Guerre civile syrienne
- Contrôlé par le gouvernement syrien et ses alliés
- Contrôlé par l'Armée syrienne libre
- Contrôlé par les Forces démocratiques syriennes
- Contrôlé par le gouvernement syrien et les Forces démocratiques syriennes
- Contrôlé par l'État islamique
- Contrôlé par Hayat Tahrir al-Cham
Date |
Depuis le (13 ans, 7 mois et 20 jours) |
---|---|
Lieu | Syrie |
Issue | En cours |
100 000 à 400 000 hommes[3],[4],[5],[6],[7] 100 000 hommes[8] 10 000 hommes[9] 5 000 hommes[9] Milices chiites étrangères : 20 000 à 100 000 hommes[10],[11],[12] 5 000 à 10 000 hommes[13], 5 000 à 10 000 hommes[12],[14] 4 000 hommes[15] |
150 000 hommes au total[16] 40 000 à 50 000 hommes[17] 15 000 à 20 000 hommes[18],[19] 15 000 à 20 000 hommes[20] 10 000 à 20 000 hommes[8],[21] 30 000 hommes[22] |
40 000 à 100 000[23],[24] 2 000 hommes[25] |
20 000 à 125 000 hommes[26],[27],[28],[29],[30] |
159 278 morts au moins (dont 91 929 militaires et 67 349 miliciens)[31] 1 736 morts au moins[31] Milices chiites étrangères : 8 700 morts au moins[31] 1 000 morts au moins[36] 112 à 266 morts au moins[37],[31] |
80 221 morts au moins[31] 28 110 morts au moins[31] 251 morts au moins[31],[38],[39],[40] |
14 334 morts au moins[31],[41] 6 morts[42],[43],[44] 1 mort[45] 1 mort[43] 1 mort[46] 1 mort[47] |
41 266 morts au moins[31] |
Guerre civile syrienne
Batailles
- 1re Deraa
- 2e Deraa
- Homs
- Banias
- Telkalakh
- 1re Rastane
- Talbiseh
- 1re Jisr al-Choghour
- 1re Jabal al-Zawiya
- 1er Hama
- Lattaquié
- 2e Rastane
- 1er Zabadani
- Douma
- 3e Rastane
- 2e Zabadani
- 1er Qousseir
- 1re Azaz
- 1re Idleb
- Taftanaz
- 4e Rastane
- Nobl et Zahraa
- Tremseh
- Damas
- Ghouta orientale
- Alep
- Al-Tel
- Menagh
- 1er Régiment 46
- 1re Maarat al-Nouman
- Cheikh Souleimane
- 2e Taftanaz
- 2e Hama
- 1re Al-Chaddadeh
- 1re Yaaroubiyé
- 1re Raqqa
- 2e Qousseir
- 3e Qousseir
- Ras al-Aïn
- Daraya
- Maaloula
- 2e Azaz
- Mahin et Sadad
- 2e Yaaroubiyé
- 1re Tall Hamis
- 2e Raqqa
- 1re Jarablous
- Al-Manajir
- Otaybah
- Yabroud
- Markada
- Kassab
- 1re Khan Cheikhoun
- Rankous
- 1re Boukamal
- Tall al-Jabiyah
- 1re Deir ez-Zor
- 1re Kobané
- Ras al-Maara
- 2e Deir ez-Zor
- Al-Chaer
- Division-17
- Brigade 93
- 1re Tabqa
- Djezaa
- 2e Kobané
- Mabrukah
- 3e Yaaroubiyé
- 2e Jabal al-Zawiya
- Wadi al-Deïf
- 2e Tall Hamis
- Tall Tamer
- 2e Régiment 46
- Bosra
- Cheikh Hilal
- 2e Idleb
- Foua et Kafraya
- Bousra al-Harir
- Qalamoun
- 2e Jisr al-Choghour
- 1re Palmyre
- Al-Amr
- 1re Tall Abyad
- Sourane
- 1re Hassaké
- Brigade 52
- Aïn Issa
- 2e Hassaké
- 3e Zabadani
- Sarrine
- Sahl al-Ghab
- Malkiyé
- Al-Qaryatayn
- 1re Marea
- 1re Abou Douhour
- 3e Hama
- Al-Hol
- Tichrine
- Cheikh Meskin
- 1re Tall Rifaat
- 2e Al-Chaddadeh
- Khanasser
- 2e Tall Abyad
- 2e Palmyre
- Al-Raï
- 2e Maarat al-Nouman
- 1re Tasil
- Qamichli
- 2e Tall Rifaat
- Khan Touman
- 3e Raqqa
- 2e Marea
- 1re Manbij
- 2e Tabqa
- 2e Boukamal
- 3e Hassaké
- Opération Bouclier de l'Euphrate
- 2e Jarablous
- 4e Hama
- 4e Raqqa
- 3e Palmyre
- Al-Bab
- Wadi Barada
- 4e Palmyre
- 1re Poche d'Idleb
- 2e Tasil
- 5e Hama
- al-Hamad
- 3e Tabqa
- Badiya
- al-Tanaf
- Aqareb et Maboujé
- 5e Raqqa
- 2e Poche d'Idleb
- 1re Al-Soukhna
- Ouqayribat
- 3e Deir ez-Zor
- 2e Abou Douhour
- Beït Djine
- Mayadine
- 3e Boukamal
- Afrine
- Khoucham
- 3e Poche d'Idleb
- 4e Boukamal
- 3e Deraa
- Soueïda
- Al-Safa
- 4e Poche d'Idleb
- 2e Khan Cheikhoun
- Opération Source de paix
- Baricha
- Maarat al-Nouman et Saraqeb
- 2e Al-Soukhna
- 4e Deraa
- Al-Sinaa
- 2e Afrine et al-Bab
- Opération Griffe-Épée
- 4e Deir ez-Zor
Coordonnées | 35° nord, 38° est | |||
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La guerre civile syrienne, aussi appelée révolution syrienne à ses débuts, est un conflit armé en cours depuis 2011 en Syrie. Elle débute dans le contexte du Printemps arabe par des manifestations majoritairement pacifiques en faveur de la démocratie contre le régime baasiste dirigé par le président Bachar el-Assad. Réprimé brutalement, le mouvement de contestation se transforme peu à peu en une rébellion armée.
De nombreux belligérants participent au conflit qui connaît plusieurs phases. La majeure partie des premiers groupes insurgés se structurent autour de l'Armée syrienne libre (ASL), qui est fondée en juillet 2011. L'opposition politique en exil forme quant à elle le Conseil national syrien (CNS) en septembre 2011 puis la Coalition nationale des forces de l'opposition et de la révolution (CNFOR) en . En 2012 et 2013, les rebelles s'emparent de la majeure partie du nord et de l'est de la Syrie, mais le régime de Bachar el-Assad résiste dans le sud et l'ouest du pays. L'opposition obtient des financements et des armes de la part de la Turquie, de l'Arabie saoudite, du Qatar, de la Jordanie, des États-Unis et de la France. Mais l'ASL est progressivement supplantée dans plusieurs régions par des groupes islamistes sunnites ou salafistes, comme Ahrar al-Cham ou Jaych al-Islam, ou encore par des groupes salafistes djihadistes, comme le Front al-Nosra, reconnu en 2013 comme la branche syrienne d'al-Qaïda. Le régime syrien est quant à lui soutenu indéfectiblement par l'Iran, qui lui fournit des financements pour contourner les sanctions internationales et qui dépêche dès le début du conflit des officiers du Corps des Gardiens de la révolution islamique et des dizaines de milices islamistes chiites venues du Liban, d'Irak ou d'Afghanistan, comme le Hezbollah, l'Organisation Badr ou la Division des Fatimides. En 2012, un autre acteur, le Parti de l'union démocratique (PYD), aile syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), prend avec sa branche armée, les Unités de protection du peuple (YPG), le contrôle des régions kurdes, au nord de la Syrie.
Le rapport des forces en présence est bouleversé par l'apparition en Syrie de l'organisation salafiste djihadiste État islamique en Irak et au Levant (EIIL) — rebaptisé ensuite État islamique (EI) — qui en 2014 entre en conflit contre tous les autres belligérants, s'empare de l'est de la Syrie, ainsi que du nord-ouest de l'Irak, et proclame la restauration du califat. En septembre 2014, menée par les États-Unis, une coalition internationale formée contre l'État islamique commence à mener des bombardements en Syrie et décide d'appuyer les YPG. Forts du soutien américain, les Kurdes remportent une première victoire à Kobané en janvier 2015, forment en octobre 2015 une alliance avec des groupes arabes qui prend le nom de Forces démocratiques syriennes (FDS), et lancent une campagne contre les djihadistes qui aboutit en octobre 2017 à la chute de Raqqa, la « capitale » syrienne de l'EI. La Turquie intervient également militairement en Syrie : d'abord contre l'État islamique en 2016 et 2017, avant d'attaquer les FDS en 2018 en raison de leurs liens avec le PKK.
De son côté, la Russie entre dans le conflit syrien en septembre 2015 en intervenant militairement pour soutenir le régime syrien. Cette intervention redonne l'avantage au camp loyaliste : l'armée syrienne et ses alliés remportent des victoires décisives à Alep en décembre 2016, à Homs en mai 2017, à Deir ez-Zor en novembre 2017, dans la Ghouta en mai 2018 et à Deraa en juillet 2018.
En se prolongeant dans le temps, le conflit syrien est devenu à la fois une guerre civile, une guerre confessionnelle et une guerre par procuration. Depuis , le conflit a fait autour de 500 000 morts d'après les estimations de diverses ONG. Des attaques à l'arme chimique et de nombreux massacres, crimes de guerre et crimes contre l'humanité ont été commis, principalement par le régime syrien et par l'État islamique. Le camp loyaliste syrien est responsable de la grande majorité des victimes civiles de la guerre par ses bombardements aériens massifs et par la répression exercée contre l'opposition, qualifiée de politique d'« extermination » par l'ONU : entre 70 000 et 200 000 personnes ont disparu dans les prisons du régime, au moins 17 000 d'entre elles y ont été torturées à mort et plus de 5 000 à 13 000 autres ont été exécutées par pendaison, principalement dans la prison de Saidnaya.
La moitié de la population est déplacée pendant le conflit, et cinq à six millions de Syriens ont fui le pays, soit le quart de la population.
Contexte
[modifier | modifier le code]Gouvernement el-Assad
[modifier | modifier le code]En 1946, la Syrie devient une république indépendante avec la fin du mandat français, mais la phase démocratique prend fin en avec un coup d'État soutenu par la CIA et suivi de deux autres la même année[48],[49]. À la faveur de ces évènements, le général Chichakli établit un régime parlementaire avant d'imposer son pouvoir personnel par un nouveau coup d'État en [50].
En , à l'issue d'un soulèvement populaire, les civils reprennent le pays. De 1958 à 1961, lors du rapprochement avec l'Égypte et de l’avènement de la République arabe unie, le régime parlementaire syrien est brièvement remplacé par un régime présidentiel extrêmement centralisé[51].
Après la rupture avec l'Égypte en 1961, la branche syrienne du Parti Baas (laïque nationaliste et socialiste) accède au pouvoir, en , à la suite d'un coup d'État. En , un putsch renverse Michel Aflak et Salah Eddine Bitar, les dirigeants historiques du Parti[52] et le général Hafez el-Assad, alors ministre de la Défense, engage une « révolution correctrice » qui le porte au poste de Premier ministre en . En , Assad se proclame Président — il le restera jusqu'à sa mort en 2000. De 1976 à 1982, il mate une insurrection islamique. Le Parti Baas s'installe comme l'autorité politique de référence dans un système de parti unique. Les Syriens ne peuvent qu'approuver leur Président par référendum. Jusqu'à la mise en place, en 2012, d'un système contrôlé par le régime, ils ne sont pas invités à choisir entre plusieurs partis pour élire le corps législatif[53].
Succédant à son père au décès de ce dernier, Bachar el-Assad — et son épouse Asma el-Assad, une sunnite née et élevée en Grande-Bretagne — inspirent des espoirs de réforme démocratique[54]. De à , des débats sociaux et politiques animent une nouvelle phase qualifiée de « printemps de Damas »[55].
Pendant cette période, se développent en Syrie de nombreux forums politiques et des lieux de réunion privés où les citoyens débattent de questions politiques et sociales et d'où émergent des activistes comme Riad Seïf, Haitham al-Maleh, Kamal al-Labwani, Riad al-Turk et Aref Dalila[56]. Tandis que les hypothèses réformistes issues du Parlement et les promesses de changement de Bachar el-Assad restent largement lettre morte[57], le printemps de Damas prend fin en avec l'arrestation et l'emprisonnement de dix des principaux leaders après leur appel à la désobéissance civile et à des élections démocratiques[58].
En 2003, malgré les promesses de démocratisation, les élections législatives s'effectuent toujours dans le cadre d'un régime autoritaire : les partis d'opposition ne sont pas légalisés, les deux-tiers des sièges de députés sont réservés à l'avance au Front national progressiste, les campagnes électorales des candidats indépendants ne sont pas couvertes par les médias officiels, etc[59]. En 2005, à l'occasion du dixième congrès du parti Baas, Bachar el-Assad opère un transfert des pouvoirs exécutifs du parti vers le gouvernement, autonomisant ce dernier et consolidant ainsi son autorité politique[60]. Toute l'administration est sous surveillance des 4 branches du Renseignement, un complexe sécuritaire commandé directement par Bachar el-Assad. Les moyens considérables des différents services de renseignement leur permettent d'opérer également dans d'autres secteurs comme l'économie ou les organisations de la société civile. L'état d'urgence, en vigueur jusqu'en 2011, leur donne un pouvoir étendu de coercition[61]. Sous la présidence de Bachar el-Assad, même si la durée des peines de prison diminue, le nombre d'incarcérations pour contestation politique reste élevé[62]. La censure perdure, notamment celle de la presse, informée par l'Administration de la censure des sujets non autorisés et de la façon de traiter les sujets autorisés[63]. Lors des élections de 2007, de nouvelles promesses de libéralisation politique ne sont absolument pas tenues. Bachar el-Assad reste dans la voie tracée par son père[64].
Géographie et écologie
[modifier | modifier le code]L’essentiel du territoire syrien est constitué par un vaste plateau calcaire surmonté de quelques reliefs anciens et traversé au nord-est par l'Euphrate. Le pays est bordé au nord par la Turquie, à l'est par l'Irak et au sud par la Jordanie, Israël et le Liban. Le pays possède une façade maritime ouvrant sur la Méditerranée. La majorité de la population syrienne réside dans les villes et les principales agglomérations sont situées sur la bande côtière (Tartus, Banias, Lattaquié, Jableh), dans l'ouest (Alep, Homs, Hama) et le sud du pays (Damas, Deraa). À cette géographie physique, se superposent une géographie humaine (ruraux/urbains) et une géographie ethno-religieuse (sunnites, chiites, alaouites, druzes, chrétiens, kurdes), qui rendaient déjà difficile toute représentation exacte de la situation avant la guerre civile. Le développement du conflit a compliqué la tâche des cartographes, au point que la représentation des opérations et des zones d'influence fait désormais partie d'une véritable « guerre des cartes » participant à la propagande et à la désinformation[65].
Cette configuration a conditionné la dynamique du conflit : la contestation a débuté dans les zones urbaines où étaient concentrés des griefs d'ordre économique et ethno-religieux contre le pouvoir en place. La répression s'est abattue sur les localités considérées comme rebelles, où le conflit a fait apparaître les fractures économiques, ethniques et religieuses entre centre, banlieue, périphérie et quartiers « informels ». Le conflit s'est ainsi installé au cœur des villes, où les combattants ont fait assaut de férocité pour assiéger et réduire leurs adversaires, quartier par quartier, et où les populations civiles ont payé un très lourd tribut aux violences.
Selon le géographe Fabrice Balanche, la représentation des fronts, des armées, des territoires occupés, est plus complexe dans une guerre civile que dans une guerre conventionnelle. La superposition des territoires tenus par l’insurrection et la contre-insurrection avec celle de la répartition ethnico-confessionnelle de la population fait apparaître la dimension communautaire du conflit. « À l’échelle de l’agglomération d’Alep, superposer la carte des combats à celle des quartiers informels d’une part, peuplés essentiellement de migrants ruraux, et, de l’autre, de ceux qu’habitent les citadins d’origine met en évidence une autre dimension du conflit : l’opposition ville-campagne »[65].
La rareté de la ressource en eau, les trois années de sècheresse de 2007 à 2010 et leurs conséquences humaines et environnementales ont joué un rôle dans la création de conditions propices à la guerre civile en Syrie, mais, selon M.D. King, « ce sont la discrimination systématique et la mauvaise gestion de l'eau par le régime d'Assad qui ont conduit à la conflagration totale en Syrie. En bref, le climat n'était pas le seul coupable ». Par ailleurs, pendant le conflit, l'eau a été instrumentalisée par les belligérants[66],[67],[68],[69].
Démographie
[modifier | modifier le code]Il n'existe pas de recensement officiel des confessions en Syrie et les estimations varient en fonction des sources. Un article français de 1955 brosse le portrait confessionnel et ethnique de la Syrie au seuil de son indépendance[71]. Un rapport d'un groupe interparlementaire du Sénat français datant de 2007[72] fait état de la répartition suivante :
- Sunnites 74 %
- Alaouites 10 %
- Chiites 3,5 %
- Druzes 1,5 %
- Chrétiens 10 % (chrétiens syriaques orthodoxes, chrétiens grecs-catholiques, chrétiens grecs-orthodoxes, chrétiens arméniens grégoriens et autres chrétiens).
Selon d'autres chiffres publiés en 2012[73], la répartition serait la suivante :
- Arabes sunnites 72,8 %
- Kurdes sunnites 8,3 %
- Arabes alaouites 10,2 %
- Arabes druzes 1,8 %
- Arabes chiites ismaéliens 0,9 %
- Arabes chiites duodécimains 0,4 %
- Tcherkesses sunnites 0,3 %
- Turkmènes - Turcomans sunnites 0,6 %
- Kurdophones yézidis 0,1 %
- Chrétiens 4,6 %.
Les chrétiens se répartiraient ainsi :
- Arabes de religion grecque orthodoxe : 526 000
- Arabes de religion grecque catholique: 121 000
- Arméniens apostoliques : 121 000
- Jacobites 89 000
- Maronites 29 000
- Arméniens catholiques 26 000
- Protestants 21 000
- Nestoriens 20 000
- Syriaques catholiques 18 000
- Chaldéens catholiques 14 000
- Catholiques latins 9 000.
Du point de vue religieux, la famille Assad est issue de la minorité des Alaouites, une branche du chiisme qui engloberait 10 % de la population syrienne[74]. Ses adeptes occupent de nombreux postes dans les services de sécurité syriens[75], ce qui génère du ressentiment chez les Sunnites[76] qui représentent plus de 60 % de la population syrienne. Maher el-Assad le frère cadet d'Assad commande la 4e Division blindée, un corps d'élite de l'armée syrienne. Jusqu'à sa disparition dans l'attentat du 18 juillet 2012, Assef Chaoukat, son beau-frère, était vice-ministre de la Défense.
Les Kurdes de Syrie ont également protesté contre les discriminations ethniques et la négation de leur identité culturelle et de leur langue[77],[78]. Ils constituent 8,5 à 11 % des syriens. Ils ne constituent pas une confession en soi, mais sont majoritairement sunnites. Ils sont regroupés au nord-est du pays sur la frontière turque, ainsi que dans la province d'Alep, le Jazirah et la banlieue de Damas. Cette population au fort sentiment communautaire met à profit l’affaiblissement de l'armée syrienne en pour investir plusieurs villes du Nord du pays[79]. Elle est soutenue par l'espoir, entretenu par le PKK, de la création d'un Kurdistan indépendant.
La part des chrétiens dans la population totale a fortement baissé au cours des dernières décennies, cette population émigrant beaucoup et ayant un taux de natalité faible. Le , les patriarches d'Antioche, chefs spirituels des chrétiens, lancent un appel à la paix et à un arrêt des sanctions internationales contre la Syrie[80]. Les chrétiens sont très inquiets des manifestations du vendredi et ont en mémoire leurs coreligionnaires irakiens qu'ils ont accueillis après les massacres, les quartiers mixtes seraient désertés de 80 % de leurs habitants chrétiens, notamment en décembre pour célébrer Noël[81].
Aspects socio-économiques
[modifier | modifier le code]Le mécontentement contre le régime est plus grand dans les zones les plus pauvres du pays, parmi les Sunnites conservateurs et dans les localités ayant un taux de pauvreté élevé, comme Deraa et Homs, ainsi que dans les zones rurales touchées par la sècheresse de 2001, et les quartiers les plus déshérités des grandes villes[82]. Les inégalités ont eu tendance à s'accroître après la mise en place, dans les dernières années du règne de Hafez el-Assad, de politiques favorisant le libre marché et avec leur développement après l'arrivée au pouvoir de son fils. Ces politiques, orientées vers le tertiaire, ont profité à une minorité de la population ayant des liens avec le gouvernement et aux membres des communautés sunnites marchandes de Damas et d'Alep. Selon le Programme des Nations unies pour le développement, en 2005, 30 % des Syriens vivent en dessous du seuil de pauvreté et le taux du chômage est estimé à 18 %[83]. Bachar el-Assad veut s'inspirer du modèle chinois et, en 2005, le Congrès du parti Baas annonce une politique de « transition vers une économie sociale de marché »[83],[84]. En 2008, le chômage se situe entre 20 et 25 %[84], et, dans le contexte d'une démographie croissante, les jeunes sont extrêmement touchés : ils sont 6 fois plus au chômage que les adultes[85]. La moitié de la population a moins de 20 ans[86].
Le symbole du « capitalisme des copains » mis en place par le régime est Rami Makhlouf, cousin du président Bachar el-Assad. Rami Makhlouf posséderait, directement ou indirectement, 60 % du secteur privé en Syrie. Pour les Syriens, lui et son entourage d'affairistes personnalisent la corruption endémique que leur misère ne permet plus de supporter. Au début de la révolte en 2011, la société de télécommunication SyriaTel de Rami Makhlouf, qui est exonérée de l'impôt sur les sociétés, focalise les critiques. À Deera, le siège de la compagnie est incendié[87].
D'après certains chercheurs et le département de la Défense des États-Unis, la sècheresse qui a frappé la Syrie entre 2006 et 2010 a contribué à faire éclater la révolte. 800 000 Syriens ont vu leurs revenus chuter de 90 %, leurs terres s'étant asséchées. La crise de l'eau est concomitante à la politique du gouvernement qui a dérèglementé le secteur agricole, vendu de vastes étendues de terre à l'agro-industrie, développé une agriculture d'exportation notamment avec le coton, ce qui a entraîné la salinité des terres par utilisation excessive de l'irrigation et la pollution des puits par les nitrates, etc[84],[88],[89].
Droits humains
[modifier | modifier le code]La situation des droits humains en Syrie a été, de longue date, durement critiquée par les organisations internationales[90]. Le pays a été en état d'urgence de 1963 à 2011, interdisant les rassemblements de plus de cinq personnes et conférant aux forces de sécurité des pouvoirs étendus en matière d'arrestation et de détention[91].
En , l'organisation Human Rights Watch conclut dans un rapport qu'en dépit des promesses d'une plus grande transparence et d'une démocratisation faites par Bachar el-Assad dix ans plus tôt, pratiquement rien n'a été fait pour améliorer la situation des droits humains en Syrie, notamment en ce qui concerne la liberté d'expression, la torture et le traitement de la minorité kurde[92].
À l'exception du Parti Baas, toutes les autres formations politiques ont été interdites, faisant de la Syrie un pays à parti unique sans élections démocratiques[93].
La liberté d'expression, d'association et de réunion étaient étroitement surveillées avant le soulèvement et les autorités harcelaient les défenseurs des droits de l'homme ainsi que les personnalités critiques vis-à-vis du régime et les détenaient, souvent sans procès, dans des conditions inhumaines et en ayant recours à la torture[94].
Les femmes et les minorités ont subi des discriminations dans le secteur public. Des milliers de Kurdes syriens se sont vu refuser la nationalité en 1962, et leurs descendants continuent à être considérés comme « étrangers »[95]. Depuis 2004, des émeutes récurrentes ont exacerbé les tensions dans les zones kurdes du pays. La situation a entrainé des heurts réguliers entre les manifestants kurdes et les forces de l'ordre[96],[97].
Forces en présence
[modifier | modifier le code]Camp pro-gouvernemental
[modifier | modifier le code]Régime el-Assad
[modifier | modifier le code]-
Bachar el-Assad, président de la République arabe syrienne depuis 2000.
-
Mohammed Naji al-Otari, Premier ministre de la Syrie, de 2003 à 2011.
-
Riad Hijab, Premier ministre de la Syrie, en 2012. Il rejoint ensuite l'opposition.
-
Wael al-Halki, Premier ministre de la Syrie, de 2012 à 2016.
-
Imad Khamis, Premier ministre de la Syrie, de 2016 à 2020.
-
Hussein Arnous, Premier ministre de la Syrie de 2020 à 2024.
La position du gouvernement vis-à-vis de la révolte armée est d'incriminer des « groupes armés antigouvernementaux » ou des « islamistes armés ». Après le massacre de Houla, le gouvernement accuse ainsi principalement des islamistes armés. Des « ingérences extérieures » occidentales et des infiltrations d'armes commanditées par des pays adverses, dont le Qatar et l'Arabie saoudite sunnites, sont également régulièrement évoquées. Ainsi, dans une allocution télévisée du [98], le président syrien Bachar el-Assad affirme que l'État syrien fait « face à une véritable guerre menée de l'étranger », il précise que leur but est d’« étouffer la résistance » à Israël[99].
Rappelant qu'après les attentats du 11 septembre 2001, la Syrie a été une base arrière des djihadistes étrangers comme le Français Boubaker El Hakim, le journaliste David Thomson estime fin 2016 que « le régime Assad a toujours instrumentalisé les djihadistes en sa faveur et aujourd’hui, il doit sa survie à la présence de l’État islamique. Donc en aucune manière ce régime ne peut être considéré comme la solution face au djihadisme[100]. ».
Le , après plus de trois années de guerre civile, le gouvernement de Bachar el-Assad, fort des reconquêtes militaires enregistrées au premier trimestre avec l'aide du Hezbollah, organise des élections présidentielles qualifiées de « farce » par les Syriens en exil et par les opposants de l'intérieur. Outre le président en exercice, qui se présente pour un troisième mandat (les deux premiers entérinés par des plébiscites référendaires), deux autres candidats, Maher Al-Hajar et Hassan Al-Nourri se présentent au suffrage de 5 ou 6 millions citoyens en situation de voter (sur une population de 15 millions d'électeurs, avec 3 millions de réfugiés et 6 millions de déplacés). Le scrutin serait ainsi, selon un diplomate français cité par Le Monde, « le prolongement politique de l'offensive militaire en cours, une manière de fermer la porte à tout plan de paix, une fuite en avant dans la bunkerisation du régime et la sanctuarisation de la Syrie utile. » [101]. À l'issue des élections, où aucun parti islamiste ni membre de l'opposition n'a le droit de se présenter, Bachar el-Assad est reconduit pour un troisième mandat avec 88,7 % des suffrages exprimés. La participation aurait atteint 73,4 %, selon la Cour constitutionnelle et 11,6 millions de personnes auraient participé au scrutin. Selon le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid el-Mouallem, « face au complot, le peuple a choisi de reconduire ses dirigeants pour rétablir la sécurité, lutter contre le terrorisme et reconstruire le pays ». Catherine Ashton, chef de la diplomatie européenne, qualifie l'élection d'« illégitime », tandis que le secrétaire d'État américain, John Kerry, parle de « non-élection »[102].
Défections dans le camp loyaliste
[modifier | modifier le code]Début , le général Manaf Tlass, intime de Bachar el-Assad tombé en disgrâce et fils de l'ancien ministre de la défense de Hafez el-Assad, fait défection[103] et se présente à la troisième réunion des Amis du peuple syrien qui se tient à Paris. Le , l'ambassadeur de Syrie en Irak Naouaf Fares fait également défection[104]. 18 généraux, et de nombreux officiers et soldats de l'armée syrienne ont abandonné le gouvernement et se sont réfugiés en Turquie avec leurs familles[105].
Le lundi , le Premier ministre d'origine sunnite Riad Hijab fait défection deux mois après sa nomination pour rejoindre l'opposition[106] au Qatar, tandis que la télévision d’État annonce son limogeage. Mi-, une dizaine de diplomates syriens à l'étranger ont officiellement rejoint la contestation[107]: Bassam al-Imadi (ancien ambassadeur en Suède), Nawwaf al-Cheykh Fares (ambassadeur en Irak), Lamia Hariri (chargée d’affaires à Chypre), Abdel-Latif al-Dabbagh (ambassadeur aux Émirats arabes unis), Mohammed Tahsin al-Faqir (attaché de sécurité près l’ambassade à Oman), Farouq Taha (ambassadeur en Biélorussie), Mohammed Housam Hafez (conseiller et consul en Arménie), Khaled al-Ayyoubi (chargé d’affaires au Royaume-Uni), Khaled al-Saleh (chargé d’affaires au Nigeria) et Dani Ba’aj (deuxième secrétaire à la représentation permanente auprès de l’ONU à Genève).
L'Armée arabe syrienne
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Ali Abdallah Ayyoub, chef d'état-major des Forces armées syriennes de 2012 à 2018, puis ministre de la Défense de 2018 à 2022.
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Maher al-Assad, frère du président Bachar el-Assad, général de la 4e division blindée.
Avant le soulèvement, les troupes régulières de l'armée syrienne comptaient environ 325 000 hommes, dont 220 000 dans l'Armée de terre et le reste réparti entre la marine, l'armée de l'air et la défense aérienne. À ces effectifs venaient s'ajouter 280 000 à 300 000 réservistes.
Dès le mois de , des défections sont signalées. En , l'Observatoire syrien des droits de l'homme estimait que des dizaines de milliers de soldats avaient déserté. Selon des experts occidentaux, ces défections, bien que dommageables pour le moral, n'avaient pas altéré la force de frappe de l'armée syrienne, la plupart des déserteurs étant issus de la communauté sunnite, dont les membres n'ont jamais occupé de poste de responsabilité dans le dispositif.
En , selon l'International Institute for Strategic Studies de Londres, l'effectif régulier de l'Armée de terre syrienne était tombé à 110 000, en raison des défections, des désertions et des victimes. Le gouvernement ne peut alors réellement compter que sur les contingents alaouites : les Forces spéciales, la Garde républicaine et deux divisions d'élite (3e et 4e divisions), soit 50 000 hommes au total[4]. De son côté, The Institute for the Study of War estime dans un rapport publié le , que les forces de l'armée syrienne sont passées de 325 000 hommes au début du conflit à 150 000 hommes au début de l'année 2015[108].
Dès 2013, l'armée syrienne est affaiblie par de très lourdes pertes. Les unités d'élite sont décimées et des troupes sunnites sont maintenues en garnison dans les casernes de peur qu'elles ne passent à la rébellion. Les officiers se muent en seigneurs de guerre vivant du racket et des trafics. Progressivement, l'armée syrienne est supplantée par des milices et des troupes étrangères alliées[109].
Abu ad-Duhur Al Qusayr As Suwayda Marj Ruhayyil Rasin el Aboud Sayqal Shayrat Taftanaz Tiyas Tabqa Tiyas Jirah An Nasiriyah Khalkhalah Mezze Qabr as Sitt |
Les chabiha
[modifier | modifier le code]Les chabiha sont des milices pro-gouvernementales non officielles généralement issues de la communauté alaouite. Le gouvernement les a utilisées régulièrement, au début des troubles, pour disperser les manifestations et faire régner l'ordre dans les quartiers en effervescence[110],[111],[112]. Quand les manifestations ont laissé place au conflit armé, l'opposition a commencé à nommer « shabiha » tout civil pro-Assad participant à la répression du soulèvement[113]. L'opposition a accusé les shabiha d'être à l'origine de nombreux abus commis à l'encontre des manifestants et des opposants[113] ainsi que de pillages et de déprédations[114],[115].
Les chabiha auraient été créés par Bassel al-Assad dans les années 1980 pour être utilisés par le gouvernement en période de crise[116]. On les a décrits comme « des paramilitaires alaouites de mauvaise réputation, accusés d'être les hommes de main du régime d'Assad[117] », des « mercenaires loyaux envers Assad[118] » et selon l'Arab Center for Research and Policy Studies, basé au Qatar, « des gangs à demi hors-la-loi, composés d'hommes de main proches du régime[118] ». Fin 2012, les chabiha fusionnent avec plusieurs autres milices pour former la Jaych al-Shabi, qui devient ensuite les Forces de défense nationale[8].
En , les shabiha ont été listés comme des organisations terroristes par les États-Unis[119]
Les Forces de défense nationale
[modifier | modifier le code]Formées initialement sous le nom de « Jaych al-Shabi », à la fin de l'année 2012 par la fusion de plusieurs milices, les Forces de défense nationale (FDN) rassemblent environ 100 000 hommes[120],[121]. Elles reçoivent équipements et salaires du gouvernement[122],[123], mais elles sont formées et organisées par le Corps des Gardiens de la révolution islamique[124]. La plupart de ces miliciens sont Alaouites, mais certains sont également chrétiens ou druzes[125],[122],[124].
Les milices chiites
[modifier | modifier le code]Dès l'été 2011, de nombreuses milices chiites, armées et entraînées par l'Iran, sont déployées en Syrie aux côtés des forces loyalistes. Ces combattants invoquent la protection de la mosquée de Sayyida Zeinab, près de Damas, un haut lieu de pèlerinage chiite, pour justifier leur intervention. Les milices sont présentes dès le début du conflit, mais leur nombre augmente sensiblement par la suite. En 2016 jusqu'à 50 milices chiites sont présentes en Syrie. Les groupes les plus importants sont le Hezbollah, la Brigade Abou al-Fadl al-Abbas, l'Organisation Badr, Asaïb Ahl al-Haq, le Harakat Hezbollah al-Nujaba, la Brigade des Fatimides, les Brigades de l'imam Ali et la Saraya al-Khorasani[126]. Début 2014, le nombre des combattants est estimé entre 5 000 à 10 000[127], puis entre 20 000 et 40 000 début 2016[10], entre 40 000 et 60 000 fin 2016[11], et jusqu'à un maximum de 100 000 combattants en 2018[12]. Ils sont pour la plupart Irakiens, Syriens, Iraniens, Libanais, Afghans, mais on compte aussi des Pakistanais, des Yéménites[126],[109]. Leur salaire est versé par le régime syrien[10],[127]. D'après des responsables politiques chiites et le ministre des Affaires étrangères irakien Hoshyar Zebari, les combattants en question n'ont cependant pas reçu de feu vert officiel de la part des chefs de leurs mouvements ou du gouvernement irakien, dominé par les chiites, pour aller combattre en Syrie[128],[129],[130],[131].
Le Hezbollah
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Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah de 1992 à 2024.
En 2012, le Hezbollah, milice libanaise chiite pro-iranienne considérée comme une organisation terroriste par les États-Unis, le Canada, l'Australie, les Pays-Bas et le Bahreïn, envoie des forces en Syrie pour appuyer le régime de Damas qui lui assure un important soutien logistique dans sa lutte contre Israël[132],[133],[134]. Fin , Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah, reconnaît officiellement la participation de son organisation aux combats en Syrie[135],[136]. D'après l'universitaire Thomas Pierret, « le Hezbollah cherche à protéger les points stratégiques syriens qui lui permettent d’acheminer des armes venues d’Iran »[137]. Le , Hassan Nasrallah déclare que le Hezbollah se bat en Syrie parce que Damas « a nourri et protégé la résistance libanaise ». Accusé par ses détracteurs de baisser la garde contre Israël en envoyant des combattants en Syrie, il s'est dit convaincu de la victoire finale du régime d'el-Assad et a assuré que le Hezbollah avait « toujours la capacité de dissuader Israël » et que « c’est l’une des inquiétudes de l’ennemi israélien : il regarde la Syrie et l’Iran et il voit qu’ils donnent toute l’aide qu’ils peuvent à la résistance »[138]. Avec entre 5 000 à 8 000 hommes déployés en Syrie, le Hezbollah fournit le plus gros contingent de miliciens chiites étrangers[139],[140]. Malgré les lourdes pertes subies, militairement le Hezbollah monte fortement en puissance lors de la guerre civile syrienne[141],[142].
L'opposition politique : CNS et CNFOR
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Mouaz al-Khatib, président de la CNFOR, de 2012 à 2013.
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Georges Sabra, président de la CNFOR en 2013.
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Ahmad Jarba, président de la CNFOR de 2013 à 2014.
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Hadi al-Bahra, président de la CNFOR de 2014 à 2015.
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Khaled Khoja, président de la CNFOR de 2015 à 2016.
Le Conseil national syrien est une autorité politique de transition créée le et officialisée les 1er et à Istanbul, en Turquie, pour coordonner l'opposition au régime de Bachar el-Assad, en Syrie et dans les pays tiers[143].
Composé de 400 membres et dominé par les sunnites, le CNS rassemble plus de 30 organisations d'opposants[144] dont les Frères musulmans (qui y sont majoritaires[145],[146],[147]), des libéraux mais aussi des partis kurdes et assyriens[148],[149].
Le , le CNS adhère à la Coalition nationale des forces de l'opposition et de la révolution dont il reste la principale composante[150].
La Coalition nationale des forces de l'opposition et de la révolution (ou Coalition nationale syrienne), est une autorité politique de transition créée le à Doha, au Qatar. Siégeant au Caire[151], plus large que le CNS, bien financée et largement reconnue au niveau international[152],[153],[154],[155],[156],[157],[158] la Coalition engage « les parties signataires à œuvrer pour la chute du régime, et de tous ses symboles et piliers, et pour le démantèlement de ses organes de sécurité, en poursuivant tous ceux qui ont été impliqués dans des crimes contre les Syriens ».
Denise Natali, professeur à la National Defense University, estime que la Coalition représente mieux les intérêts de ses soutiens étrangers que ceux des Syriens de l'intérieur, et ne se distingue du CNS que par une allégeance au Qatar et aux autres États du Golfe Persique plutôt qu'à la Turquie[159].
Opposition armée : Armée syrienne libre, Ahrar al-Cham, Front al-Nosra et autres groupes
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Selim Idriss, commandant en chef de l'Armée syrienne libre de 2012 à 2014 et chef de l'Armée nationale syrienne depuis 2019.
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Abdul Jabbar al-Oqaidi, chef du Conseil militaire d'Alep en 2012.
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Abd al-Qader Salah, chef du Liwa al-Tawhid.
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Hassan Aboud, chef et fondateur d'Ahrar al-Cham.
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Zahran Allouche, chef et fondateur de Jaych al-Islam.
À l'automne 2011, face à la répression, des défections se produisent dans les rangs gouvernementaux et une frange de l'armée semble se constituer en opposition armée au gouvernement. Deux groupes de soldats séditieux, l'Armée syrienne libre (créée en par le colonel Riyad Al Asaad) et le Mouvement des officiers libres, se forment[160]. Ils fusionnent en septembre 2011 sous l'égide du premier, alors que les attaques de déserteurs contre les forces gouvernementales se multiplient[161],[162],[163]. Le , l'ASL reconnaît l’autorité du Conseil national syrien (CNS)[164].
Fin , à l'instigation de la France et de la Turquie, plusieurs centaines d'officiers, déserteurs de l'armée syrienne, se réunissent à Istanbul, autour du général Mohamed Al Haj Ali, le plus gradé d'entre eux, et décident de placer l'ensemble des brigades rebelles sous son commandement. Le projet échoue en raison des dissensions entre bailleurs de fonds et de la montée en puissance des djihadistes étrangers dans le nord du pays. Alors que le clan el-Assad resserre les rangs, l'option d'un retournement des forces armées, déterminant dans la chute des régimes tunisien et égyptien, s'éloigne définitivement[165].
L'ASL ne forma cependant jamais une armée unie, elle devient progressivement un simple label dont se réclament certains groupes rebelles indépendants de fait[166]. En 2015, elle regroupait environ 70 factions, la plupart dans le sud de la Syrie, rassemblées au sein du Front du Sud[167]. Parmi les principales brigades affiliées à l'ASL figurent ; la Brigade Ahfad al-Rassoul, la Brigade al-Farouq, le Liwa al-Tawhid, les Brigades des martyrs de Syrie, le Mouvement Hazm, l'Armée de Yarmouk, Faylaq al-Rahman, Fastaqim Kama Umirt, Alwiyat Saif al-Cham, la 1re division côtière, la 101e division d'infanterie, Liwa Suqour al-Jabal, la 13e division, la 16e division d'infanterie, Liwa Shuhada al-Islam, Fursan al-Haq, la Brigade de la Tempête du Nord et la Division Sultan Mourad.
Dès 2012, les islamistes voient leurs effectifs fortement augmenter. Selon l'ONU, les rebelles issus des deux organisations liées à Al-Qaïda (Front al-Nosra et État islamique d'Irak) représentaient, en 2012, 5 % environ des insurgés, alors qu'en , « les membres de ces deux groupes et les salafistes en général sont en nombre au moins 40 % des 150 000 insurgés environ qui se battent sur l'ensemble du territoire ». « 58 % exactement des 600 factions armées les plus fortes — avec plus de 50 combattants — épousent [une] vision ultrarigoriste ou obscurantiste de l'islam »[168].
Les groupes islamistes sont divisés entre ceux relativement modérés, proches pour certains des Frères musulmans, comme le Front de l'authenticité et du développement, Faylaq al-Cham, l'Union islamique Ajnad al-Cham, le Harakat Nour al-Din al-Zenki, les Kataeb Thuwar al-Cham, Al-Fauj al-Awwal et Liwa al-Fatah[167],[169], et d'autres plus extrémistes, d'idéologie salafiste djihadiste, tels que Jaych al-Mouhajirine wal-Ansar, Jound al-Aqsa, Jound al-Cham, le Parti islamique du Turkistan, le Harakat al-Muthanna, le Harakat Cham al-Islam ou Liwa Ansar al-Khalifah[170].
Plusieurs structures de coordination et chambres d'opérations sont formées au cours du conflit. En 2012, des brigades salafistes ou proche des Frères musulmans se rassemblent au sein du Front islamique de libération syrien et du Front islamique syrien[171],[172]. Plusieurs annoncent qu'elles rejettent la Coalition nationale syrienne[173]. En , le Front islamique devient le plus important rassemblement de groupes rebelles syriens[174],[175]. De à début 2017, l'Armée de la conquête domine dans le nord-ouest de la Syrie[176].
De 2015 à 2017, Ahrar al-Cham, Jaych al-Islam et le Front al-Nosra — seuls groupes dont les effectifs dépassent les 10 000 hommes — sont les trois principales organisations militaires rebelles en Syrie[167],[170]. Le mouvement salafiste Ahrar al-Cham est le seul actif sur tous les fronts du territoire syrien[177]. Jaych al-Islam, également salafiste, est quant à lui le principal groupe rebelle dans la région de Damas[167],[8],[178]. Le Front al-Nosra est initialement une extension en Syrie de l'État islamique d'Irak. Mais en 2013, il refuse la fusion pour former l'État islamique en Irak et au Levant et est reconnu par Ayman al-Zaouahiri comme la branche syrienne d'Al-Qaïda[179]. En 2016, pour des raisons tactiques, le Front al-Nosra et Al-Qaïda se séparent d'un commun accord et le premier se rebaptise Front Fatah al-Cham[180].
En , le Front Fatah al-Cham fusionne avec plusieurs autres groupes rebelles islamistes pour former Hayat Tahrir al-Cham[181]. Face à cette alliance, les groupes rebelles non-djihadistes se restructurent sous le parrainage de la Turquie. Ahrar al-Cham se déradicalise[182] avec d'une part les défections de ses membres les plus radicaux qui rejoignent Hayat Tahrir al-Cham[183] et de l'autre le ralliement de plusieurs factions issues de l'ASL[184]. En , les factions de l'ASL actives dans la région d'al-Bab s'unissent pour former l'Armée nationale syrienne[185]. Jaych al-Islam la rallie en 2017 et 2018, après avoir été chassé de Damas. Dans la région d'Idleb, Ahrar al-Cham fusionne avec le Harakat Nour al-Din al-Zenki pour former en le Jabhat Tahrir Souriya[186]. Puis, entre mai et , les factions de l'ASL à Idleb, le Jabhat Tahrir Souriya et quelques autres groupes fusionnent pour former le Front national de libération[187],[188], lequel rallie à son tour l'Armée nationale syrienne en [189],[190]. De leur côté, quelques groupes djihadistes n'approuvant pas la rupture entre Hayat Tahrir al-Cham et al-Qaïda forment de nouvelles factions en 2018, les principales étant Tanzim Hurras ad-Din et Ansar al-Tawhid[191].
Au total, les forces de la rébellion syrienne sont estimées de 100 000 à 150 000 hommes en 2016[16],[192].
L'État islamique
[modifier | modifier le code]Né en 2006 en Irak, l'État islamique est une organisation salafiste djihadiste, dirigée par Abou Bakr al-Baghdadi, proclamé calife le . Le groupe apparaît en Syrie le sous le nom d'État islamique en Irak et au Levant et prend le nom d'État islamique lorsqu'il proclame l'instauration du califat, mais ses adversaires lui donnent le surnom de « Daech »[193].
Considéré comme moins corrompu que les autres groupes djihadistes[Par qui ?], l'EIIL est aussi le plus extrémiste, il est craint pour sa violence, son intransigeance et son indifférence aux notions de droits humains[194]. Très impliqué sur les réseaux sociaux, il attire un grand nombre de djihadistes étrangers venus de tout le Monde musulman et même d'Occident[195].
Cependant, sa radicalité et ses ambitions lui attirent rapidement l'hostilité des autres groupes rebelles. En janvier 2014, le Front islamique, l'Armée syrienne libre et le Front al-Nosra et plusieurs autres groupes rebelles lui déclarent la guerre[196].
En 2013 et 2014, les effectifs en Syrie de État islamique sont estimés de 5 000 à 13 000 hommes[197],[198]. Ils augmentent sensiblement à la suite de la proclamation du califat. En 2015, les estimations vont de 20 000 à 80 000 combattants, tant en Syrie qu'en Irak et sans compter le ralliement de nombreux groupes djihadistes à travers tout le monde musulman[199].
Les Kurdes du PYD
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Salih Muslim, coprésident du PYD de 2010 à 2017.
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Asya Abdullah, coprésidente du PYD de 2010 à 2017.
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Mazloum Abdi, commandant en chef des Forces démocratiques syriennes.
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Rojda Felat, commandante au sein des YPG, YPJ et FDS.
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Rêdûr Xelîl, porte-parole des YPG.
Historiquement discriminées par le régime et ancrées à une solide identité culturelle[77], les populations kurdes de Syrie occupent, le long de la frontière turque, trois enclaves séparées qui constituent le prolongement naturel des territoires kurdes de Turquie et d’Irak[200]. Au début du conflit kurde en Turquie, la Syrie sert déjà de base arrière au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) ; de 1979 à la fin des années 1990, tout en réprimant les autres organisations kurdes, le régime laisse le PKK installer son état-major sur son territoire[201]. Cependant, en 1998, Damas se rapproche d'Ankara ; Abdullah Öcalan est expulsé et des centaines de militants sont arrêtés[201]. En 2003, une branche syrienne du PKK, le Parti de l'union démocratique (PYD), est formée[201]. En 2004, parti de Qamichli, un mouvement de protestation de Kurdes réclamant leurs droits civiques est réprimé par le régime, avec plusieurs dizaines de morts[201].
En juillet 2012, le PYD profite des désordres de la guerre civile pour prendre le contrôle du « Kurdistan syrien », appelé le Rojava[202]. Depuis le , ce dernier dispose d'une administration autonome, qui gère les questions « politiques, militaires, économiques et de sécurité dans la région et en Syrie »[203]. Le PYD forme sa branche armée, les Unités de protection du peuple (YPG), dont les effectifs sont estimés entre 35 000 et 65 000 combattants, avec environ 40 % de femmes[204] regroupées au sein des YPJ. Jouant leur propre carte, les Kurdes du PYD concluent parfois des alliances ponctuelles et opportunistes, tantôt avec les forces loyalistes, tantôt avec les rebelles[205]. Hostiles au régime de Bachar el-Assad, ils affrontent cependant rarement les forces loyalistes avec lesquelles ils cohabitent dans certaines villes[206],[207]. Ils combattent aussi à plusieurs reprises contre des groupes de l'Armée syrienne libre soutenus par la Turquie, tout en étant les alliés d'autres factions de l'ASL, notamment celles rassemblées au sein de Jaych al-Thuwar. Les YPG livrent l'essentiel de leurs combats contre les forces djihadistes, et principalement contre l'État islamique[208],[207]. Considérés comme une organisation terroriste par la Turquie, les YPG parviennent cependant à s'allier au cours du conflit à la fois avec les États-Unis et avec la Russie[209],[210],[211].
En , les Kurdes des YPG forment avec d'autres factions une vaste alliance qui prend le nom de Forces démocratiques syriennes[212],[2]. Elle rassemble des groupes arabes affiliés à l'Armée syrienne libre, ainsi que la milice tribale Jaych al-Sanadid, les chrétiens syriaques du MFS, et des volontaires anarchistes et marxistes-léninistes, venus principalement de Turquie et d'Europe et réunis au sein du Bataillon international de libération[212],[2]. Cependant, les YPG et les diverses organisations affiliées au PYD demeurent la force dominante de cette coalition[212],[2].
Acteurs internationaux
[modifier | modifier le code]Rôle de l'Iran
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Ali Khamenei, guide suprême de la révolution islamique depuis 1989.
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Mahmoud Ahmadinejad, président de la république islamique d'Iran de 2005 à 2013.
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Hassan Rohani, président de la république islamique d'Iran de 2013 à 2021.
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Qasem Soleimani, général et commandant en chef de la Force Al-Qods de 1997 à son assassinat en 2020.
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Ebrahim Raïssi, président de la république islamique d'Iran de 2021 à sa mort en 2024.
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Ismael Qaani, général et commandant de la Force Al-Qods depuis 2020.
En 1979, après la Révolution iranienne, la Syrie a été le premier pays arabe à reconnaître la république islamique d'Iran[126]. Depuis les deux pays sont étroitement alliés, une alliance qui est également favorisée par l'appartenance de la famille el-Assad au groupe ethnique et religieux des Alaouites, apparenté aux chiites[126]. Lors de la guerre Iran-Irak, la Syrie est aussi le seul pays arabe à soutenir Téhéran contre son rival baasiste[126],[213],[214]. Au cours de cette période, la Mosquée de Sayyida Zeinab, près de Damas, devient un haut lieu de pèlerinage pour les chiites[126],[213]. Après la mort de Hafez el-Assad et la montée au pouvoir de Bachar el-Assad, l'influence de l'Iran s'accroît en Syrie, au point de devenir plus un parrain qu'un allié[126],[215],[216],[217].
Au début de la crise, la diplomatie iranienne en Syrie apparaît ambigüe en raison des tensions entre le président iranien Mahmoud Ahmadinejad et le guide suprême, Ali Khamenei, soutenu par le Corps des Gardiens de la révolution islamique[218],[213]. Ahmadinejad applaudit la révolution tunisienne et la révolution égyptienne qui renversent des régimes alliés aux Américains et aux Israéliens[218],[213]. Pour la Syrie, il reprend dans un premier temps les déclarations de Bachar el-Assad qui dénonce les manifestations pacifiques comme un « complot international », mais il appelle ensuite au dialogue et désapprouve la répression militaire[218],[213],[219]. Cependant, le dossier syrien reste aux mains du guide suprême Ali Khamenei et des Gardiens de la révolution islamique qui soutiennent le régime dès le début de la crise et mettent un coup d'arrêt à la tentative d'ouverture d'Ahmadinejad[126],[213]. L'Iran ne tient pas à perdre un allié stratégique et la possibilité de l'arrivée en Syrie d'un pouvoir favorable à l'Arabie saoudite est pour lui une véritable hantise[126],[213],[217].
L'Iran participe militairement au conflit syrien[220],[221],[222],[223],[224]. Des éléments du Corps des Gardiens de la révolution islamique sont déployés en Syrie dès 2011 et participent à la répression des manifestations[126]. Leur nombre est inconnu, initialement des conseillers militaires sont envoyés mais des tireurs d'élite sont également signalés en [126]. En , le général Esmaïl Ghani, commandant en second de la Force Al-Qods, reconnaît officiellement la présence en Syrie des forces spéciales du Corps des Gardiens de la révolution[225]. L'engagement de l'Iran augmente significativement en 2014 et 2015. En 2015, des unités entières du Corps des Gardiens de la révolution islamique sont déployées en Syrie, suivies début 2016 pour la première fois par des unités de l'armée régulière iranienne[109]. Le nombre des Gardiens de la révolution islamique déployés en Syrie est estimé entre 5 000 et 10 000[12],[14]. L'ingérence iranienne est cependant très mal vue par une partie des généraux de l'armée syrienne : en 2015, le lieutenant-général Rustum Ghazaleh, chef de la sécurité politique du régime, est battu à mort après avoir dénoncé l'emprise croissante de la hiérarchie militaire iranienne[126].
L'Iran parraine également de nombreuses milices chiites au Moyen-Orient, telles que le Hezbollah au Liban ou l'Organisation Badr depuis la guerre Iran-Irak[126],[217]. À partir de 2013, le nombre des milices chiites irakiennes déployées en Syrie augmente[126]. Les principales milices syriennes, les Forces de défense nationale, sont également entraînées par les Gardiens de la Révolution[126].
Par ailleurs, l'Iran fournit au gouvernement syrien une aide financière annuelle pour contourner les sanctions internationales, entre un et quinze milliards de dollars selon les estimations[126],[226].
En , le général iranien Qasem Soleimani effectue une visite à Moscou alors que les rebelles progressent vers la côte. D'après l'agence Reuters, ce déplacement, précédé par des contacts à haut niveau entre Russes et Iraniens, est la première étape préparant l'intervention militaire de la Russie en Syrie[227].
Rôle de la Russie
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Dmitri Medvedev, président de la Russie de 2008 à 2012, puis président du gouvernement russe de 2012 à 2020.
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Vladimir Poutine, président du gouvernement russe de 2008 à 2012, puis président de la Russie depuis 2012.
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Sergueï Lavrov, ministre des Affaires étrangères depuis 2004.
L'alliance entre la Russie et la Syrie remonte au temps de la guerre froide[228]. Leur relation débute au milieu des années 1950 et se renforce à partir de 1970[228]. En 1980, Damas et Moscou signent un traité d'amitié, à une période pourtant où Hafez el-Assad écarte l'aile gauche socialiste pure et dure du Parti Baas et réprime les communistes dissidents et les nassériens[228]. Entre 1982 et 1986, l'Union soviétique livre à la Syrie plus de mille chars, 200 avions de chasse et des centaines de pièces d'artillerie, ce qui au moment de la guerre civile, constitue encore l'arsenal de base du régime[228]. À ces éléments vétustes, s'ajoutent cependant par la suite des armes plus modernes, comme des missiles sol-sol SS-21[228]. Les relations entre Moscou et Damas se tendent toutefois quelque peu sous la présidence de Mikhaïl Gorbatchev, Hafez el-Assad se rapproche même alors des États-Unis et de l'Europe[228]. Ils renouent au début des années 2000 après l'arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine et le début de la guerre d'Irak[228]. Lorsque la guerre civile éclate, les deux pays sont très proches : des milliers d'officiers de l'armée syrienne ont été formés dans les académies militaires soviétiques et russes, sans compter des dizaines de milliers de mariages mixtes, en particulier parmi les Syriens de minorité grecque orthodoxe[228].
La Russie s'oppose à toute résolution ou sanction contre la Syrie[229],[230] ; entre le début du conflit et début 2018, elle place son veto au Conseil de sécurité de l'ONU à onze reprises[231],[232]. Elle appuie le régime syrien pour plusieurs raisons : pour des raisons stratégiques (elle tient à conserver son unique base navale méditerranéenne à Tartous, qui accueille en permanence des navires de la flotte militaire russe)[228],[233],[234],[235],[236] ; pour des raisons intérieures (craintes de voir le Printemps arabe faire tache d'huile en Russie[235],[236]) ; pour des raisons de principes (la Russie est traditionnellement opposée à tout droit d'ingérence, sa ligne est de s'opposer à toute intervention militaire étrangère qui viserait à renverser un régime au pouvoir, même pour des raisons humanitaires)[228],[235],[236] ; ou encore pour des raisons d'intérêts (la Russie est notamment le premier fournisseur d'armes de la Syrie, 75 % des armes syriennes viennent de Russie)[228]. Les Russes redoutent plus globalement une perte de débouchés commerciaux en Syrie, ce pays étant en 2011 leur quatrième marché le plus lucratif avec 700 millions de dollars de vente[228],[237]. En 2012, Moscou prétend néanmoins ne livrer que des armes de défense antiaérienne à la Syrie, affirmant même qu'elle ne conclurait plus de nouveaux contrats d'armement avec la Syrie avant la stabilisation de la situation[238]. La Russie compte également la plus importante minorité musulmane d'Europe et tient à contrer l'influence du djihadisme[228]. Marquée par les guerres en Tchétchénie et plusieurs attentats, elle redoute une montée islamiste liée à la formation d’un front panislamique qui s’étendrait du Caucase aux frontières orientales de la Communauté des États indépendants et de l'Asie centrale, ainsi qu'un affaiblissement de l'Iran dans l'équilibre géopolitique du Moyen-Orient[228],[237]. Elle cherche aussi à s'afficher comme un protecteur des chrétiens orthodoxes d'orient et comme un allié fiable qui ne lâche pas ses partenaires[228],[237]. De plus, elle conçoit ses opérations militaires en Syrie comme un bon entraînement pour ses troupes aérospatiales[239],[240] et un moyen de tester[241] et valoriser[242] l'armement moderne russe dans les conditions réelles de combat. Enfin, la Russie tient à redevenir une puissance mondiale, à l'égal des États-Unis[228],[243].
Fin 2011, alors qu'une demande d'intervention de la Turquie par des réfugiés syriens se fait de plus en plus pressante, la Russie prévoit en retour de déployer une importante flotte militaire dans les eaux territoriales syriennes pour empêcher une éventuelle attaque de l'OTAN[244],[245]. Le , Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères annonce que la Russie est prête à soutenir une déclaration du Conseil de sécurité de l'ONU appuyant la mission en Syrie de Kofi Annan sous condition que celle-ci « ne constitue pas un ultimatum »[246]. Le , son vice-ministre Guennadi Gatilov affirme n'avoir « jamais dit ou posé comme condition qu'Assad devait nécessairement rester au pouvoir à la fin du processus politique », ce qui constitue un premier signe de changement de position de la Russie, devant la répétition de massacres. Sur le plan financier, la Russie a envoyé des tonnes de billets de banque à la Syrie. L'impression de la monnaie syrienne était initialement dévolue à une banque autrichienne, mais elle fut stoppée à cause des sanctions occidentales[247]. Par ailleurs, des conseillers militaires russes sont présents en Syrie dès 2012[248].
À l'été 2015, la Russie intensifie son aide au régime syrien, notamment par la livraison de blindés et d'avions (des Su-24, Su-25, ainsi que des avions de reconnaissance[249],[250]), et renforce les garnisons russes à Lattaquié et Tartous[251],[252]. La base aérienne de Hmeimim, adjacente à l'aéroport international de Lattaquié, est agrandie et des dizaines d'avions de chasse, des chars et des missiles antiaériens SA-22 y sont déployés[228]. À partir du , l'intervention militaire de la Russie prend la forme d'une intense campagne de bombardements en soutien aux forces de Bachar el-Assad. Les forces déployées sont relativement modestes — 4 000 à 5 000 hommes des forces armées russes, 1 000 à 4 000 mercenaires du Groupe Wagner, et 50 à 70 aéronefs — mais suffisantes pour refaire pencher la balance en faveur du régime syrien[253],[254],[255],[256]. Des Kadyrovtsy ont également été envoyés à Alep fin 2016[257],[258],[259]. Selon le ministère russe de la Défense, 63 000 militaires russes ont combattu en Syrie entre et [260]. En 2016, le coût de son engagement en Syrie représente pour la Russie entre 3 et 4 millions de dollars par jour pour environ 11,5 millions de dollars par jour pour les États-Unis[261]. Finalement, l'intervention militaire russe en Syrie aura été décisive pour le maintien au pouvoir du dictateur Bachar el-Assad[262].
Rôle de la Turquie
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Abdullah Gül, président de la Turquie de 2007 à 2014.
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Recep Tayyip Erdoğan, premier ministre de la Turquie de 2003 à 2014, puis président de la Turquie depuis 2014.
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Ahmet Davutoğlu, ministre des Affaires étrangères de 2009 à 2014 et premier ministre de la Turquie de 2014 à 2016.
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Binali Yıldırım, premier ministre de la Turquie de 2016 à 2018.
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Mevlüt Çavuşoğlu, ministre des Affaires étrangères de 2014 à 2023.
En 2011, la Turquie aspire à jouer un rôle de médiateur entre les différents pays du Moyen-Orient et elle entretient de très bonnes relations avec la Syrie depuis la fin des années 1990[263],[264],[265]. Lorsque la révolution syrienne débute, elle tente de convaincre Bachar el-Assad d'éviter de recourir à la force contre les manifestants et de négocier une issue pacifique, mais elle n'est pas entendue et les relations se tendent[263],[265],[266]. La crise perdure et les pertes financières sont considérables pour Ankara, qui a de très gros intérêts économiques en Syrie[263],[265]. À l'été 2011, la Turquie rompt définitivement avec le régime syrien, en croyant à tort sa chute imminente, et apporte son soutien à la rébellion[263]. Le Conseil national syrien est lancé en octobre à Istanbul et le premier camp de l'Armée syrienne libre est installé en décembre[263]. Bien que l'AKP, au pouvoir, soit proche des Frères musulmans, la Turquie soutient l'ensemble de l'opposition, à laquelle elle fournit des armes, mais elle se montre aussi assez complaisante avec les groupes djihadistes[263],[267]. Les rebelles modérés comme les djihadistes franchissent librement les frontières et leurs blessés sont soignés dans les hôpitaux turcs[268]. Jusqu'au printemps 2015, la Turquie se montre également peu hostile à l'État islamique, dont elle est le principal acheteur de pétrole et de coton par l'intermédiaire d'un réseau de trafiquants et de contrebandiers[263]. L'opposition turque accuse alors le gouvernement de soutenir les djihadistes[269],[268]. Face aux pressions, Ankara inscrit en l'État islamique et le Front al-Nosra dans la liste des organisations terroristes[268]. Cependant, la Turquie hésite à prendre des mesures offensives contre l'EI à cause de l'enlèvement de 80 otages turcs à Mossoul en et par crainte d'une attaque contre le tombeau de Suleiman Chah[268],[265].
Le gouvernement turc considère comme menace principale la formation d'un Kurdistan syrien autonome tenu par le PYD et sa branche armée les YPG, liés au PKK[263]. Il voit d'un très mauvais œil l'alliance formée en 2014 entre les YPG et la coalition internationale menée par les États-Unis, coalition qu'elle intègre pourtant[263],[270]. En Turquie, un cessez-le-feu est conclu avec le PKK en 2013, mais le conflit kurde reprend à l'été 2015[271]. À la même période, la Turquie mène ses premiers bombardements contre l'État islamique mais elle est aussi frappée par plusieurs attentats, aussi bien de la part des djihadistes de l'EI que des rebelles kurdes.
La Turquie, qui de 2011 à 2016 accueille plus de deux millions de réfugiés syriens, réclame également à de nombreuses reprises la mise en place d'une zone tampon et d'une zone d'exclusion aérienne au nord de la Syrie, mais elle se heurte à l'opposition des Américains[263],[272].
Au terme des quatre premières années de conflit syrien, le bilan de la diplomatie turque est désastreux[263],[267],[265] : la Turquie s'est brouillée avec le monde arabe ; avec les Occidentaux, par son hostilité aux Kurdes des YPG et sa complaisance envers les djihadistes[263],[270],[267] ; avec la Russie, après l'attaque aérienne du 24 novembre 2015 ; avec l'Égypte après la chute de Mohamed Morsi en 2013[267] ; avec Israël depuis 2009[263] ; tandis que les relations avec l'Arabie saoudite sont également plutôt fraîches[263],[267]. Le Qatar, avec lequel la Turquie signe un accord de défense le , fait exception[263]. Mais sur le plan énergétique, la Turquie dépend beaucoup de la Russie et de l'Iran et n'est pas en mesure de s'opposer à leur politique en Syrie[263]. En , le gouvernement échappe à une tentative de coup d'État menée par une partie de l'armée[273]. À l'été 2016, la Turquie change alors de cap[265] : elle normalise ses relations avec Israël[274], elle se réconcilie avec la Russie[275],[276],[277], elle s'engage à coopérer avec l'Iran[278] et admet pour la première fois que Bachar el-Assad est « acteur qu'il faut reconnaître en Syrie ». Le premier ministre Binali Yıldırım déclare le : « Il est possible de parler avec Assad pour évoquer la transition en Syrie... Mais pour la Turquie il n'en est pas question. »[279],[277]. Pour autant, le président Recep Tayyip Erdoğan réaffirme le sa totale opposition à un maintien au pouvoir de Bachar el-Assad, qu'il qualifie de « terroriste »[280].
Fin , l'armée turque lance l'Opération Bouclier de l'Euphrate et intervient directement au Nord de la Syrie pour chasser l'État islamique de sa frontière et empêcher le PYD d'établir une continuité territoriale entre les différents cantons de la région fédérale du Rojava, proclamée le [281],[282],[283],[277],[284]. De facto, la Turquie parvient également à établir une zone tampon à partir de sa frontière[284],[285],[286]. Cette opération militaire s'achève officiellement le [287]. Cependant l'armée turque reste présente en Syrie. À partir de 2017, toutes les forces de l'Armée syrienne libre dans le nord de la Syrie et divers autres groupes se fondent dans l'Armée nationale syrienne, qui devient une force supplétive de l'armée turque[288]. En , des troupes turques entent dans le gouvernorat d'Idleb où elles installent des postes d'observation en zone rebelle afin de veiller aux accords de cessez-le-feu[289]. Ankara tourne ensuite ses forces contre le PYD et lance une offensive à Afrine au début de l'année 2018, baptisée l'Opération Rameau d'olivier[290]. Elle mène ensuite l'Opération Source de paix en octobre 2019 dans le nord-est de la Syrie[291]. De fait, les régions conquises passent sous occupation turque[292].
En août 2022, la Turquie appelle à une « réconciliation » entre le régime de Damas et l'opposition, ce qui provoque des manifestations de protestations dans les régions contrôlées par les rebelles[293],[294]. Elle amorce alors un rapprochement avec le régime d'Assad[295].
Rôle des États-Unis
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Barack Obama, président des États-Unis de 2009 à 2017.
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Hillary Clinton, secrétaire d'État des États-Unis de 2009 à 2013.
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John Kerry, secrétaire d'État des États-Unis de 2013 à 2017.
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Donald Trump, président des États-Unis de 2017 à 2021.
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Rex Tillerson, secrétaire d'État des États-Unis de 2017 à 2018.
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Mike Pompeo, secrétaire d'État des États-Unis de 2018 à 2021.
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Joe Biden, président des États-Unis depuis 2021.
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Antony Blinken, secrétaire d'État des États-Unis depuis 2021.
Au cours des décennies qui ont précédé la guerre civile syrienne, les relations ont été agitées entre le gouvernement de Damas et les États-Unis, les phases de tensions alternant avec les phases de détente[296]. La rupture initiale a lieu lors des années 1960 avec le rapprochement de la Syrie vers l'Union soviétique, la montée au pouvoir du parti Baas et la guerre des Six Jours[296]. Après la Résolution 242 du Conseil de sécurité des Nations unies, Damas rompt ses relations diplomatiques avec Washington[296]. Elles sont rétablies en 1974, mais la guerre du Liban provoque de nouvelles tensions[296],[297], avant une nouvelle détente lors de la signature de l'accord de Taëf en 1989 et la participation de la Syrie à la guerre du Golfe au sein de la coalition en 1991[296]. Mais la situation s'aggrave à nouveau sous l'administration Bush, en 2003 Bachar el-Assad s'oppose à la guerre d'Irak et est alors le seul allié de Saddam Hussein[296],[297]. Craignant d'être la nouvelle cible des néo-conservateurs, le régime de Damas entretient la guérilla en Irak ; il favorise le passage de combattants étrangers à sa frontière qui rejoignent des groupes djihadistes et notamment Al-Qaïda en Irak, puis l'État islamique d'Irak et accorde l'asile à de nombreux baasistes irakiens[296],[298],[297]. Lorsque Barack Obama accède la Maison blanche en 2009, le dialogue reprend entre Damas et Washington[296].
Les États-Unis se montrent passifs au début de la révolution syrienne en 2011[296]. Cinq semaines après le début des manifestations en Syrie Barack Obama appelle à la fin de la répression, puis il réclame le départ de Bachar el-Assad en [296]. Mais il tient à désengager les États-Unis d'Afghanistan et d'Irak et n'a pas l'intention de mener d'autres interventions militaires[296],[299]. En , l'armée américaine se retire d'Irak.
En 2012, les Américains commencent à fournir des renseignements à l'Armée syrienne libre, mais refusent de lui livrer des armes[296]. En 2013, des combattants de groupes rebelles non islamistes commencent à être entraînés en Jordanie par les Américains, les Français et les Britanniques, en avril les États-Unis s'engagent à porter à 250 millions de dollars leur assistance « non létale » à la rébellion[296]. C'est en , après avoir acquis la certitude que le régime syrien a employé des armes chimiques, que les États-Unis décident de fournir des armes aux rebelles[296]. Le , la présidence américaine annonce qu'elle va apporter un « soutien militaire » aux rebelles[300]. En septembre, les brigades de l'ASL dans le sud de la Syrie reçoivent leurs premiers armements, les Américains livrent des armes légères et antichar mais refusent de fournir des missiles sol-air[296]. Début 2014, des missiles antichar BGM-71 TOW commencent à être livrés aux groupes modérés ou liés à l'ASL[301].
Mais les États-Unis sont aussi grandement préoccupés par la question des armes chimiques syriennes et craignent qu'elles ne tombent entre les mains d'Al-Qaïda ou du Hezbollah, aussi acceptent-ils la proposition russe de démantèlement de l'arsenal chimique syrien, alors qu'ils semblaient prêts à lancer une campagne de frappes aériennes après le massacre de la Ghouta[296]. C'est finalement contre l'État islamique, à partir du , que les États-Unis engagent une campagne de frappes aériennes, après avoir formé une coalition internationale[296]. Celle-ci intervient surtout en soutien aux Kurdes des YPG et renverse la balance en leur faveur au nord de la Syrie[296]. En , Barack Obama autorise le déploiement de forces spéciales en Syrie[302].
En 2015, les États-Unis débloquent 500 millions de dollars et concluent un accord avec la Turquie pour former un corps de 15 000 rebelles modérés afin de combattre l'État islamique, nombre ensuite réduit à 5 000. Le programme est un véritable fiasco, en juillet et seulement 120 hommes entrent en Syrie : le premier groupe est aussitôt attaqué par le Front al-Nosra qui fait plusieurs prisonniers, le second remet une partie de ses armes aux djihadistes pour obtenir un droit de passage. Les combattants de cette « Nouvelle force syrienne » désertent ou font défection et à la mi-septembre, le général Lloyd Austin, chef de l'United States Central Command, reconnait que seulement « 4 ou 5 » rebelles formés et équipés par les forces américaines combattent l'État islamique sur le terrain[303],[304],[305],[306].
La position américaine vis-à-vis de Bachar el-Assad et les déclarations de ses responsables sont parfois confuses et contradictoires, notamment sur la question de négocier ou non avec le régime syrien[296]. Selon le journaliste américain Doyle McManus : « l'administration Obama a une politique mais pas de stratégie »[296]. Jusqu'à la fin de son mandat, Barack Obama reste en retrait sur dossier syrien et dans l'ensemble du Moyen-Orient, laissant ainsi le champ libre à l'Iran et à la Russie[299],[307],[308],[309],[310],[311].
Arrivée au pouvoir en 2017, l'administration Trump ne rompt pas dans les premiers mois avec la politique de l'administration Obama[312],[313],[311]. Elle annonce cependant que le départ de Bachar el-Assad n'est plus pour elle une priorité[314],[315], elle se montre plus proche de la Russie[316], mais affiche ouvertement son hostilité envers l'Iran[312]. Elle continue d'appuyer les Kurdes des YPG malgré les protestations de la Turquie[317],[318],[311] et ravive son alliance avec l'Arabie saoudite[319],[320],[321],[322]. Mais l'attaque chimique de Khan Cheikhoun, le , bouleverse la position américaine : pour la première fois les États-Unis ripostent contre le régime syrien en détruisant une de ses bases aériennes dans la nuit du 6 au [323],[324]. Après cet évènement, les États-Unis déclarent qu'il ne peut y avoir de solution politique avec Bachar el-Assad à la tête du régime[325],[326]. Le , après plusieurs mois de sollicitations, le gouvernement américain autorise son armée à fournir des armes aux YPG, malgré l'opposition de la Turquie[327],[328]. En revanche, en , il met fin au programme de la CIA d'aide aux rebelles, qui mis en place quatre ans plus tôt, fournissait à ces derniers armes et entraînement[329],[330],[331],[332]. Pour apaiser la Turquie, les États-Unis annoncent également suspendre la livraison d'armes aux YPG vers fin 2017 ou début 2018[333],[334]. Mais les livraisons d'armes aux Forces démocratiques syriennes se poursuivent[335].
Fin 2017, l'État islamique subit plusieurs défaites et perd la grande majorité de son territoire ; le secrétaire d'État Rex Tillerson annonce cependant en que l'armée américaine va rester en Syrie avec l'objectif d'empêcher les djihadistes de réémerger, de contrer l'influence de l'Iran et de s'opposer au régime de Bachar el-Assad[336],[337],[338]. En , au moins 2 000 soldats américains sont présents en Syrie aux côtés des Forces démocratiques syriennes[25]. À partir de , Donald Trump annonce son intention de retirer les troupes américaines du territoire syrien[339]. En octobre 2019, contre l'avis de son administration, il laisse la Turquie mener une opération militaire contre les FDS dans le nord de la Syrie[340] et fait retirer ses troupes de toutes les bases militaires du gouvernorat d'Alep et du gouvernorat de Raqqa qui sont ensuite occupées par les forces russes et syriennes loyalistes[341],[342],[343],[344]. Fin 2019, les États-Unis ne maintiennent plus que quelques centaines d'hommes dans le gouvernorat de Deir ez-Zor, le gouvernorat d'Hassaké et la région d'al-Tanaf[341],[345].
En , les États-Unis adoptent la loi « César », qui impose de lourdes sanctions économiques à la Syrie, en visant notamment les États et les entreprises tierces qui commercent avec les autorités syriennes[346].
En novembre 2020, Joe Biden est élu président des États-Unis. Vice-président de Barack Obama entre 2009 et 2017, il s'était alors opposé au projet de frappes aériennes contre le régime syrien après le massacre de la Ghouta et s'était montré réticent sur le fait d'armer et d'entraîner des groupes rebelles[347]. En 2019, il est favorable à un maintien de l'alliance avec les Forces démocratiques syriennes et accuse Donald Trump de « trahison » envers les Kurdes après le lancement par l'armée turque de l'Opération Source de paix[347].
Le 10 août 2022, le président des États-Unis Joe Biden déclare que le gouvernement des États-Unis sait qu'un journaliste américain, Austin Tice, est détenu par le régime syrien depuis août 2012. Joe Biden déclare que son administration aurait demandé au gouvernement syrien maintes fois de coopérer afin de rapatrier le journaliste chez lui[348],[349]. Un hashtag, #Freeaustintice, a été créé en signe de support à la libération du journaliste. Le 17 août 2022, le ministère des affaires étrangères syrien déclare qu'aucun citoyen américain n'est détenu dans son territoire, répondant ainsi, aussi, au sujet de Majd Kamalmaz, psychologue américain virginien disparu en Syrie en 2017[350], que les renseignements américains estiment morts en 2024[351].
Rôle de l'Arabie saoudite
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Abdallah ben Abdelaziz Al Saoud, roi d'Arabie saoudite de 2005 à sa mort en 2015.
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Salmane ben Abdelaziz Al Saoud, roi d'Arabie saoudite depuis 2015.
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Mohammed ben Nayef Al Saoud, prince héritier et vice-Premier ministre Premier ministre de 2015 à 2017 et ministre de l'Intérieur de 2012 à 2017.
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Mohammed ben Salmane Al Saoud, prince héritier depuis 2017 et Premier ministre depuis 2022.
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Saoud ben Fayçal ben Abdelaziz Al Saoud, ministre des Affaires étrangères de 1975 à 2015.
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Adel al-Joubeir, ministre des Affaires étrangères de 2015 à 2018.
Au début de l'année 2011, le pouvoir en Arabie saoudite est hostile au printemps arabe[352]. En février et mars, son armée réprime notamment le soulèvement bahreïni[352]. Consciente de sa fragilité, la monarchie saoudienne redoute d'être atteinte par le vent de révolte qui secoue le monde arabe, ce qui la pousse à soutenir la stabilité des régimes en place, et donc, dans un premier temps, à soutenir le régime de Bachar el-Assad[352],[353]. Mais elle fait volte-face à l'automne 2011 pour appuyer les rebelles syriens, en choisissant désormais de privilégier l'opportunité de renverser un allié de l'Iran, son principal rival dans la région[352],[354],[353].
Le royaume s'appuie sur les conservateurs, les officiers déserteurs, les tribus et les libéraux[355],[356], il soutient les groupes armés modérés et séculiers liés à l'Armée syrienne libre, mais s'oppose aux Frères musulmans[354],[356],[352],[357],[358],[359],[353]. Cependant, des milliers de Saoudiens partent combattre en Syrie et de nombreux groupes insurgés de toute tendances, dont des djihadistes, bénéficient de soutiens financiers venus d'acteurs privés, d'associations, de comités, de personnalités politiques ou d'hommes d'affaires, parfois liés à la famille royale, qui profitent d'un certain laisser-aller de l'État[352],[360],[361],[359]. L'Arabie saoudite finit par s'inquiéter de la montée en puissance des salafistes djihadistes, qui contestent la légitimité de la dynastie saoudienne, et redoute qu'ils ne puissent bénéficier d'une certaine attractivité aux yeux d'une partie de la population saoudienne, ce qui pourrait déstabiliser le royaume[356],[352],[358],[362]. En les départs de combattants pour la Syrie sont rendus illégaux par le ministère de l'Intérieur dirigé par le prince Mohammed ben Nayef Al Saoud et le gouvernement tente de reprendre le contrôle des flux financiers à destination de la Syrie en faisant fermer certains comités non étatiques[354],[352]. En , le royaume saoudien classe le Front al-Nosra et l'État islamique comme organisations terroristes et interdit tout soutien ou financement à ces groupes[354],[361]. Le , le roi Abdallah ben Abdelaziz Al Saoud fait également inscrire les Frères musulmans sur la liste des organisations terroristes, mais son successeur, Salmane ben Abdelaziz Al Saoud, se montre plus conciliant à leur égard[352],[363],[364]. À partir de 2014 ou début 2015, avec l'affaiblissement de l'Armée syrienne libre, l'Arabie saoudite commence à soutenir également des factions islamistes et salafistes non djihadistes, comme Jaych al-Islam et Ahrar al-Cham[352],[354],[365],[359]. En 2015, l'Arabie saoudite, la Turquie et le Qatar se rapprochent pour soutenir les mêmes groupes[352],[353]. En , Riyad rejoint la coalition internationale contre l'EI. Mais à partir de 2015, il concentre ses efforts au Yémen, où il intervient militairement contre les Houthis, alliés de l'Iran, et réduit son financement aux groupes rebelles[365],[354],[361],[366],[352],[359].
À partir de 2016, après l'intervention militaire russe, l'Arabie saoudite apparaît un peu plus en retrait en Syrie[352],[367], elle cherche notamment à nouer de bonnes relations avec la Russie afin de l'éloigner de l'Iran[352],[368]. Le , le prince héritier Mohammed ben Salmane Al Saoud reconnaît pour la première fois la défaite de la politique saoudienne en Syrie en admettant que Bachar el-Assad va rester au pouvoir[369],[353]. Plaidant de nouveau pour la stabilité des régimes en place, l'Arabie saoudite rétablit ses relations diplomatiques avec l'Iran le 10 mars 2023 et signe un accord de détente[370]. Le 10 mai 2023, l'Arabie saoudite et la Syrie rétablissent également leurs représentations diplomatiques[371]. Le 19 mai, le prince héritier Mohammed ben Salmane reçoit Bachar al-Assad à Djeddah pour le sommet de la Ligue arabe 2023[372],[373].
Rôle du Qatar
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Hamad ben Khalifa Al Thani, émir du Qatar de 1995 à 2013.
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Tamim ben Hamad Al Thani, émir du Qatar depuis 2013.
Contrairement à l'Arabie saoudite, le Qatar soutient les révolutions du Printemps arabe[354]. Cependant, au début des manifestations, le Qatar est encore l'allié du régime syrien et il ne bascule en faveur de l'opposition qu'au bout de plusieurs semaines[374],[375],[376]. Début 2012, il qualifie les exactions du régime syrien de « génocide »[377]. En Syrie, comme dans d'autres pays, le Qatar appuie ouvertement les Frères musulmans[354],[357],[378]. Il finance de nombreux groupes rebelles, ainsi que la Coalition nationale des forces de l'opposition et de la révolution (CNFOR)[354]. Cependant, les Qataris sont écartés de la CNFOR en 2013, après l'élection d'Ahmad Jarba, soutenu par les Saoudiens[354],[357]. Le Qatar fait également parfois l'objet d'accusation de soutien à des groupes salafistes djihadistes, et particulièrement au Front al-Nosra, ce qu'il nie vigoureusement[354],[379],[380],[376]. Des groupes djihadistes bénéficient cependant de soutiens financiers venus d'acteurs privés[381] et en 2014, selon le Département d'État des États-Unis, la vigilance du Qatar est « inexistante »[382].
En , le Qatar rejoint la coalition internationale contre l'EI. Le , il signe un accord de défense avec la Turquie[354]. En 2017, une crise diplomatique secoue les pays du Golfe après des propos conciliants attribués à l'émir du Qatar envers l'Iran, le Hamas et le Hezbollah[383],[384],[385],[386],[387],[388]. Bien que l'émir Tamim ben Hamad Al Thani ait démenti avoir formulé de telles déclarations, l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l'Égypte, Bahreïn, le gouvernement yéménite d'Abdrabbo Mansour Hadi, le gouvernement libyen de Tobrouk, la Mauritanie et les Maldives annoncent le la rupture de leurs relations diplomatiques avec le Qatar, en l'accusant de soutenir pêle-mêle « les Houthis, [...] les Frères musulmans, Daech et Al-Qaïda »[384],[385],[386],[389],[390],[391],[387],[388].
Rôle des Émirats arabes unis
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Mohammed ben Zayed Al Nahyane, président des Émirats arabes unis depuis 2022.
Dans un premier temps, les Émirats arabes unis soutiennent l'opposition syrienne et cherchent à se protéger de l'Iran. Cependant, ils mènent également une politique très active contre les islamistes, en particulier contre les Frères musulmans, et s'opposent par conséquent au Qatar[364]. Proches alliés des États-Unis, les Émirats rejoignent la coalition en 2014 et leurs forces spéciales auraient participé à l'entraînement des combattants des Forces démocratiques syriennes[364]. Après l'intervention militaire russe, Abou Dabi adopte une ligne moins agressive envers Damas et privilégie la mise en place d'une solution politique associant la Russie et les États-Unis[364]. Le , les Émirats rouvrent leur ambassade à Damas[392]. Le , Bachar el-Assad est reçu à Abou Dabi par le prince héritier Mohammed ben Zayed, pour sa première visite dans un pays arabe depuis 2011[393].
Rôle de la Jordanie
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Abdallah II, roi de Jordanie depuis 1999.
Peu après leurs indépendances, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la Jordanie et la Syrie entament de mauvaises relations à cause des prétentions — pas encore totalement abandonnées — du roi Abdallah à reformer un royaume arabe de Syrie[394]. Par la suite, lors de la guerre froide, le royaume hachémite rallie le bloc occidental, tandis que la Syrie se rapproche du bloc soviétique[394]. En 1970 et 1971, les deux pays s'affrontent lors du conflit de Septembre noir[394]. Après un bref apaisement, les relations redeviennent particulièrement exécrables avec le début de l'insurrection des Frères musulmans en Syrie, pendant laquelle Damas accuse Amman de soutenir la confrérie[394]. Entre 1981 et 1986, la Syrie mène alors, parfois par le biais de groupes armés, plusieurs attentats et tentatives d'assassinats contre des cibles jordaniennes ; jusqu'à ce que les relations entre les deux pays s'apaisent à la fin des années 1980[394]. Mais en 1990, contrairement à la Syrie, la Jordanie refuse de soutenir la guerre du Golfe contre son allié irakien, ce qui lui vaut des sanctions de la part des États-Unis et de l'Arabie saoudite[394]. Puis, après la signature du traité de paix israélo-jordanien, le , Damas rompt ses relations diplomatiques avec Amman[394]. Les tensions s'apaisent cependant progressivement pendant la fin des années 1990 et au cours des années 2000 ; en avril 2010, le roi Abdallah II déclare que la relation de son pays avec la Syrie n'a peut-être « jamais été aussi bonne »[394].
Pourtant, le , le roi Abdallah II est le premier dirigeant d'un pays arabe à appeler Bachar el-Assad à démissionner[394]. La Jordanie est également touchée par des manifestations au cours du Printemps arabe, mais dans une moindre ampleur que la Syrie[394]. Le pays doit aussi accueillir rapidement plusieurs centaines de milliers de réfugiés qui vivent dans des conditions précaires ; les répercussions économiques du conflit sont de plus en plus lourdes, or la Jordanie dépend en grande partie d'une rente humanitaire fournie essentiellement par les États-Unis et l'Arabie saoudite, lesquels font alors pression pour qu'Amman s'aligne sur leur politique[394]. La Jordanie apporte un soutien prudent à la rébellion mais cherche à éviter une confrontation directe avec la Syrie ; malgré les accusations et les menaces de la part de Damas, les deux pays ne rompent pas leurs relations diplomatiques au cours du conflit[394],[395].
En dépit de son souhait de privilégier une solution politique à une solution militaire, la Jordanie apporte son soutien à l'Armée syrienne libre (ASL) et en particulier au Front du Sud, une alliance de groupes rebelles de la région de Deraa formée en 2014[394],[396]. Fin 2012, un premier convoi d'armes destiné aux rebelles passe la frontière jordanienne[397]. Il s'agit alors d'armes lourdes des guerres de Yougoslavie transportés à Amman par des avions croates et conduites en Syrie par les Jordaniens[397]. Cette première opération est financée par l'Arabie saoudite et se fait avec l'accord des États-Unis[397]. En 2013, des convois d'armes financées par l'Arabie saoudite à destination de l'ASL continuent de franchir régulièrement la frontière sous la supervision de la CIA et du Dairat al-Mukhabarat al-Ammah (GIP)[395],[398]. Fin 2013, les États-Unis installent le Military Operations Center (MOC) à Amman, une structure dirigée par la CIA, qui avec l'aide d'experts jordaniens, saoudiens, qataris, émiratis, français et britanniques, organise la fourniture d'armes et de salaires aux groupes rebelles jugés fiables et entraîne militairement des milliers de rebelles en territoire jordanien[397],[399]. Contrairement à la Turquie, la Jordanie verrouille suffisamment sa frontière pour empêcher le passage de djihadistes étrangers vers la Syrie et veille à ce que les équipements soient remis aux groupes de l'Armée syrienne libre et non aux islamistes radicaux, contribuant ainsi à ce que l'ASL demeure la force prédominante dans le sud de la Syrie[397].
Cependant, à partir de 2014 et 2015, la Jordanie commence à privilégier la lutte contre l'État islamique : elle rejoint la coalition et bombarde les djihadistes en Syrie[394]. En , Amman ferme sa frontière avec la Syrie peu de temps après la prise du poste-frontière de Nassib par le Front du Sud et le Front al-Nosra, exaspéré par l'incapacité des rebelles à sécuriser cette voie commerciale majeure[397]. Fin 2015, sous la pression de la Russie, la Jordanie réduit son soutien au Front du Sud ; elle se rapproche également de l'Iran et rétablit une coopération sécuritaire avec Damas[394],[395],[367]. En juillet 2017, Amman négocie avec Washington et Moscou l'instauration d'un cessez-le-feu dans le sud de la Syrie par la mise en place d'une « zone de désescalade »[400]. Mais peu après, le gouvernement américain annonce la fermeture du MOC et l'aide financière et militaire aux rebelles s'arrête définitivement en [397]. À l'été 2018, la Jordanie ne s'oppose pas à la reconquête du sud de la Syrie par le régime, et espère ainsi pouvoir rouvrir le poste-frontière de Nassib et rétablir la route commerciale avec Damas[400],[397]. Le , le poste frontière de Nassib rouvre[401].
Rôle du Liban
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Michel Sleiman, président de la République libanaise de 2008 à 2014.
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Michel Aoun, président de la République libanaise de 2016 à 2022.
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Tammam Salam, président du Conseil des ministres libanais de 2014 à 2016.
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Saad Hariri, président du Conseil des ministres libanais de 2009 à 2011 et de 2016 à 2020.
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Hassan Diab, , président du Conseil des ministres libanais de 2020 à 2021.
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Najib Mikati, président du Conseil des ministres libanais de 2011 à 2014 et depuis 2021.
Dès leurs indépendances, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, les relations entre la Syrie et le Liban s'avèrent difficiles, notamment par la volonté de certains nationalistes d'unifier les deux pays et des créer une Grande Syrie[394]. En 1975, une guerre civile éclate au Liban, opposant principalement des milices chrétiennes menées par les Phalanges libanaises à l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), soutenu par diverses milices arabes nationalistes, socialistes ou communistes[402],[403]. Au printemps 1976, l'armée syrienne intervient au Liban au sein d'une Force arabe de dissuasion mandatée par la Ligue arabe afin d'imposer un cessez-le-feu[402]. Mais cette intervention permet également à Hafez el-Assad de placer sous contrôle les organisations palestiniennes et de mettre le Liban sous tutelle[402]. Le conflit s'achève en 1989 avec l'Accord de Taëf, qui entérine notamment l'occupation du Liban par l'armée syrienne[402].
En 2004, la Résolution 1559 du Conseil de sécurité des Nations unies impose à la Syrie de retirer ses troupes du Liban, mais Bachar el-Assad refuse[402]. Cependant en 2005, l'assassinat du premier ministre libanais Rafiq Hariri provoque la Révolution du Cèdre, où des centaines de milliers de Libanais manifestent pour exiger le départ des troupes syriennes[402]. Après un accord conclu avec l'ONU le , l'armée syrienne se retire du Liban le [402].
Cependant, la Syrie continue d'exercer une force influence au Liban et le pays reste profondément divisé[402]. Deux coalitions politiques se font alors face : l'Alliance du 8-Mars, qui regroupe notamment le Courant patriotique libre, le Hezbollah, Amal et le PSNS, est proche de la Syrie et de l'Iran, tandis que l'Alliance du 14-Mars, qui rassemble notamment le Courant du futur, les Forces libanaises, les Phalanges libanaises et le Bloc national, est pro-occidentale[402],[404]. À plusieurs reprises des combats opposent ces milices et causent des centaines de morts et de blessés[404]. Le pays connaît cependant d'autres épisodes de violences, avec notamment un conflit au Sud entre Israël et le Hezbollah en 2006 et des affrontements au Nord entre l'armée libanaise et les salafistes djihadistes de Fatah al-Islam en 2007[405].
En mai 2011, peu après le début de la révolution syrienne, les premiers réfugiés syriens arrivent au Liban[402]. En 2015, le pays accueille 1,2 million de Syriens, alors qu'il n'est lui-même peuplé que 4,5 millions d'habitants, dont 500 000 réfugiés palestiniens[402]. L'État libanais n'ouvre pas de camp et laisse l'ONU prendre en charge les réfugiés[402]. L'économie libanaise souffre aussi grandement du conflit : sa seule ouverture terrestre étant la Syrie, ses échanges commerciaux avec son voisin, mais aussi la Jordanie et les pays du Golfe diminuent grandement, ce qui contraint le Liban à exporter par voie maritime, ce qui est plus long et plus onéreux[402],[406].
Le début de la guerre civile syrienne ravive également les tensions communautaires au Liban[402]. L'Alliance du 8-Mars soutient le régime syrien, tandis que l'Alliance du 14-Mars observe favorablement le début de la révolution syrienne[402]. Le pays connait ponctuellement des affrontements entre milices et des attentats, notamment à Beyrouth et Tripoli, mais c'est surtout dans la région d'Aarsal, au nord-est du pays, que les plus violents affrontements ont lieu[402]. En 2013, notamment après leur défaite à la bataille de Qousseir, de nombreux rebelles trouvent refuge dans les montagnes de la région d'Aarsal, où vivent déjà des centaines de milliers de réfugiés[402]. Les djihadistes du Front al-Nosra et de l'État islamique font bientôt leur apparition et des combats éclatent en entre ces derniers et l'armée libanaise[402]. Cependant, à l'été 2017, l'armée libanaise et le Hezbollah lancent deux offensives décisives qui viennent à bout des djihadistes et des rebelles ; ces derniers capitulent et leurs combattants sont évacués vers la Syrie[407]. À la fin de l'année 2017, des signes d'apaisement apparaissent également entre l'Alliance du 8-Mars et l'Alliance du 14-Mars[404].
Rôle d'Israël
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Shimon Peres, président de l'État d'Israël de 2007 à 2014.
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Reuven Rivlin, président de l'État d'Israël de 2014 à 2021.
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Isaac Herzog, président de l'État d'Israël depuis 2021.
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Naftali Bennett, premier ministre d'Israël de 2021 à 2022.
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Yaïr Lapid, premier ministre d'Israël en 2022.
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Benyamin Netanyahou, premier ministre d'Israël de 2009 à 2021 et depuis 2022.
Après s'être affrontés lors de guerre des Six Jours, la guerre du Kippour et la guerre du Liban, et malgré plusieurs tentatives des Israéliens pour obtenir un accord de paix, Israël et la Syrie sont théoriquement toujours en guerre en 2011[408]. Depuis 1967, Tsahal occupe le plateau du Golan, un territoire unilatéralement annexé en 1981 au travers de la loi du plateau du Golan. Cette annexion est contestée par la Syrie et n'est pas reconnue par la communauté internationale, cependant le cessez-le-feu est respecté pendant les 40 années qui précèdent le conflit syrien[408],[409],[410]. Lorsque la guerre civile éclate en Syrie, l'État hébreu affiche sa neutralité, estimant que la chute du régime de Bachar el-Assad n'entraînerait pas forcément la venue au pouvoir d'un pouvoir plus favorable à son égard, tandis que l'afflux de combattants islamistes et salafistes djihadistes dans la région suscite également des inquiétudes[408],[411],[410],[412],[413]. Cependant, les Israéliens s'inquiètent de l'intervention en Syrie de leur ennemi principal : l'Iran, allié du régime syrien et soutien du Hezbollah et du Hamas[408],[411]. Ponctuellement, l'aviation israélienne mène à partir de 2013 des raids et des frappes aériennes en Syrie contre les Gardiens de la révolution islamique, le Hezbollah ou l'armée syrienne[408]. En 2022, ces pratiques sont toujours d'actualité[414],[415]. Selon des analyses indépendantes, dont celles du magazine Foreign Policy, entre 2013 et juillet 2018, Israël aurait fourni des armes et des financements à des groupes rebelles du Front du Sud et noue des liens avec des communautés du Golan afin de contrer les milices chiites pro-iraniennes et l'État islamique[397],[410],[413],[416],[417]. Cette hostilité commune avec l'Iran marque également un rapprochement diplomatique avec l'Arabie saoudite[408],[411],[418]. Les relations entre Israël et la Russie sont quant à elles complexes et les premiers s'inquiètent de l'Intervention militaire russe en Syrie qui favorise également Téhéran[408]. Mais en , les deux pays concluent un accord pour s'informer mutuellement de leurs opérations aériennes respectives afin d'éviter les accidents[419]. Les Israéliens cherchent à obtenir le soutien de la Russie afin d'empêcher l'Iran de s'implanter davantage en Syrie[420],[421],[413].
Près du plateau du Golan, Israël adopte en 2013 une politique baptisée « Bon voisin » : il refuse d'accueillir des réfugiés syriens sur son territoire pendant toute la durée du conflit mais fournit de l'aide humanitaire aux civils et soigne des milliers de Syriens, combattants rebelles et civils, dans ses hôpitaux en Galilée[397],[410],[412],[422],[413].
Rôle de la France
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Nicolas Sarkozy, président de la République de 2007 à 2012.
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François Hollande, président de la République de 2012 à 2017.
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Emmanuel Macron, président de la République depuis 2017.
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Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères de 2011 à 2012.
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Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères de 2012 à 2016.
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Jean-Marc Ayrault, ministre des Affaires étrangères de 2016 à 2017.
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Jean-Yves Le Drian, ministre des Affaires étrangères de 2017 à 2022.
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Catherine Colonna, ministre des Affaires étrangères de 2022 à 2024.
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Stéphane Séjourné, ministre des affaires étrangères en 2024.
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Jean-Noël Barrot, ministre des affaires étrangères depuis 2024.
Depuis l’indépendance de la Syrie en 1946, les relations de ce pays avec la France ont été modestes sur le plan économique, denses sur le plan culturel et agitées sur le plan politique et diplomatique[423],[424],[425],[426]. Après la Première Guerre mondiale, la France gagne la guerre franco-syrienne, réprime la révolte druze et occupe le pays de 1920 à 1946 au cours de son Mandat sur la Syrie et le Liban[423]. Après l'indépendance, les relations diplomatiques sont rompues en 1956 au moment de la crise du canal de Suez[423]. Elles sont rétablies en 1961 et demeurent apaisées jusqu'à la guerre du Liban, où de nouvelles tensions apparaissent[423]. En 1982, François Mitterrand ne réagit pas au massacre de Hama[424]. Les relations se réchauffent à la fin des années 1990 avec l'arrivée au pouvoir de Jacques Chirac[423],[424],[427]. En 2003, la France et la Syrie s'opposent ensemble à la guerre d'Irak, mais après l'invasion américaine les objectifs des deux pays diffèrent sensiblement[423]. Leurs relations redeviennent exécrables en 2005 au moment de la Révolution du Cèdre au Liban, après l'assassinat de Rafiq Hariri, ami proche de Jacques Chirac[424],[428]. Nicolas Sarkozy fait volte-face aussitôt élu en 2007 et il rétablit le dialogue avec Damas, mais ses espérances sont également déçues[423],[424],[427].
La France se montre assez hésitante au début de la crise syrienne[423],[424]. Le , le ministère des Affaires étrangères français appelle le gouvernement syrien à « renoncer à tout usage excessif de la force », il condamne « les violences qui font des morts et des blessés » et invite le président Bachar el-Assad à engager des réformes politiques[429]. Le , le ministre Alain Juppé déclare que Bachar el-Assad « a perdu sa légitimité à la tête de la Syrie »[427]. Puis, le , le gouvernement français condamne définitivement le régime syrien et appelle à son départ[423]. Peu après, la France apporte son soutien à l'opposition[423]. Le , elle rappelle son ambassadeur français en Syrie, Éric Chevallier, à Paris et ferme les consulats généraux d'Alep et de Lattaquié[430]. Élu en 2012, François Hollande continue de soutenir l'opposition syrienne[431]. En , le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, déclare que « Bachar el-Assad ne mériterait pas d’être sur la terre » et que « le régime syrien devait être abattu et rapidement »[432].
Fin 2012, la France commence à fournir des armes et de l'équipement à des groupes de l'Armée syrienne libre, mais en quantité modeste[423],[433],[434]. Ces livraisons sont effectuées par la DGSE malgré l'embargo sur les armes imposé par l'Union européenne[434]. L'embargo est cependant levé le [435], notamment après les réclamations de la France[436].
En , après le massacre de la Ghouta, la France est prête à intervenir militairement contre le régime syrien, mais elle se retrouve isolée après la volte-face des Américains et des Britanniques, et est contrainte de renoncer[423],[437],[438],[439],[440],[441].
En , la France intègre la coalition internationale qui lance une campagne de frappes aériennes contre l'État islamique en Irak et en Syrie. Au sein de cette coalition, elle lance l'opération Chammal en Irak le , puis en Syrie à partir du [442],[443]. La France tient alors une position « ni Assad, ni Daech »[423],[444],[445]. Cependant, à partir de 2015, elle est frappée sur son sol par plusieurs attentats djihadistes, notamment les attentats du 13 novembre 2015, qui sont les plus meurtriers et les premiers directement revendiqués en Europe par l'État islamique[446]. La lutte contre cette organisation devient alors la priorité du gouvernement français[446],[444]. En 2016, des forces spéciales françaises sont engagées en Syrie aux côtés des Forces démocratiques syriennes[447],[448],[449]. Arrivé au pouvoir en 2017, Emmanuel Macron conserve cette ligne[450],[451] : il réaffirme son soutien à l'opposition syrienne[452],[453] mais change de rhétorique en affirmant ouvertement ne pas vouloir faire de « la destitution de Bachar el-Assad une condition préalable à des discussions »[454],[455],[456],[450],[457],[458],[441]. Il déclare : « Daech est notre ennemi, Bachar est l'ennemi du peuple syrien », tout en estimant que son maintien au pouvoir serait une « erreur funeste »[454],[455],[456],[450],[459],[457],[458].
Le , la France prend part aux côtés des États-Unis et du Royaume-Uni aux bombardements de Barzé et de Him Shinshar, menés en représailles à l'attaque chimique de Douma[460].
Rôle de l'Égypte
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Hosni Moubarak, président de la république arabe d'Égypte de 1981 à 2011.
-
Mohamed Morsi, président de la république arabe d'Égypte de 2012 à 2013.
-
Abdel Fattah al-Sissi, président de la république arabe d'Égypte depuis 2013.
En , le chef de la diplomatie égyptienne Mohamed Kamel Amr se prononce pour un règlement pacifique du conflit syrien, une prise en compte des exigences du peuple et une cessation immédiate des violences dans le pays, rejetant toute ingérence extérieure[461]. En , le président égyptien Mohamed Morsi affirme qu'« il ne faut pas perdre de temps à parler de réforme » et que le président Bachar el-Assad « ne sera pas là pour longtemps »[462], ce à quoi réagit le ministère des affaires étrangères syrien en accusant l'Égypte d'ingérence[463]. Mais le même mois, Morsi s'oppose, devant l'Assemblée générale de l'ONU, à une intervention militaire étrangère[464]. En , il annonce finalement avoir rompu « définitivement » les relations avec le régime en place en Syrie[465]. Cependant, Mohamed Morsi est renversé le par un coup d'État mené par l'armée qui porte le maréchal Abdel Fattah al-Sissi au pouvoir. Le coup d'État est condamné par la Turquie et le Qatar, mais est soutenu par l'Arabie saoudite[466]. Le , le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Choukry salue la campagne de bombardements russes en Syrie qui va, d'après lui, « avoir pour effet de contenir et éradiquer le terrorisme » dans le pays. Ces propos témoignent, pour Le Monde, « du réchauffement des relations entre Le Caire et Moscou », alors que l'Égypte s'était « jusque-là efforcée de ne pas soutenir publiquement Bachar Al-Assad pour ne pas froisser l’un de ses principaux alliés, l’Arabie saoudite »[467]. Mais en , al-Sissi officialise son soutien au régime de Bachar el-Assad[468]. Des médias arabes avancent alors que des conseillers militaires égyptiens auraient été envoyés en Syrie[468].
Autres pays
[modifier | modifier le code]En Palestine, le Hamas, allié de longue date de l'Iran, du régime syrien et du Hezbollah, revoit radicalement sa position en se rangeant du côté des rebelles syriens à partir de 2012[469],[470],[471],[472],[473],[474]. Téhéran réduit alors son aide au Hamas, cependant ce dernier finit par délaisser la Syrie et renoue avec l'Iran en 2017[475].
Le roi sunnite de Bahreïn Hamed ben Issa al-Khalifa, qui vient de réprimer la contestation massive dans son propre pays, apporte son soutien au gouvernement syrien[476]. Néanmoins, le royaume a rapidement changé de position pour s'aligner sur celles des autres monarchies du Golfe[477],[478] et fait même partie des Amis de la Syrie[479], qui regroupe tous les États soutenant l'opposition syrienne. En , Bahreïn a félicité le bombardement d'une base aérienne de l'armée syrienne par le président américain Donald Trump[480].
La Chine s'aligne sur les positions russes en espérant tout simplement obtenir en retour un soutien de Moscou lorsque les intérêts chinois sont également menacés, notamment en cas de volonté d'ingérence occidentale dans ses affaires intérieures (par exemple au Tibet, ou dans le Xinjiang)[236] et par peur de la contagion de telles révoltes populaires[481].
Le président vénézuélien, Hugo Chávez, a apporté son soutien à son « ami » Bachar el-Assad, et l'a décrit comme « un humaniste »[482]. Après la mort de Chavez, le gouvernement vénézuélien fait le choix de se déclarer neutre en ce qui concerne la suite de la guerre civile syrienne, ne soutenant plus ni Bachar el-Assad, ni la rébellion et, se rangeant derrière l'ONU et la Ligue Arabe, recommande des élections démocratiques[réf. nécessaire].
D'autres pays, comme le Brésil, soutiennent une position en faveur du dialogue avec le gouvernement du président Bachar el-Assad[483]. La Bolivie soutient une solution pacifique sans intervention étrangère[484].
L'Inde et la Corée du Nord sont favorables à une résolution du conflit par un dialogue entre Syriens. Le Bangladesh s'aligne sur la position de la fédération de Russie[485].
Le Vatican a plusieurs fois appelé à l'arrêt des violences en interpellant aussi bien les parties impliquées que la communauté internationale ainsi que les leaders religieux et les croyants des différentes religions[486],[487],[488],[489],[490].
En , le Jerusalem Post indique que des pilotes d'hélicoptères nord-coréens opèrent en Syrie « pour le compte du régime de Bachar el-Assad », information corroborée selon le journal par l'Observatoire syrien des droits de l'homme. Mais la Corée du Nord dément apporter une quelconque aide militaire au gouvernement syrien de Bachar el-Assad, avec lequel elle entretient des relations de longue date[491]. Le à Genève, Bachar al-Zoubi, un responsable du Haut Conseil des négociations (HCN), la principale alliance de l’opposition, accuse la Corée du Nord d'avoir déployée deux unités militaires en Syrie, appelées « Cholma-1 » et « Cholma-7 »[492],[493]. Le , un rapport de l'ONU accuse la Corée du Nord d'avoir livré du matériel militaire au régime syrien[494].
Rôle de la Ligue arabe
[modifier | modifier le code]Après une période d'indécision, plusieurs capitales arabes condamnent finalement le pouvoir syrien, se joignant aux pays occidentaux pour provoquer, le , une session spéciale du Conseil des droits de l'homme de l'ONU[495],[496].
Le , la Ligue arabe (sauf l'Irak et le Liban) vote la « suspension de l'adhésion de la Syrie à toutes ses réunions » à compter du et prône des « sanctions politiques et économiques » contre le pouvoir syrien[497]. Le , les chefs de tribus se rencontrent à une conférence au Caire pour annoncer leur soutien à l'Armée syrienne libre et aux révolutionnaires en Syrie ; à la fin de la conférence les chefs de tribus arabes en Syrie annoncent la fondation d'un conseil politique, où toutes les tribus de Syrie sont représentées. Le , le sommet islamique de La Mecque (Arabie saoudite) prononce la suspension de la Syrie de l'Organisation de la coopération islamique. En 2013, l'opposition anti-Assad occupe le siège de la Syrie lors d'un sommet de la Ligue arabe à Doha, au Qatar[498].
Le régime syrien est réintégré dans la Ligue arabe le 7 mai 2023, au Caire[498].
Rôle de l'Union européenne
[modifier | modifier le code]Dès le mois de , l'Union européenne (de concert avec le Canada, et les États-Unis) a condamné les violences[499],[500],[501].
L'Union européenne a pris des sanctions à plusieurs reprises contre la Syrie. Tout au long du mois d', Catherine Ashton, chef de la diplomatie européenne, a annoncé une série de sanctions contre la Syrie. Une vingtaine de personnes faisant partie du gouvernement syrien ont été interdites de visa et ont vu leurs avoirs gelés. Cinq entreprises militaires impliquées dans les violences sont interdites de relations commerciales. Un embargo de l'UE sur les exportations de pétrole syriennes est également instauré[502],[503],[504]. Plusieurs États de l'UE rappellent leurs ambassadeurs à Damas.
Rôle des Nations unies
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Ban Ki-moon, secrétaire général des Nations unies de 2007 à 2016.
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António Guterres, secrétaire général des Nations unies, depuis 2016.
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Kofi Annan, émissaire spécial de l'ONU pour la Syrie en 2012.
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Lakhdar Brahimi, émissaire spécial de l'ONU pour la Syrie, de 2012 à 2014.
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Staffan de Mistura, émissaire spécial de l'ONU pour la Syrie, de 2014 à 2018.
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Geir Otto Pedersen, émissaire spécial de l'ONU pour la Syrie, depuis 2018.
Les 7, 20 et , le Secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon appelle à mettre un terme à la répression[505],[506],[507].
Le , le Conseil de sécurité des Nations unies adopte une déclaration condamnant la répression menée par les autorités syriennes[508], ainsi que les « violations généralisées des droits de l'homme et l'emploi de la force contre des civils » par les autorités syriennes[509].
Le , des experts de l'ONU exhortent la Syrie à cesser la répression contre les civils[510].
Le , le Conseil des droits de l'homme des Nations unies établit une Commission d'enquête indépendante et internationale (COI) sur les violations des droits de l'homme en Syrie[511],[512]. Celle-ci est présidée par le Brésilien Paulo Sérgio Pinheiro (en)[513]. Pendant le conflit, la Commission accuse dans différents rapports le gouvernement syrien de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre[514],[515],[516],[517] et les rebelles de crimes de guerre[515],[516],[517]. Elle accuse également la Russie et la coalition internationale menée par les États-Unis de possibles crimes de guerre[518],[519].
Le Conseil de sécurité des Nations unies est quant à lui paralysé par plusieurs vetos de la Russie et de la Chine empêchant d'adoption d'une résolution condamnant le régime syrien[520],[521],[522].
En , alors que plusieurs villes sont bombardées par l'armée syrienne, Ban Ki-moon, déclare que la répression contre les opposants est « presque certainement un crime contre l'humanité »[523].
Le , Kofi Annan est nommé émissaire conjoint de l'Organisation des Nations unies et de la Ligue arabe sur la crise en Syrie[524]. Il démissionnera en , face à la mésentente entre les 5 membres permanents du conseil.
Le , Ban Ki-moon déclare, lors d'une conférence de presse à Bogor, que « La situation en Syrie est devenue intolérable et inacceptable ». Il ajoute que « La communauté internationale doit s'unir. Ce n'est pas parce que nous ne sommes pas capables d'avoir une résolution à l'ONU qu'il faut que la souffrance de la population syrienne continue. Il s'agit de la responsabilité morale et politique de la communauté internationale »[525].
Le , le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon dénonce une « guerre par procuration, avec des acteurs régionaux et internationaux armant un camp ou l'autre »[526].
Le , Ban Ki-moon accuse Bachar el-Assad d'avoir « commis de nombreux crimes contre l'humanité »[527]. Le , Navanethem Pillay, la Haute Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, accuse à son tour le président syrien : « La Commission d'enquête a produit d'énormes quantités de preuves [...] sur des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité. [...] Les preuves indiquent une responsabilité au plus haut niveau du gouvernement, y compris du chef de l'Etat »[528].
Entre 2014 et 2018, Staffan de Mistura assure les fonctions d'émissaire spécial de l'ONU pour la Syrie, mais son bilan est un échec : malgré sa volonté de se montrer conciliant avec le régime il échoue à obtenir de sa part la moindre concession lors des négociations avec l'opposition[529].
Le , l'Assemblée générale des Nations unies adopte une résolution par laquelle elle décide de la création d'un Mécanisme international « chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d'aider à juger ceux qui en sont responsables »[530],[531]. Le , la juge française Catherine Marchi-Uhel est nommée à la tête de ce Mécanisme international[532]. L'enquête du Mécanisme débute en [533].
Déroulement du conflit
[modifier | modifier le code]Prélude
[modifier | modifier le code]En , en Tunisie, ont lieu des manifestations de masse contre le gouvernement. Puis le mouvement contestataire s'étend au monde arabe jusqu'à la Syrie. En , Ben Ali est renversé en Tunisie, suivi en février par Hosni Moubarak en Égypte, tandis que la Libye sombre dans la guerre civile. La plupart des pays arabes traversent une phase d'agitation et certains tentent de calmer la colère populaire en acceptant des concessions et en procédant à des aménagements politiques.
Alors que le printemps arabe s'étend en 2011 à tout le monde arabe, le gouvernement syrien prend des mesures de prévention et de répression, assorties de tentatives d'apaisement. Plusieurs appels à manifester sont lancés à partir du [534], mais les services de renseignements (les moukhabarat) répriment ces manifestations. La Syrie garde en mémoire l'insurrection des Frères musulmans et sa répression sans réaction internationale par Hafez el-Assad qui s'était achevée en 1982 avec l'écrasement de la révolte de Hama (10 000 à 40 000 morts, en majorité des civils)[535],[536].
Suivant l'exemple des « révolutions colorées », des appels à manifester sont lancés sur Facebook, invitant les Syriens à se mobiliser les 4 et , notamment devant le siège du parlement à Damas. L'appel n'est pas suivi, en raison notamment de l'important dispositif de sécurité, des intimidations des forces de sécurité et de l'arrestation des principaux organisateurs[537],[538]. Le , le pouvoir rétablit l'accès à Facebook et YouTube, pensant apaiser d'éventuelles tensions[539]. Cependant, ce geste n'est pas interprété de la même manière par tous les médias. D'après Télérama et le Huffington Post, il s'agirait d'un moyen pour mieux repérer les activistes[540],[541]. En outre, ce point de vue est partagé par Kenneth Roth, directeur exécutif de Human Rights Watch, qui estime que « les médias sociaux peuvent également être un outil de surveillance et de répression de l'opposition »[542]. Dans le même temps, le pouvoir multiplie également les mesures sécuritaires : renforcement des écoutes, plan de rupture des moyens de communications pour isoler des régions ou des villes du reste du pays, ordre donné aux moukhabarats de réprimer fermement toute agitation, interdiction de messagerie instantanée et de Skype, nombreuses arrestations préventives ou non, comme celles d’enfants tagueurs[543],[544].
Le , le gouvernement annonce des mesures sociales prévoyant la baisse de taxes sur les produits alimentaires de première nécessité, l'augmentation des subventions pour le fioul et la création d'un fonds social qui aidera 420 000 personnes en difficulté[545],[543]. D’autres augmentations de prix et l’instauration de la TVA sont reportées ; le gouvernement annonce également le recrutement de 67 000 fonctionnaires, multiplie les rencontres avec des représentants de la société civile et des dignitaires religieux[543]. Des dizaines de fonctionnaires corrompus sont mutés ou renvoyés[543]. Le gouvernement apporte son soutien diplomatique, mais aussi matériel, et envoie des renforts en Libye soutenir le colonel Kadhafi, en manière d’avertissement sur ses intentions en cas de révolte[546]. Le , les violences policières contre un commerçant entraînent le soulèvement d'un quartier de Damas[547],[548]. Le , 13 prisonniers politiques entament une grève de la faim[549].
2011 : Du printemps arabe à la guerre civile
[modifier | modifier le code]En , quelques jours après la chute de Zine el-Abidine Ben Ali en Tunisie et celle d'Hosni Moubarak en Égypte, un groupe d'environ quinze à vingt adolescents inscrit sur les murs d'une école de Deraa le slogan « Jay alek el door ya doctor » (« Ton tour arrive, docteur»), qui vise directement le président syrien Bachar el-Assad, ancien ophtalmologue[550],[551],[552],[553],[554],[555],[556]. La plupart des enfants sont très rapidement arrêtés par les services de renseignement et torturés pendant plusieurs semaines, et détenus au plus tôt après quelques jours et au plus tard après sept mois[553],[554],[555]. Une délégation venue solliciter leur libération est insultée par Atef Najib, cousin de Bachar el-Assad et chef de la branche locale de la Sécurité politique, qui aurait déclaré : « Oubliez vos enfants et allez retrouver vos femmes. Elles vous en donneront d'autres. Et puis, si vous n'êtes pas capables de leur faire des enfants, amenez-nous vos femmes. On le fera pour vous »[553]. Ces paroles se répandent alors à Deraa comme une traînée de poudre et scandalisent les habitants[553]. Le , un premier rassemblement a lieu devant le Palais de justice de Deraa[551],[553]. Une seconde manifestation de bien plus grande ampleur, baptisée le « vendredi de la liberté », suit le , mais cette fois la police tire sur la foule, faisant deux morts et de nombreux blessés[553],[551],[552]. Le , pour tenter d'apaiser la situation, le régime fait libérer la plupart des adolescents arrêtés, mais les traces de tortures sur leurs corps et leurs visages ravivent la colère des habitants de Deraa[553],[555],[552],[556],[554]. Des milliers de manifestants incendient le Palais de justice et tiennent un sit-in à la mosquée al-Omari (ar)[552]. Le soir du , la police donne l'assaut contre la mosquée, tire à balles réelles et tue entre 51 et 100 manifestants en 24 heures[552],[557],[558]. Le , la mosquée al-Omari est sous le contrôle des forces de sécurité, mais le mouvement de contestation se poursuit[552],[559].
La page Facebook nommée « La révolution syrienne contre Bachar Al-Assad 2011 » appelle à « une Syrie sans tyrannie, sans loi sur l'état d'urgence, ni tribunaux d'exception » et invite tous les syriens à protester le 15 et [560],[561]. Bien que Deraa soit l'épicentre de la révolte[562], l'agitation touche d'autres villes, principalement Damas, Banias et Homs[557],[563],[534]. Le , une première manifestation de quelques dizaines de personnes a brièvement lieu dans un souk de Damas[564],[553],[558]. Le lendemain, environ 150 personnes, pour la plupart des militants des droits de l'homme et des proches de prisonniers politiques, manifestent près du ministère de l'Intérieur à Damas, pour demander la libération des détenus politiques, mais les participants sont violemment dispersés par la police et 34 personnes sont arrêtées[565],[563],[566]. D'autres manifestations ont lieu le à Damas et Banias[567],[563],[566] et le (« vendredi de la fierté ») à Damas, Douma, Deraa, Al-Sanamayn, Da'el, Cheikh Meskin, Banias, Homs, Hama, Lattaquié, Deir ez-Zor et Raqqa[568]. Les 26 et , des violences secouent Lattaquié, faisant au moins 15 morts et 185 blessés[567],[569],[570],[571]. Les manifestants réclament alors la fin de l'état d’urgence, la libération des prisonniers politiques, la fin de la corruption et des réformes démocratiques[562],[569]. Mais les revendications se durcissent rapidement : dès fin mars et début avril, les protestataires réclament le départ de Bachar el-Assad et s'attaquent aux symboles du pouvoir[572],[573]. Les manifestations ont un caractère tribal et confessionnel limité : ainsi, la croix et le croissant sont brandis au sein de la mosquée des Omeyyades à Damas[557].
Le au soir, le gouvernement syrien déclare que tous les protestataires arrêtés depuis le début des manifestations ont été libérés[574]. Une conseillère du président juge même les revendications des manifestants « légitimes »[574]. Le , le premier ministre Mohammed Naji al-Otari démissionne[569]. Le même jour, une manifestation pro-régime rassemblant des dizaines de milliers de personnes est organisée par le gouvernement à Damas[575],[576]. Le , le président Bachar el-Assad s'exprime pour la première fois depuis le début des manifestations : dans un discours au parlement, il accuse une « minorité » de tenter de semer le chaos à Deraa, évoque une « conspiration » d'Israël, des États-Unis et de l'étranger et assure que son gouvernement poursuit ses réformes pour renforcer l'unité nationale, la lutte contre la corruption et la création des emplois, mais sans annoncer de mesures précises[577],[578],[579]. Le , le gouvernement syrien annonce la levée de l'état d'urgence, en vigueur depuis 1963, et abolit la Cour de sûreté de l'État, un tribunal d'exception[580]. Le régime effectue également quelques concessions socio-économiques[581]. Mais sur le terrain, le pouvoir répond aux manifestants par une répression militaire féroce[582] : les forces de sécurité tirent sur la foule à balles réelles[582],[583], les personnes arrêtées par les services de renseignements sont presque systématiquement torturées[584],[585] et des campagnes de viols massifs sont commises de manière planifiée[586]. Le pouvoir s'appuie aussi sur les milices chabiha, particulièrement violentes[582],[587].
Cependant le mouvement de protestation ne faiblit pas et les manifestations se poursuivent chaque vendredi[588], toujours pacifiquement[589]. Les opposants sont influencés par Canvas, ONG spécialisée dans les actions pacifiques pour faire tomber les dictatures, et qui a mis à disposition des documents gratuits sur internet après la révolution tunisienne. De nombreux militants des Comités de coordination locaux ont été formés directement par Canvas, ce qui, selon la journaliste Sofia Amara, influence « considérablement » leur stratégie[Note 1]. Les manifestants syriens scandent des slogans pacifiques, brandissent des branches d'olivier et des roses, dansent, chantent, offrent des bouteilles d'eau aux soldats venus les réprimer... Des militants sunnites, chrétiens et alaouites multiplient ensemble les initiatives, telles que la distribution de cadeaux aux enfants chrétiens et musulmans déguisés en « pères Noël de la liberté »[589],[590]. Selon Srdja Popovic, fondateur de Canvas, il y a eu « une fenêtre d'opportunité de sept mois durant lesquels le mouvement était non-violent de façon prédominante »[591].
Le 1er avril, des milliers de personnes manifestent à Damas, Deraa, Douma, Homs et Lattaquié[592],[593]. Une vague d'arrestations suit le lendemain dans ces mêmes villes[593]. Le , Alep connaît ses premières manifestations, effectuées par un groupe de 500 étudiants[594]. Le , 10 000 personnes manifestent à Lattaquié[567]. Le , 20 000 personnes participent à un sit-in à Homs[567]. Le , des dizaines de milliers de personnes manifestent à Damas, Deraa, Hama, Lattaquié, Homs, Banias, Qamichli, Douma et Zabadani[583]. Cette journée est particulièrement meurtrière avec plus de 80 morts dans l'ensemble du pays[583],[595]. Le 1er et le , environ 1 000 personnes sont arrêtées[596]. Début mai, des sit-in permanents commencent à s'organiser dans plusieurs villes[567].
Au bout d'un mois de manifestations, l'armée syrienne commence à intervenir directement dans la répression[597]. Les chars entrent dans Deraa le , puis dans Homs le et dans Banias le [597],[598],[599]. L'armée reprend le contrôle de Deraa et de Banias, mais elle échoue à Homs à cause de nombreuses désertions[600].
Le , un projet de résolution condamnant la répression en Syrie, l'intervention de l'armée et les tirs à balles réelles est proposé au Conseil de sécurité des Nations unies par le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne et le Portugal, mais il est bloqué par la Russie et la Chine[601]. Le même jour, plus de 230 membres du parti Baas au pouvoir démissionnent[601].
Malgré l'interdiction édictée par le ministère de l'Intérieur, des milliers de Syriens continuent de descendre dans la rue[602]. Au cours du mois de mai, des manifestations se poursuivent chaque vendredi à Homs, Hama, Deraa, Lattaquié, Jablé, Banias, Maarat al-Nouman, Kafar Noubol, Douma, Saqba (en), Deir ez-Zor, Boukamal, Kobané, Amouda, Derbassyié (en) et Qamichli[602],[603],[604]. La jeunesse joue un rôle important dans l'organisation des manifestations car elle maîtrise l'outil informatique et communique via les réseaux sociaux[605],[606]. Par exemple, les 80 coordinateurs de l'Union des coordinateurs de la Révolution syrienne, qui couvrent la totalité du territoire syrien et communiquent via un groupe privé Facebook, ont pratiquement tous moins de 30 ans. Ils préparent et diffusent des slogans pour les manifestations, filment ces dernières, envoient les vidéos aux agences internationales, etc[605]. Il existe de nombreux réseaux, dont certains importants comme Shaam News Network (en), ou le groupe Facebook Syrian Revolution 2011[607], qui selon France 24 en est suivi par 240 000 personnes et qui est « considéré comme l'un des principaux moteurs du mouvement de contestation »[608].
Le , le corps mutilé de Hamza al-Khatib, un garçon âgé de 13 ans disparu depuis le à Deraa, est rendu à sa famille par les autorités syriennes. Il porte des marques de tortures : cou et mâchoire brisés, rotules broyées, brûlures de cigarettes, blessures par balles dans les bras et parties génitales mutilées. Il avait été arrêté lors d'une manifestation contre le régime. Les images de son corps, diffusées par la famille, alimentent l'indignation contre le régime, qui nie les tortures et les circonstances du décès[609],[610],[611].
Début juin, alors que le bilan de la répression a déjà dépassé les 1 000 morts selon l'ONU[612], de violents combats éclatent à Jisr al-Choghour. Les forces de sécurité ouvrent le feu sur la foule, mais des habitants s'arment après avoir pillé un poste de police, et sont rejoints par des déserteurs[613]. Le , 120 policiers sont tués dans des combats[614]. L'armée contre-attaque, tue au moins 130 personnes, et reprend le contrôle de Jisr al-Choghour le [615],[616],[617]. Cependant, de nombreux soldats continuent de faire défection et pendant l'été 2011, la région montagneuse du Jabal al-Zawiya, au sud-est de la ville, passe sous le contrôle des insurgés[613]. L'armée y lance une offensive, mais les rebelles se contentent de se replier en Turquie avant de réinvestir la zone après son départ[613].
L'intensification des opérations militaires à l'été 2011 marque le début d'une vague de désertions dans les rangs de l'armée, qui va se poursuivre en s'intensifiant jusqu'en 2012[618],[619],[620]. Au moins plusieurs dizaines de milliers de soldats font défection au cours du conflit, des unités entières rejoignent la rébellion tandis que d'autres déserteurs tentent de fuir à l'étranger[618],[621]. Cependant par adhésion ou par peur, une large partie de l'armée demeure loyale au régime de Bachar el-Assad, qui peut compter sur le soutien d'unités totalement fidèles, en particulier l'armée de l'air et la 4e division blindée, en première ligne dans la répression, constituée principalement d'Alaouites et commandée par Maher el-Assad, le frère du président[619],[620]. Progressivement, toutes les tendances anti-Assad se militarisent. En mai et , fondé par des salafistes, le groupe Ahrar al-Cham passe à la lutte armée dans les régions d'Idleb et Hama[622]. Le , à Rastane, au nord de Homs, des officiers déserteurs de l'armée syrienne annoncent la formation de l'Armée syrienne libre (ASL) et créent un conseil militaire[623],[619]. À Homs, le Bataillon Khalid bin al-Walid et la Brigade al-Farouq, affiliés à l'ASL, sont formés entre juin et octobre par des déserteurs[624],[625],[626]. En août, l'État islamique d'Irak envoie en Syrie un petit nombre de djihadistes originaires de la région, qui formeront quelques mois plus tard le Front al-Nosra[627]. Près de Damas, le mouvement islamiste Liwa al-Islam et des groupes de l'Armée syrienne libre se constituent à Douma et dans la Ghouta au cours de l'été[628],[629]. Dans la région d'Idleb, Suqour al-Cham est fondé en septembre, suivi par les Brigades des martyrs de Syrie en décembre[628],[630]. Cependant à l'été 2011, les groupes armés restent encore marginaux, ce n'est que fin 2011 que le passage à la lutte armée devient général[631].
L'opposition politique se structure également : le , le Conseil national syrien (CNS) est fondé à Istanbul, en Turquie, avec pour objectif de coordonner les opposants et mener des opérations contre le régime de Bachar el-Assad[632]. Des groupes d'opposition démocratiques sont également formés à l'intérieur de la Syrie[633]. La Commission générale de la révolution syrienne (CGRS), fondée en , regroupe environ 150 coordinations locales, elle revendique un héritage islamique, elle est proche de l'Armée syrienne libre et est favorable à une intervention étrangère indirecte, mais entretient de mauvaises relations avec le CNS et les Frères musulmans[633]. Les Comités locaux de coordination (CLC) sont fondés en et regroupent environ 60 coordinations locales : ses objectifs sont les mêmes que ceux du CGRS, mais les CLC sont intégrés au CNS, ils sont également proches de l'Armée syrienne libre, résolument laïcs, et favorables à une intervention internationale limitée avec la mise place d'une zone d'exclusion aérienne et des frappes aériennes ciblées[633],[634]. Bien différent des deux autres mouvements, le Comité de coordination nationale pour le changement démocratique (CCNCD) intègre notamment le PYD et s'oppose à l'Armée syrienne libre, à la lutte armée, et à une intervention internationale, ce qui lui vaut des accusations de trahison de la part de la majeure partie de l'opposition syrienne[633]. Enfin l'organisation des Frères musulmans en Syrie commence également à mobiliser son réseau de sympathisants début 2012[633]. Ses cadres et ses militants vivent cependant en exil depuis plus de 30 ans et sa direction est installée à Istanbul[633]. Islamiste, l'organisation s'affirme cependant comme modérée, défend les principes de la démocratie et se montre en faveur d'une intervention étrangère limitée[633].
Le , le comité révolutionnaire de Homs et le Conseil national syrien adoptent l'ancien drapeau de la République syrienne — utilisé entre 1932 et 1963 — comme drapeau officiel de l'opposition[635].
Jouant sur la peur de l'islamisme sunnite, le pouvoir syrien attise les divisions communautaires, réprime férocement les sunnites mais ménage les protestataires issus des minorités — les Alaouites, les Druzes, les chrétiens et les Kurdes — afin de les couper de l'opposition[636],[637],[638],[639],[640],[641]. Le régime syrien va également chercher à « djihadiser » la rébellion syrienne en libérant des détenus islamistes enfermés dans ses prisons[642],[643],[644],[645],[646]. Dès le , 260 prisonniers en grande majorité islamistes enfermés à la prison de Saidnaya sont relâchés[647],[642],[648],[649],[559]. Puis, après une amnistie présidentielle prononcée le , ils sont suivis par plusieurs centaines d'autres au cours de l'été[642]. Parmi les détenus relâchés, plusieurs comme Zahran Allouche[650],[643], Hassan Aboud[643], Ahmed Abou Issa[643], Abou Yahia al-Hamawi[622], Abou Jaber[651], ou encore Abou Lôqman[652] deviendront des chefs importants.
Le pouvoir syrien multiplie également les grandes manifestations pro-régime. Certains participants viennent « sous peine de sanctions »[653], notamment pécuniaires en ce qui concerne les fonctionnaires et étudiants, et d'autres manifestants sont des soutiens d'Assad[654]. Des marches rassemblant des dizaines de milliers de personnes ont notamment lieu à Damas les 15 et [655],[656], à Deir ez-Zor le 1er novembre[657], à Alep le [658] ou encore à Damas, Alep et Lattaquié le [659]. Cependant, au début de l'été 2011, paralysée par les désertions, l'armée est contrainte d'abandonner plusieurs quartiers à Deraa, Rastane, Homs, Hama et Lattaquié[660]. Des manifestations anti-régime particulièrement importantes ont alors lieu en juillet à Hama, rassemblant 150 000 à 500 000 personnes chaque vendredi[661],[662],[663],[664],[665]. Le , les ambassadeurs des États-Unis et de la France, Robert Ford et Éric Chevallier, se rendent alors à Hama, désertée par l'armée, à la rencontre des protestataires[664],[665]. En représailles, des partisans du régime mènent plusieurs attaques à Damas contre les ambassades américaine et française[666]. Des centaines de milliers de personnes manifestent également à Homs, Deir ez-Zor, Banias, Lattaquié, Deraa, Idleb, Maarat al-Nouman, Alep, Raqqa, Douma, Hassaké, Qamichli, Amouda, Kobané, Zabadani, Boukamal et dans plusieurs villes de la banlieue de Damas[661],[662],[664],[667],[668],[669]. Les manifestations les plus importantes ont lieu à Hama, Homs et Deir ez-Zor[670],[664],[667], elles prennent également de l'ampleur à Alep et Raqqa, jusqu'alors plutôt épargnées[662],[664]. L'armée lance alors de nouvelles opérations. À Deir ez-Zor, elle tue près d'une centaine de personnes entre le et le [671]. Le , elle entre également dans Hama et massacre 200 civils pendant cinq jours[672],[673],[674],[675],[676]. Le , des navires de guerre et des chars bombardent les quartiers sunnites de Lattaquié[677],[678],[679], avant que l'armée ne lance une offensive dans cette ville le lendemain[680]. Le , le régime attaque Rastane avec 250 chars et blindés et reprend la ville le 1er octobre après avoir tué au moins 130 civils et déserteurs de l'Armée syrienne libre[681],[682]. L'armée poursuit également ses opérations contre les rebelles dans le Jabal al-Zawiya, au sud d'Idleb et massacre notamment au moins 111 civils le dans le village de Kafroueid[683],[684].
Le 18 août, les États-Unis, la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne appellent pour la première fois à la démission de Bachar el-Assad[685]. Courant 2011, l'Union européenne, les États-Unis, la Suisse, la Turquie, le Canada et l'Australie adoptent une série de sanctions internationales contre le régime syrien[686].
Le , la Syrie et la Ligue arabe signent un accord dans lequel Damas s'engage à arrêter la violence, à libérer les prisonniers et retirer l'armée des villes[687]. Mais la répression n'ayant pas faibli, la Ligue arabe déclare le que le gouvernement syrien a « failli à ses engagements »[688]. Le , la Syrie est exclue de la Ligue arabe[689]. Le 27 novembre, la Ligue arabe adopte à son tour des sanctions avec le gel des transactions commerciales avec le gouvernement syrien et de ses comptes bancaires[686].
Pendant l'automne, les manifestations anti-régime se poursuivent alors que les affrontements entre l'armée et les déserteurs s'intensifient dans tout le pays[161]. Le , le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCDH) déclare que la Syrie est en état de « guerre civile »[690] et le , le Conseil des droits de l'homme des Nations unies vote une résolution qui condamne les « violations répandues, systématiques et flagrantes » des droits de l'homme et des libertés fondamentales par les autorités syriennes[691]. Alors que l'année 2011 s'achève, le HCDH affirme que plus de 5 000 personnes ont été tuées depuis le début des violences en Syrie, et que plus de 4 000 autres ont été arrêtées par les forces du régime[692]. Les villes de Hama et de Homs ont compté les plus importantes manifestations et le plus grand nombre de morts[670],[558].
2012 : Victoires des rebelles dans le nord et l'est de la Syrie, résistance du régime à l'ouest et au sud du pays
[modifier | modifier le code]Le , après plusieurs jours de combats, l'armée syrienne se retire de Zabadani, près de la frontière libanaise, qui devient la première ville de Syrie à tomber entièrement aux mains des rebelles[693]. Cependant, les loyalistes lancent une contre-offensive le avec au moins 15 000 soldats et 40 chars[694]. Le , Zabadani est reprise par les forces du régime[694].
L'armée syrienne poursuit également ses offensives pour tenter de reprendre le contrôle de Homs, qui commence à être appelée la « capitale de la révolution »[695]. La journée du vendredi est la plus meurtrière depuis le début de la révolte : des tirs d'artillerie font au moins 260 morts parmi la population civile[696]. Le 1er mars, après plusieurs semaines de siège et de bombardements ayant fait des centaines de morts, l'armée syrienne s'empare du quartier Baba Amr, le principal bastion de la rébellion à Homs[697],[698],[699].
Le la première Conférence internationale des amis de la Syrie se tient en Tunisie, regroupant une soixantaine de délégations occidentales et arabes qui souhaitent voir condamner fermement le régime syrien. Elle se réunit pour la troisième fois à Paris le , avec 106 pays participants qui se heurtent toujours au refus de la Chine et la Russie d'infliger des sanctions à la Syrie. Elle se réunit pour la cinquième fois à Amman, en Jordanie, le [700], et pour la sixième fois à Doha, au Qatar, le [701], avec, chaque fois, 11 pays participants.
Le , alors que Kofi Annan, l'émissaire spécial de l'ONU pour la Syrie, rencontre Bachar el-Assad pour tenter d'obtenir un cessez-le-feu, les forces gouvernementales syriennes assiègent et bombardent la ville d'Idleb, occupée par les rebelles[702],[377]. Le régime syrien entreprend parallèlement de rappeler ses ambassadeurs des 27 pays de l'Union européenne, anticipant leur expulsion en représailles à la répression menée par son armée[377]. Le , Kofi Annan quitte la Syrie sans avoir trouvé de solution à la crise et sans avoir obtenu de concessions d'Assad[703]. Idleb est reconquise le par le régime après la retraite des forces de l'Armée syrienne libre, mal armées[704]. Puis le , la ville de Taftanaz est prise d'assaut par une cinquantaine de chars ; la rébellion y est écrasée après deux jours des combats qui font au moins 120 morts[705].
Le , un cessez-le-feu est conclu entre le gouvernement et l'opposition armée par l'intermédiaire des négociations menées par Kofi Annan[706],[707]. Violé dès le lendemain par les belligérants, le cessez-le-feu ne sera jamais respecté[708].
Au printemps et à l'été 2012, les Chabiha et l'armée syrienne commettent une vague de massacres : le , au moins 26 enfants et 21 femmes sont tués au couteau dans les quartiers de Karm al-Zeitoun et Al-Adawiyé, à Homs[709] ; le , 108 civils, dont 49 enfants et 34 femmes, sont massacrés à Houla[710],[711] ; le , 78 villageois sont tués à Mazraat al-Koubeir[712] ; le , 150 civils sont tués selon l'OSDH par des tirs d'artillerie à Tremseh, près de Hama[713] ; et les 25 et , 600 à 700 personnes sont massacrées par les loyalistes à Daraya[714],[715].
Le , l'Armée syrienne libre tente de remporter un coup décisif et lance une offensive sur la capitale syrienne, Damas, suivie d'une autre cinq jours plus tard à Alep, la deuxième ville du pays[716]. À Damas, le régime résiste et organise une contre-offensive qui chasse les rebelles du centre de la capitale le [717]. À Alep, les combats sont indécis et la ville se retrouve rapidement coupée en deux : les quartiers est et sud tombent aux mains des rebelles, tandis que les loyalistes tiennent ceux au nord et à l'ouest[718],[719].
Afin de renforcer ses troupes à Alep, l'armée syrienne se retire du Kurdistan syrien (Rojava). Les loyalistes maintiennent des garnisons dans les villes de Qamichli et d'Hassaké, mais les miliciens kurdes du PYD, la branche syrienne du PKK, prennent sans tirer un coup de feu le contrôle d'Afrine le , de Kobané le et de plusieurs autres localités[720],[721]. La région passe alors sous le contrôle du PYD et de sa branche armée, les YPG. Ces derniers écartent les partis du Conseil national kurde (CNK) liés à Barzani et proches du Conseil national syrien, dont les dirigeants sont contraints de s'exiler au Kurdistan irakien[722].
À partir de l'été 2012, les rebelles commencent à accumuler les victoires dans le nord la Syrie et le régime syrien perd progressivement le contrôle de sa frontière avec la Turquie. L'Armée syrienne libre prend Jarablous le [723], Azaz le [724] et Manbij le [721]. Elle s'emparent également de plusieurs poste-frontières : Bab Al-Hawa le 19 juillet[723], Al-Salama le 22 juillet[725],[723], et Anadane le 30 juillet, ce qui permet aux rebelles de disposer d'une voie de ravitaillement reliant Alep à la Turquie[726]. Au début du mois d'août, les villes de Marea et Al-Bab sont prises à leur tour et toute la région située au nord d'Alep se retrouve alors sous le contrôle des rebelles[721]. Ces derniers poursuivent ensuite leur progression le long de la frontière turque, cette fois vers l'est dans le gouvernorat de Raqqa et le gouvernorat d'Hassaké. Ils s'emparent de la ville de Tell Abyad le [727], puis de Ras al-Aïn le [728],[729]. Mais dans cette dernière ville, les rebelles du Front al-Nosra et de la brigade Ghouraba Al-Cham de l'Armée syrienne libre entrent en conflit le avec les Kurdes des Unités de protection du peuple (YPG). Une trêve est conclue le mais les combats reprennent en décembre, jusqu'à ce qu'une nouvelle trêve soit conclue en [730],[731],[732].
Dans le gouvernorat d'Idleb, les rebelles s'emparent du village de Khirbet al-Joz le [733], puis de la ville de Maarat al-Nouman le après de violents combats, mais les loyalistes conservent les bases militaires de Wadi al-Deïf et Hamidiyé, situées à proximité[734]. Les rebelles s'emparent ensuite de la région de Saraqeb le [735].
Les rebelles progressent également dans l'est du pays. Ils commencent par prendre le contrôle des postes-frontières avec l'Irak, puis ils s'emparent de Boukamal le [736], et de Mayadine le [737]. Fin novembre, le gouvernorat de Deir ez-Zor est presque entièrement aux mains des rebelles ; la ville Deir ez-Zor est toujours tenue par les loyalistes mais elle est isolée et encerclée[731].
En novembre, les rebelles continuent d'avancer dans le gouvernorat d'Alep. Le , après des semaines de combats intenses, ils prennent le contrôle de la base du Régiment 46, l'une des plus importantes bases militaires de l'armée syrienne dans le nord du pays[738]. Le , ils s'emparent du barrage de Tichrin[739]. Enfin le , le Front al-Nosra prend d'assaut la base du bataillon 111, dite « Cheikh Souleimane »[740].
À la mi-, rassemblant ses forces dans le nord-ouest de la Syrie, l'Armée syrienne libre lance une offensive dans le nord de du gouvernorat de Hama, avec l'objectif d'atteindre la ville de Hama, toujours contrôlée par les loyalistes, mais l'avancée des rebelles est modeste[741],[742].
Le , l'aviation syrienne bombarde la mosquée Abdelkader Husseini dans le camp de Yarmouk au sud de Damas : 160 réfugiés palestiniens sur les 500 présents dans la mosquée sont tués[743].
2013 : Contre-offensives des loyalistes et attaques chimiques
[modifier | modifier le code]Au début de l'année 2013, les rebelles poursuivent leur avancée dans le nord de la Syrie. Le , dans le gouvernorat d'Idleb, la base aérienne de Taftanaz, la plus grande du nord du pays, est prise par le Front al-Nosra, Ahrar al-Cham et l'Armée syrienne libre après deux mois d'assaut[744],[745]. Près du Lac el-Assad, entre Alep et Raqqa, les rebelles prennent la ville de Tabqa le , puis l'aéroport d'Al-Jirah le 12[746]. Le , le Front al-Nosra s'empare de la ville d'Al-Chaddadeh, au sud d'Hassaké, après deux jours de combats et la mort d'une centaine de soldats syriens[747]. Début mars, le Front al-Nosra prend la ville de Yaaroubiyé, ainsi que son poste-frontière avec l'Irak[748]. Enfin le , après trois jours de combats et plus d'une centaine de morts, la ville de Raqqa est prise par les forces d'Ahrar al-Cham, du Front de libération de Raqqa et du Front al-Nosra. Raqqa est la première capitale d'un gouvernorat à tomber aux mains de la rébellion depuis le début du conflit[749],[750],[751].
Le , l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL) apparaît en Syrie lorsque Abou Bakr al-Baghdadi annonce la fusion de son groupe, l'État islamique d'Irak, avec le Front al-Nosra, dirigé par Abou Mohammed al-Joulani. Cependant, la question divise le Front al-Nosra : certains djihadistes prêtent allégeance à Abou Bakr al-Baghdadi, mais Abou Mohammed al-Joulani et une partie de ses troupes refusent la fusion[26],[752]. L'État islamique en Irak et au Levant commence à s'implanter à Raqqa peu de temps après la chute de la ville, avant de prendre progressivement l'ascendant avec des assassinats et des affrontements ponctuels contre d'autres groupes rebelles[751].
Cependant, si les rebelles continuent de progresser au nord de la Syrie, les loyalistes regagnent du terrain sur les fronts de Damas et de Homs, notamment avec l'intensification à partir de février de l'intervention militaire de la milice libanaise chiite du Hezbollah[753]. À Damas, une offensive menée par l'armée à l'est de la capitale permet au régime d'encercler les rebelles dans la Ghouta orientale le [754],[629]. Près de Homs, le Hezbollah et l'armée syrienne avancent vers la ville stratégique de Qousseir, qui garde la principale voie d'approvisionnement en armes pour les rebelles de Homs[755]. Le , après la reconquête de plusieurs villages, le Hezbollah et les forces du régime syrien sont aux portes de la ville. Les combats durent environ deux semaines et les rebelles subissent de très lourdes pertes : environ 500 morts et un millier de blessés. Le , l'ASL se retire de Qousseir qui est entièrement reconquise par le régime syrien[756]. L'armée syrienne et le Hezbollah lancent ensuite en juillet une offensive à l'intérieur de la ville Homs qui leur permet de reprendre le quartier de Khaldiyé, le plus grand de la ville aux mains des insurgés[757],[758]. Les rebelles ne conservent alors plus à Homs essentiellement que la vieille ville, où ils sont isolés et encerclés[757].
À l'ouest de la Syrie, dans le gouvernorat de Tartous, majoritairement alaouite et pro-gouvernemental, l'armée syrienne et les Forces de défense nationale attaquent le les rebelles dans l'îlot sunnite d'al-Bayda. Les forces de l'opposition sont chassées de la zone mais après leur victoire, les loyalistes commettent des massacres à al-Bayda et dans le quartier de Ras al-Nabaa, à Banias. Au moins 248 à 450 civils sont tués, dont des femmes et des enfants[759],[760].
Dans la région d'Alep, les rebelles continuent d'avancer au cours de l'été. Le , ils s'emparent de Khan al-Assal, à l'ouest d'Alep, après plusieurs mois de combats et des centaines de morts dans les deux camps[761],[762],[763],[764]. Le , la base aérienne de Menagh est prise à son tour après un siège d'un an[765]. Le , les rebelles prennent Khanasser, au sud-est d'Alep, et coupent la ligne de ravitaillement des loyalistes à l'intérieur d'Alep[766].
Dans le gouvernorat de Lattaquié, une offensive est lancée le par l'État islamique en Irak et au Levant, le Front al-Nosra, Jaych al-Mouhajirine wal-Ansar et Ahrar al-Cham. Elle est repoussée par les loyalistes le , mais pendant les combats 67 à 190 civils alaouites sont massacrés par les djihadistes[767],[768].
À partir de fin 2012, le régime syrien commence à recourir aux armes chimiques et en particulier au gaz sarin[769],[770]. Dans les villes et les quartiers tenus par les rebelles de la Ghouta, à l'est et au sud de Damas, les attaques chimiques débutent en , mais elles sont initialement de faible ampleur[769],[770]. Cependant, le , une offensive de l'armée syrienne s'accompagne d'une nouvelle attaque au sarin particulièrement meurtrière : entre plusieurs centaines et près de 2 000 personnes sont tuées selon les estimations, dont un grand nombre de femmes et d'enfants[771],[769]. Pour les pays occidentaux, la « ligne rouge » est franchie et les États-Unis, la France et le Royaume-Uni envisagent sérieusement d'intervenir militairement en Syrie en lançant une campagne de frappes aériennes contre le régime de Bachar el-Assad[772]. Mais à Londres, la Chambre des communes vote contre une intervention tandis qu'à Washington, le président Barack Obama hésite et demande l'autorisation du Congrès[773],[774]. La Russie propose alors un plan de démantèlement de l'arsenal chimique syrien, sous la supervision de l'OIAC[775]. Le régime syrien accepte et le , les États-Unis et la Russie annoncent qu'un accord a été trouvé[776]. Le démantèlent dure plus de deux ans ; l'OIAC annonce la destruction totale de l'arsenal déclaré par Damas le [777]. Le régime syrien ne cesse cependant pas son utilisation d'armes non conventionnelles et commence dès à recourir au chlore[778],[779].
Le revirement américain marque un tournant du conflit syrien[441]. Les opposants qui avaient misé sur une intervention militaire occidentale pour faire chuter le régime sont désormais discrédités. Le , des brigades du Front islamique de libération syrien et du Front islamique syrien déclarent qu'elles rejettent la Coalition nationale syrienne et affirment que cette organisation ne les représente pas[173]. Ces deux mouvements sont dissous deux mois plus tard et le , plusieurs groupes rebelles islamistes — dont les principaux sont Ahrar al-Cham, Jaych al-Islam et Liwa al-Tawhid — annoncent la formation d'un nouveau rassemblement : le Front islamique, qui devient le plus important mouvement rebelle syrien[18],[780],[781]. L'Armée syrienne libre, affaiblie, perd en décembre le contrôle de son quartier-général à Bab Al-Hawa, près de la frontière turque, qui est pillé par le Front islamique[174].
Le , située entre Homs et Damas, la petite ville chrétienne de Maaloula, position stratégique dans la région montagneuse de Qalamoun, est attaquée par un grand nombre de combattants du Front Al-Nosra et de rebelles. La ville tombe entre leurs mains le . Les édifices religieux sont saccagés et quelques habitants sont tués ou enlevés[782]. La ville est reprise par les loyalistes le [783], mais le les rebelles repassent à l'attaque et reprennent Maaloula le [784],[785]. Pendant ce temps, un peu plus au nord, dans le gouvernorat de Homs, les rebelles et les djihadistes attaquent le le dépôt d'armes de Mahin et la petite ville chrétienne de Sadad. Cette dernière est rapidement prise, de même qu'une partie du dépôt le . Mais les loyalistes contre-attaquent et reprennent Sadad le , avant de chasser les rebelles de Mahin le au prix de plusieurs centaines de morts[786],[787],[788],[789],[790]. L'armée syrienne et le Hezbollah poursuivent ensuite leur progression dans le Qalamoun : ils prennent Qara le , puis Deir Attiya le 28 et enfin Nabak le [791],[792],[793].
Début octobre également, l'armée syrienne lance une offensive au sud d'Alep : elle reprend Khanasser le , puis As-Safirah le 1er novembre, et parvient à percer les lignes rebelles et à rétablir une voie d'accès reliant Alep au gouvernorat de Hama[794],[795]. Dans le centre de la Syrie, l'armée reprend également en octobre les villes de Palmyre et d'Al-Soukhna[796].
Pendant ce temps, dans le nord-ouest de la Syrie, les incidents puis les affrontements se multiplient entre l'État islamique en Irak et au Levant et l'Armée syrienne libre. Plusieurs chefs de l'ASL sont assassinés par les djihadistes et en juillet des dizaines de rebelles sont tués dans une bataille dans le gouvernorat d'Idleb[797],[798],[799]. Dans le gouvernorat d'Alep, des combats éclatent le à Azaz entre l'EIIL et la Brigade de la Tempête du Nord. Les djihadistes prennent l'avantage et s'emparent de la ville début octobre[800],[801],[802],[803],[804],[805]. Le , une autre brigade de l'ASL est attaquée à l'intérieur d'Alep et chassée de trois secteurs au terme de combats qui font une cinquantaine de morts[752].
De leur côté, les Kurdes des YPG livrent pendant l'année 2013 plusieurs combats dans le gouvernorat d'Hassaké, au nord-est de la Syrie. Le 1er mars, après des affrontements contre les troupes du régime, ils s'emparent des petites villes de Qahtaniyé et de Rmeilane (en), à l'est de Qamichli[806]. Le , après plusieurs mois de trêve, les combats reprennent à Ras al-Aïn et les Kurdes parviennent le lendemain à repousser les djihadistes du Front al-Nosra et de l'État islamique en Irak et au Levant hors de la ville[807]. En octobre, les YPG prennent le poste-frontière de Yaaroubiyé[206]. En décembre, ils lancent avec les assyriens du MFS une offensive sur Tall Hamis, à l'est d'Hassaké, mais cette fois les groupes rebelles et djihadistes les repoussent début [808],[809].
Fin 2013, les Nations unies soutiennent la mise en place d'une conférence diplomatique internationale sur le futur de la Syrie. Baptisé « conférence Genève II sur la Syrie»[810], « Conférence de paix au Moyen-Orient Genève II » ou simplement « Genève 2 », le processus a pour objectif de mettre fin au conflit en amenant les belligérants à la table des négociations[811],[812] avec pour objectif avoué de négocier la création d'un gouvernement de transition doté de tous les pouvoirs exécutifs[813]. La conférence débute le à Montreux et se poursuit, du 23 au , à Genève à un moment ou le régime syrien a repris l'avantage militaire sur les rebelles. En l'absence de résultats tangibles, un second round a lieu à partir du et les travaux sont suspendus le [814].