Gouvernement Erbakan

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Gouvernement Erbakan
(tr) Erbakan Hükûmeti

République de Turquie

Description de cette image, également commentée ci-après
Necmettin Erbakan, le .
Président de la République Süleyman Demirel
Premier ministre Necmettin Erbakan
Élection 24 décembre 1995
Législature 20e (en)
Formation
Fin
Durée 1 an et 2 jours
Composition initiale
Coalition RP-DYP
Ministres 37
Femmes 3
Hommes 34
Moyenne d'âge 50 ans
Représentation
Grande Assemblée nationale de Turquie
278  /  550
Drapeau de la Turquie

Le gouvernement Erbakan (en turc : Erbakan Hükûmeti) est le cinquante-quatrième gouvernement de la république de Turquie (en turc : 54. Türkiye Cumhuriyeti Hükûmeti), en fonction entre le et le , durant la vingtième législature (en) de la Grande Assemblée nationale de Turquie.

Historique[modifier | modifier le code]

Élections de 1995 et invalidation du gouvernement précédent[modifier | modifier le code]

Le gouvernement Yılmaz II (en), formé du Parti de la mère patrie (ANAP) et du Parti de la juste voie (DYP), voit le jour le avec l'approbation du président Süleyman Demirel et à l'initiative de l'armée, qui souhaite écarter le Parti du bien-être (RP), à qui elle reproche son orientation islamiste, qui est alors arrivé en tête à la majorité relative des élections législatives turques de 1995[1],[2].

Le , immédiatement après l'investiture du nouveau cabinet, arguant que le quorum n'a pas été atteint lors du vote de confiance, Necmettin Erbakan dépose un recours à la Cour constitutionnelle pour invalider le gouvernement. Le , la Cour constitutionnelle accepte le recours et annule le vote. Les députés du RP déposent une motion de censure contre le gouvernement déchu le , celle-ci est votée par le Parlement le .

Formation[modifier | modifier le code]

Trois jours plus tard, le Premier ministre Mesut Yılmaz remet sa démission au président Süleyman Demirel qui l'accepte et demande au principal chef de l'opposition (en), Necmettin Erbakan, de former un nouveau gouvernement.

Après trois semaines d’intenses négociations avec Tansu Çiller, Necmettin Erbakan parvient finalement à constituer un gouvernement de coalition entre le RP et le DYP le [3]. Le protocole de coalition entre les deux partis prévoit une rotation à la tête du gouvernement tous les deux ans, Necmettin Erbakan devant assumer la charge en premier de 1996 à 1998 et Tansu Ciller de 1998 à 2000. En attendant son tour, cette dernière est nommée vice-Première ministre et ministre des Affaires étrangères[4]. Outre le Premier ministre, le gouvernement est paritaire avec 18 ministres pour chaque parti.

Le , le gouvernement obtient la confiance par 278 votes pour, 265 contre et 1 abstention[5]. De nombreux députés du Parti de la juste voie (dont le ministre des Affaires étrangères du gouvernement précédent Emre Gönensay) ayant voté contre la confiance, le soutien sans participation des sept députés du Parti de la grande unité (BBP) s'avère décisive dans l'obtention de cette dernière[5].

Évolution[modifier | modifier le code]

Opposé à la visite d'État controversée de Necmettin Erbakan en Libye[6], le ministre de l'Intérieur Mehmet Ağar (en) (DYP) démissionne le [7],[8]. Il est aussitôt remplacé par Meral Akşener (DYP)[8], qui devient, à cette occasion, la première femme ministre de l'Intérieur de l'histoire de la Turquie[9]. Il est à noter que la démission d'Ağar intervient quelques jours seulement après l'affaire de Susurluk dans laquelle il s'est retrouvé directement mis en cause (des faux signés de sa main ayant été retrouvés dans une voiture à bord de laquelle voyageaient un député de son parti, le numéro deux de la police d'Istanbul et un tueur à gages d'extrême droite accompagné sa compagne) et pourrait donc avoir été, en réalité, motivée par cette dernière[10],[11].

Le , le ministre de l'Industrie et du Commerce Enis Yalım Erez (tr) et le ministre de la Santé Yıldırım Aktuna (en), tous deux membres du DYP, démissionnent de leurs postes respectifs pour protester contre l'orientation islamique du gouvernement[12]. Le premier est remplacé par Ali Rıza Gönül (tr) et le second par le ministre d'État Nafiz Kurt qui assure seulement l'intérim avant que le poste de ministre de la Santé ne soit pris en charge par le ministre d'État İsmail Karakuyu (tr), le .

Le , alors que la crise politique s'accentue et que la démission prochaine d'Erbakan est évoquée, c'est au tour du ministre du Tourisme Bahattin Yücel (tr) de donner sa démission, ce dernier refusant le maintien d'une coalition avec le Parti du bien-être[13] au motif qu'« il est inacceptable de s'accrocher à tout prix au pouvoir »[14].

Succession[modifier | modifier le code]

Après avoir temporisé en acceptant d'appliquer les mesures prônées par l'armée en avril 1997 lors du mémorandum militaire turc de 1997[15], Erbakan est finalement contraint de démissionner le sous la pression de l'armée. 186 associations et syndicats dont le TISK, et les trois principales confédérations de salariés avaient lancé début juin au Premier ministre un appel commun l'encourageant à se retirer[16],[17].

La coalition sortante, qui ne dispose désormais plus de la majorité au Parlement, propose Tansu Çiller comme Première ministre dans le cadre d'une rotation anticipée à la tête du gouvernement, et des élections anticipées pour la fin de l'année 1997 ou pour le printemps 1998[14]. Mais le président Süleyman Demirel désigne de nouveau Mesut Yılmaz, pour former le nouveau gouvernement. Il constitue le une nouvelle équipe (en)[17],[18].

Composition[modifier | modifier le code]

Poste Titulaire Parti
Premier ministre Necmettin Erbakan RP
Vice-Première ministre (en)
Ministre des Affaires étrangères
Tansu Çiller DYP
Ministre d'État
Porte-parole du gouvernement
Abdullah Gül RP
Ministre d'État Namık Kemal Zeybek (en) DYP
Nevzat Ercan (tr)
Fehim Adak RP
Gürcan Dağdaş (tr)
Salim Ensarioğlu (tr) DYP
Ahmet Demircan (en) RP
Teoman Rıza Güneri (tr)
Sacit Günbey (tr)
Ufuk Söylemez (tr) DYP
Ayfer Yılmaz (en)
İsmail Karakuyu (tr)
Ahmet Cemil Tunç (tr) RP
Sabri Tekir (tr)
Bekir Aksoy (tr) DYP
Lütfü Esengün (tr) RP
Mehmet Altınsoy (en)
Işılay Saygın (en) DYP
Nafiz Kurt
Bahattin Şeker (tr)
Ministre de la Justice Şevket Kazan RP
Ministre de la Défense nationale Turhan Tayan (en) DYP
Ministre de l'Intérieur Mehmet Ağar (en) (jusqu'au 08/11/1996)
Meral Akşener
Ministre des Finances Abdüllatif Şener RP
Ministre de l'Éducation nationale Mehmet Sağlam (tr) DYP
Ministre des Travaux publics et du Logement Cevat Ayhan (tr) RP
Ministre de la Santé Yıldırım Aktuna (en) (jusqu'au 26/04/1997)
Nafiz Kurt a.i. (jusqu'au 17/05/1997)
İsmail Karakuyu (tr)
DYP
Ministre des Transports Ömer Barutçu (tr)
Ministre de l'Agriculture et des Affaires rurales Musa Demirci (tr) RP
Ministre du Travail et de la Sécurité sociale Necati Çelik (tr)
Ministre de l'Industrie et du Commerce Enis Yalım Erez (tr) (jusqu'au 26/04/1997)
Ali Rıza Gönül (tr)
DYP
Ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles Recai Kutan (tr) RP
Ministre de la Culture İsmail Kahraman
Ministre du Tourisme Bahattin Yücel (tr) DYP
Ministre de l'Environnement Ziyaettin Tokar (tr) RP
Ministre des Forêts Halit Dağlı (tr) DYP

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Fatih Karakaya, « Turquie : Le 28 février 1997, le jour où des millions de rêves furent brisés », Agence Anadolu, (consulté le )
  2. « Accession de Necmettin Erbakan au poste de premier ministre de la Turquie », Université de Sherbrooke (consulté le )
  3. (tr) « 54 Erbakan Hükümeti ( 28.06.1996 - 30.06.1997) » [archive du ], Grande Assemblée nationale de Turquie
  4. (tr) « Cumhuriyetin seyir defterinden » [archive du ], Hürriyet,
  5. a et b Marc Semo et Musa Akdemir, « Erbakan, le Premier ministre, a obtenu la confiance du Parlement.Après soixante-treize ans de laïcité un islamiste dirige la Turquie », Libération, (consulté le )
  6. (en) Seva Ulman, « Turkish chief leaves for Libya, Nigeria », United Press International, (consulté le )
  7. (tr) Mahmut Hamsici, « Mehmet Ağar ve yaklaşık 50 yıldır 'devlet adına' yapılanların hikayesi », BBC News, (consulté le )
  8. a et b (tr) « Tarihte bugün: 8 Kasım 1996: İçişleri Bakanı Mehmet Ağar istifa etti, yerine Meral Akşener İçişleri Bakanı Oldu », Yeni Akit, (consulté le )
  9. David Hearst, « La poutinisation d’Erdoğan », sur MiddleEastEye.net, (consulté le )
  10. « Susurluk par où le scandale arrive », Le Temps, (consulté le )
  11. (tr) « İkinci kararname krizi... », Vatan, (consulté le )
  12. (en) « 2 Officials Opposing Islamic Trend Resign », Los Angeles Times, (consulté le )
  13. (en) Seva Ulman, « More resignations weaken Turk coalition », United Press International, (consulté le )
  14. a et b (en) Musa Akdemir, « Erbakan rentre dans le rang en Turquie. Le Premier ministre islamiste devrait démissionner le 18 juin. », Libération, (consulté le )
  15. Nicolas Pope, « Les dirigeants civils et militaires turcs continuent de s'affronter sur l'islamisme », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  16. Rédaction Le Monde.fr et AFP, « Turquie : un ex-chef de l'armée arrêté pour un putsch en 1997 », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  17. a et b Marc Semo (juillet), « L'armée turque dicte sa loi sans bouger. Un gouvernement de coalition a été constitué pour barrer la route aux islamistes », Libération,‎ (lire en ligne)
  18. rédaction LM, « L'armée turque et les islamistes », Le Monde,‎ (lire en ligne)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Lien externe[modifier | modifier le code]