Fusion d'étoiles à neutrons du 17 août 2017

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GW170817
Mesures de la collaboration LIGO-Virgo du signal GW170817.
Mesures de la collaboration LIGO-Virgo du signal GW170817.
Détection
Date de détection
Publication des résultats
Détecté par LIGO
Virgo
Données
Source coalescence de deux étoiles à neutrons
Durée du signal 100 s
Décalage vers le rouge (z) 0,008+0,002
−0,003
Énergie totale libérée (Erad) > 0,025 Mc2


La fusion de deux étoiles à neutrons a été détectée le au sein de la galaxie NGC 4993, tant sous forme d'ondes gravitationnelles que sous forme lumineuse.

Au total, outre LIGO et Virgo, ce sont quelque 70 observatoires, au sol et dans l'espace, qui ont participé au suivi de l'évènement. C'est la première détection d'ondes gravitationnelles pour laquelle une contrepartie électromagnétique a été détectée. Cette détection renforce l'hypothèse selon laquelle les sursauts gamma, ou au moins une partie d'entre eux, sont le résultat de la fusion de deux étoiles à neutrons.

Informations générales[modifier | modifier le code]

Informations[1]
Masse de la première étoile à neutrons 1,36 à 1,60 (hypothèse d'une valeur faible pour le spin)
Masse de la seconde étoile à neutrons 1,17 à 1,36 (hypothèse d'une valeur faible pour le spin)
Rayon des deux étoiles à neutrons[2] 11,9+1,4
−1,4
km
Masse finale 2,74+0,04
−0,01
(hypothèse d'une valeur faible pour le spin)
Énergie rayonnée sous forme d'ondes gravitationnelles > 0,025
Distance de la source 40+8
−14
 Mpc
Redshift de la source 0,008+0,002
−0,003

GW170817, l'évènement d'ondes gravitationnelles[modifier | modifier le code]

Le signal GW170817 détecté par les deux instruments de LIGO et par Virgo.

GW170817 est le nom du signal attribué à une observation directe d’ondes gravitationnelles annoncée le par les collaborations LIGO et Virgo. La détection du signal a été effectuée le à 12 h 41 UTC sur les trois sites, et a duré près de 100 s. L'analyse du signal indique la fusion de deux astres de 1,1 à 1,6 masse solaire (des masses typiques d'étoiles à neutrons)[3],[4].

GRB 170817A, le sursaut gamma[modifier | modifier le code]

Un sursaut gamma (GRB 170817A) associé à l'onde gravitationnelle a été détecté environ 1,74 ± 0,05 seconde après le début du signal d'ondes gravitationnelles[4] issu de la coalescence des deux astres par le Fermi Gamma-ray Space Telescope, avec l'instrument GBM, et l'International Gamma-Ray Astrophysics Laboratory (INTEGRAL), avec SPI-ACS. Le signal correspond à la première observation de la coalescence de deux étoiles à neutrons[1].

Ondes radio[modifier | modifier le code]

L'observation détaillée des ondes radio rémanentes — à l'aide des radiotélescopes VLA et VLBA — a permis à une équipe d'astrophysiciens du Caltech de confirmer que le phénomène à l'origine de l'ensemble des signaux correspondait au scénario d'une fusion d'étoiles à neutrons[5].

AT 2017gfo, la kilonova[modifier | modifier le code]

Animation montrant l'évolution d'une kilonova, perdant en luminosité sur quelques jours.
La kilonova issue de l'évènement, observée par Hubble.

AT 2017gfo est un évènement astronomique transitoire. Il a tout d'abord été détecté par le Swope Supernova Survey (en) (SSS), environ 10,9 heures après le signal d'ondes gravitationnelles[6], qui l'a répertorié sous la désignation SSS 17a avant qu'il ne reçoive sa désignation officielle de l'Union astronomique internationale, AT 2017gfo[7]. L'évènement a aussi été observé par le relevé de supernovas Distance Less Than 40 Megaparsecs (DLT40) et répertorié sous la désignation DLT17ck[8]. Étant donné sa rareté et sa proximité spatio-temporelle avec GW170817, AT 2017gfo est très probablement issu de la même fusion d'étoiles à neutrons (la probabilité que les deux ne soient pas liés est estimée inférieure à 10-9)[9].

Au moment de sa découverte, l'évènement transitoire possède une magnitude absolue de −15,8 ± 0,1, passant probablement par un pic entre 11 et 35 heures après observation du signal d'ondes gravitationnelles puis diminuant rapidement (près d'une magnitude de moins 35 heures après la première observation)[8]. Son spectre est également singulier, avec une évolution rapide vers le rouge et peu de motifs discernables relativement aux autres évènements astronomiques transitoires observés jusqu'alors[9]. Ainsi, au moment de sa découverte, AT 2017gfo est la kilonova à l'évolution la plus rapide connue[8].

Objet résultant[modifier | modifier le code]

Étant donné une masse estimée à 2,74 masses solaires pour l'objet résultant de la fusion, sa nature est indéterminée. Si c'est une étoile à neutrons, il s'agit de la plus massive connue ; à l'inverse, si c'est un trou noir, il s'agit du moins massif connu[10]. Des observations du télescope spatial Chandra réalisées entre et révèlent que le flux de rayons X provenant de la source serait faible pour une étoile à neutrons, tendant à montrer qu'il s'agirait d'un trou noir[11]. Des observations effectuées conjointement par 32 radiotélescopes et combinées par interférométrie ont pu montrer que la fusion a été suivie d'un jet de matière relativiste et étroit[12]; de tels jets n'ont jusqu'à présent été observés qu'aux abords de trous noirs.

Implications[modifier | modifier le code]

Les spectres ultraviolet, visible et proche infrarouge de la contrepartie électromagnétique de l'événement montrent qu'un minimum d'environ 0,5 ± 0,2 masse solaire d'éléments a été produit par le processus r, semblant indiquer qu'une part significative des éléments lourds est produite par fusion d'étoiles à neutrons[13],[14]. L'événement du est ainsi la première observation directe que les fusions d'étoiles à neutrons participent activement à la nucléosynthèse[15]. Par ailleurs, la détection de lanthanides dans le spectre de la contrepartie électromagnétique rejette l'hypothèse de la fusion d'un système binaire d'étoiles étranges[14].

Cet événement étant le premier de sa catégorie à être observé, le taux d'apparition d'événements semblables est difficile à estimer. Cependant, une limite supérieure au taux d'apparition d'événements transitoires similaires à AT 2017gfo a été déterminée à 1,6 × 105 Gpc−3 a−1 [9].

La mesure de la vitesse des ondes gravitationnelles exclut de nombreuses théories de gravitation modifiée comme explication de l’accélération cosmique[16],[17]. GW170817 et GRB 170817A permettent en effet de restreindre le rapport avec et respectivement les vitesses des ondes gravitationnelles et de la lumière dans le vide entre environ -4,3 × 10−16 et 10−11 en considérant la vitesse des ondes gravitationnelles constante[14].

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Abbott et al. 2017.
  2. (en) The LIGO Scientific Collaboration and the Virgo Collaboration, « GW170817: Measurements of Neutron Star Radii and Equation of State », Physical Review Letters, vol. 121, no 16,‎ , p. 161101 (DOI 10.1103/PhysRevLett.121.161101, lire en ligne, consulté le ).
  3. Sean Bailly, « La fusion de deux étoiles à neutrons a fait vibrer Ligo et Virgo », Pour la science, no 482,‎ , p. 6.
  4. a et b (en) B. P. Abbott, R. Abbott, T. D. Abbott, F. Acernese et al., « Gravitational Waves and Gamma-Rays from a Binary Neutron Star Merger: GW170817 and GRB 170817A », The Astrophysical Journal Letters, vol. 848, no 2,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  5. Lucas Streit, « Un jet supraluminique trahit la fusion d'étoiles à neutrons », Pour la science, no 493,‎ , p. 8 (lire en ligne)
  6. Coulter et al. 2017.
  7. Transient Name Server.
  8. a b et c Valenti et al. 2017.
  9. a b et c Siebert et al. 2017.
  10. (en) Charles Q. Choi, « Gravitational Waves Detected from Neutron-Star Crashes: The Discovery Explained », Space.com,‎ (lire en ligne).
  11. (en) David Pooley, Pawan Kumar, J. Craig Wheeler et Bruce Grossan, « GW170817 Most Likely Made a Black Hole », The Astrophysical Journal Letters,‎ (DOI 10.3847/2041-8213/aac3d6, lire en ligne).
  12. (en) G. Ghirlanda, O. S. Salafia, Z. Paragi, M. Giroletti, J. Yang, B. Marcote, J. Blanchard, I. Agudo, T. An et al., « Compact radio emission indicates a structured jet was produced by a binary neutron star merger », Science,‎ (DOI 10.1126/science.aau8815, lire en ligne).
  13. Drout et al. 2017.
  14. a b et c (en) Hao Wang, Fu-Wen Zhang, Yuan-Zhu Wang, Zhao-Qiang Shen, Yun-Feng Liang, Xiang Li, Neng-Hui Liao, Zhi-Ping Jin, Qiang Yuan, Yuan-Chuan Zou, Yi-Zhong Fan et Da-Ming Wei, « GW170817/GRB 170817A/AT2017gfo association: some implications for physics and astrophysics », arXiv:1710.05805 [astro-ph, physics:gr-qc],‎ (lire en ligne, consulté le ).
  15. (en) S. Rosswog, J. Sollerman, U. Feindt et A. Goobar, « The first direct double neutron star merger detection: implications for cosmic nucleosynthesis », arXiv:1710.05445 [astro-ph],‎ (lire en ligne, consulté le ).
  16. (en) L. Lombriser, et A. Taylor, « Breaking a Dark Degeneracy with Gravitational Waves », Journal of Cosmology and Astroparticle Physics, vol. 2016,‎ , p. 031 (DOI 10.1088/1475-7516/2016/03/031).
  17. (en) L. Lombriser et N. Lima, « Challenges to Self-Acceleration in Modified Gravity from Gravitational Waves and Large-Scale Structure », Physics Letters B, vol. 765,‎ , p. 382 (DOI 10.1016/j.physletb.2016.12.048, lire en ligne).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

Articles scientifiques
L'article d'Abbott et al. annonçant la détection des ondes gravitationnelles.

L'ensemble des articles publiés à l'occasion de l'annonce du sont compilés sur cette page.

  • [Abbott et al. 2017] (en) B. P. Abbott et al., « GW170817: Observation of Gravitational Waves from a Binary Neutron Star Inspiral », Physical Review Letters, vol. 119, no 16,‎ (ISSN 0031-9007 et 1079-7114, DOI 10.1103/physrevlett.119.161101, lire en ligne). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Albert et al. 2017
  • [Coulter et al. 2017] (en) D. A. Coulter, R. J. Foley, C. D. Kilpatrick, M. R. Drout, A. L. Piro, B. J. Shappee, M. R. Siebert, J. D. Simon, N. Ulloa, D. Kasen, B. F. Madore, A. Murguia-Berthier, Y.-C. Pan, J. X. Prochaska, E. Ramirez-Ruiz, A. Rest et C. Rojas-Bravo, « Swope Supernova Survey 2017a (SSS17a), the optical counterpart to a gravitational wave source », Science,‎ , eaap9811 (ISSN 0036-8075 et 1095-9203, PMID 29038368, DOI 10.1126/science.aap9811, lire en ligne, consulté le ). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • [Covino et al. 2017] Covino et al., « The unpolarized macronova associated with the gravita- tional wave event GW 170817 », ?,‎ publié le (lire en ligne)
  • [Drout et al. 2017] (en) M. R. Drout, A. L. Piro, B. J. Shappee et C. D. Kilpatrick, « Light curves of the neutron star merger GW170817/SSS17a: Implications for r-process nucleosynthesis », Science,‎ , eaaq0049 (ISSN 0036-8075 et 1095-9203, PMID 29038375, DOI 10.1126/science.aaq0049, lire en ligne, consulté le ). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • [Hjorth et al. 2017] Hjorth et al., « The distance to NGC 4993 – the host galaxy of the gravitational wave event GW 170817 », ?,‎ publié le (lire en ligne)
  • [Levan et al. 2017] Levan et al., « The environment of the binary neutron star merger GW170817 », ?,‎ publié le (lire en ligne)
  • [Pian et al. 2017] (en) Pian et al., « Spectroscopic identification of r-process nucleosynthesis in a double neutron star merger », ?,‎ publié le (lire en ligne).
  • [Siebert et al. 2017] (en) Matthew R. Siebert, Ryan J. Foley, Maria R. Drout, Charles D. Kilpatrick, B. J. Shappee, D. A. Coulter, D. Kasen, B. F. Madore, A. Murguia-Berthier, Y.-C. Pan, A. L. Piro, J. X. Prochaska, E. Ramirez-Ruiz, A. Rest, C. Contreras, N. Morrell, C. Rojas-Bravo et J. D. Simon, « The Unprecedented Properties of the First Electromagnetic Counterpart to a Gravitational Wave Source », The Astrophysical Journal, vol. 848, no 2,‎ , p. L26 (ISSN 2041-8213, DOI 10.3847/2041-8213/aa905e, lire en ligne, consulté le ). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • [Smartt et al. 2017] Smartt et al., « The electromagnetic counterpart to a gravitational wave source unveils a kilonova », ?,‎ publié le (lire en ligne)
  • [Tanvir et al. 2017] Tanvir et al., « The emergence of a lanthanide-rich kilonova following the merger of two neutron stars », ?,‎ publié le (lire en ligne).
  • [Valenti et al. 2017] (en) Stefano Valenti, J. Sand David, Sheng Yang, Enrico Cappellaro, Leonardo Tartaglia, Alessandra Corsi, Saurabh W. Jha, Daniel E. Reichart, Joshua Haislip et Vladimir Kouprianov, « The Discovery of the Electromagnetic Counterpart of GW170817: Kilonova AT 2017gfo/DLT17ck », The Astrophysical Journal Letters, vol. 848, no 2,‎ , p. L24 (ISSN 2041-8205, DOI 10.3847/2041-8213/aa8edf, lire en ligne, consulté le ). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
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Articles connexes[modifier | modifier le code]