Hakuto-R

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Hakuto-R est un programme spatial développé par la société japonaise ispace dont l'objectif est de construire et de mettre en œuvre des atterrisseurs et des astromobiles lunaires de petite taille. En 2022, deux missions sont d'ores et déjà financées par des investisseurs privés dont Yokogawa Electric et Toray Carbon Magic. La première mission M1 est lancée le 11 décembre 2022 par une fusée Falcon 9 en tant que charge utile principale, le nano-satellite Lunar Flashlight l'accompagnant en tant que charge utile secondaire.

L'engin spatial réussit à se placer en orbite autour de la Lune le 17 mars mais est perdu durant sa descente vers le sol lunaire réalisée le 25 avril. Deux autres missions - M2 planifiée par ispace en 2024 et M3 pour le compte de la NASA en 2025 - sont programmées.

Le projet Hakuto-R est issu de développements réalisés dans le cadre du Google Lunar X Prize. Sa fabrication est en partie assurée par le groupe industriel européen ArianeGroup.

Historique[modifier | modifier le code]

Maquette de l'atterrisseur Hakuto-R dans la version de 2019 et d'un astromobile (au premier plan).

L'atterrisseur lunaire Hakuto (en français lapin blanc, en référence au lapin lunaire) est conçu initialement par la société japonaise ispace pour tenter de remporter le Google Lunar X Prize, un prix décerné à la première équipe d'ingénieurs et techniciens travaillant en dehors du cadre institutionnel des agences spatiales qui parviendrait à concevoir, fabriquer et poser un engin spatial sur la surface de la Lune. Lancé en 2007, la compétition est close en 2018 sans qu'aucune équipe ne soit parvenue à atteindre cet objectif. En 2018, ispace décide de poursuivre ses travaux en développant l'atterrisseur Hakuto-R (R pour reboot c'est-à-dire, en français, redémarrage). Plusieurs missions, destinées à déposer des charges utiles à la surface de la Lune, sont programmées. Hakuto-R M1 est la première mission dont l'objectif est de valider la conception de l'atterrisseur ainsi que le modèle économique du projet[1].

L’atterrisseur est construit par l'établissement allemand de Lampoldhausen d'ArianeGroup. L'intégration des charges utiles a été réalisée dans les installations de la société IABG (en) (Industrieanlagen-Betriebsgesellschaft mbH) à Ottobrunn. Plusieurs sociétés américaines fournissent des composants. En avril 2023, la société ispace, qui emploie environ 200 personnes, est financée par plusieurs sociétés japonaises dont Suzuki, Japan Airlines, la banque de développement du Japon, Konical Minolta, Dentsu ainsi que par plusieurs fonds d'investissement et de capital-risque[1],[2].

La mission Hakuto-R M1[modifier | modifier le code]

Hakuto-R M1 est la première mission de l'atterrisseur lunaire Hakuto-R d'une masse de 1000 kg. Lancé le 11 décembre 2022 par une fusée Falcon 9, il emporte plusieurs charges utiles qui doivent être déposées à la surface de la Lune dans la plaine basaltique Lacus Somniorum située à une latitude moyenne (47,5° Nord, 44,4° Est). Ce site a été choisi parce qu'il comporte peu de rochers susceptibles de faire échouer l'atterrissage et parce qu'il est caractérisé par une grande diversité des formations géologiques. Parmi ces charges utiles, figurent deux petits astromobiles : un astromobile développé par ispace et Rashid 1 des Émirats arabes unis[3],[2],[4].

Hakuto-R est placé sur une trajectoire de transit vers la Lune à basse énergie similaire à celle suivie par la sonde spatiale sud-coréenne Danuri[2]. Après avoir été placée sur une orbite haute culminant à une altitude de 1,5 million de kilomètres de la Terre (au delà de l'orbite de la Lune), la sonde spatiale effectue trois corrections de trajectoire les 16 décembre 2022, 4 janvier et 3 février 2023 qui lui permettent finalement de s'insérer sur une orbite lunaire elliptique de 100 x 2300 kilomètres. Après une nouvelle série de manœuvres destinées à modifier cette orbite, la sonde spatiale réduit sa vitesse avec son propulseur principal le 25 avril une heure avant d'entamer sa descente vers la surface de la Lune pour s'y poser. Alors qu'il s'approche de la surface, Hakuto-R pivote pour réduire sa vitesse de descente avec sa propulsion principale puis est censé utiliser ses six petits propulseurs pour la phase finale. Le centre de contrôle de la mission installé à Tokyo qui reçoit les télémesures de l'engin spatial via le réseau d'antennes de l'Agence spatiale européenne perd le contact avec Hakuto-R durant cette dernière phase. Le vaisseau s’est mis en position verticale, à quelques centaines de mètres de la surface[5] mais sa vitesse de descente a accéléré. Les informations transmises indiquent un niveau de carburant au plus bas, empêchant le contrôle de la vitesse et amenant à une destruction à la surface[6],[7].

Charges utiles de l'atterrisseur[modifier | modifier le code]

La charge utile de l'atterrisseur a une masse de 11 kilogrammes.

Astromobile Rashid[modifier | modifier le code]

Vue d'artiste de l'astromobile Rashid 1.

Rashid 1 est un petit astromobile de 10 kilogrammes comportant quatre roues dont l'énergie est fournie par des panneaux solaires d'une surface de 53 x 53 centimètres. Il emporte trois caméras à haute résolution CASPEX de fabrication française, une caméra infrarouge CAM-T ayant une résolution de 80x64 pixels et un champ de vue de 38 x 31 °, un microscope CAM-M permettant d'étudier le régolithe et des sondes de Langmuir permettant d'étudier le plasma. Les caméras CASPEX développées par l'agence spatiale française CNES et la société 3D PLUS ont une résolution spatiale de 2048 x 2048 pixels et un champ de vue de 85 degrés. Deux de ces caméras sont en position fixe à l'avant et à l'arrière de l'astromobile et la troisième est positionnée à l'extrémité d'un mât déployable). Rashid a une vitesse de déplacement maximum de 10 centimètres par seconde et il peut franchir des obstacles de 10 cm de haut et des pentes allant jusqu'à 20 degrés. Une fois l'atterrisseur posé à la surface de la Lune, l'astromobile est déposé sur le sol à l'aide d'un bras articulé. Un deuxième exemplaire de l'astromobile doit embarquer sur une mission ultérieure qui reste à définir. Le choix de la sonde spatiale chinoise Chang'e 7, qui doit être lancée vers 2025, semble écarté en raison des règlements ITAR[8],[9],[2].

SORA-Q[modifier | modifier le code]

L'atterrisseur doit également déposer sur le sol lunaire SORA-Q (Sora signifie ciel en japonais), qui est un petit engin de forme ovale d'une masse de 250 grammes et de 8 centimètres de diamètre. Capable de se déplacer grâce à ses extrémités qui peuvent agir comme des roues, il dispose d'une caméra[2].

Autres charges utiles[modifier | modifier le code]

Hakuto-R transporte également un caméra 4K d'ispace, une caméra panoramique (360°) de la société canadienne Canadensys Aerospace et un prototype de batterie à semi-conducteurs[2].

CubeSat Lunar Flashlight[modifier | modifier le code]

La fusée Falcon 9 emporte également une charge utile secondaire, le CubeSat 6U Lunar Flashlight qui est placé sur une orbite lunaire très elliptique avec un périgée passant environ 15 kilomètres au-dessus du pôle sud de la Lune. Ce nano-satellite utilise des lasers pour tenter de mettre en évidence la présence de glace d'eau[1].

Les missions Hakuto-R M2 et M3[modifier | modifier le code]

Deux autres missions utilisant l'atterrisseur Hakuto-R sont programmées[10],[4] :

  • La mission M2 programmée pour 2024 devrait emporter un astromobile conçu par la société japonaise.
  • La mission M3 utilisant un atterrisseur de deuxième génération construit par Draper aux États-Unis est développée dans le cadre du programme CLPS de la NASA pour le compte du laboratoire Draper. La mission prévue pour 2025 doit se poser sur la face cachée de la Lune.

Caractéristiques techniques de l'atterrisseur[modifier | modifier le code]

L'atterrisseur permet de déposer des charges utiles d'une masse totale de 30 kilogrammes à la surface de la Lune. Avec son train d'atterrissage déployé, il est haut de 2,3 mètres pour un diamètre de 2,6 mètres. Sa masse à vide (sans ergols) est de 340 kilogrammes et atteint une tonne avec les ergols. Le système propulsif comprend un moteur-fusée principal et six moteurs-fusées secondaires qui brûlent un mélange d'ergols hypergoliques (méthylhydrazine et peroxyde d'azote). L'attitude de l'engin spatial est contrôlée à l'aide de huit petits moteurs-fusées brûlant de l'hydrazine. L'ensemble du système propulsif est fourni par la société européenne ArianeGroup. Le logiciel gérant le guidage, la navigation et le contrôle d'attitude est fourni par le laboratoire américain Draper. Les panneaux solaires sont fournis par la société américaine Sierra Space[1],[2],[4].

Une version plus puissante de l'atterrisseur dite Séries 2, fabriquée aux États-Unis, sera utilisée pour la mission M3[11].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c et d (en) Andrew Jones, « SpaceX launches Falcon 9 carrying private Japanese moon lander », sur nasaspaceflight.com,
  2. a b c d e f et g (es) Daniel Marin, « Lanzada la sonda japonesa HAKUTO-R a la Luna », sur Eureka,
  3. (en) Gunter Krebs, « Hakuto-R M1 », sur Gunter's Space Page,
  4. a b et c (en) Stephen Clark, « Japanese company says commercial spacecraft crashed on moon landing attempt », sur paceflightnow.com,
  5. Rédaction S&V, « Hakuto-R : on sait pourquoi le vaisseau spatial japonais s’est écrasé sur la Lune », sur Science et vie, (consulté le )
  6. Julien Lausson, « Crash de Hakuto-R sur la Lune : ce que l’on sait », sur Numerama, (consulté le )
  7. (en) « Status Update on ispace HAKUTO-R Mission 1 Lunar Lander », sur ispace (consulté le )
  8. (en) Andrew Jones, « China loses UAE as partner for Chang’e-7 lunar south pole mission », sur SpaceNews, (consulté le ).
  9. (en) Andrew Jones, « UAE moon rover, Japanese lander set to launch atop SpaceX rocket in November », sur Space.com,
  10. (es) Daniel Marin, « La sonda japonesa HAKUTO-R no logra alunizar con éxito », sur Eureka,
  11. (es) « Services », sur ispace (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Lien externe[modifier | modifier le code]