L'Ange bleu (film, 1930)

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L'Ange bleu
Description de cette image, également commentée ci-après
Marlene Dietrich dans une scène du film
Titre original Der blaue Engel
Réalisation Josef von Sternberg
Scénario Josef von Sternberg
Carl Zuckmayer
Karl Vollmöller
Robert Liebmann
Heinrich Mann (roman)
Acteurs principaux
Sociétés de production Universum Film (UFA)
Pays de production Drapeau de l'Allemagne Allemagne
Genre drame
Durée 100 minutes
Sortie 1930

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution.

L'Ange bleu (Der blaue Engel) est un film allemand réalisé par Josef von Sternberg et sorti en 1930. Il marque la première collaboration artistique entre le réalisateur et l'actrice allemande Marlene Dietrich, qui tournent six autres films entre 1930 et 1935.

Synopsis

Marlene Dietrich dans le rôle de Lola-Lola.

En Allemagne, en 1925, le professeur Immanuel Rath enseigne la littérature anglaise dans le lycée d'une petite ville, où il mène une existence routinière. Vieux célibataire, sévère et tenant d'une morale conservatrice, il est méprisé et chahuté par ses élèves, qui le surnomment avec le calembour « Professor Unrat » (mot signifiant « déchet » en allemand[N 1]). L'enseignant découvre un jour que certains de ses élèves fréquentent un cabaret mal famé nommé L'Ange bleu. Il s'y rend, dans l'intention de dissuader l'établissement de pervertir ses élèves et de réprimander ces derniers.

Au cabaret, le professeur Rath tombe sous le charme d'une chanteuse court-vêtue, Lola-Lola. Il la demande rapidement en mariage, abandonne son poste de professeur, dilapide son argent pour Lola-Lola, qu'il suit dans ses tournées. Quelques années s'écoulent et la troupe doit repasser par la ville où Rath enseignait. Au fond de la déchéance, il est réduit à un humiliant rôle de clown, assistant le directeur de la troupe dans son numéro de prestidigitateur. La publicité ayant mis en avant la présence du professeur dans le spectacle, la salle est comble. Alors que ses anciens collègues et élèves sont dans le public, Immanuel Rath est d'autant plus effondré que, en coulisses, Lola-Lola cède facilement aux avances de Mazeppa, un hercule tombé sous son charme. Fou de jalousie, il reste longtemps impassible durant le numéro, puis il tente d'étrangler sa femme ; la troupe se jette sur lui, Mazeppa lui passe une camisole de force. Une fois calmé et libéré, Rath retourne dans son ancien lycée, et y meurt, les mains crispées sur le bureau d'où il enseignait autrefois.

Fiche technique

Distribution

Marlene Dietrich sur une photographie parue dans la presse. 1931.

Production

Casting

Après avoir auditionné nombre de comédiennes, Josef von Sternberg choisit de conserver contre l'avis du studio Marlene Dietrich, et ce même malgré l'intervention de la vedette du film, Emil Jannings, qui lui dit qu'il se repentira de sa décision[réf. nécessaire].

Sur les conseils de Rudolf Sieber, mari de Marlene Dietrich, le réalisateur laisse à l'actrice la liberté de constituer ses costumes. La première fois que von Sternberg voit Dietrich en Lola-Lola, il dit simplement : « C'est extraordinaire, extraordinaire, tout simplement extraordinaire ! »[réf. nécessaire] Il lui fait alors une totale confiance dans ce domaine pour leurs six collaborations suivantes.

Tournage

Von Sternberg tourne simultanément le film en version allemande et en version anglaise[1].

Marlene s'amuse souvent à raconter que lors du tournage de la scène où le professeur Rath tente d'étrangler Lola-Lola, Jannings, qui sent que Dietrich lui vole la vedette, essaie réellement de l'étrangler[réf. nécessaire].

Après avoir vu les premiers rushes du film, Dietrich déclare : « C'est un film vulgaire, soit - mais von Sternberg est un... dieu ! Un dieu ! Un maître ! [...] Il peint - comme Rembrandt - avec ses éclairages. Ce visage, sur l'écran... Pas d'erreur, c'est une vraie morue de Lübeck ! Elle sonne “juste” ! Elle est merveilleuse ! »[2]

Autour du film

Affiche danoise du film.
  • Ce film marque la rencontre de l'une célèbre et prolifique collaboration cinématographique : Dietrich et Von Sternberg. L'entente et le perfectionnisme artistique entre eux sont tels qu'ils tournent six autres films ensemble, à Hollywood.
  • Ce film est le premier film parlant tourné en Allemagne. C'est aussi le premier dans lequel Dietrich parle et chante, elle qui avait déjà tourné des rôles mineurs dans dix-sept productions muettes auparavant[3].
  • Emil Jannings, immense vedette de l'époque, vient de recevoir le premier Oscar du meilleur acteur lors de la première cérémonie des Oscars à Hollywood pour son rôle dans Crépuscule de gloire (1928) sous la direction de Von Sternberg. Il est alors prévu initialement que ce nouveau film mette à nouveau en valeur son talent. Mais le roman d'Heinrich Mann, intitulé Professor Unrat (rôle tenu par Jannings), devient à l'écran Der blaue Engel, du nom du cabaret où se produit Lola-Lola (rôle tenu par Dietrich). Ce glissement sémantique est révélateur des intentions du metteur en scène.
  • Bien que Dietrich soit finalement plus mise en valeur que Jannings dans le film, les cachets que chacun perçoit sont en accord avec leur statut antérieur et favorisent donc l'acteur, qui deux cent mille dollars contre cinq mille pour l'actrice[4][source insuffisante].
  • Josef von Sternberg déclare au sujet du film : « Dietrich ne détruit pas l’homme, dans L’Ange bleu, il se détruit lui-même. La faute est sienne, c’est lui qui n’aurait pas dû se lancer dans cette aventure. C’est cela le sujet. »[5]
  • Heinrich Mann, dont le roman est ici adapté, considère que « le film [doit] son succès aux cuisses dénudées de Mademoiselle Dietrich »[6].
  • Lola-Lola, en bas et porte-jarretelles, chante dans une scène inoubliable Ich bin von Kopf bis Fuss auf Liebe eingestellt (en) (« Je suis, de la tête aux pieds, faite pour l'amour »). La chanson fait l'objet de nombreuses reprises, notamment en anglais sous le titre Falling in Love Again, d'abord par Marlene Dietrich elle-même au cours de la Seconde Guerre mondiale puis lors de ses tours de chants, mais également par Nina Simone, Klaus Nomi, ou encore plus récemment en version dance par Starbeat. Lors de sa tournée mondiale The Girlie Show, Madonna rend hommage à Marlene Dietrich en interprétant sa chanson Like a Virgin sur l'air de Falling in Love Again. Elle a également été adaptée en français sous le titre Amoureuse de la tête aux pieds, interprétée par Berthe Sylva.
  • Bien qu'il fasse de Dietrich une vedette en Allemagne, c'est le dernier film qu'elle tourne dans son pays. Elle joue plus tard dans C'est mon Gigolo (1978), qui est une production allemande, mais dont les deux scènes où l'actrice apparaît sont tournées à Paris.
  • À la fin du tournage, les studios de la UFA décident de ne pas renouveler le contrat de Marlene Dietrich. La Paramount, studio américain de Von Sternberg et distributeur de L'Ange Bleu aux États-Unis, propose aussitôt à l'actrice un contrat à Hollywood[7] ; cette proposition, envoyée par câble le , prévoit un cachet hebdomadaire de 500 dollars, que l'actrice tourne ou non. Le studio voit dans cette Allemande une concurrente possible face à la Suédoise Greta Garbo, star des studios rivaux de la MGM. Par la suite, le contrat que Von Sternberg renégocie pour Marlene Dietrich à Hollywood lui donne la possibilité, exceptionnelle pour l'époque, de ne tourner que deux films, avec le metteur en scène de son choix. La Paramount attent néanmoins que l'actrice fasse ses preuves (financièrement parlant) avec son premier film américain, Cœurs brûlés Morocco), avant de sortir L'Ange bleu aux États-Unis. Ainsi, Cœurs brûlés sort le , et L'Ange Bleu, tourné avant, seulement le . Entre-temps, Dietrich et Von Sternberg tournent Agent X 27.
  • Émigrée aux États-Unis, Marlene Dietrich devient une farouche opposante à Adolf Hitler et obtient la nationalité américaine en 1939. En revanche, Emil Jannings collabore pour sa part avec le régime nazi. Quant à Kurt Gerron, bien que de confession juive, il est contraint de diriger un film de propagande, Theresienstadt, avant d'être déporté dans le dernier convoi pour Auschwitz où il est l'un des derniers à mourir gazé.
  • La chanson Marlène du groupe Noir Désir, sur l'album Tostaky, est une référence directe à Marlene Dietrich, et en particulier dans ce film.
  • Un remake est tourné aux États-Unis en 1959 : L'Ange bleu, réalisé par Edward Dmytryk, avec Curd Jürgens et May Britt.
  • L'épisode pilote de la série française Une femme d'honneur, intitulé Lola Lola, fait directement référence à ce film. On peut y voir la présence de la VHS de L'Ange bleu.
  • Le film est interdit au Québec le , puis accepté avec des coupures[8].

Notes et références

Notes

  1. Les sous-titres français ne traduisent pas le terme littéralement en proposant « face de rat ».

Références

  1. « Nous commençâmes le tournage : à la première scène en allemand succédait la même prise, mais cette fois en anglais. » In Marlene Dietrich, Marlene D. par Marlene Dietrich, autobiographie, éditions Grasset, 1984, p. 63.
  2. Maria Riva, op. cit., p. 77.
  3. D'après la liste des films de sa mère que donne Maria Riva à la p. 857 de sa biographie.
  4. Marlene Dietrich, op. cit., p. 61.
  5. Josef von Sternberg, « L’Amérique des stars », Cinéma d’aujourd’hui no 8, mai-juin 1976, Seghers, p. 39.
  6. Cité par Vincent Pinel, Le Siècle du cinéma, éditions Bordas, 1995, p. 137.
  7. Maria Riva, op. cit., p. 79-80.
  8. Hébert, Pierre, 1949-, Landry, Kenneth, 1945- et Lever, Yves, 1942-, Dictionnaire de la censure au Québec : littérature et cinéma, Fides, (ISBN 2-7621-2636-3 et 978-2-7621-2636-5, OCLC 63468049, lire en ligne), p. 33

Voir aussi

Bibliographie

  • André Nolat, « L'Ange bleu (du livre au film) », Roman Ciné, Publibook - Le Petit Futé, Paris, 2013

Liens externes

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