Lockheed Martin F-117 Nighthawk

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Lockheed-Martin F-117 Nighthawk
Vue de l'avion.
Un F-117 en vol en 2002.

Constructeur Lockheed Martin
Rôle Attaque au sol
Statut Retiré du service
Premier vol
Mise en service
Date de retrait Retiré du service en 2008, sortie de sommeil en 2021 pour entraînement.
Coût unitaire US$42.6 millions (coût de construction)

US$111.2 millions (prix général)

Nombre construits 64 (5 YF-117A, 59 F-117A)
Dérivé de Lockheed Have Blue
Équipage
1 pilote
Motorisation
Moteur General Electric F404-GE-F1D2
Nombre 2
Type Turboréacteurs
Poussée unitaire 47,8 kN
Dimensions
vue en plan de l’avion
Envergure 13,21 m
Longueur 20,09 m
Hauteur 3,78 m
Surface alaire 84,8 m2
Masses
À vide 13 000 kg
Avec armement 20 000 kg
Maximale 25 000 kg
Performances
Vitesse maximale 993 km/h (Mach 0,92)
Vitesse de décrochage 280 km/h
Plafond 13 710 m
Rayon d'action 2 110 km
Armement
Interne 2 bombes en soute (Mk 84, Paveway GBU-10, GBU-27 (en), BLU-109B, WCMD, Mk.61)
Externe Aucun
Avionique
FLIR et DLIR de ciblage

Le Lockheed-Martin F-117 Nighthawk est un avion d'attaque au sol conçu par les États-Unis dans la seconde moitié des années 1970. C'est le premier avion militaire au monde étudié dès le départ pour avoir la signature la plus réduite possible. Il a été retiré du service actif le et fut mis définitivement hors service à partir de 2018 mais une quarantaine d'appareils servent toujours, tenant le rôle d’agresseurs lors d’exercices en 2024[1].

À cause de ses formes inhabituelles et du secret qui a entouré tant l'avion (son existence n'a été reconnue officiellement qu'en 1988) que ses missions, le F-117 a été évoqué comme source des observations d'OVNI triangulaires, en particulier durant les vagues d'ovnis américaine (1983-1997) dans la vallée de l'Hudson, belge (1989-1992) et britannique (1993).

Conception[modifier | modifier le code]

Have Blue[modifier | modifier le code]

Au milieu des années 1970, les bureaux d'études du constructeur aéronautique Lockheed commencent à étudier un avion furtif, se basant en partie sur les recherches menées pour réduire la signature du Lockheed A-12 Oxcart. Nommé Have Blue, le projet était protégé par un secret absolu. Deux prototypes furent construits, le premier d'entre eux faisant son vol inaugural le .

F-117A Nighthawk[modifier | modifier le code]

Un F-117 larguant deux bombes d'exercices Paveway-24.

Fin 1978, Lockheed obtient un contrat pour construire un avion de série reprenant la formule validée sur le Have Blue. Ce nouveau projet, toujours couvert par le secret le plus total, reçut la désignation Senior Trend. Le premier avion de présérie fit son vol inaugural le , et fut rejoint par 4 autres exemplaires en vue des essais et validations nécessaires avant la mise en service effective. Le premier avion de production fut livré en , mais fut détruit dès son premier décollage à la suite d'un mauvais montage des commandes de vol électriques. Le pilote fut grièvement blessé.

Le F-117 reprend l'allure générale du Have Blue mais s'en différencie de plusieurs façons. D'abord, il est nettement plus grand et plus lourd. Ses moteurs sont des General Electric F404-GE-F1D2, dérivés des moteurs du F-18 mais sans post-combustion. Les deux dérives sont placées plus en arrière et inclinées vers l'extérieur (au lieu de l'intérieur), tandis que la flèche de l'aile est moins prononcée. Le pare-brise comporte un panneau central plat pour permettre l'utilisation d'un viseur tête-haute. Une soute à armement ventrale permet d'emporter 2 270 kg de charge militaire, dans la grande majorité des cas, des bombes Paveway à guidage laser. Enfin, une avionique spécifique est installée, composée notamment de deux systèmes de vision infrarouge (un FLIR vers l'avant, d'un DLIR vers le bas), d'un système de désignation à laser, et d'une centrale de navigation à inertie.

Construit à 59 exemplaires seulement, l'avion a été modernisé plusieurs fois, recevant par exemple un nouveau système de navigation et un tableau de bord avec des écrans multi-fonctions en couleurs. Au début des années 1990, le système d'expulsion des gaz des réacteurs a été entièrement revu pour améliorer sa fiabilité.

Versions[modifier | modifier le code]

F-117A au National Museum of the United States Air Force à Dayton (Ohio).
Vue de dessous du F-117A au National Museum of the United States Air Force.

Aucune variante du F-117 n'a été construite, mais plusieurs projets ont été envisagés :

  • Le F-117A+ équipé de nouveaux moteurs General Electric F-414 plus puissants de 35 % par rapport aux anciens, et les entrées d'air du B-2 (en forme de S). Une version destinée à la Royal Air Force aurait été équipée des moteurs EJ200 de l'Eurofighter Typhoon.
  • Le F-117B qui était allongé, avait une vitesse d'approche améliorée, et une plus grande capacité d'emport d'armement. Il pouvait tirer le missile AGM-88 HARM anti-radar.
  • Le F-117N/AF-117X qui était apte à l'emploi depuis un porte-avions. Les principales caractéristiques étaient un renfort de la structure et la rétractibilité des embouts d'ailes (pour prendre moins de place).

Problématique de la désignation F-117[modifier | modifier le code]

L'existence de l'avion n'a été reconnue par le Pentagone que fin , et sa désignation officielle a alors été annoncée comme étant F-117A. Par rapport à la nomenclature officielle, cette désignation est peu orthodoxe, la désignation F étant généralement réservée aux avions de chasse. L'explication serait que le F-117 a une maniabilité et une taille proche de celle d'un avion de chasse, il serait alors absurde de lui donner la désignation B des bombardiers où il serait comparé à des appareils comme le B-52.

Toutefois, le F-117 était initialement prévu pour faire des frappes préventives sur le territoire ennemi, y compris des missions anti-bombardier, rôle qui fut finalement abandonné, mais la lettre F lui resta.

Le numéro 117 ne suit pas celui des séries qui le précèdent (F-16, YF-17 et F-18). La numérotation aurait pris la suite des numéros 112 à 116, utilisés officieusement soit pour désigner les avions d'origine soviétique récupérés et testés secrètement par les États-Unis, soit pour d'autres projets secrets[2].

On retrouve les mêmes problématiques de désignation avec le F-111 Aardvark.

Le problème aurait pu être résolu en partie en prenant en compte le déjà oublié F-4 Phantom II, qui commença sa carrière comme F-110A "Spectre" en prenant son nom dans la lignée des « century fighters ». Lors du renouvellement des désignations, le F-110A Spectre devint Phantom II et changea de code pour devenir F-4 (à la suite du F-3 Demon, de plus le nom de Spectre avait été attribué officiellement au Lockheed AC-130 au même moment) et seul le F-4 eut droit à ce traitement. En effet, à l'instar de tous les appareils de l'USAF de l'ancienne nomenclature, aucun autre Century Fighter ne changea de code[3], puisque la nouvelle désignation ne concernait que ceux de la marine, auxquels le F-4 appartenait à l'origine.

Le F-117 n'a pas, lui non plus, changé de code, essentiellement par le fait que les dénominations ultérieures étaient déjà attribuées jusqu'à F-33 lors de sa divulgation en 1988.

On peut donc considérer que le F-117 est le dernier représentant de la lignée des "Century Fighters" (chasseurs allant depuis le Super Sabre F-100 jusqu'au F-117).

Histoire opérationnelle[modifier | modifier le code]

La première unité à recevoir l'avion fut le 4450th Tactical Group (en) du Tactical Air Command, installé dans une nouvelle base construite en secret dans la zone de Nellis. Pour garder le secret, les F-117 ne volaient que de nuit et l'unité était officiellement équipée de Vought A-7 Corsair II. Malgré ces précautions, des rumeurs concernant un avion secret commençaient à s'amplifier et deux accidents lors de vols d'entraînement nocturnes (voir plus loin, pertes et accidents) finirent par obliger le Pentagone à reconnaître officiellement l'existence du F-117, fin .

Accidents[modifier | modifier le code]

  • Le , lors de son vol de réception par l'US Air Force, le premier F-117A de série s'écrasa dès le décollage à la suite d'un défaut dans les commandes de vol. Le pilote n'eut pas le temps de s'éjecter et fut grièvement blessé[4].
  • Le , un F-117A percuta une montagne lors d'un vol d'entraînement nocturne à basse altitude. Le pilote fut tué[5].
  • Le , un F-117A s'écrasa lors d'un vol d'entraînement nocturne. Le pilote fut tué[6].
  • Le , un F-117A s'écrasa juste après le décollage à la suite d'un incendie à bord. Le pilote s'éjecta sans dommage[7].
  • Le , un F-117A s'écrasa lors d'un vol d'entraînement nocturne. Le pilote fut tué[8].
  • Le , un F-117A devint incontrôlable lors d'un vol de démonstration durant un meeting aérien. Le pilote s'éjecta sans dommage, l'avion s'écrasa sur une maison et quatre personnes furent légèrement blessées[9].

Engagements[modifier | modifier le code]

La verrière du F-117 abattu en Serbie

Le F-117 a été engagé lors de plusieurs opérations militaires et quasi exclusivement de nuit :

Perte en opérations[modifier | modifier le code]

Un équipement de pilote de F-16 ainsi qu'un fragment du F-117 abattu par les forces serbes.

Un seul F-117 a été perdu au combat au cours des quatre conflits auxquels il a participé. Le , durant la guerre du Kosovo, un F-117A est abattu par un missile anti-aérien S-125 près de Belgrade, en Yougoslavie[11]. Le pilote américain, Dale Zelko[11], s'éjecte et est récupéré sain et sauf[12]. La détection et le tir de deux missiles Neva ont été réalisés par la 3e batterie de la 250e brigade de défense antiaérienne composée de 8 batteries équipées de radar non modifiés, de missiles russes Neva, de missiles portatifs Silo et Strela 2M. L'armée américaine a d'abord déclaré qu'il s'agissait d'un incident mécanique[13]. L'officier chargé de la batterie, le commandant Zoltan Dani, pense que puisque les Américains n'ont fait que du marketing en parlant de furtivité pour le F-117, il peut faire de même, en faisant croire que la batterie Neva a été modifiée par ses techniciens, ce qui est complètement faux et sera confirmé onze ans plus tard par lui-même et l'ensemble des opérateurs de la 3e batterie[14].

L'Otan soupçonnera l'armée serbe d'avoir utilisé un radar passif, appareil peu coûteux qui utilise la réflexion des ondes radio et télé ambiantes, pour détecter l'avion, mais les mauvaises conditions météorologiques ayant réduit la furtivité du F-117 sont seules en cause[15].

Un autre F-117 aurait été touché la même année par les Serbes. La rumeur court dès la guerre du Kosovo. Des années plus tard, en 2020, un officier à la retraite de l'US Air Force nommé Charlie « Tuna » Hainline, lui-même ancien pilote de F-117 au sein du 9th Fighter Squadron (en) le confirme sans en donner la date précise. Selon son témoignage, lui-même évita une salve de missiles mais son ailier fut touché. Malgré les dégâts qui rendirent difficile le ravitaillement en vol, il put rentrer à la base de Spangdahlem[16].

Retrait de service[modifier | modifier le code]

Il a été retiré du service actif le [17]. Il était prévu de l'utiliser jusqu'en 2018 mais les surcoûts du F-22 ont précipité sa retraite[18]. Tous les appareils existants ne sont pas stockés au 309th Aerospace Maintenance and Regeneration Group à Davis-Monthan AFB où vont généralement les avions retirés du service mais vont en zone militaire interdite au Tonopah Test Range (en) près de la Zone 51 dans le Nevada pour éviter les fuites de matériaux sensibles toujours d'actualité sur cet appareil où ils sont stockés dans une configuration Type 1000.

En 2014, deux appareils ont été photographiés en vol à Tonopah, sans doute pour des tests[19] puis plusieurs fois depuis. Ainsi en mai 2020, il est utilisé ponctuellement pour des exercices au large de la Californie sans doute pour l'entrainement contre les appareils furtifs de la marine américaine[20], en septembre 2021, il participe à la formation au combat de F-15 de la Garde nationale aérienne de Californie.

En 2017, on annonce qu'a partir de 2018, ils seront définitivement retirés du stock pour destruction, à raison de quatre exemplaires par an[21]. Au , 48 sont dans l'inventaire de l'USAF[22].

Le , le retour en service est officialisé par l'atterrissage public de 2 avions sur l'aéroport international de Fresno Yosemite.

Culture populaire[modifier | modifier le code]

Films et séries[modifier | modifier le code]

  • Piège à grande vitesse (1995), deux F-117 décollent d'une base militaire de l'US Air Force, l'un d'eux survole de nuit le train détourné par les terroristes.
  • Ultime Décision (1996), utilisé en abordage furtif sur un avion de ligne.
  • Vol d'Enfer (2006), présenté comme un nouveau prototype, un F-117 intervient au début de l'intrigue et sa furtivité s'applique également de façon littérale. C'est-à-dire qu'il devient véritablement invisible aux yeux de n'importe qui, et pas seulement sur écran radar.
  • Interceptor (1992), deux F-117 sont utilisés comme chasseur.
  • 24 Heures chrono, saison 4, épisode 16 (Attaque contre Air Force One).

Jeux vidéo[modifier | modifier le code]

Musique[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Laurent Lagneau, « US Air Force : Retiré du service en 2008, le F-117A Nighthawk pourra être ravitaillé en vol par le KC-46A Pegasus », (consulté le )
  2. Cover Designations for Classified USAF Aircraft
  3. ni le F-111 par exemple, ni même le F-105 Thunderchief pourtant contemporain du F-4 au Viêt Nam.
  4. (en) F-117A: Loss of #785
  5. (en) F-117A: Loss of #792
  6. (en) F-117A: Loss of #815
  7. (en) F-117A: Loss of #85-801
  8. (en) F-117A: Loss of #822
  9. (en) F-117A: Loss of #793
  10. (en) « F-117A: Team Stealth 1991 », sur f-117a.com, (consulté le ).
  11. a et b Katarina Subasic, « Deux ex-ennemis de guerre se retrouvent en Serbie », La Presse,‎ (lire en ligne, consulté le )
  12. (en) Vega 31: The loss of F-117A #82-806
  13. Jacques Isnard, « L'Otan engage la phase 2 de son opération », le Monde,‎ , p. 3
  14. (sr) Branislav Soveljanski, « F-117 Stealth fighter shootdown over Serbia », RTV,‎ (Youtube)
  15. (ro) « Doborarea invizibilului F117 : strategie stralucita,un P18 inovator sau pur noroc ? », sur Suntem Romania, (consulté le ).
  16. Laurent Lagneau, « Un ex-pilote américain confirme que la défense serbe a bien touché un second F-117A Nighthawk en 1999 », sur opex360.com, (consulté le ).
  17. (en) Air Force's stealth fighters making final flights
  18. Le F-117 est (déjà) retiré du service
  19. (en) « New Photos of the F-117 Black Jet flying over Tonopah Test Range in 2014 », sur The Avionest, (consulté le ).
  20. https://archive.wikiwix.com/cache/20240325143227/https://www.opex360.com/2024/03/24/us-air-force-retire-du-service-en-2008-le-f-117a-nighthawk-pourra-etre-ravitaille-en-vol-par-le-kc-46a-pegasus/.
  21. (en) David Cenciotti, « The Day After An F-117 Was Spotted On A Trailer In Southern Nevada Another One Was Photographed Flying With An F-16 Near Rachel », sur theaviationist.com, (consulté le ).
  22. (en) David Cenciotti, « The U.S. Air Force Has Just Released The First Official Photos Of The F-117 Deployment To Fresno », sur theaviationist.com, (consulté le ).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • [1563472457] (en) David C. Aronstein et Albert C. Piccirillo, Have Blue and the F-117A : evolution of the "Stealth Fighter, Reston, Va, American Institute of Aeronautics and Astronautics, , 305 p. (ISBN 978-1-56347-245-9, OCLC 36842378)
  • (en) H.W. III Crocker, Don't Tread on Me : a 400-year history of America at war, from Indian fighting to terrorist hunting, New York, Crown Forum, 2006, (ISBN 978-1-4000-5363-6, OCLC 63705803)
  • (en) David Donald, Black Jets : The Development and Operation of America's Most Secret Warplanes, Norwalk, Connecticut, AIRtime Publishing Inc., 2003, , 256 p. (ISBN 978-1-880588-67-3, OCLC 52325069)
  • (en) Paul E Eden (éd.), Encyclopedia of modern military aircraft, Londres, Amber Books Ltd, , 512 p. (ISBN 978-1-904687-84-9, OCLC 79862721).
  • (en) James C Goodall, America's Stealth Fighters and Bombers : B-2, F-117, YF-22 and YF-23, St. Paul, Minnesota, Motorbooks International, , 128 p. (ISBN 978-0-87938-609-2, OCLC 25748533), « The Lockheed F-117A Stealth Fighter »
  • (en) Don Logan, Lockheed F-117 Nighthawks : A Stealth Fighter Roll Call, Atglen, Pennsylvania, Schiffer Publishing, 2009, coll. « Schiffer military history book », , 206 p. (ISBN 978-0-7643-3242-5, OCLC 264045596)
  • (en) Jay Miller, Lockheed F-117 Stealth Fighter, Arlington, Texas, Aerofax Extra, 1990, coll. « Aerofax minigraph », , 40 p. (ISBN 978-0-942548-48-8, OCLC 22714649)
  • (en) Ben R. Rich et Leo Janos, Skunk Works : A Personal Memoir of My Years at Lockheed, New York, Back Bay Books, 1994, , 370 p. (ISBN 978-0-316-74330-3 et 978-0-316-74300-6, OCLC 30036071)
  • (en) Doug Richardson, Stealth Warplanes, New York, Salamander Books Ltd, 2001, , 188 p. (ISBN 978-1-84065-256-7, OCLC 877316357)
  • « 100 armes qui ont fait l'histoire », Guerre et Histoire, no hors série n°1,‎ , p. 60-71 (ISSN 2115-967X).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Aéronefs comparables

Articles connexes

Liens externes[modifier | modifier le code]