Initiative populaire « Interdiction de l'absinthe et révision correspondante de l'article 31b »

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Initiative populaire fédérale
Interdiction de l'absinthe et révision correspondante de l'article 31b

Déposée le
Déposée par Ligue antialcoolique

Contre-projet non
Votée le
Participation 49,31 %
Résultat : acceptée[NB 1]
Par le peuple oui (par 63,5 %)
Par les cantons oui (par 17 6/2)[NB 2]

L'initiative populaire « Interdiction de l'absinthe et révision correspondante de l'article 31b » est une initiative populaire suisse, approuvée par le peuple et les cantons le .

Contenu[modifier | modifier le code]

L'initiative propose de modifier l'article 31 de la Constitution fédérale en ajoutant, dans la liste des réserves des libertés de commerce et d'industrie, la fabrication, l'importation, le transport, la vente et la détention pour la vente de l'absinthe et de « toutes les boissons qui, sous une dénomination quelconque, constitueraient une imitation de l'absinthe ».

Le texte complet de l'initiative peut être consulté sur le site de la Chancellerie fédérale[1].

Déroulement[modifier | modifier le code]

Affiche appelant à accepter l'initiative.

Contexte historique[modifier | modifier le code]

Dès la seconde moitié du XIXe siècle, la culture et la distillation de l'absinthe représentent une part importante de l'économie du Val-de-Travers qui exporte en France voisine une grande partie de sa production malgré des études médicales mettant en garde contre les abus de cette boisson, liés en particulier à sa teneur importante en thuyone.

Le , un ouvrier vigneron de Commugny[2] tue sa femme sous l'emprise de l'absinthe ; ce fait-divers va provoquer la mise en place de la prohibition dans le cantons de Vaud en 1906 et de Genève l'année suivante[3]. Quelques mois plus tard, l'avocat neuchâtelois originaire de La Chaux-de-Fonds Auguste Monnier propose à la Délégation antialcoolique cantonale d'étendre cette interdiction sur le plan fédéral ; une décision dans ce sens est prise par l'assemblée le  : l'interdiction est proposée via une initiative populaire et un comité d’initiative est créé dans ce but[4].

Récolte des signatures et dépôt de l'initiative[modifier | modifier le code]

La récolte des 50 000 signatures nécessaires a débuté le . Le , l'initiative a été déposée à la chancellerie fédérale qui l'a déclarée valide le [5].

Discussions et recommandations des autorités[modifier | modifier le code]

Alors que le Conseil fédéral[6] recommande le rejet de cette initiative, le parlement[7], lui, préfère recommander son acceptation. Dans son message à L'assemblée, le gouvernement, tout en précisant son « accord pour le fond avec les initiants », déplore un certain flou dans sa formulation (en particulier quant au manque de clarté sur les boissons considérées comme des imitations ainsi que sur une confusion entre la liqueur d'absinthe et la plante elle-même).

Votation[modifier | modifier le code]

Soumise à la votation le , l'initiative est acceptée par 17 6/2 cantons[NB 2] et par 63,5 % des suffrages exprimés[8]. Le tableau ci-dessous détaille les résultats par cantons[9] :

Effets[modifier | modifier le code]

Affiche critiquant l'interdiction de l'absinthe

À la suite de l'acceptation de l'initiative, le gouvernement suisse édicte, le , une « loi fédérale sur l'interdiction de l'absinthe » qui précise différents points laissés dans le flou par le texte de l'initiative, et en particulier ce qui est considéré comme imitations de l'absinthe[10].

Lors de la révision de la Constitution fédérale en 1999, la disposition sur l'interdiction de l'absinthe est supprimée. Sur la proposition du Conseiller aux États Jean-Claude Cornu relayant une demande de l’Association Région Val-de-Travers, la loi spécifique sur cette interdiction est levée en 2004, l'absinthe n'étant plus depuis considérée que comme un spiritueux normal[11].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Selon l'article 139 de la Constitution, une initiative proposée sous la forme d'un projet rédigé doit être acceptée à la fois par la majorité du peuple et par la majorité des cantons. Dans le cas d'une initiative rédigée en termes généraux, seul le vote du peuple est nécessaire.
  2. a et b Le premier chiffre indique le nombre de cantons, le second le nombre de cantons comptant pour moitié. Par exemple, 20 6/2 se lit « 20 cantons et 6 cantons comptant pour moitié ».

Références[modifier | modifier le code]

  1. « Texte de l'initiative populaire fédérale », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  2. « La maison du crime », sur commugny.ch (consulté le )
  3. Rolf Trechsel, « Absinthe » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
  4. Sophie Rossier, La Croix-Bleue et sa lutte antialcoolique en Suisse romande, 1877-1910 : Le fonctionnement d’une société de tempérance entre idéaux religieux et aspirations patriotiques, Faculté des Lettres de l’Université de Fribourg (CH),
    Mémoire de licence
  5. « Initiative populaire 'Interdiction de l'absinthe et revision correspondante de l'article 31b' », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  6. « Message du Conseil fédéral »  (26 décembre 1907) de la Feuille fédérale référence FF 1907 VI 1162
  7. « Objet parlementaire »  (13 mai 1908) de la Feuille fédérale référence FF 1908 II 849
  8. « Votation no 68 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  9. « Votation no 68 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  10. « Loi fédérale sur l'interdiction de l'absinthe »  (24 juin 1910) de la Feuille fédérale référence FF 1910 IV 417
  11. « Initiative parlementaire relative à la levée de l’interdiction de l’absinthe »  (10 février 2004) de la Feuille fédérale référence FF 2004 I 1433