Living lab

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Le Living Lab, ou laboratoire vivant, est une méthode où citoyens, habitants, usagers sont considérés comme des acteurs clés des processus de recherche et d’innovation. Cette expression anglaise désigne, y compris dans la littérature et la pratique francophone, la notion de laboratoires vivants[1]. En 2014, on dénombre plus de 340 Living Labs dans le Monde[2].

Histoire[modifier | modifier le code]

La notion de Living Lab émerge à la fin des années 1990 aux États-Unis au sein du Massachusetts Institute of Technology (MIT)[3], grâce aux travaux de trois professeurs qui créent le premier Living Lab géré par un consortium de recherche[4].

En Europe, le développement des Living Labs a lieu à partir de 2006 dans le contexte de la Stratégie de Lisbonne pour relancer l'emploi. La présidence finlandaise de la Communauté européenne lance le projet Living Labs Europe ayant pour objectif de susciter et fédérer des initiatives locales en créant un réseau européen des Living Labs[5], appelé European Network of Living Labs (ENOLL)[6]. Le réseau ENOLL prend le statut d'association en 2010[5].

Définition[modifier | modifier le code]

Un Living Lab regroupe des acteurs publics, privés, des entreprises, des associations, des acteurs individuels, dans l’objectif de tester « grandeur nature » des services, des outils ou des usages nouveaux. Il s’agit de sortir la recherche des laboratoires pour la faire descendre dans la vie de tous les jours, en ayant souvent une vue stratégique sur les usages potentiels de ces technologies. Tout cela se passe en coopération entre des collectivités locales, des entreprises, des laboratoires de recherche, ainsi que des utilisateurs potentiels. Il s'agit de favoriser l'innovation ouverte, partager les réseaux et impliquer les utilisateurs dès le début de la conception.

Enjeux[modifier | modifier le code]

Le Living Lab est une méthode où citoyens, habitants, usagers sont considérés comme des acteurs clés des processus de recherche et d’innovation. Cette approche est censée stimuler les collaborations entre des profils hétérogènes de personnes dans le but de développer des découvertes inattendues. Elle permet donc à une population d’influer sur les évolutions de notre société et d’en appréhender les enjeux sociaux, technologiques et économiques.

Cette approche s'éloigne de l'innovation centrée sur l'usager pour relever du projet porté par l'usager, telle que documentée par le cabinet « Umvelt » dans le cadre du réseau « Montreal InVivo »[7],[8].

Ce schéma du projet porté par l'usager a été complété par le consortium « Inmediats »[9] qui l’enrichit de la participation de « communautés créatives et artistiques ». Ainsi complétée, l’approche Living Lab fait le pont avec les pratiques de résidences et d’ateliers liant arts, sciences et technologies et permet des points de jonction avec les dynamiques de recherches et innovations responsables.

Labellisations[modifier | modifier le code]

La certification Living Lab est notamment accordée par l'association belge ENOLL après examen des candidatures. Les Living Labs sont au départ situés principalement en Europe. En 2006 par exemple est créé le premier Living Lab agricole français, le Laboratoire d'Innovation Territorial (LIT) spécialisé dans les grandes cultures et implanté en Limagne Val-d'Allier. Néanmoins, de plus en plus de nouvelles labellisations étant décernées, ils se sont peu à peu implantés dans de nombreux pays et régions (une trentaine en 2009), comme la Chine, le Mozambique, Taïwan, l’Afrique du Sud ou encore le Brésil. Récemment sont nés l'Acadie Lab, un Living Lab canadien qui travaille sur la réhabilitation des agroécosystèmes du bassin versant de la rivière l'Acadie, et le Living Lab PA4All ( « Precision Agriculture for All - Agriculture de précision pour tous » ) en Serbie.

D'autres réseaux existent comme Living Labs Global, le « Réseau français des Living Labs et Espaces d'innovation » (RELAI), le Forum LLSA des « Living Labs en Santé et Autonomie », le LEILAC, « Réseau des Living Labs et Espaces d'innovation Amérique Latine, les Caraïbes » qui accordent aussi leurs labellisations respectives et le réseau Francophonie Living Lab dont fait partie le « Living Lab en innovation ouverte » ( LLio), situé à Rivière-du-Loup, au Québec, Canada.

Les Living Labs ne reçoivent pas de soutien financier de la Communauté européenne, mais leur crédibilité est importante.

Agriculture et Living Lab : les Livings Labs territoriaux[modifier | modifier le code]

En France, en 2015, le rapport « Agriculture-innovation 2025 » établit la liste de quatre actions pour favoriser l'innovation ouverte en agriculture[10], parmi lesquelles la création de Living Labs territoriaux[11].

Culture et Living Lab[modifier | modifier le code]

Depuis 2011, le consortium de centres de sciences « Inmediats »[9] s'est saisi du concept de Living Lab pour en faire un nouveau mode de rapport au public dans les pratiques de médiation culturelle et scientifique. Piloté par Relais d'sciences, en association avec Cap Sciences, Science animation, La casemate et le carrefour numérique de la Cité des sciences, ce groupe de Living Labs a posé un ensemble de règles pratiques et de déontologies permettant de déterminer comment une démarche Living Lab peut être productrice de nouveaux modes de médiation culturelle.

Cette approche modernise et actualise les pratiques héritées de la pédagogie active et de la citoyenneté participative. Fini le temps où le “sachant” délivrait un savoir à des anonymes. L’heure est à l’échange et à la coconstruction rendus possibles par l’approche Living Lab qui suppose de réunir public, collectivité, recherche et entreprise autour d’un même projet.

Le simple fait de réunir différentes personnes autour d’un même projet ne suffit pas pour générer le partage et la critique des informations et des enjeux. Il convient d’anticiper la production de supports et de temps d’échanges et d’informations entre les participants. Initialement, l’approche Living Lab n’est pas conçue pour faire de la médiation culturelle, mais les objectifs et les valeurs qu’elle véhicule en font un outil idéal pour y parvenir et plusieurs raisons motivent l'adoption d'une démarche Living Lab pour faire médiation culturelle.

Du point de vue des publics, l'approche Living Lab permet de transformer le statut des visiteurs en expérimentateurs, usagers, voire dans certains cas, co-constructeurs d’une théorie, d’une technologie, d’un usage. Cette nouvelle forme d’implication participe de la prise de conscience des enjeux de développement des sociétés contemporaines.

Du point de vue de la recherche et du monde de l’entreprise, c'est une démarche dans laquelle il est possible de recueillir des retours sur des travaux, des idées, des concepts en cours d’élaboration, de créer de nouvelles formes de partage de savoirs et même de créer des savoirs !

D'un point de vue social, les actions Living Lab permettent de décloisonner les communautés constituées en favorisant leur rencontre dans un premier temps, puis en leur permettant de partager leurs connaissances et d’imaginer des projets ensemble. Toutes ces pratiques s'appuient sur les différents niveaux de participation dans laquelle engager les porteurs de projets.

Au travers des projets qui se réclament d'une démarche Living Lab, une nouvelle voie est affirmée, un renouvellement des pratiques d’implication des publics, un enrichissement des valeurs produites par l’action culturelle, un nouveau territoire d’implication de différentes composantes de la société, de nouvelles formes de financement pour la culture scientifique et technique et pourquoi pas, de la culture. La démarche Living Lab propose un nouveau paradigme de la place et du rôle potentiel d'un centre de science dans la société en réponse directe avec ce qui la fonde depuis plusieurs décennies. Elle préfigure le concept de « centre de science de nouvelle génération ».

Références[modifier | modifier le code]

  1. Ceren Ark et Marc Smyrl, « Innovation ouverte et « Living labs » : production et traduction d’un modèle européen », Revue française d'administration publique, vol. 161,‎ , p. 90 (lire en ligne)
  2. Livre blanc, 2014, p.11
  3. Sophie Pellé, Business, Innovation and Responsibility, Wiley, , 182 p. (lire en ligne), p. 106
  4. Voilmy Dimitri, « Les living labs et la conception participative : l’exemple d’ActivAgeing », Retraite et société, vol. 75,‎ , p. 75 (lire en ligne)
  5. a et b Ceren Ark et Marc Smyrl, p. 97
  6. Livre blanc, 2014, p.40
  7. « A propos du réseau « Montreal InVivo » » (consulté le )
  8. « "Qu'est-ce qu'un living lab ?" » (consulté le )
  9. a et b « Inmédiats : des centres de culture scientifique aux agoras de l’innovation », sur echosciences-grenoble.fr, (consulté le )
  10. Jean-Marc Bournigal, #AgricultureInnovation2025 : 30 projets pour une agriculture compétitive & respectueuse de l’environnement, Paris, , 70 p. (lire en ligne), p. 71
  11. Aurélie Beaugency, « Repenser l’innovation dans les systèmes de production agricole : la mise en place d’un archipel de living lab dans les territoires de Nouvelle Aquitaine », Actes de colloque des journées de recherche en sciences sociales,‎ , p. 6 (lire en ligne)

Bibliographie[modifier | modifier le code]

En français

En anglais
  • M. Csikszentmihalyi et R. Larson, « Validity and reliability of the Experience Sampling Method », Journal of Nervous and Mental Disease, no 175, 1997, p. 526-536
  • M. Csikszentmihalyi, R. Larson et S. Prescott, « The Ecology of Adolescent Activity and Experience », Journal of Youth and Adolescence, no 6. 1987, p. 281-294
  • B. de Ruyter et E. Pelgrim, « Ambient Assisted Living Research in CareLab », ACM Interactions, volume 14, no 4, juillet-.
  • B. de Ruyter, E. van Loenen et V. Teeven, « User Centered Research in ExperienceLab », European Conference, 2007, Darmstadt, Allemagne, 7- (LNCS volume 4794/2007, printemps).
  • J. Garett, The Element of User Experience, 2002
  • B. Gaver, T. Dunne, et E. Pacenti, « Design : Cultural Probes », Interactions, 6 (1), 1999, p. 21-29
  • W. W. Gaver, A. Boucher, S. Pennington et B. Walker, Cultural Probes and the Value of Uncertainty, 2004
  • A. Kusiak, « Innovation : The Living Laboratory Perspective », Computer-Aided Design & Applications, vol. 4, n° 6, The University of Iowa, 2007, p. 863-876
  • A. Kusiak, C.-Y. Tang, Innovation in a Requirement Life-Cycle Framework, Proceedings of the 5th International Symposium on Intelligent Manufacturing Systems, IMS’2006, Sakarya University, Sakarya, Turquie, 2006, p. 61-67.
  • Joseph Luft, Of Human Interaction, Palo Alto, CA National Press, 1969
  • V.-P. Niitamo, S. Kulkki, M. Eriksson, et K. A. Hribernik, State-of-the-Art and Good Practice in the Field of Living Labs, Proceedings of the 12th International Conference on Concurrent Enterprising: Innovative Products and Services through Collaborative Networks, Milan, Italie, 2006, p. 349-357.
  • M. Pallot, B. Trousse, B. Senach, S. Richir, B. de Ruyter, W. Prinz, O. Rerolle, et B. Katzy, « Living Lab Research », Ecospace Newsletter Special Issue on Living Labs, n° 5, 2008.
  • J. Schumacher, et K. Feurstein, Living Labs – A New Multi-Stakeholder Approach to User Integration, Presented at the 3rd International Conference on Interoperability of Enterprise Systems and Applications (I-ESA'07), Funchal, Madeira, Portugal, 2007.
  • D. Norman, The Invisible Computer, Why Good Products Can Fail, the Personal Computer Is So Complex, and Information Appliances Are the Solution, Cambridge MA, MIT Press, 1998
  • D. Norman, Emotional Design : Why we Love (or Hate) Everyday Things, New York, Basic Books, 2004
  • D. Norman, The Design of Future Things, Basic Books, 2007
  • Collectif, Living Lab : new form of relationship with public, Inmediats, 2015.

Liens externes[modifier | modifier le code]