La réglisse ou réglisse glabre — du grecγλυκύρριζα[1] (Glycyrrhiza glabra L.) — est une espèce de plante à fleurs de la famille des Fabacées, de la sous-famille des Faboideae, aux racines aromatiques. C'est une plante herbacée originaire du sud de l'Europe et de l'Asie, qui pousse dans le bassin méditerranéen, aux États-Unis, au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et à l'Île Maurice. Utilisée dans l'alimentation, elle relève dans certains pays d'une réglementation d'utilisation.
Le nom du genreGlycyrrhiza vient du grec ; glykys signifiant « sucré » et rhiza signifiant « racines », en référence au goût naturellement sucré et aromatique de la racine. En tant que nom de genre, le mot « réglisse » désigne de nombreuses espèces, mais seules trois servent dans le monde à fabriquer des produits commerciaux à usage alimentaire (ou parfois médicinal) :
Les deux dernières espèces sont utilisées en médecine traditionnelle chinoise et sont pour cette raison appelées « réglisse chinoise »[2]. Seules les deux premières espèces (Glycyrrhiza glabra et Glycyrrhiza uralensis) figurent sur les listes (2014) des plantes autorisées dans les compléments alimentaires de la DGCCRF[3]. En France, en 2025, l'Anses a réévalué les risques sanitaires liés à la consommation de réglisse, après que 64 cas d'effets indésirables ont été rapportés de 2012 à 2021 (principalement liés aux boissons et confiseries)[3].
« Réglisse » désigne aussi la racine, ou plus exactement le rhizome de cette plante. Élixir de longue vie pour la médecine traditionnelle chinoise et selon Hippocrate, cette racine, au goût caractéristique, doux et amer, est récoltée depuis l'Antiquité sur la côte ioniquecalabraise, où elle pousse naturellement.
Ce mot désigne en outre l'extrait aromatique issu du rhizome de cette plante, utilisé en confiserie (il désigne également la confiserie confectionnée à partir de cet arôme). Dans ce dernier cas, « réglisse » peut être employé au masculin comme au féminin[4].
Une fois plantée dans une zone climatique lui convenant, la réglisse a tendance à devenir invasive : même après arrachage des racines, le moindre fragment laissé en terre engendrera un nouveau plant.
Glycyrrhiza vient du grec γλυκύς glucus (doux, sucré), et ῥἰζα rhidza (racine, rhizome). La réglisse a reçu différentes appellations : bois doux, bois sucré, racine douce, ou régalisse.
La réglisse était connue des Grecs et des Romains, de Théophraste et de sainte Hildegarde, qui l'employaient notamment pour s'éclaircir la voix[6]. Mélangée à de la racine de chiendent torréfiée, elle entrait dans la composition de la boisson dite « hospitalière », qui se trouvait jadis sur les tables de chevet dans tous les hôpitaux[7].
La réglisse contient de nombreux principes actifs, principalement dans sa racine :
des saponosidestriterpéniques pharmacologiquement actifs[10],[11],[12],[13]. Parmi ces nombreux saponosides triterpéniques, dans le genre Glycyrrhiza, figure l'acide glycyrrhizique (aussi appelé glycyrrhizine)[14], où on l'y retrouve lié aux sels de calcium et de potassium ; c'est le constituant actif majoritaire des racines de Glycyrrhiza uralensis et Glycyrrhiza glabra,[2]. C'est un édulcorant naturel 50 à 100 fois plus sucré que le sucre raffiné mais toxique à des doses qui sont atteintes par les amateurs de réglisse ou consommant des produits en contenant.
Réclame pour Antésite parue dans Le Petit Marocain (1939)Pour la fabrication de sirop et de pâte à friandise.
Un des composants du pastis de Marseille (y compris de pastis sans alcool), avec un cas d'intoxication mortelle[18] ;
Le coco, appelé aussi à ses débuts « tisane », boisson bon marché et très populaire vendue jadis dans la rue à Paris et Bruxelles, ou sous forme de poudre.
L'Antésite, concentré liquide de réglisse à diluer avec de l'eau.
La réglisse, en bâton à mâcher, est utilisée notamment comme substitut au tabac, pour faire passer l'envie de fumer. On lui donne parfois le nom de « bois doux » en Suisse.
En France, le Coco Boer est une friandise qui doit son nom au coco en poudre mentionné ci-dessus. Bien que cessant d'être commercialisé dans les années 1970, le terme est resté connu grâce à la chanson de Renaud, Mistral gagnant.
En France, un arrêté[19], encadre notamment l'utilisation de la réglisse et ses conditions d'emploi. La consommation des racines, rhizomes et stolons des espèces Glycyrrhiza glabra L. et Glycyrrhiza uralensis Fisch est autorisée, mais avec une limite maximale de consommation journalière établie à 100 mg d'acide glycyrrhizique et avec un étiquetage précisant clairement au consommateur de ne pas consommer de compléments alimentaires contenant de la réglisse pendant plus de 6 semaines sans avis médical. L'étiquetage doit également déconseiller l'emploi de ces compléments alimentaires chez les enfants et contenir les mentions suivantes :
« déconseillé en cas d'hypertension artérielle, de pathologies cardiaques ou rénales, d'insuffisance hépatique, et de tout trouble de l'équilibre hydroélectrolytique » ;
« en cas de traitements médicamenteux, demander conseil à un professionnel de santé » ;
« déconseillé aux femmes enceintes et allaitantes » ;
« réservé aux adultes ».
« Cette liste de plantes a été consolidée et publiée par la DGCCRF en janvier 2019 [20]. La Direction générale de l'alimentation (DGAL), qui a la compétence sur les compléments alimentaires depuis 2023, reprend sur son site [21] les recommandations relatives à la réglisse émises par l'Anses pour les compléments alimentaires (2019). Ces recommandations ont été extrapolées des recommandations émises dans les monographies de plantes médicinales de l'Agence européenne du médicament (EMA) » et mises à jour en 2025.
« L'acide glycyrrhizique ne figure pas dans la liste des substances à but nutritionnel ou physiologique éligibles à l'article 15 du décret n°2006-352 relatif aux compléments alimentaires publiée par la DGCCRF8 et ne figure pas non plus dans la liste des substances à but nutritionnel ou physiologique autorisées dans les compléments alimentaires en Annexe I de l'arrêté du 26 septembre 20169 »
Des extraits de réglisse aromatisent maintenant de nombreux aliments et boissons (y compris alcoolisées comme le pastis), tisanes et compléments alimentaires ; la teneur en extrait de réglisse dans la confiserie et les boissons est assez variable et est théoriquement notifiée sur les étiquettes . Les pharmacologues estiment qu'en utilisation prolongée, il est préférable de ne pas absorber plus de 125 à 150 mg de glycyrrhizine par jour[22].
Autrefois, la réglisse servait, avec l'orge et le chiendent, à préparer la tisane ordinaire des hôpitaux, sans indication particulière, dite « bonne à tout »[7].
De nos jours, la réglisse sous la forme de poudre ou de sirop est utilisée pour cuisiner des plats et desserts salés ou sucrés (viandes blanches, poissons, glaces, gâteaux, jus de fruits).
Le goût de la réglisse provient de l'anéthol. Selon plusieurs scientifiques[Qui ?], le goût et l'odeur de la licorice et de la réglisse noire pourraient être liés à l'expression d'un gène[23].
La réglisse (sèche) contient 3 à 5 % d'acide glycyrrhizine, un édulcorant naturel, qui peut en cas de consommation excessive, provoquer un « pseudohyperaldostéronisme, entraînant hypertension et hypokaliémie (baisse du potassium), avec des risques de troubles cardiaques »[24]. Cette molécule est en grande majorité responsable des effets indésirables associés à la consommation de réglisse par son métabolite, l'acide glycyrrhétique, également appelé acide glycyrrhétinique ou énoxolone.
Sa concentration dans la racine des trois espèces considérées varie de 2 à 15 % (pourcentage massique du poids sec), atteignant un maximum de 20 % dans certains échantillons selon l'espèce végétale, les conditions de culture, le climat, la saison ou l'origine géographique. L'acide glycyrrhétique est présent à des taux beaucoup plus faibles que l'acide glycyrrhizique, de l'ordre de 0,1 à 1,6 %, selon Sabbioni et al. (2005)[25]. L'acide glycyrrhétique (métabolite de la glycyrrhizine) est 200 à 1 000 fois plus active sur ce système enzymatique que la réglisse pure. Le seuil toxique serait, chez une personne moyenne, aux alentours d'un gramme de glycyrrhizine par jour sur une durée prolongée, mais certaines personnes peuvent montrer des signes d'intoxication à des doses plus faibles (300 à 400 mg/j).
En France, en 2025, l'Anses a réévalué les risques sanitaires liés à la consommation de réglisse, après que, de 2012 à 2021, 64 cas d'effets indésirables ont été rapportés (principalement liés aux boissons et confiseries)[3]. L'Anses a fixé une valeur toxicologique indicative de 0,14 mg d'acide glycyrrhizique par kg de poids corporel par jour. La population générale est peu exposée, mais[24] 60 % des adultes et 40 % des enfants qui consomment régulièrement des produits à base de réglisse dépassent ce seuil de sécurité. « Chez les adultes, les principaux aliments vecteurs d’acide glycyrrhizique sont les boissons alcoolisées (environ 65-70 %), les confiseries (environ 16-18 %) et les thés et tisanes (environ 7-16 %). Chez les enfants, les aliments concernés sont les confiseries (un peu plus de 75 %), les thés et tisanes (environ 13-16 %) et les boissons rafraîchissantes sans alcool (environ 5 %). »[24].
L'Anses recommande de ne pas cumuler les produits en contenant, et pour les personnes souffrant de pathologies cardiaques ou rénales, de signaler leur consommation aux professionnels de santé[3]. L'Agence préconise aussi un étiquetage informant les usagers de la présence de réglisse ou d'acide glycyrrhizique, et une vigilance accrue des praticiens[24].
Médecins, pharmaciens et diététiciens devraient systématiquement questionner leurs patients à propos de leur éventuelle consommation de réglisse sous toutes ses formes (compléments alimentaires y compris), notamment pour les personnes atteintes de pathologies cardiaques ou rénales, d'insuffisance hépatique, d'hypokaliémie, ainsi que pour les femmes enceintes ou allaitantes, et celles sous traitement médical susceptible d'interagir avec la réglisse. L'Anses demande ainsi aux professionnels de santé et aux fabricants de respecter l'impératif de vigilance sanitaire consistant à déclarer tout effet indésirable potentiellement lié à la consommation de compléments alimentaires (sur son dispositif de nutrivigilance)[3]. L'Agence appelle également l'industrie alimentaire à fournir des données plus précises sur la teneur en acide glycyrrhizique (le composé actif de la réglisse) dans les aliments et sur le profil toxicologique de cette substance, pour mieux évaluer les expositions et établir une valeur toxicologique de référence plus robuste, et in fine envisager - si cela se justifie - une nouvelle teneur maximale réglementaire pour l'acide glycyrrhizique dans les aliments, ainsi qu'une définition d'une dose journalière maximale dans les compléments alimentaires[3].
L'Anses invite enfin à poursuivre l'harmonisation européenne des listes de plantes, des usages, des doses autorisées, ainsi que des restrictions et avertissements encadrant l'utilisation des compléments alimentaires[3].
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↑arrêté du 24 juin 2014, établissant la liste des plantes, autres que les champignons, autorisées dans les compléments alimentaires, et les conditions de leur emploi
↑(en) Cesare Sabbioni, Roberto Mandrioli, Anna Ferranti et Francesca Bugamelli, « Separation and analysis of glycyrrhizin, 18β-glycyrrhetic acid and 18α-glycyrrhetic acid in liquorice roots by means of capillary zone electrophoresis », Journal of Chromatography A, vol. 1081, no 1, , p. 65–71 (DOI10.1016/j.chroma.2005.03.044, lire en ligne, consulté le )