Louis Favre (prêtre)

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Louis Favre
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 33 ans)
Vieugy (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Louis Adrien FavreVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activités
Autres informations
Ordre religieux
Salésiens (à partir de )Voir et modifier les données sur Wikidata
Conflit
Distinctions

Louis Favre, né à Bellevaux, en Haute-Savoie le , et fusillé à Vieugy (Haute-Savoie) le , est un prêtre catholique français, membre des Missionnaires de Saint François de Sales, résistant, Juste parmi les nations.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse[modifier | modifier le code]

Né le [1] dans un hameau de la commune de Bellevaux, en Haute-Savoie, il est le deuxième fils de Joseph Marie Favre, cultivateur, et de Marie Julie Voisin son épouse. Il est le troisième enfant d’une famille qui en compte quatre. Le père de famille est tué sur le front en 1917.

Louis Favre fait ses études primaires à Bellevaux et ses études secondaires de 1922 à 1929 à Ville-la-Grand au Juvénat (petit séminaire) dans la banlieue d’Annemasse, chez les Missionnaires de Saint François de Sales, une petite communauté religieuse axée sur l’enseignement. Il continue ensuite ses études religieuses à Fribourg, en Suisse, où la Congrégation possède une grande maison, la villa Bonlieu. Il effectue son noviciat du au puis suit les cours de philosophie à Saint-Michel avant d’effectuer son service militaire.

Service militaire et ordination[modifier | modifier le code]

Il entre dans la 14e section d’infirmiers à compter du en tant que soldat de 2e classe, il devient caporal puis sergent avant « d’être renvoyé dans ses foyers » le .

Il revient compléter sa formation religieuse à Bonlieu et suit les cours de la faculté de théologie de Fribourg; il prononce ses vœux perpétuels le et est ordonné prêtre le [1] par Marius Besson à Saint-Michel à Fribourg.

Après sa dernière année de théologie la Congrégation l’envoie comme surveillant à l’Institut Florimont, l’établissement d’enseignement français qu’elle possède au Petit-Lancy dans la banlieue de Genève. Passionné de football, Louis Favre devient le professeur de sport de Florimont. Il aime aussi écrire des pièces de théâtre qu’il joue avec les plus jeunes élèves sur la scène du théâtre de l’école.

Résistance[modifier | modifier le code]

La guerre est inévitable : il est rappelé par l’armée le et affecté au dépôt de la 14e section d’infirmiers militaires. Il est démobilisé le  : les soldats de l’armée des Alpes dont il fait partie n’ont pas été faits prisonniers. La frontière avec la Suisse étant momentanément fermée il enseigne à Ville-la-Grand à la rentrée 1940. La position du Juvénat est déterminante pour son futur engagement dans la Résistance et dans le passage des Juifs : l’établissement possède un jardin dont le mur fait frontière avec la Suisse. De l’autre côté du mur, c’est le hameau de Carra dans le canton de Genève, et cette position privilégiée de l’établissement va déterminer le destin de Louis Favre.

À la rentrée 1941 la frontière est ouverte et Louis Favre revient enseigner à l’Institut Florimont en Suisse. L’établissement est pétainiste, comme la plupart des établissements dépendant de la religion catholique qui soutient le nouveau régime. Les positions ouvertement gaullistes de Louis Favre lui valent son éviction de Florimont en et son retour à Ville-la-Grand dans le cours d’une année scolaire.

L’établissement connaît ses premiers passages (des jeunes Hollandais principalement) dès la fin 1941. L’engagement de Louis Favre dans la Résistance est très précoce comme le montre son dossier individuel relatif aux opérations accomplies dans la clandestinité qui se trouve au ministère de la Défense à Vincennes, dans le « bureau Résistance et Seconde guerre mondiale ». André Devigny, Compagnon de la Libération chargé de « liquider » le réseau Gilbert, c'est-à-dire d’en contrôler toute la véracité des éléments des dossiers, écrit de sa main : « entrée dans la Résistance : janvier 42 ». Ce dossier enfin consultable bouleverse tout ce que l’on savait de l’engagement de Louis Favre dans la Résistance. En effet, si son appartenance aux réseaux Gilbert du colonel Georges Groussard (résistant) était connue, – engagement commençant en juste après l’invasion de la zone libre par les Allemands – , son homologation en tant qu'agent P2 dans le réseau de renseignement du mouvement Combat, le réseau Kasanga, dès , était totalement inconnue.

Parallèlement à ses activités de renseignement, de passage de documents dans un sens ou dans l’autre de la frontière, il y a le passage des hommes, ceux de la Résistance, malgré l’hostilité de ses confrères, et celle des Juifs depuis l’été 1942 et les grandes rafles. Tout l’établissement finit par participer au passage des Juifs, et quatre d’entre eux recevront la médaille des Justes parmi les nations : les pères Louis Favre, Gilbert Pernoud, Pierre Frontin ainsi que le frère jardinier Raymond Boccard. Louis Favre multiplie les activités de passages, se rend très souvent à Genève et il est repéré par la Gestapo. Le jeudi il est arrêté par la douane allemande au Juvénat après une longue traque dans l’établissement. Il passe dans quatre prisons de Haute-Savoie et devient le plus ancien prisonnier de la Gestapo du département. Louis Favre impressionne tout le monde, les prisonniers comme les gardiens qui le laissent soigner les autres détenus et même… leur couper les cheveux grâce à la tondeuse que lui a fait parvenir à sa demande son ami Marcel Durupthy des réseaux Gilbert qui est gérant du salon de coiffure de la gare de Cornavin, à Genève. Il continue à faire du renseignement et à soutenir les autres membres du réseau Kasanga qui ont été arrêtés peu après lui : Charles Francillon, Albert Curioz et Emille Millet. Son existence en prison nous est connue par des témoignages de codétenus mais aussi par les petits billets qu’il a réussi à faire passer à l’extérieur grâce à la complicité de sa jeune sœur Marie. Louis Favre refuse l’évasion préparée par les services de renseignement suisses et français pour que d’autres ne paient pas leur vie de la sienne. Il est fusillé le dimanche avec sept autres camarades dans une clairière de Vieugy, près d’Annecy. De nombreux autres membres des réseaux Gilbert ont été arrêtés, mais seuls les quatre qui faisaient partie du réseau Kasanga, Louis Favre, Charles Francillon, Albert Curioz et Emille Millet ont été fusillés. Ils ont leur monument à l’entrée du cimetière d’Annemasse. Les anciens élèves sportifs de Florimont ont financé le médaillon de bronze qui orne le Juvénat. Gilbert Ceffa, qui a connu Louis Favre lorsqu’il avait 18 ans, a conservé ses billets et a entretenu sa mémoire. Les billets ont été exposés aux archives de l’état de Genève, et hommage a été rendu à ces Français qui, par leur action bénévole, ont contribué à la sauvegarde de la Suisse.

Distinctions[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Giroud 2012, p. 13, 37.
  2. « Louis Favre », sur www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr (consulté le )
  3. « Favre Louis », sur Comité français pour Yad Vashem (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Gilbert Ceffa, Louis-Adrien Favre – Prêtre et patriote-résistant – Dix-huit messages de captivité, éd. La Salévienne, 2009.
  • « Favre, père Louis », dans Israel Gutman, Lucien Lazare, Dictionnaire des Justes de France, Jérusalem et Paris, Yad Vashem et Arthème Fayard, (ISBN 2-213-61435-0), p. 249.
  • Jean-Claude Croquet, Chemins de passage, éd. Salévia, St.-Julien-en-Genevois, 1996.
  • Michel Germain, La Haute-Savoie dans la guerre 1939-1945, éd. Horvath, 1993.
  • Michel Germain, Haute-Savoie 1940-1945 Mémorial de la déportation, éd. La Fontaine de Siloé, 1999.
  • Nicole Giroud, Mission et calvaire de Louis Favre : la filière franco-suisse, Bière (Suisse), Cabedita, , 260 p. (ISBN 978-2-88295-635-4 et 2-88295-635-5).
  • Georges Groussard, Service secret 1940-1945, éd. La Table Ronde, 1964, (ISBN 2710316544).
  • René Mossu, Les secrets d’une frontière, éd. Milieu du monde, 1946.
  • Odile Munos-Du Peloux, Passer en Suisse les passages clandestins entre la Haute-Savoie et la Suisse 1940-1944, éd. Presses universitaires de Grenoble, 2002.
  • Jean-François Pierrier, Chronique des années brunes à la frontière genevoise, Journal « Le Courrier », Genève, 1984.
  • Limore Yagil, La France terre de refuge et de désobéissance civile 1936-1945 : le sauvetage des Juifs, Cerf, 3 tomes, 1200 p. 2010-2011.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]