis de France (16821712), duc de Bourgogne, puis dauphin de France.

Duchesse de Bourgogne

Marie-Adélaïde de Savoie et ses deux enfants le duc de Bretagne et le duc d'Anjou
Marie-Adélaïde de Savoie à l'âge de quinze ans par Pierre Gobert
Mariage du duc et la duchesse de Bourgogne le à Versailles, tableau d'Antoine Dieu

Son mariage avec le duc de Bourgogne mit un terme à l'austérité de la Cour par des festivités fastueuses, malgré le retour du roi à la dévotion. Elle fit la conquête du vieux roi Louis XIV, flatté par sa bonne humeur et ses manières, ainsi que de l'épouse secrète de celui-ci, Madame de Maintenon (qu'elle appelait familièrement mais avec adresse « ma tante ») et obtint une place dans la Maison royale de Saint-LouisSaint-Cyr), en suivant les cours avec attention, malgré son attitude de mauvaise élève. Elle séduisit aussi son pieux mari, et lui resta solidaire en tout. Elle respectait aussi son beau-père, le Grand Dauphin, qui n'appréciait guère son fils aîné, le duc de Bourgogne. Bref, elle fut le trait d'union de toute la famille entre 1697 et 1712. Ses maternités malgré quelques fausses-couches raffermirent sa position à la Cour, et chacun voyait en elle une future reine.

Elle aimait la fête, la chasse, les plaisirs, mais se souciait beaucoup des autres. En 1700, elle assiste au mariage de Pierre de Montesquiou d'Artagnan, au Plessis-Picquet. Son mari lui vouait un amour violent et passionné, peu payé en retour : la princesse écoutait son mari, le soutenait contre leurs ennemis de la "clique de Meudon" (le Grand Dauphin et ses demi-sœurs, la duchesse de Bourbon et la princesse de Conti, toutes deux filles légitimées de Louis XIV). Ainsi en 1708, vola-t-elle au secours de son époux, calomnié pour son peu de courage militaire… Celui qu'elle admirait, c'était le roi.[réf. nécessaire]

En tant que future dauphine de France, et étant donné que la reine Marie-Thérèse était morte en 1683 et la dauphine Marie-Anne en 1690, Marie-Adélaïde tint, durant tout le temps où elle fut duchesse de Bourgogne puis dauphine et bien qu'elle n'ait que 12 ans à son arrivée en France, le rôle de reine. À ce titre, elle vivait dans l'ancien appartement de la reine Marie-Thérèse et étant la première dame de la cour, l'étiquette lui accordait de nombreux avantages qu'une simple dauphine n'aurait pas eus mais aussi un devoir de représentation très important. Aussi, en 1699, elle ne put que souscrire à l'invitation de Mme de Maintenon d'être la marraine du petit Louis-François-Armand, futur duc de Richelieu. Elle le familiarisera avec la Cour[4].

En 1700, son beau-frère le duc d'Anjou devint roi d'Espagne et l'année suivante épousa la sœur de Marie-Adélaïde, Marie-Louise-Gabrielle de Savoie ce qui n'empêcha pas le duc Victor-Amédée II de Savoie, père des deux princesses, de rompre l'alliance française pendant la Guerre de succession d'Espagne dont ses deux filles ne virent pas la fin.

Dauphine de France

En 1711 à la mort de son beau-père, Marie-Adélaïde de Savoie devint dauphine de France, et son mari dauphin. Elle mourut à 27 ans, le , d'une rougeole épidémique qui emporta également son mari 6 jours après elle, et leur fils, le duc de Bretagne (devenu dauphin), un mois plus tard.

Son cœur fut porté à la chapelle Sainte-Anne (nommée la « chapelle des cœurs » renfermant les cœurs embaumés de 45 rois et reines de France) de l'église du Val-de-Grâce. En 1793, lors de la profanation de cette chapelle, l'architecte Louis François Petit-Radel s'empara de l'urne reliquaire en vermeil contenant son cœur, le vendit ou l'échangea contre des tableaux à des peintres qui recherchaient la substance issue de l'embaumement ou « mummie » – très rare et hors de prix – alors réputée, une fois mêlée à de l'huile, donner un glacis incomparable aux tableaux[5].

Sous la plume du duc de Saint-Simon

Le duc de Saint-Simon, dans ses mémoires, dépeint la duchesse comme une femme habile à la cour, pleine d'esprit et d'énergie :

« Jamais princesse arrivée si jeune ne vint si bien instruite, et ne sut mieux profiter des instructions qu’elle avait reçues. Son habile père, qui connaissait à fond notre cour, la lui avait peinte, et lui avait appris la manière unique de s’y rendre heureuse. Beaucoup d’esprit naturel et facile l’y seconda, et beaucoup de qualités aimables lui attachèrent les cœurs, tandis que sa situation personnelle avec son époux, avec le roi, avec Mme de Maintenon lui attira les hommages de l’ambition. Elle avait su travailler à s’y mettre dès les premiers moments de son arrivée ; elle ne cessa tant qu’elle vécut de continuer un travail si utile, et dont elle recueillit sans cesse tous les fruits. Douce, timide, mais adroite, bonne jusqu’à craindre de faire la moindre peine à personne, et, toute légère et vive qu’elle était, très-capable de vues et de suite de la plus longue haleine, la contrainte jusqu’à la gêne, dont elle sentait tout le poids, semblait ne lui rien coûter. La complaisance lui était naturelle, coulait de source ; elle en avait jusque pour sa cour.

Régulièrement laide, les joues pendantes, le front trop avancé, un nez qui ne disait rien, de grosses lèvres mordantes, des cheveux et des sourcils châtain brun fort bien plantés, des yeux les plus parlants et les plus beaux du monde, peu de dents et toutes pourries dont elle parlait et se moquait la première, le plus beau teint et la plus belle peau, peu de gorge mais admirable, le cou long avec un soupçon de goitre qui ne lui seyait point mal, un port de tête galant, gracieux, majestueux et le regard de même, le sourire le plus expressif, une taille longue, ronde, menue ; aisée, parfaitement coupée, une marche de déesse sur les nuées ; elle plaisait au dernier point. Les grâces naissaient d’elles-mêmes de tous ses pas, de toutes ses manières et de ses discours les plus communs. Un air simple et naturel toujours, naïf assez souvent, mais assaisonné d’esprit, charmait, avec cette aisance qui était en elle, jusqu’à la communiquer à tout ce qui l’approchait.

Elle voulait plaire même aux personnes les plus inutiles et les plus médiocres, sans qu’elle parût le rechercher. On était tenté de la croire toute et uniquement à celles avec qui elle se trouvait. Sa gaieté jeune, vive, active, animait tout, et sa légèreté de nymphe la portait partout comme un tourbillon qui remplit plusieurs lieux à la fois, et qui y donne le mouvement et la vie. Elle ornait tous les spectacles, était l’âme des fêtes, des plaisirs, des bals, et y ravissait par les grâces, la justesse et la perfection de sa danse. Elle aimait le jeu, s’amusait au petit jeu, car tout l’amusait ; elle préférait le gros, y était nette, exacte, la plus belle joueuse du monde, et en un instant faisait le jeu de chacun ; également gaie et amusée à faire, les après-dînées, des lectures sérieuses, à converser dessus, et à travailler avec ses dames sérieuses ; on appelait ainsi ses dames du palais les plus âgées. Elle n’épargna rien jusqu’à sa santé, elle n’oublia pas jusqu’aux plus petites choses, et sans cesse, pour gagner Mme de Maintenon, et le roi par elle. Sa souplesse à leur égard était sans pareille et ne se démentit jamais d’un moment. Elle l’accompagnait de toute la discrétion que lui donnait la connaissance d’eux, que l’étude et l’expérience lui avaient acquise, pour les degrés d’enjouement ou de mesure qui étaient à propos. Son plaisir, ses agréments, je le répète, sa santé même, tout leur fut immolé. Par cette voie elle s’acquit une familiarité avec eux, dont aucun des enfants du roi, non pas même les bâtards, n’avait pu approcher.

En public, sérieuse, mesurée, respectueuse avec le roi, et en timide bienséance avec Mme de Maintenon, qu’elle n’appelait jamais que ma tante, pour confondre joliment le rang et l’amitié. En particulier, causante, sautante, voltigeante autour d’eux, tantôt perchée sur le bras du fauteuil, de l’un ou de l’autre, tantôt se jouant sur leurs genoux, elle leur sautait au cou, les embrassait, les baisait, les caressait, les chiffonnait, leur tirait le dessous du menton, les tourmentait, fouillait leurs tables, leurs papiers, leurs lettres, les décachetait, les lisait quelquefois malgré eux, selon qu’elle les voyait en humeur d’en rire, et parlant quelquefois dessus. [...] Avec elle s’éclipsèrent joie, plaisirs, amusements même, et toutes espèces de grâces ; les ténèbres couvrirent toute la surface de la cour ; elle l’animait tout entière, elle en remplissait tous les lieux à la fois, elle y occupait tout, elle en pénétrait tout l’intérieur. Si la cour subsista après elle, ce ne fut plus que pour languir. Jamais princesse si regrettée, jamais il n’en fut si digne de l’être, aussi les regrets n’en ont-ils pu passer, et l’amertume involontaire et secrète en est constamment demeurée, avec un vide affreux qui n’a pu être diminué.» [6]

Toujours d'après le duc, elle serait aussi l'auteur d'un trait d'esprit osé à propos de la monarchie anglaise, en présence de Louis XIV et de Mme de Maintenon :

« Si libre, qu'entendant un soir le Roi et Mme de Maintenon parler avec affection de la cour d'Angleterre dans les commencements qu'on espéra la paix par la reine Anne : "Ma tante, se mit-elle à dire, il faut convenir qu'en Angleterre les reines gouvernent mieux que les rois, et savez-vous bien pourquoi, ma tante ?" et toujours courant, gambadant, "c'est que, sous les rois, ce sont les femmes qui gouvernent, et ce sont les hommes sous les reines." L'admirable est qu'ils en rirent tous deux, et trouvèrent qu'elle avait raison. » [6] Mme de Maintenon avait en effet beaucoup d'influence sur le roi Louis XIV.

Héraldique

Marie-Adélaïde Duchesse de Bourgogne
Blason Blasonnement :
Écartelé, en I contre-écartelé au 1 d’argent à la croix potencée d’or cantonné de quatre croisettes de même, en 2 burelé d’azur et d’argent de dix pièces au lion de gueules armé lampassé et couronné d’or brochant sur le tout, au 3 d’or au lion de gueules armé lampassé et couronné d’azur et au 4 d’argent au lion de gueules armé lampassé et couronné d’or en II grand-quartier parti au 1 de gueules au cheval effrayé d’argent, au 2 fascé d’or et de sable de huit pièces au cancrelin de sinople posée en bande brochant sur le tout et enté en pointe d’argent à trois bouterolles au bout d’épée faites en croissant de gueules malordonnées, en III grand-quartier parti en 1 d’argent semé de billettes de sable au lion de même brochant sur le tout et en 2 de sable au lion d’argent, en IV grand-quartier parti en 1 à cinq point d’or équipolé à quatre points d’azur au 2 d’argent au chef de gueules ; sur le tout de gueules à la croix d’argent.

Famille

Postérité

Marie-Adélaïde de Savoie et Louis de France ont trois enfants :

  1. Louis de France (), duc de Bretagne ;
  2. Louis de France (), duc de Bretagne puis dauphin de France à la mort de son père en 1712 ;
  3. Louis de France (), duc d'Anjou, futur Louis XV.

Ascendance

Voir aussi

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Bibliographie

Marie-Adélaïde Duchesse de Bourgogne
  • Fabrice Preyat, « Marie-Adélaïde de Savoie (1685-1712), Duchesse de Bourgogne, enfant terrible de Versailles », Études sur le XVIIIe siècle, vol. XXXXI,‎ , p. 292 (lire en ligne)
  • Annie Pietri, "Le sourire de Marie-Adélaïde", Bayard, 2014 (roman)
  • Anne-Marie Desplat-Duc, "Les Colombes du Roi-Soleil tome 12 : Victoire et la Princesse de Savoie", Flammarion, 2013 (roman pour la jeunesse)
  • Martial Debriffe, La duchesse de Bourgogne, mère de Louis XV, Univers Poche, , 166 p. (ISBN 978-2-82380-787-5)
  • Annie Jay, Adélaïde, princesse espiègle, Éveil et Découvertes, 2010 (roman pour la jeunesse)
  • Sabine Melchior-Bonnet, Louis et Marie-Adélaïde de Bourgogne, la vertu et la grâce, Robert Lafont, 2002
  • Antonia Fraser, Les femmes dans la vie de Louis XIV, 2007
  • Simone Bertière, Les Femmes du Roi-Soleil, Éditions de Fallois, 1998, (ISBN 2-253-14712-5)
  • Yvonne Brunel, Marie-Adélaïde de Savoie, duchesse de Bourgogne, 1685-1712, Éditions Beauchesne, coll. « Figures d'hier et d'aujourd'hui », , 254 p.
  • Louise de Cléron, Souvenirs d'une Demoiselle d'honneur de Mme la Duchesse de Bourgogne, Paris, Michel Lévy, 1861. Écrit sous le pseudonyme de Fiorenza Orsini, cette biographie livre une part de l'intimité de la duchesse. (Attention : cet écrit est considéré par certains historiens comme apocryphe.)
  • Adrien Maurice de Noailles, Lettres inédites de Marie-Adélaïde de Savoye, duchesse de Bourgogne, précédées d'une notice sur sa vie (1850)
  • Marie-Nicolas Bouillet et Alexis Chassang (dir.), « Marie-Adélaïde de Savoie » dans Dictionnaire universel d’histoire et de géographie, (lire sur Wikisource)

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. a et b Brunel 1974, p. 16 (Lire en ligne).
  2. Preyat 2014, p. 31.
  3. a et b Palluel-Guillard, p. 36.
  4. Paul Rival, Fantaisies amoureuses du duc de Richelieu, Paris, (Hachette), , 399 p., p. 27-28
  5. André Castelot, L'Histoire insolite, Paris, Perrin, , 427 p. (ISBN 2-262-00248-7), p. 171.
  6. a et b Saint-Simon, Mémoires, folio (ISBN 2-07-038234-6), p. 227-237