Hôpital général de Québec

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Hôpital général de Québec
Image illustrative de l’article Hôpital général de Québec
Vue de l’hôpital
Présentation
Coordonnées 46° 48′ 52″ nord, 71° 14′ 00″ ouest
Pays Drapeau du Canada Canada
Ville Notre-Dame-des-Anges
Fondation 1692
Site web http://www.csssvc.qc.ca/index.php
Affiliation Centre de santé et de services sociaux de la Vieille-Capitale
Protection Classé en tant qu'immeuble patrimonial par le Ministère de la Culture et des Communications le 9 décembre 1977

Carte

L'Hôpital général de Québec situé dans la municipalité de paroisse nommée Notre-Dame-des-Anges, enclavée dans l'arrondissement de La Cité–Limoilou, est le plus ancien bâtiment conventuel au pays. Il comprend la plus ancienne église, le plus ancien hospice toujours en fonction et le plus ancien cimetière de la ville de Québec[1].

Cet hôpital a été classé site historique en 1977. Certaines parties de ce territoire sont inscrites à l'Inventaire des sites archéologiques du Québec.

Histoire : L'Hôpital général de Québec au temps des Augustines[modifier | modifier le code]

Fondation[modifier | modifier le code]

La détermination de Mgr de Saint-Vallier[modifier | modifier le code]

Lorsque le deuxième évêque de la Nouvelle-France, Mgr Jean-Baptiste de La Croix de Chevrières de Saint-Vallier (1653-1727), fonde l’Hôpital général de Québec, il réalise un projet envisagé depuis un bon moment par les dirigeants de la colonie française en Amérique. Cet établissement, calqué sur un modèle existant en France, est destiné à héberger les indigents, les invalides et les personnes âgées[2]. La mendicité est interdite en Nouvelle-France. Les mendiants risquent le carcan et le fouet. Les personnes pauvres et âgées sont donc sans ressources dans la colonie naissante[3].

Pour établir son hôpital, l’évêque souhaite acquérir le couvent des Récollets érigé à l’écart de la ville de Québec, sur les bords de la rivière Saint-Charles. À cette époque, les religieux terminent la construction d’un second couvent en haute-ville. L’évêque réussit à les convaincre de lui vendre leur premier couvent même si leur intention était de le conserver. En mars 1692, Mgr de Saint-Vallier reçoit de Louis XIV des lettres patentes pour l’érection de l’Hôpital général[4]. En septembre de la même année, il fait l’acquisition des installations des Récollets sur la rivière Saint-Charles. Il y fait conduire les pauvres et les invalides qui étaient jusque-là hébergés à la maison de la Providence dans la haute-ville de Québec. L’établissement est placé provisoirement sous la gouverne d’une sœur de la Congrégation de Notre-Dame et du Bureau de la Charité géré par des administrateurs laïcs[5].

Mgr de Saint-Vallier tente de convaincre les Augustines, fondatrices de l’Hôtel-Dieu de Québec, de prendre en charge le nouvel hôpital. Celles-ci invoquent d’abord leur manque d’effectifs et la pauvreté de leurs moyens, mais le prélat sait se faire convaincant[6]. Le 1er avril 1693, quatre augustines, Marguerite Bourdon de Saint-Jean-Baptiste (1642-1706), Louise Soumande de Saint-Augustin (1664-1708), Geneviève Gosselin de Sainte-Madeleine (1667-1739) et Madeleine Bacon de la Résurrection (1653-1727), arrivent à l’Hôpital général. Huit ans plus tard, la nouvelle communauté deviendra autonome et ne relèvera plus de celle de l’Hôtel-Dieu[7].

Les premières installations[modifier | modifier le code]

À leur arrivée, les Augustines adaptent les bâtiments des Récollets à leurs propres besoins ainsi qu’à ceux des personnes qui y résident depuis quelques mois. En 1710, l’évêque fait construire une aile pour l’hôpital et un presbytère qui deviendra son lieu de résidence. Quatre ans plus tard, il fait construire une apothicairerie en lieu et place de la maison que le gouverneur de la Nouvelle-France, Louis de Buade comte de Frontenac et de Palluau (1622-1698), avait érigée en 1677[8]. En 1726, l’évêque soutient la construction d’un chœur pour les religieuses attenant à l’église. Il meurt l’année suivante, le 26 décembre. Il aura jeté les bases d’un établissement entièrement dédié aux pauvres qui survivra jusqu’à aujourd’hui. Un témoin de l’époque, l’historien jésuite Pierre-François-Xavier de Charlevoix (1682-1761), écrit : « L’Hôpital général est la plus belle maison du Canada, et elle ne déparerait point nos plus grandes villes de France[9] ».

Développements[modifier | modifier le code]

Les loges[modifier | modifier le code]

En 1717, à la demande de l’intendant Michel Bégon de la Picardière (1667-1747), Mgr de Saint-Vallier confie aux Augustines de l’Hôpital général le soin des femmes atteintes de maladie mentale. Elles construisent des loges qui servent de lieu d’accueil et de mise à l’écart de celles qu’on appelle alors les insensées. En 1723, un deuxième bâtiment est construit pour accueillir les hommes. Les Augustines s’acquitteront de cette fonction jusqu’à la création de l’asile de Beauport, en 1845[10].

Le pensionnat et autres sources de revenus[modifier | modifier le code]

Les Augustines doivent diversifier leurs sources de revenus pour prendre soin des personnes qui leur sont confiées. Elles reçoivent de l’État deux seigneuries, Orsainville et Saint-Vallier, où elles implantent des fermes. Elles construisent un moulin à eau à proximité de l’hôpital et un autre à vent pour moudre le grain. En 1725, elles ouvrent un pensionnat pour jeunes filles et assurent leur formation générale, une mission qu’elles poursuivront jusqu’en 1868[11].

La guerre de Sept Ans et la révolution américaine[modifier | modifier le code]

La conquête britannique[modifier | modifier le code]

Dès le début de la guerre de Sept Ans, en 1756, l’Hôpital général de Québec devient le lieu de soin des combattants. L’Hôtel-Dieu de Québec, en reconstruction après un grave incendie, n’est pas en mesure de les accueillir. La première année, en 1756, 6 000 soldats débarquent de France. À leur arrivée, 600 d’entre eux souffrent du typhus. Soignés à l’Hôpital général, ils occupent les salles de la communauté, l’infirmerie des religieuses et même l’église. Sur les trente religieuses que compte le monastère, vingt-deux tombent malades, sept d’entre elles meurent[12]. Au cours des deux années qui suivent, 700 militaires et matelots arrivés dans les mêmes circonstances décèdent à l’hôpital[13].

Les troupes britanniques commencent le siège de Québec en juillet 1759. Les Augustines et les Ursulines de la haute-ville se réfugient à l’Hôpital général situé hors de portée des boulets et des bombes. La population y trouve également refuge et les combattants, sans distinction de leur camp, s’y font soigner. Devant un tel dévouement, le général James Wolfe (1727-1759), commandant des forces britanniques, écrit en août 1759 une lettre de remerciements à la sœur dépositaire responsable des soins[14].

Au terme de la bataille des plaines d’Abraham, le 13 septembre 1759, les soldats blessés des deux armées et les miliciens sont emmenés par centaines à l’Hôpital général. Ceux qui meurent de leurs blessures sont inhumés sur place. En avril de l’année suivante, les combattants de la bataille de Sainte-Foy y sont aussi transportés. En tout 1 063 combattants reposent dans le cimetière et dans des fosses communes sur les terrains de l’hôpital. En 2001, le gouvernement du Québec y aménage un monument commémoratif. Le commandant des troupes françaises, Louis-Joseph de Saint-Véran, marquis de Montcalm (1712-1759), décédé des suites de ses blessures le 14 septembre 1759, repose également dans ce cimetière depuis la translation de ses restes en 2001 (il reposait jusque-là dans la chapelle des Ursulines)[15].

La guerre des Bostonnais[modifier | modifier le code]

Le 14 novembre 1775, les révolutionnaires de la Nouvelle-Angleterre commandés par le colonel Benedict Arnold (1741-1801) arrivent aux portes de Québec. Ils ont résolu de s’emparer de la colonie passée aux mains des Britanniques quinze ans plus tôt[16]. Tandis qu’un deuxième contingent, commandé par le général Richard Montgomery (1738-1775), vient de s’emparer de Montréal, le colonel Arnold réclame aux Augustines de l’Hôpital général de Québec le logement pour une partie de son armée. Ses hommes occupent les lieux en attendant de passer à l’assaut de la ville le 31 décembre 1775. Après leur défaite, les blessés, parmi lesquels se trouve leur commandant, sont ramenés à l’Hôpital général pour y être soignés. Ils y passent l’hiver, toujours dans l’espoir de prendre la ville. Cependant, l’arrivée de renforts britanniques au printemps les oblige à renoncer définitivement à leur projet[17].

Deux siècles d’essor[modifier | modifier le code]

Aux 19e et 20e siècles, l’Hôpital général de Québec continue son essor. L’établissement s’agrandit tant du côté de l’hôpital que de celui du monastère[18]. Le site de l’Hôpital général est érigé en municipalité en 1855 sous le nom de Notre-Dame-des-Anges. Cette municipalité demeure aujourd’hui la plus petite du territoire québécois[19]. Au milieu du 19e siècle, les Augustines renoncent à leur mission de soin en santé mentale et au pensionnat pour se concentrer sur leurs fonctions premières auprès des personnes âgées et des pauvres. En 1873, elles fondent l’Hôtel-Dieu du Sacré-Cœur de Jésus de Québec destiné à accueillir les enfants abandonnés et les épileptiques[20]. En 1884, elles fondent l’Hôtel-Dieu de Chicoutimi[21]. En 1893, deux augustines de l’Hôpital général de Québec se rendent à Durban, en Afrique du Sud, pendant la guerre des Boers[22].

D’importants changements surviennent à partir de la deuxième moitié du 20e siècle. En 1965, à la suite du concile Vatican II, la règle de vie cloîtrée des sœurs est levée. Au cours de la décennie de 1960, l’hôpital devient un établissement public. Les Augustines le céderont définitivement à l’État, le 7 octobre 1999. Aujourd’hui, l’Hôpital général de Québec est un Centre hospitalier de soins de longue durée. Il poursuit la mission confiée aux Augustines en 1693 par Mgr de Saint-Vallier[11].

Patrimoine[modifier | modifier le code]

Le monastère de l’Hôpital général de Québec est l’un des sites patrimoniaux les plus importants du Canada. Son église et les sections bâties par les Récollets sont parmi les plus anciennes constructions du pays[23]. Le cimetière des combattants est le seul cimetière de guerre sur le territoire canadien. L’ensemble du site ainsi que les archives et les collections de ce monastère sont classés en vertu de la Loi sur le patrimoine culturel du Québec[24]. Les archives du monastère ainsi que celles des autres monastères des Augustines du Canada sont inscrites au Registre international de la Mémoire du monde de l’UNESCO [25].

Classé site historique en 1977, l'hôpital a été habité sans interruption depuis sa fondation. On y retrouve des éléments des siècles passés, comme des cellules de Récollets, les appartements de Frontenac, des armoires de pharmacie, des biens ayant appartenu à Mgr de Saint-Vallier, ainsi que des archives et diverses œuvres d'art, comme le tabernacle de 1722 par François-Noël Levasseur, une Assomption de la Vierge, peinte en 1670, et quelques tableaux de Joseph Légaré[26].

Hommages[modifier | modifier le code]

Le parc du Moulin-de-l'Hôpital a été nommé en l'honneur du moulin de l'Hôpital, à Québec, en 1998.

Galerie[modifier | modifier le code]

Publications historiques[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Jean-Yves Bronze, Les morts de la guerre de Sept Ans au Cimetière de l’Hôpital général de Québec, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2001, 190 p.
  • Pierre-François-Xavier Charlevoix, Histoire et description générale de la Nouvelle France, avec le Journal historique d’un voyage fait par ordre du roi dans l’Amérique septentrionale, 1722. Nyon, Paris, 1744.
  • Micheline D’Allaire, L’hôpital général de Québec, 1692-1764, Montréal, Fides, 1971.
  • Captain John Knox, An Historical Journal of the Campaigns in North America, vol. II, Toronto, The Champlain Society Publications, 1914, p. 368.
  • Collectif, Québec ville militaire, 1608-2008, Montréal, Art global, 2008, p. 122 et suivantes
  • Guy-Marie Oury, Monseigneur de Saint-Vallier et ses pauvres, 1653-1727, Les Éditions La Liberté, Québec, 1993.
  • René Piacentini, Origines et évolution de l’hospitalisation, les chanoinesses augustines de la Miséricorde de Jésus, Paris, Grasset, 1957.
  • Denis Robitaille et A. Julien, Traversée du temps, Notre-Dame-des-Anges, 1620-2020, Les Augustines du monastère Saint-Augustin, Québec, 2022, 36 p.
  • Denis Robitaille, L’Hôtel-Dieu du Sacré-Cœur de Jésus de Québec au temps des Augustines, Québec, Les Augustines de l’Hôtel-Dieu du Sacré-Cœur de Jésus de Québec, 2023, 44 p.
  • S. Saint-Félix, Monseigneur de Saint-Vallier et l’Hôpital général de Québec, histoire de Notre-Dame-des-Anges, Québec, Darveau, 1882.
  • Paul Trépanier, Le patrimoine des Augustines du monastère de l’Hôpital général de Québec, Étude de l’architecture, Ville de Québec et ministère de la Culture et des Communications du Québec, 2002, 158 p.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Hôpital général de Québec, Registre du patrimoine culturel du Québec, Gouvernement du Québec, Ministère de la Culture et des Communications, 2013. Consulté le 19 décembre 2023.
  2. Voir Micheline D’Allaire, L’hôpital général de Québec, 1692-1764, Montréal, Fides, 1971, p. 3 et suivantes.
  3. Voir Guy-Marie Oury, Monseigneur de Saint-Vallier et ses pauvres, 1653-1727, Les Éditions La Liberté, Québec, 1993, p. 32 et suivantes.
  4. Micheline D’Allaire, L’hôpital général de Québec, 1692-1764, Montréal, Fides, 1971, p. 10.
  5. Voir S. Saint-Félix, Monseigneur de Saint-Vallier et l’Hôpital général de Québec, histoire de Notre-Dame-des-Anges, Québec, Darveau, 1882, p. 97 et suivantes.
  6. Annales de l’Hôtel-Dieu de Québec, 1636-1716, Québec, Hôtel-Dieu de Québec, 1984, p. 273 et 274.
  7. Micheline D’Allaire, L’hôpital général de Québec, 1692-1764, Montréal, Fides, 1971, p. 23.
  8. [1] Voir Paul Trépanier, Le patrimoine des Augustines du monastère de l’Hôpital général de Québec, Étude de l’architecture, Ville de Québec et ministère de la Culture et des Communications du Québec, 2002, 158 p. [1] Consulté le 19/12/2023
  9. Pierre-François-Xavier Charlevoix, Histoire et description générale de la Nouvelle France, avec le Journal historique d’un voyage fait par ordre du roi dans l’Amérique septentrionale, 1722. Nyon, Paris, 1744, t. III, lettre III, octobre 1720.
  10. Voir John R. Porter, L’Hôpital-Général de Québec et le soin des aliénés (1717-1845). Sessions d’étude — Société canadienne d’histoire de l’Église catholique, 44 (1977), p. 23-55.
  11. a et b Voir D. Robitaille et A. Julien, Traversée du temps, Notre-Dame-des-Anges, 1620-2020, Les Augustines du monastère Saint-Augustin, Québec, 2022, 36 p.
  12. René Piacentini, Origines et évolution de l’hospitalisation, les chanoinesses augustines de la Miséricorde de Jésus, Paris, Grasset, 1957, p. 105.
  13. Voir S. Saint-Félix, Monseigneur de Saint-Vallier et l’Hôpital général de Québec, histoire de Notre-Dame-des-Anges, Québec, Darveau, 1882, p. 327.
  14. Captain John Knox, An Historical Journal of the Campaigns in North America, vol. II, Toronto, The Champlain Society Publications, 1914, p. 368.
  15. Jean-Yves Bronze, Les morts de la guerre de Sept Ans au Cimetière de l’Hôpital général de Québec, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2001, 190 p.
  16. Collectif, Québec ville militaire, 1608-2008, Montréal, Art global, 2008, p. 122 et suivantes.
  17. Voir Occupation-du-monastère-par-les-Américains (monastere-hgq.ca).[2]
  18. Voir Paul Trépanier, Le patrimoine des Augustines du monastère de l’Hôpital général de Québec, Étude de l’architecture, Ville de Québec et ministère de la Culture et des Communications du Québec, 2002, 158 p. [3] Consulté le 19/12/2023
  19. Notre-Dame-des-Anges — Répertoire des municipalités — Ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (gouv.qc.ca).[4] Consulté le 19/12/2023
  20. Voir Denis Robitaille, L’Hôtel-Dieu du Sacré-Cœur de Jésus de Québec au temps des Augustines, Québec, Les Augustines de l’Hôtel-Dieu du Sacré-Cœur de Jésus de Québec, 2023, 44 p.
  21. Voir Augustines de la Miséricorde de Jésus de Chicoutimi — Répertoire du patrimoine culturel du Québec (gouv.qc.ca)[5] Consulté le 19/12/2023
  22. Louise-Ozina-Desroches.pdf (monastere-hgq.ca).[6] Consulté le 19/12/2023
  23. Voir Accueil — Le monastère des Augustines de l’Hôpital général de Québec (monastere-hgq.ca) [7] Consulté le 19/12/2023
  24. Hôpital général de Québec — Répertoire du patrimoine culturel du Québec (gouv.qc.ca). [8] Consulté le 19/12/2023
  25. Tifa Bourjouane, « Les archives des Augustines entrent officiellement au Patrimoine mondial de l’UNESCO »
  26. Alain Côté, « Héritage des Augustines de l'Hôpital général de Québec », Un patrimoine incontournable, Commission des biens culturels, no 1,‎ , p. 30-31.
  27. Rendez-vous d'histoire de Québec, « Objets et lieux de mémoire au Monastère de l’Hôpital général de Québec. Une visite-privilège. », sur Youtube, (consulté le )