Jean-Auguste-Dominique Ingres

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Jean-Auguste-Dominique Ingres
Portrait d'Ingres par lui-même, à l'âge de vingt-quatre ans (1804), huile sur toile, 77 × 64 cm.
Chantilly, musée Condé[1].
Naissance
Décès
(à 86 ans)
Paris
Sépulture
Nationalité
Activités
Autres activités
Formation
Maître
Élève
Lieux de travail
Mouvement
Mécène
Influencé par
A influencé
Père
Conjoints
Madeleine Chapelle (en) (de à )
Delphine Ramel (d) (à partir de )Voir et modifier les données sur Wikidata
Distinction
Œuvres principales
signature de Jean-Auguste-Dominique Ingres
Signature
Vue de la sépulture.

Jean-Auguste-Dominique Ingres, né le [2] à Montauban et mort le à Paris[3], est un peintre néo-classique français.

Biographie

Son père, le peintre et sculpteur Jean-Marie-Joseph Ingres, a favorisé ses penchants artistiques. Il entre en 1791 à l’Académie de Toulouse où il est formé par Jean Suau, puis se rend à Paris, en 1796, pour étudier sous la direction de Jacques-Louis David. Il s’éloigne de son classicisme par son dévouement à un idéal de beauté fondé sur de difficiles harmonies de lignes et de couleurs.Il peint le portrait d'amis ainsi que de Pierre-François Bernier, qu'il connaît de Montauban. Il remporte le prix de Rome en 1801 au cours de sa deuxième tentative, avec Les Ambassadeurs d'Agamemnon. En juin 1806, il se fiance[note 1] avec Marie-Anne-Julie Forestier.

Madame Rivière (1805), huile sur toile, 116,5 × 81,7 cm, Paris, musée du Louvre.

En 1806, Ingres découvre à Rome, Raphaël et le Quattrocento, qui marquent définitivement son style. Ces années de travail sont les plus fécondes avec les nus, parmi lesquels La Baigneuse, les paysages, les dessins, les portraits et les compositions historiques. Il est en pleine possession de son art et son séjour à Rome est aussi l'occasion de tisser des liens amicaux avec les grands commis de l'administration impériale : le comte de Tournon et sa mère, Edme Bochet et sa sœur Cécile Bochet madame Henry Panckoucke, Hippolyte-François Devillers, le baron de Montbreton de Norvins. En France, cependant, ses toiles peintes en Italie ne plaisent pas. L’artiste décide alors de rester à Rome. Il se marie en 1813 avec Madeleine Chapelle (1782-1849), une jeune modiste habitant Guéret[4]. Ingres réalisa dix portraits de sa femme. Mais le plus célèbre tableau sur lequel elle apparait est Le Bain turc. Madeleine pose pour l'odalisque aux bras levés qui s'étire au premier plan. Le tableau a été réalisé en 1862, après la mort de Madeleine. Elle fut peinte d'après un croquis qu'Ingres avait réalisé en 1818. En 1850, il va à Châlons chez sa belle-mère pour connaître les lieux où sa femme a vécu, et y rencontre le notaire Louois Changy. Il semble y être retourné l'année suivante[5]

À la chute de Napoléon Ier, des difficultés économiques et familiales l’entraînent dans une période financièrement difficile pendant laquelle il peint, avec acharnement, tout ce qu’on lui commande. Il sollicite ses amitiés romaines et ses bonnes relations avec les Panckoucke et les Bochet lui présentent Charles Marcotte d'Argenteuil, ami d'Edouard Gatteaux, ami proche d'Ingres. Très vite, Charles Marcotte d'Argenteuil devient un proche du peintre, jusqu'à devenir un de ses principaux mécènes jusqu'à son décès en 1864. Après la mort de Madeleine, ce dernier ira même jusqu'à lui présenter sa nièce, Delphine Ramel, qu'Ingres épousera le 15 avril 1852. De ce mariage, viendra la décision d'acheter la maison de Meung-sur-Loire avec son nouveau beau-frère, Jean-François Guille, notaire et conseiller général du Loiret, où il se retirera tous les étés pour bénéficier de la douceur et de la lumière de la Loire.

Nombre de membres de la famille Marcotte seront de fidèles acheteurs, comme Philippe Marcotte de Quivières et ses frères Marcotte de Sainte-Marie et Marcotte de Genlis, le baron Charles Athanase Walckenaer, Alexandre Legentil et le baron Hubert Rohault de Fleury (tous deux initiateurs du projet de la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre), Cécile Bochet, devenue madame Henry Panckoucke et baronne Morande-Forgeot, et le clan Ramel.

Il trouve finalement le succès en France avec son Vœu de Louis XIII exposé au Salon de 1824, destiné à la cathédrale de Montauban. Il devient directeur de l’Académie de France à Rome de 1835 à 1840. Appelé, le 25 mai 1862, à faire partie du Sénat impérial, il y vota jusqu'à sa mort conformément aux vœux du pouvoir[6]. Il avait été élevé au grade de grand officier de la Légion d'honneur le 14 novembre 1855[7].

Le Bain turc (1862), huile sur toile, 108 × 110 cm, Paris, musée du Louvre.

Ingres attache au dessin une grande importance et déclarait à ce sujet : « Une chose bien dessinée est toujours assez bien peinte[8]. » La galerie de portraits réalistes qu’il laisse, constitue un miroir de la société bourgeoise de son temps, de l’esprit et des mœurs d’une classe à laquelle il appartient et dont il trace les vertus et les limites. Ingres s’intéresse beaucoup à la texture des vêtements et des étoffes (velours, soie, satin, cachemire…) qu’il intègre dans ses œuvres de façon que la classe sociale du personnage représenté soit mise en valeur. Il s’inspire, à ses débuts, de l'esthétique de l’art grec, avant de se tourner vers une approche plus souple des courbes et des drapés. Ingres n'hésitait pas à accentuer l'anatomie de ses modèles pour atteindre son idéal de beauté ; ainsi, il rajouta quelques vertèbres à sa Grande Odalisque.

Dominique Ingres est aussi violoniste et devient, durant un temps, deuxième violon à l’Orchestre du Capitole de Toulouse. De ce loisir est née l’expression « violon d’Ingres ». Ingres est enterré au cimetière du Père-Lachaise à Paris (23e division)[9]. Conformément à la volonté de l'artiste de léguer à sa ville natale une grande partie de ses dessins (4 500) ainsi que certains objets personnels, le musée Ingres ouvre ses portes au milieu du XIXe siècle dans l'enceinte de l'ancien palais épiscopal de Montauban ; Armand Cambon, Montalbanais élève d'Ingres, fut son exécuteur testamentaire et le premier conservateur du musée.

Henry Lapauze (1867-1925), historien d'art spécialiste de J-A.D. Ingres, conservateur du Petit-Palais à Paris, mais surtout président du comité Ingres, organise en octobre 1913 [10] avec la municipalité de Montauban les festivités en hommage à Ingres et de l'inauguration du musée Ingres : de nombreuses célébrités littéraires et artistiques entouraient Alfred Roll, président de la Société nationale des beaux-arts, et Léon Bérard, sous-secrétaire d'État aux beaux-arts. Un poème de Daniel Lesueur intitulé Ingres de Montauban sera dit par Louis Brémont.

Principales œuvres

Louise de Broglie, Comtesse d’Haussonville (1845), huile sur toile, 131,8 × 92 cm, New York, The Frick Collection.
Jupiter et Thétis (1811), huile sur toile, 324 × 260 cm, Aix-en-Provence, musée Granet.

Son œuvre recouvre essentiellement trois genres, la peinture d’histoire, principalement exécutées lors de son séjour italien, les portraits[note 2] et les nus féminins.

Galerie

Élèves

Ingres a formé de nombreux élèves, parmi lesquels :

Jugement de quelques contemporains

Eugène Delacroix se montrait très sévère avec son aîné pour son « goût mêlé d’antique et de raphaëlisme bâtard », entendant par là que Ingres commet l’erreur prétentieuse de « se [croire] semblable à Raphaël en singeant certains gestes, certaines tournures qui lui sont habituelles [16]. »

Charles Baudelaire , grand admirateur de Delacroix, a plusieurs fois formulé le reproche que : « Le grand défaut de M. Ingres […] est de vouloir imposer à chaque type qui pose sous son œil un perfectionnement plus ou moins complet […] emprunté au répertoires des idées classiques. » Lorsque Ingres entreprend de peindre « un modèle grand, pittoresque, séduisant », il tombe « victime d’une obsession qui le contraint sans cesse à […] altérer le beau », à « [ajouter] quelque chose à son modèle […] par impuissance de le faire à la fois grand et vrai [17]. »

Vincent Van Gogh écrivait à son frère Théo : « Un Ingres, un David, des peintres dont vraiment la peinture n’est pas toujours belle, combien ils deviennent intéressants, quand mettant de côté leur pédantisme, ils s’oublient à être vrais, à rendre un caractère [18]. »

Voici ce qu’inspira à Edmond de Goncourt le tableau Bain antique vu à l’exposition Khalil-Bey de 1867 : « une mêlée de corps mannequinés, avec des disproportions presque caricaturales, une assemblée de sauvagesses de la Terre de Feu, découpées dans du pain d’épice, des corps qui retournent à la primitivité embryonnaire des premières académies de l’art. » Quelque vingt ans plus tard, son avis n’a pas changé : « Et les pauvres petites misérables mines de plomb de M. Ingres, est-ce de l’art assez gringalet à côté des préparations de La Tour, de la préparation de Chardin […] [19]! »

En revanche, Edouard Manet affirmait que « dans notre siècle, M. Ingres avait été le maître des Maîtres » et vouait une grande admiration à La Source, tableau de 1856[20].

Postérité

Tombe d'Ingres à Paris au cimetière du Père-Lachaise. Buste réalisé par Jean-Marie Bonnassieux (1810-1892).

Son influence se ressent dans la peinture académique et jusque chez les impressionnistes Auguste Renoir et Edgar Degas. Celui-ci a possédé près de vingt tableaux du peintre. Au XXe siècle, Pablo Picasso fait plusieurs fois référence à son œuvre avec, en particulier, une Grande odalisque d’après Ingres peinte en 1907 et déclare : « Il est notre maître à tous »[réf. nécessaire]. Dans un autre genre, Man Ray a repris le thème des nus féminins de dos dans son célèbre Violon d’Ingres (vers 1920), photographie d’une modèle dénudée sur laquelle il a dessiné les ouïes de l’instrument de musique. D’autres artistes contemporains, dont Martial Raysse, ont réutilisé ses peintures les plus célèbres. On peut aussi citer Gérard Collin-Thiébaut et son œuvre Ingres, La Grande Odalisque, Transcription (puzzle en carton de 69 × 84 cm, de 1 500 pièces, réalisé en 2008).

Collections publiques

En Algérie
En Belgique
Aux États-Unis
En France

Expositions

Notes et références

Notes

  1. Le départ d'Ingres pour Rome en septembre mit progressivement fin à ce premier amour.
  2. Il considérait ce genre comme mineur.

Références

  1. a et b « Portrait d'Ingres par lui-même, à l'âge de vingt-quatre ans », notice no 00000076458, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Joconde, ministère français de la Culture.
  2. http://www.culture.gouv.fr/LH/LH090/PG/FRDAFAN83_OL1335027v002.htm
  3. Paul Le Vayer, Recueil des inscriptions parisiennes : 1881-1891 (lire en ligne)
  4. « Fille de Mathieu Lambert Chapelle, menuisier, et de Jeanne Nicaise, elle a été baptisée en l'église Saint-Alpin de Châlons le 30 octobre 1782. » Cité par François Lefèvre in « Le peintre Ingres et Châlons-en-Champagne », Bulletin de la Société d'Agriculture, Commerce, Sciences et Arts de la Marne, n°49, printemps 2017.
  5. François Lefèvre, op. cit., p.11.
  6. « Ingres (Jean-Auguste-Dominique) », dans Adolphe Robert et Gaston Cougny, Dictionnaire des parlementaires français, Edgar Bourloton, 1889-1891 [détail de l’édition]
  7. « Cote LH/1335/27 », base Léonore, ministère français de la Culture
  8. Ingres par le CNDP
  9. Paul Bauer, Deux siècles d'histoire au Père Lachaise, Mémoire et Documents, (ISBN 978-2914611480), p. 427-428
  10. Le Temps | 1913-10-06 | Gallica
  11. musees.angers.fr
  12. Georges Vigne et M-H Lavallée, Les élèves d'Ingres, [catalogue de l'exposition du musée Ingres de 1999].
  13. Prix de Rome en sculpture en 1832, devient son élève à la demande d'Ingres.
  14. Openbibart
  15. Second grand prix de Rome de gravure en 1834.
  16. Delacroix, Journal, Plon, 1980, 942 p. ISBN 2-259-00646-9, p. 721,791.
  17. Baudelaire, Charles, Oeuvres complètes, Editions du Seuil, 1968, 759 p., ASIN: B0000DOL59, p. 554.
  18. Van Gogh, Vincent, Lettres de Vincent Van Gogh à son frère Théo, Grasset, 1972, 304 p., ISBN 978-2246002222.
  19. de Goncourt, Edmond, Journal, Tome II, Robert Laffont, 1989, 1292 p., ISBN 978-2221059449, pp. 124, 1051.
  20. Manet, Edouard, Souvenirs, L'Échoppe, 1988, 102 p. 978-2905657398, p. 93.
  21. Critique de l'exposition par Didier Rykner, sur le site de La Tribune de l'Art, 30 avril 2006.

Annexes

Bibliographie

  • Henry Lapauze, Les dessins de J-A-D. Ingres du Musée de Montauban, préface de Henry Roujon, édit. JE. Bulloz, 1901, 308 p.
    Ouvrage couronné par l'Académie française, prix Charles Blanc 1902.
  • Henry Lapauze, Le roman d'amour de M. Ingres, Éd. P. Laffitte, 1910, 226 p.
  • Henry Lapauze, Ingres, sa vie et son œuvre, d'après des documents inédits, Imp. G. Petit, 1911. 585 p.
  • Henry Lapauze, Jean Briant, paysagiste (1760-1799), maître de Ingres et le paysage dans l'œuvre de Ingres, Imp. G. Petit, 1911, 54 p.
  • Gaëtan Picon, Ingres, Skira, 1980 (ISBN 2-605-00003-6).
  • Georges Vigne, Les dessins secrets de Monsieur Ingres, Toulouse, Le Pérégrinateur Éditeur, 1997.
  • Bohumir Mraz, Ingres, dessins, Éditions du Cercle d'Art, 2003 (ISBN 9782702201725).
  • Manuel Jover, Ingres, Pierre Terrail, coll. « PEINTURE/SCULPT », (ISBN 978-2879392875).
  • Vincent Pomarède, Stéphane Guégan, Louis-Antoine Prat, Eric Bertin (dir.), Ingres (1780-1867), catalogue de l’exposition du musée du Louvre - Coédition Gallimard / musée du Louvre Éditions, 408 pages, 325 illustrations en couleurs, Paris, 2006 (ISBN 2-35031-051-5).
  • Sébastien Allard et Marie-Claude Chaudonneret, Ingres : la réforme des principes : 1806-1834, Fage, , 168 p. (ISBN 2849750735).
  • Jean-Pierre Cuzin, Dimitri Salmon, Ingres, regards croisés, Mengès - RMN, 288 p., 455 ill., 2006 (ISBN 978-2-84459-129-6).
    Ingres, ses maîtres, ses élèves, ses influences dans l'art contemporain. Ouvrage publié à l'occasion de l'exposition au musée du Louvre.
  • Catherine Lépront, Ingres, ombres permanentes - Belles feuilles du musée Ingres de Montauban, Éditions Le Passage, mars 2008, 157 p. (ISBN 978-2-84742-114-9).
    Catalogue de l'exposition du musée Ingres à Montauban.
  • N. Schlenoff, Ingres, ses sources littéraires, Paris, 1956 ; Les Cahiers littéraires inédits de J.A.D. Ingres, Paris, 1957
  • D. Ternois & J. Lacambre, Ingres et son temps, catal. expos., musée Ingres, 1967
  • D. Ternois & P. Nesplé, Ingres et ses maîtres, catal. expos., Montauban-Toulouse, 1955
  • Ingres et sa postérité jusqu'à Matisse et Picasso, catal. expos., musée Ingres, Montauban, 1980’

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