Haïk (vêtement)

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Haïk
Femmes d'Alger en Haïk et aadjar couvrant le visage.
Caractéristiques
Type
Voile islamique (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Matière
Origine
haik
Haïk porté par des femmes à Alger.
haik
Haïk porté par une femme au Maroc.
L'aadjar, complément du haïk

Le haïk (arabe : الحايك) est un vêtement féminin algérien, porté particulièrement à Alger, au centre algérien et au Maroc. Il est constitué d'une étoffe rectangulaire recouvrant tout le corps[1], longue — six mètres sur 2,2 mètres —, enroulée puis maintenue à la taille par une ceinture et ramenée ensuite sur les épaules pour y être fixée par des fibules. Il peut être blanc ou noir. Il rappelle le mlaya de l'est algérien, le ksaa de l'ouest algérien[2][C'est-à-dire ?], et le sefsari en Tunisie.

Emblématique de la guerre d'indépendance algérienne, le haïk est un symbole du rôle des femmes dans la libération du pays.

Histoire

Origine

Gravure représentant une femme algérienne au XVIIe siècle.

Fabriqué à partir de tissu de laine, de soie ou de soie synthétique, le haïk réussit, en un laps de temps très court, à se répandre à travers de nombreuses régions de l'Algérie, mais son port fut adapté aux spécificités socioculturelles de la région d'adoption.

Parmi cette panoplie, un type de voile a connu un grand succès, auprès des femmes s'entend, au vu de son style de conception, la manière de le porter, ainsi que la qualité du tissu utilisé par les artisans. Il s'agit du haïk m'rama, apparu à la fin du XIXe siècle et qui fut porté par les femmes citadines d'Alger et sa banlieue. Ce type de voile est souvent associé à la beauté féminine et a inspiré nombre de poètes et de chanteurs chaâbi, qui lui dédièrent beaucoup de leurs œuvres.

En ce qui concerne la couleur, on remarque qu'il est d'un blanc immaculé à Alger, Tlemcen, Béjaïa et Oran, alors qu'à Constantine, il est noir, et cela en signe de deuil d’un bey décédé. En effet, les Constantinoises portent la m'laya en guise de haïk[3]. En 1792, la m'laya, voile de couleur noir, fait son apparition pour faire le deuil de Salah Bey, Bey de Constantine. Ce vêtement fut par la suite en vogue dans la partie Est de l'Algérie.

Ce vêtement est également présent dans les autres régences ottomanes d'Afrique du Nord comme Tunis[4], ainsi qu’au Maroc[5], l'Algérie et le Maroc se disputant sa parenté[6].

Un symbole des femmes dans la guerre d'indépendance

Durant la guerre d'indépendance algérienne, le haïk a fait un retour en force, les femmes le portant davantage afin de faire face à la propension des colons français à arrêter et fouiller les femmes[7]. Le Front de libération nationale (FLN) encourage ainsi les femmes à se vêtir d'un haïk, facilitant la dissimulations d'armes, dans un but tactique[8]. Les colons français ont ensuite agressé sexuellement de nombreuses femmes innocentes vêtues de la sorte[8][évasif].

Le port du haïk, tenue modeste et très pudique, est également un symbole de la résistance féminine à la volonté de la France coloniale de De Gaulle de dévêtir les femmes musulmanes et de les éloigner du conservatisme religieux[9][non neutre].

Dans la culture populaire

Le haïk est immortalisé dans le célèbre film La Bataille d'Alger (1966) dans lequel Gillo Pontecorvo restitue le rôle central de ce vêtement dans la résistance des femmes algériennes à la colonisation française[10],[11],[12].

Étymologie

Le mot est emprunté à l'arabe maghrébin hayk qui provient du verbe arabe hâka qui signifie « tisser ». D'abord employé sous la forme francisée heque (1654), il connaît de nombreuses variantes hayque (1667), alhaique (1670), eque (1670), haïque (1683), hayc (1686). Le mot haïk sera d'abord féminin (1725) et se fixe au masculin en 1830[13].

Un Espagnol au XVIIe siècle, Diego de Haedo, le cite à propos des femmes d'Alger dans son ouvrage Topographia de Argel (Topographie d'Alger). Il décrit ainsi les Algéroises :

« Quand elles sortent de chez elles, elles mettent des manteaux blancs, très déliés, en laine fine ou tissus de laine et soie.

C'est tout un art que de porter le haïk :

Les femmes s'entortillent dans ces manteaux, en attachant un bout sur la poitrine avec des agrafes ou de grandes épingles d'argent doré, elles jettent le corps du manteau sur les épaules et sur la tête, et de l'autre bout, celui de dessous, elles couvrent le bras droit. »

En Algérie, le Haïk blanc est toujours porté quotidiennement (surtout les femmes âgées et dans les villes de l'intérieur).

En Tunisie, le sefseri, une variante tunisienne du haïk composée d'une seule pièce de tissu ne couvrant pas le visage, a été pratiquement abandonné. Toutefois il est encore parfois traditionnellement porté, en particulier par des femmes âgées.

Haïk est également un patronyme venant de ce même vêtement. Il désignait entre autres les tisserands. Il se compare donc aux noms de famille français Tessier ou Texier.

Galerie

Notes et références

  1. Ambroise Queffélec, Yacine Derradji, Valéry Debov, Dalila Smaali-Dekdouk et Yasmina Cherrad-Benchefra, Le français en Algérie : Lexique et dynamique des langues, Bruxelles, Duculot, , 590 p. (ISBN 2-8011-1294-1), p. 343.
  2. « Haik ou Ksà - Voile », sur vitaminedz.com (consulté le )
  3. « El Haïk, une étoffe symbole de pureté », sur dziriya.net (consulté le ).
  4. « El-Haik, une histoire à découvrir...au musée des arts populaires de Médéa », sur Al Huffington Post, (consulté le ).
  5. (en) « An infinity of stripes » [df], sur nomadno.com (consulté le ).
  6. « Algériens et Marocains se disputent la propriété du haïk », sur Middle East Eye édition française (consulté le )
  7. (en) Jill Condra, Encyclopedia of National Dress: Traditional Clothing around the World [2 volumes], ABC-CLIO, , 838 p. (ISBN 978-0-313-37637-5, lire en ligne), p. 23
  8. a et b (en) Esra Mirze Santesso et James McClung, Islam and Postcolonial Discourse : Purity and Hybridity, Routledge, , 256 p. (ISBN 978-1-317-11256-3, lire en ligne)
  9. (en) James McDougall, A History of Algeria, Cambridge University Press, (ISBN 978-1-108-16574-7, lire en ligne)
  10. Catherine Sawers, « The Women of Bataille d'Alger: Hearts and Minds and Bombs », Journal of Middle East Women's Studies, vol. 10, no 2,‎ , p. 80–106 (ISSN 1552-5864, DOI 10.2979/jmiddeastwomstud.10.2.80, lire en ligne, consulté le )
  11. Olive Brodie-Stuart, « women in conflict, ‘Woman’ conflicted: the representation of women in The Battle of Algiers (1966) against the Women, Peace and Security agenda », Feminist Review, no 122,‎ , p. 151–157 (ISSN 0141-7789, lire en ligne, consulté le )
  12. (en) Naomi Nkealah et Obioma Nnaemeka, Gendered Violence and Human Rights in Black World Literature and Film, Routledge, (ISBN 978-1-000-36777-5, lire en ligne)
  13. Alain Rey, Dictionnaire historique de la langue française, éd. Le Robert, Paris, 1992 (ISBN 2-85036-187-9).[réf. incomplète]

Voir aussi

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Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

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