Fonction de Dickman

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Le graphe de la fonction de Dickman–de Bruijn ρ sur une échelle logarithmique. L'axe horizontal est l'argument u, et l'axe vertical est la valeur ρ(u) de la fonction ρ.

En théorie analytique des nombres, la fonction ρ de Dickman ou de Dickman-de Bruijn est une fonction spéciale utilisée dans l'estimation de la proportion d'entiers friables jusqu'à une certaine borne.

Elle fut étudiée pour la première fois par l'actuaire Karl Dickman, qui la définit dans son unique publication mathématique[1]. Elle est étudiée plus tard par le mathématicien néerlandais Nicolaas Govert de Bruijn[2],[3].

Définition[modifier | modifier le code]

La fonction de Dickman-de Bruijn ρ est l'unique fonction continue, définie sur R+*, qui est dérivable sur ]1, +∞] et satisfait l'équation différentielle à retard

pour tout u > 1, ainsi que la condition initiale ρ(u) = 1 pour 0 ≤ u ≤ 1.

Propriétés[modifier | modifier le code]

Dickman a montré que pour tout u≥1 fixé, on a lorsque x tend vers l'infini

où Ψ(x,y) est le nombre d'entiers y-friables inférieurs à x. La version la plus uniforme connue[réf. nécessaire] actuellement[Quand ?] est due à Hildebrand[4] et stipule que pour tout ε > 0 fixé,

lorsque u < log x/(log log x)5/3+ε, où est la notation de Landau[précision nécessaire].

Applications[modifier | modifier le code]

La principale utilité de la fonction de Dickman-de Bruijn est l'estimation de la proportion d'entiers qui sont friables et d'une taille donnée. Cela intervient dans l'optimisation de certaines preuves et constructions en théorie des nombres, ainsi qu'en théorie algorithmique des nombres.

On peut montrer par exemple[5] que

lorsque u tend vers l'infini et u < log x/log log x. Cela est lié à l'approximation ρ(u) ≈ u-u détaillée ci-dessous, et a une grande utilité dans le théorème d'Erdös-Rankin sur les grands écarts entre nombres premiers.

La constante de Golomb–Dickman peut être définie en termes de la fonction de Dickman–de Bruijn.

Estimation[modifier | modifier le code]

En première approximation, on a ρ(u) ≈ u-u. Une estimation plus précise est[5]

lorsque u tend vers l'infini, où Ei est l'exponentielle intégrale et ξ est l'unique solution réelle positive de l'équation

.

Une majoration simple est ρ(u) ≤ 1/Γ(u+1), où Γ est la fonction Gamma d'Euler.

1 1
2 3,069 × 10-1
3 4,861 × 10-2
4 4,911 × 10-3
5 3,547 × 10-4
6 1,965 × 10-5
7 8,746 × 10-7
8 3,232 × 10-8
9 1,016 × 10-9
10 2,770 × 10-11

Calcul numérique[modifier | modifier le code]

Pour chaque intervalle du type [n - 1, n], où n est un entier strictement positif, il existe une fonction analytique ρn telle que ρn(u) = ρ(u) lorsque n-1 < un. Ces fonctions peuvent être déterminées par récurrence à partir de l'équation (*). Ainsi, ρ1(u) = 1, ρ2(u) = 1-log u, et

où Li2 est le dilogarithme. Les fonctions ρn peuvent également être exprimées sous forme d'une série entière dont les coefficients sont explicites[6].

Généralisation[modifier | modifier le code]

Friedlander définit[7] un analogue σ(u,v) de ρ(u), qui est également définie comme la solution d'un système d'équations différentielles aux différences. Cette fonction est utile dans l'estimation du nombre Ψ(x, y, z) des entiers inférieurs à x, dont tous les facteurs premiers sont compris dans l'intervalle ]z, y] (avec z<y). On a en effet, lorsque u et v sont fixés avec 1 ≤ u < v, et lorsque x tend vers l'infini,

Notes et références[modifier | modifier le code]

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Dickman function » (voir la liste des auteurs).
  1. K. Dickman, « On the frequency of numbers containing prime factors of a certain relative magnitude », Arkiv för Matematik, Astronomi och Fysik, vol. 22A, no 10,‎ , p. 1–14
  2. N. G. de Bruijn, « On the number of positive integers ≤ x and free of prime factors > y », Indagationes Mathematicae, vol. 13,‎ , p. 50–60 (lire en ligne)
  3. N. G. de Bruijn, « On the number of positive integers ≤ x and free of prime factors > y, II », Indagationes Mathematicae, vol. 28,‎ , p. 239–247 (lire en ligne)
  4. A. Hildebrand, « On the number of positive integers ≤ x and free of prime factors > y », Journal of Number Theory, vol. 22, no 3,‎ , p. 289-307 (DOI 10.1016/0022-314X(86)90013-2)
  5. a et b A. Hildebrand et G. Tenenbaum, « Integers without large prime factors », Journal de théorie des nombres de Bordeaux, vol. 5, no 2,‎ , p. 411–484 (DOI 10.5802/jtnb.101, lire en ligne)
  6. Eric Bach et René Peralta, « Asymptotic Semismoothness Probabilities », Mathematics of Computation, vol. 65, no 216,‎ , p. 1701–1715 (DOI 10.1090/S0025-5718-96-00775-2, lire en ligne)
  7. John B. Friedlander, « Integers free from large and small primes », Proc. London Math. Soc., vol. 33, no 3,‎ , p. 565–576 (DOI 10.1112/plms/s3-33.3.565, lire en ligne)

Liens externes[modifier | modifier le code]