Malikisme

Le malikisme ou malékisme (en arabe : مذهب مالكي) est l'une des quatre madhhab, écoles classiques du droit musulman sunnite. Il est fondé sur l'enseignement de l'imam Mālik ibn Anas (711 - 795), théologien et législateur qui naquit à Médine. Cette école est majoritaire en Afrique du Nord et Afrique de l'Ouest ; on la retrouve par ailleurs en Égypte, au Soudan et dans certains pays du golfe Persique (Koweït, Émirats arabes unis, Qatar, Bahreïn). Suivie par environ 20 % des musulmans, c'est la troisième école en nombre de pratiquants ; en France, elle est la première.
En 2016, un concile, inauguré par le grand imam de l'Azhar, Ahmed al-Tayeb, rassemblant 200 personnalités sunnites du monde entier, s'est réuni dans le but de définir l’identité de ceux qui se font connaître comme « les gens du sunnisme » par opposition aux différents groupes considérés égarés. À l'issue de leurs travaux, les dignitaires sunnites ont convenu qu'au niveau du droit, les malikites sont bien des gens du sunnisme [2],[3].
Cette école diffère essentiellement des trois autres du fait qu'elle est plus structurée et hiérarchisée avec un primat à sa tête et par les sources qu'elle utilise pour déterminer la jurisprudence. Si les quatre écoles utilisent toutes le Coran, la sunna, ainsi que l'ijma (le consensus des compagnons du Prophète) et les analogies (qiyâs), le malikisme utilise également les pratiques des premiers habitants musulmans de Médine (Amal ahl al-medina) comme source de la jurisprudence islamique (fiqh) et fait grand cas de la tradition du Prophète (hadiths), tout en prenant en considération l'intérêt général.
Sommaire
Formation du madhhab[modifier | modifier le code]
L'imam Malik rapportait les hadiths et discutait leurs significations en contexte. Soit il citait des hadiths et des athaars (dires des sahabas -compagnons du prophète) sur des domaines de la chariah en discutant leurs conséquences, soit il demandait à ses élèves s'il y avait dans leurs contrées un problème qu'ils pouvaient tenter de résoudre.
Après avoir achevé son recueil al-Muwatta, il le récitait à ses étudiants avec des variations en ajoutant ou en soustrayant quelques hadiths selon qu'il recevait des nouvelles informations.
Il évitait scrupuleusement le fiqh hypothétique; ainsi son école était rattachée aux « gens du hadith » (ahl al-hadith) en opposition aux « gens de la raison » (ahl al-râ'y).
Sources et méthodologie[modifier | modifier le code]
Les sources sont, par ordre d'importance :
- Le Coran : c'est la source première et l'imam Malik l'appliqua sans restrictions aucune.
- La Sunna : tout comme Abou Hanifa, Malik imposa quelques restrictions à son utilisation : si un hadith contredisait la pratique des Médinois, il le rejetait. Toutefois il ne demandait pas que le hadith soit connu (mashhûr) pour l'appliquer, à la différence d'Abou Hanifa ; il utilisait tout hadith pour peu que les narrateurs aient été fiables et n'étaient pas des forgeurs de hadith ou à mémoire faible.
- La pratique des Médinois (amal ahl al-Madinah) : l'imam Malik soutient que puisque beaucoup de médinois étaient descendants de sahaba et que c'était la place où le Prophète avait passé les dix dernières années de sa vie terrestre, la pratique générale des médinois devait être au moins autorisée, voire encouragée par le Prophète lui-même. Malik considérait ainsi ce point-là comme une sounnah plus qu'authentique où l'action parle plus que les mots : le mode de vie des habitants de la cité est vu comme une sunna appliquée.
- Le consensus des compagnons (Ijmâ') : l'opinion unanime des sahabas sur un point donné non mentionné dans une source précédente prend le dessus sur toute opinion personnelle de tout juriste.
- L'opinion individuelle d'un compagnon : l'imam Malik donnait toute son importance aux déclarations des sahabas, qu'ils soient d'accord entre eux ou non, et les inclut dans son livre Al-Muwatta. Le consensus des sahaba était cependant plus fort qu'une opinion individuelle d'un sahaba.
- Le raisonnement par analogie ou Qiyâs : dans les domaines où il n'y avait aucune preuve claire disponible, le qiyas était admis, mais Malik prenait toutes les précautions face à cette science subjective.
- La coutume isolée de certains médinois : Malik pensait que même les pratiques isolées des médinois devaient être d'origine sahabi, voire venir du Prophète : tant qu'elles n'étaient pas en contradiction avec un quelconque hadith elles étaient acceptées.
- L’Istislâh (intérêt général) : comparable au principe d'istihsân (préférence) de l'école hanafite, c'est en fait chercher ce qui est le plus adéquat. Cela concerne un évènement qui n'est pas considéré par la chari'ah mais qui est pour l'intérêt commun. Un exemple est la décision du calife 'Ali sur un groupe, jugé coupable d'un meurtre, quand bien même un seul membre du groupe l'avait commis.
- La coutume locale ('urf) : les coutumes locales entrent en jeu quand il n'y a pas d'injonctions religieuses disponibles. C'est ce principe qui est à l'origine de l'inclusion de certaines pratiques culturelles vues comme religieuses par un observateur extérieur. Par exemple, le mot arabe "Daabbah" signifie en Syrie un cheval, mais dans les autres contrées arabes il désigne tout animal à quatre pattes. Ainsi un contrat passé en Syrie avec ce terme ne nécessiterait pas de plus amples explications, à la différence des autres régions.
- Al insaf bi Dhikri Asbab al Khilaf
- Mukhtasar al Muntaha
- Sharhu Mukhtasar al Usul
- Ash Sharhu ala Mukhtasar al Usul
- Sharhu Mukhtasar al Usul
- Al Hashiyatu ala Sharh al Mukhtasar
- Al Hashiyatu ala Sharh al Adidi
- Jawhir al Tajqiq
- Hashiyatu ala Sharhi Mukhtasar al Usul
- Hashiyatu ala Hashiyati Mukhtasar al Usul
Élèves et savants malikites célèbres[modifier | modifier le code]
- Ibn Al-Qâssim (m.813)
- Imam Sahnoun
- Ibn Wahb (m.818)
- Ibn Battûta
- Ibn Abî Zayd Al-Qayrawânî, surnommé "le petit imam Malik"
- Asad ibn al Furat
- Abû Bakr Ibn At Tayyib Al Bâqillânî (m.1013)
- Al Qâdî Abû Bakr Ibn Al 'Arabî
- Al-Qâdhî 'Iyâdh
- Ibn 'Abd Il Barr
- 'Abd Ul Mâlik Ibn Mas'ûd Ibn Bashkuwâl (m.1139)
- Abul Walîd Al Bâjî
- Abû 'Abdi Llâh Al Qurtubî (m.1273)
- Ibn Khaldoun (m.1406)
- Ibn Ruchd al Jadd et son petit-fils Ibn Ruchd (connu en Europe sous le nom d'Averroès)
- Ibn Juzayy Al Kalbî Al Gharanâtî
- Khalil ibn Ishaq al-Jundi l'auteur du célèbre "Mukhtasar Khalil"
- Abû Is-hâq Ash Shâtibî
- 'Abd Ul Wâhid Ibn 'Âshir l'auteur du Matn "Al Murchid ul Mu'in"
- Shaykh Ahmad At Tijani
- Oumar Tall, fondateur de l'empire Toucouleur
- Usman dan Fodio, fondateur de l'empire du Sokoto
- Al Jassûs (m.1768)
- Muhammad Elîsh (m.1883)
- Famille Ennaifer famille tunisienne de oulémas malikites
- Famille Djaït famille tunisienne de oulémas malikites
- Famille Malki famille tunisienne de Cheikh Salah Malki
XXe siècle[modifier | modifier le code]
- Abder-Rahman Elîsh El-Kebîr (m.1930)
- Ahmadou Bamba Mbacké
- Seydi Al Hajj Malik Sy
- Mohammed Belkebir, savant algérien du Touat
- Ahmad al-Alawi
- Mohamed Tahar Ben Achour, tunisien.
- Farid al-Ansari
- Muhammad Ibn 'Alawî Al Mâlikî Al Makkî
- Hamza Yusuf
- Cheikh Ahmad Ndiaye Dabaye
D'autres élèves de l'imam Malik modifièrent quelque peu ce qu'ils avaient appris de lui tels que Mouhammad Al-Chaybani, le hanafite. Muhammad Ibn Idris ash-Châfi'î pour sa part combina ce qu'il avait appris de l'Imam Malik avec d'autres connaissances et créa son propre madhhab, le chafi'isme.
Notes et références[modifier | modifier le code]
- (en) Roland Anthony Oliver et Anthony Atmore, Medieval Africa, 1250-1800, éd. Cambridge University Press, Cambridge, 2001, p. 36
- « Schisme en Islam : le Wahhabisme exclu du sunnisme », sur Metamag (consulté le 28 mai 2017)
- "Islamic conference in Chechnya: Why Sunnis are disassociating themselves from Salafists" Sep, 09 2016 | He stated: “Ahluls Sunna wal Jama’ah are the Ash’arites or Muturidis (adherents of Abu Mansur al-Maturidi's systematic theology which is also identical to Imam Abu Hasan al-Ash'ari’s school of logical thought). In matters of belief, they are followers of any of the four schools of thought (Hanafi, Shaf’ai, Maliki or Hanbali) and are also the followers of pure Sufism in doctrines, manners and [spiritual] purification.
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- Abdullah Saeed (2008), The Qur'an: An Introduction, Routledge, (ISBN 978-0415421256), pp. 16–18
Voir aussi[modifier | modifier le code]
Bibliographie[modifier | modifier le code]
- Mohammad Aboû Zahra, L'imam Mâlik, éditeur Al-Qalam, 2007, 392 p., (ISBN 978-2-909469-41-6)
- Saʻd al- Gurāb, Ibn Arafa et le malikisme en Ifriqiya au VIII/XIVe s, éd. Études arabo-islamiques-Paris 3, 1984
Articles connexes[modifier | modifier le code]
Liens externes[modifier | modifier le code]
- Portail d'information sur l'école Malekite http://www.ecolemalekite.com
- La doctrine malikite