Maison de verre (Budapest)
La Maison de verre (en hongrois Üvegház) est un bâtiment situé à Vadász utca 29 à Budapest, en Hongrie. Il est notamment connu pour avoir abrité des Juifs lors de la Seconde Guerre mondiale, sous protection du vice-consul suisse, Carl Lutz.
Construction
[modifier | modifier le code]La bâtiment est construit dans les années 1920 par l'entrepreneur juif Arthur Weisz, grossiste en produits en verre[1],[2]. L'architecte chargé des plans est Lajos Kozma (hu), considéré comme un des plus en vue de son époque en Hongrie[3]. Bâti dans le style Bauhaus, il est situé dans la Vadász utca (dans le quartier Lipótváros), où les constructions avoisinantes sont dans le style art déco[1]. Weisz est toutefois dépossédé lors de l'introduction des lois raciales en Hongrie[1].
La façade extérieure est composée de verre blanc incrusté de petits morceaux de verre coloré[4].
Refuge lors de la Seconde Guerre mondiale
[modifier | modifier le code]Mise sous protection par Carl Lutz
[modifier | modifier le code]Des milliers de Juifs hongrois trouvent refuge dans la Maison de verre, placée sous protection de la légation suisse à Budapest le [5],[6] et bénéficie ainsi d'une extraterritorialité[7]. Carl Lutz, vice-consul de Suisse, y installe la section de l'émigration de la division des intérêts étrangers[8] et permet à Weisz et sa famille d'y habiter de nouveau[1],[5]. Le refuge est alors géré par Moshe Krausz, responsable de l'Office pour la Palestine de l'Agence juive[7].
L'ouverture de ce lieu de protection a pour conséquence d'enlever une partie du marché noir des lettres de protection rédigées par la Suisse en faveur des Juifs hongrois, particulièrement dans le parc Saint-Étienne[9]. Une production pratiquement industrielle se développe dans la Maison de verre, sous la conduite d'Alexander Grossman (en)[10], où 60 à 120 secrétaires remplissent les lettres de protection[10]. Le journal hongrois pro-allemand Magyar Szó parle ainsi d'un « centre du marché noir pour l'émigration »[11],[12]. Même si les faux ne sont pas produits sur place, un marché noir a effectivement lieu dans la Maison de verre[13].
Un des bâtiments voisins de la Maison de verre appartient à la Fédération hongroise de football (MLZS), du moins jusqu'au [14]. Disposant d'un passage souterrain communicant, les responsables de la Maison de verre peuvent ainsi « loger » plusieurs centaines de jeunes (entre 800 et 1 200 selon les principaux concernés), qui doivent toutefois rester silencieux et limiter leurs déplacement pour maintenir l'illusion d'un bâtiment inhabité[14].
Conditions de vie
[modifier | modifier le code]Le bâtiment fait office de bureau et de lieu d'habitation, où chaque recoin est utilisé[15]. Au rez-de-chaussée se trouve l'accueil des Juifs cherchant une protection, au 1er étage les bureaux permettant de traiter les demandes[15]. Dans la cave, les Juifs orthodoxes s'installent, parmi eux beaucoup de personnes âgées et de familles avec des enfants[16],[17]. Ceux ayant de la chance dans cette [Quoi ?] ont à disposition une caisse haute de 30 cm et de 1,5 mètre de long, parfois partagée entre plusieurs familles[17].
La Maison de verre est dotée d'une cuisine au rez-de-chaussée, dont les stocks (conserves, pois et confitures) sont approvisionnés par la Croix-Rouge[18]. Du café est servi au début des activités, mais est rapidement remplacé par du thé[18]. Le repas quotidien se limite à un ragoût, généralement de légumes[18]. Plus le rationnement progresse, plus les portions sont maigres, voire réparties entre les membres d'une famille en fonction de leur nombre[18]. Selon les souvenirs d'un jeune de 16 ans à l'époque, « personne n'avait pas faim, mais personne n'était affamé »[19]. Pour les enfants, la ration alimentaire se limite à une fine tranche de pain avec une grande portion de pâté de foie[19].
Le refuge est doté d'une infirmerie[11] et de deux sanitaires, en sus des latrines creusées dans la cour intérieure[20]. Les vêtements sont lavés dans un lavoir installé au 1er étage[19].
Références
[modifier | modifier le code]- Rosenberg 2016, p. 153.
- ↑ (de) Theo Tschuy (préf. Simon Wiesenthal), Carl Lutz und die Juden von Budapest, Zurich, NZZ Verlag, , 446 p. (ISBN 3-8582-3551-2), p. 190
- ↑ (de) György Vámos (trad. du hongrois par Agnes Hirschi), Carl Lutz (1895-1975) : Schweizer Diplomat in Budapest 1944 : ein Gerechter unter den Völkern, Genève, Éditions de Penthes, coll. « Suisses dans le Monde » (no 9), , 130 p. (ISBN 978-2-8847-4670-0), p. 69.
- ↑ Vámos 2012, p. 69.
- Tschuy 1995, p. 190.
- ↑ Vámos 2012, p. 70.
- Rosenberg 2016, p. 151.
- ↑ Rosenberg 2016, p. 150.
- ↑ Rosenberg 2016, p. 152.
- Rosenberg 2016, p. 158.
- Rosenberg 2016, p. 162.
- ↑ Vámos 2012, p. 78.
- ↑ Vámos 2012, p. 77.
- Vámos 2012, p. 82.
- Rosenberg 2016, p. 192.
- ↑ Rosenberg 2016, p. 193.
- Vámos 2012, p. 81.
- Vámos 2012, p. 83.
- Vámos 2012, p. 84.
- ↑ Rosenberg 2016, p. 194.
Annexes
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- (de) Erika Rosenberg, Das Glashaus : Carl Lutz und die Rettung ungarischer Juden vor dem Holocaust, Munich, Herbig, , 223 p. (ISBN 978-3-7766-2787-9), chapitre 9 : « Das Glashaus: Logistikzentrale und letzte Flucht » et chapitre 11 : « Im Angesicht des Todes: Leben und Überleben im Glashaus »
- Erika Rosenberg (trad. Maxime Vissac), Carl Lutz et le sauvetage des Juifs de Hongrie, Neuchâtel, Editions Livreo-Alphil, , 229 p. (ISBN 978-2-8895-0040-6).
Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- (en) Site officiel