Estoire des Engleis

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L'Estoire des Engleis est une chronique de l'histoire de l'Angleterre écrite par Geoffroy Gaimar. Ce texte, commandé par la femme d'un propriétaire terrien des comtés de Lincolnshire et Hampshire, est la plus ancienne chronique historique rédigée en français qui nous soit parvenue[1]. Bien que les universitaires aient proposé plusieurs dates pour son écriture, la période du milieu à la fin des années 1130 est communément acceptée. En grande partie inspirée, voire directement traduite, de chroniques préexistantes, l'Estoire des Engleis retrace l'histoire de l'Angleterre de l'arrivée en 495 de Cerdic de Wessex jusqu'à la mort de Guillaume le Roux en 1100. Le document d'origine débutait par les origines troyennes mythiques de la Grande-Bretagne, cependant, toutes les portions précédant le débarquement de Cerdic sont perdues.

Histoire[modifier | modifier le code]

Geoffrey Gaimar a écrit l’Estoire des Engleis pour Constance[2], épouse de Ralph Fitz Gilbert[3]. Celui-ci, apparenté à la famille de Clare[3] et propriétaire terrien des comtés de Lincolnshire et Hampshire[4], aurait été le commanditaire de l'ouvrage selon ce que Gaimar relate dans l'épilogue de la chronique. Gaimar lui-même aurait été l'aumonier des Fitz Gilbert[5] ou peut-être un clerc séculier[4]. Les universitaires avancent différentes dates pour la rédaction de la chronique, mais des périodes s'étendant de à et de 1135 à 1140 sont communément admises. Gaimar commença probablement l'écriture de l’Estoire des Engleis dans le Hampshire puis la termina dans le Lincolnshire[4].

Ian Short, professeur émérite de langue française au Birkbeck College[6], affirme que la chronique a été écrite « afin de fournir un vaste panorama des dynasties celto-britanniques, anglo-saxonnes, et anglo-normandes dans les îles Britanniques des temps troyens jusqu'à la mort de Guillaume le Roux[4] ». Ce texte, qui est la plus ancienne chronique historique connue rédigée en langue française[4], a été écrit avec un biais à l'égard des Normands, considérant ces derniers comme les véritables successeurs du trône d'Angleterre[5]. Comme il l'est mentionné dans l'épilogue de l'ouvrage, la chronique débutait originellement par le récit des mythiques origines troyennes de l'Angleterre[7]. Cependant, cette première partie de la chronique, connue sous le nom d’Estoire des Troiiens, ainsi qu'une autre portion, l’Estoire des Bretuns, sont perdues[4]. Les quatre copies actuellement existantes commencent par l'arrivée en Angleterre de Cerdic de Wessex en 495, et se concluent par la mort de Guillaume le Roux en l'an 1100[7]. L'œuvre est écrite en couplets[8], et contient 6 532 octosyllabes[9].

L’Estoire des Engleis est en grande partie inspirée, voire directement traduite, de chroniques préexistantes. Par exemple, les portions désormais perdues, l’Estoire des Troiiens et l’Estoire des Bretuns, semblent reprendre de nombreuses informations de l’Historia regum Britanniae de Geoffrey de Monmouth. Le reste de l'ouvrage, du débarquement de Cerdic à l'an 959 environ, est principalement une traduction de la Chronique anglo-saxonne. L'exactitude des faits relatés sur l'histoire politique de l'Angleterre est mise en question par les universitaires, mais la chronique est tout de même considérée comme estimable pour d'autres domaines de recherches et d'études[4].

Cette chronique est le premier texte où l'on voit apparaître le personnage de Havelok, populaire dans les lettres anglo-normandes et anglaises au Moyen Âge.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Vielliard 2010, p. 225-226.
  2. (en) Christopher Harper-Bill et Elisabeth Van Houts, A Companion to the Anglo-Norman World, Boydell & Brewer Ltd, , 298 p. (ISBN 978-1-84383-341-3, lire en ligne), p. 209.
  3. a et b Vielliard 2010, p. 226.
  4. a b c d e f et g « The Date of Geoffrey Gaimar's Estoire des Engleis, the Connections of His Patrons, and the Politics of Stephen's Reign », sur muse.jhu.edu (consulté le ).
  5. a et b (en) Peter Damian-Grint, The New Historians of the Twelfth-century Renaissance : Inventing Vernacular Authority, Boydell & Brewer, , 292 p. (ISBN 978-0-85115-760-3, lire en ligne), p. 49.
  6. « Emeritus Professor Ian Short », sur bbk.ac.uk (consulté le ).
  7. a et b « Introduction », sur fdslive.oup.com (consulté le ).
  8. (en) John Spence, Reimagining History in Anglo-Norman Prose Chronicles, Woodbridge, Boydell & Brewer Ltd, , 221 p. (ISBN 978-1-903153-45-1, lire en ligne), p. 9.
  9. « Estoire des Engleis: History of the English », sur ukcatalogue.oup.com (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • [Croizy-Naquet 2002] Catherine Croizy-Naquet, « De la translation à la compilation : le cas de l'Estoire des Engleis de Geiffrei Gaimar », dans Danielle Buschinger (éd.), Le travail sur le modèle, Amiens, Presses du centre d'études médiévales de l'université de Picardie – Jules-Verne, coll. « Médiévales » (no 16), , 1re éd., 1 vol., 77, 21 cm (ISBN 2-901121-40-3, EAN 9782901121404, OCLC 277231339, BNF 38882687, SUDOC 068455771), p. 19-29.
  • [Croizy-Naquet 2008] Catherine Croizy-Naquet, « L'Estoire des Engleis de Geiffrei Gaimar ou comment faire mémoire du passé », dans Pierre Chastang (éd.), Le passé à l'épreuve du présent : appropriations et usages du passé du Moyen Âge à la Renaissance, Paris, Presses universitaires de Paris-Sorbonne, coll. « Mythes, critique et histoire », , 1re éd., 1 vol., 523-IV, 24 cm (ISBN 978-2-84050-545-7, EAN 9782840505457, OCLC 470661626, BNF 41285036, SUDOC 126502919), p. 61-74.
  • [Vielliard 2010] Françoise Vielliard, « Geffrei Gaimar, Estoire des Engleis. History of the English, edited and translated by Ian Short, Oxford, Oxford University Press, , in-8o, LIII−496 p. [compte rendu] », Bibliothèque de l'École des chartes, t. 168, 1re livraison,‎ , p. 225-229 (lire en ligne, consulté le ).

Articles connexes[modifier | modifier le code]