Jacqueline d'Escoman

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Jacqueline d'Escoman
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Jacqueline Le VoyerVoir et modifier les données sur Wikidata
Activité
Conjoint
Isaac de Varennes, sieur d'Escoman

Jacqueline d'Escoman (vers 1585- 1618?), née Jacqueline Le Voyer, est une dame de compagnie connue pour avoir accusé sa maîtresse Henriette d'Entragues, marquise de Verneuil, d'avoir organisé un complot avec le duc d'Épernon ayant abouti à l'assassinat d'Henri IV par François Ravaillac.

Condamnée en 1611 à la réclusion à perpétuité pour calomnie, elle passe les dernières années de sa vie enfermée dans une chambre du couvent des Filles repenties de la rue Saint-Denis à Paris.

Elle est présentée comme l'auteur du Véritable Manifeste sur la mort d'Henri Le Grand publié en 1616.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jacqueline Le Voyer naît à Orphins dans une famille de la petite noblesse. Elle épouse Isaac de Varennes, sieur d'Escoman, qui est soldat dans le régiment des gardes royaux. Introduite auprès de la marquise de Verneuil en 1606 par sa demi-sœur Charlotte Catherine d'Entragues[1], elle aurait rapidement gagné sa confiance au point de devenir sa confidente. Elle aurait ainsi assisté à plusieurs rencontres entre des personnes qu'elle qualifiera ultérieurement de "vrais Français en apparence, mais d'âmes tout contraires". Ainsi, peu avant la Noël 1606, elle aurait assisté à la rencontre d'Henriette d'Entragues et du duc d'Épernon, et les aurait entendu conclure un pacte en vue d'assassiner Henri IV, ancien amant de la marquise de Verneuil qu'il avait promis d'épouser[2]. Ce complot aurait eu pour objectif de placer sur le trône du royaume de France le fils d'Henri IV et de la marquise de Verneuil. L'Espagne aurait été mêlé à ce complot, des lettres partant régulièrement du château de Verneuil vers ce pays.

De 1607 à 1609, elle aurait plusieurs fois rencontré Ravaillac, lequel, selon ses déclarations, allait et venait dans l'entourage d'Henriette d'Entragues. La croisant le jour de l'Ascension 1609, il lui aurait avoué son projet régicide. Affolée, elle se précipite au Louvre pour prévenir le couple royal, en vain, proposant même, pour preuve de ses propos, de remettre des lettres compromettantes adressées aux Espagnols[3]. Elle multiplie ensuite les tentatives pour alerter le roi ou la reine mais est arrêtée et mise en prison pour abandon d'enfant[4]. Jules Michelet y voit une confirmation d'un complot visant à assassiner Henri IV[5], son enfermement visant selon lui à la neutraliser.

Jacqueline d'Escoman avait en effet quitté son époux, qui selon elle la battait, et mis leur enfant en nourrice, avant de l'abandonner, faute de moyens. Condamnée à mort, elle fait appel et sa peine est commuée en une réclusion dans un monastère, aux frais de son époux. Ce dernier ne s'acquittant pas de la rente annuelle devant financer cette réclusion, elle est finalement remise en liberté.

À peine sortie de prison, elle prend contact avec Marguerite de Valois le samedi et lui révèle un complot mené par la marquise de Verneuil et le duc d'Épernon, Ravaillac ayant agi pour leur compte. Arrêtée le , elle est condamnée à une peine d'enfermement à perpétuité, échappant de peu à une condamnation à mort. Enfermée au couvent des Filles repenties de Saint-Magloire, rue Saint-Denis à Paris, elle décède dans l'oubli à une date incertaine.

En 1616, le Véritable Manifeste sur la mort d'Henri Le Grand[6] est rendu public par des magistrats du Parlement de Paris afin d'affaiblir Marie de Médicis et le duc d'Épernon.

Procès de Jacqueline d'Escoman : première réfutation d'un complot lié à l'assassinat d'Henri IV[modifier | modifier le code]

Le premier interrogatoire de Jacqueline d'Escoman a lieu le sous la direction du président du Parlement Achille 1er de Harlay. Après avoir entendu les principales personnes mises en cause par l'accusée et divers témoins, le Parlement rend un arrêt le mettant hors de cause la marquise de Verneuil et le duc d'Épernon. Pourtant, interrogé avant cet arrêt par un proche du mémorialiste Pierre de l'Estoile, Harlay aurait déclaré  : "Il n'y en a que trop de preuves, il n'y en a que trop..."[7]. Dans les jours suivants, Marie de Médicis, veuve d'Henri IV, met à la retraite Achille de Harlay, âgé de 74 ans et presque aveugle, et le remplace par M. de Verdun, un proche du duc d'Épernon.

Après une semaine de délibérations, tous les accusés sont innocentés le . Jacqueline d'Escoman est condamnée pour "crime de lèse-majesté" à la réclusion à perpétuité. Ses juges ne statuent pas sur le fond du dossier (le complot visant à assassiner Henri IV), mais constatent que ses accusations envers les prétendus conspirateurs ne sont pas prouvées. Dès lors considérée comme calomniatrice, elle est condamnée à la peine que risquent les personnes qu'elle accuse.

Interprétations[modifier | modifier le code]

Tallemant des Réaux ne prend pas au sérieux les propos de Jacqueline d'Escoman : elle est une "petite bossue qui se fourrait partout"[8]. Il fait ainsi référence à sa réputation d'entremetteuse.

Jules Michelet s'appuie sur son témoignage, ainsi que sur celui du capitaine de la Garde, pour voir derrière l'assassinat d'Henri IV un complot impliquant l'Espagne[9].

Pour Jean-Christian Petitfils[2] qui a consulté les pièces de son procès conservées dans les registres des procédures criminelles du Parlement de Paris, Jacqueline d'Escoman est une affabulatrice. Lors de son procès, l’aumônier de la marquise de Verneuil la décrit comme une "solliciteuse", l'ayant vu plusieurs fois venir réclamer la charité auprès d'Henriette d'Entragues.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Charlotte Catherine d'Entragues était la fille de François de Balzac, seigneur d'Entragues et gouverneur d'Orléans, et de sa première épouse Jacqueline de Rohan-Guémené, dame de Gié, et l'épouse de Jacques d'Illiers, seigneur de Chantemesle.
  2. a et b Jean-Christian Petitfils, L'assassinat d'Henri IV : mystères d'un crime, Paris, Perrin, , 330 p. (ISBN 978-2-262-03914-1), p. 181-182
  3. Jean-Christian Petitfils, L'assassinat d'Henri IV : mystères d'un crime, Paris, Perrin, , 330 p. (ISBN 978-2-262-03914-1), p. 207
  4. Mercure françois, , Folio 14 et 15
  5. Jules Michelet, Histoire de France : au XVIe siècle, Paris, Chamerot,
  6. Jacqueline de Voyer Escoman, Le Véritable manifeste sur la mort d'Henri le Grand, par la demoiselle d'Escoman, 1616, (lire en ligne)
  7. Jean-Christian Petitfils, L'assassinat d'Henri IV : mystères d'un crime, Paris, Perrin, , 330 p. (ISBN 978-2-262-03914-1), p. 189
  8. Tallemant des Réaux, Les historiettes, Tome 1, Paris, Téchener, , p 127
  9. Jules Michelet, Histoire de France , Tome 11 : Henri IV et Richelieu, Paris, Chamerot, , pages 242 et suivantes